Inde / Commerce

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Inde / Commerce
Les portes de l’Inde restent fermées à la grande distribution
(MFI / 13.12.11) Le gouvernement indien suspend son projet concernant
l’ouverture du marché indien à la grande distribution. Le projet a suscité le
rejet de la classe politique, qu’elle soit au pouvoir ou non. Malgré les emplois
promis, les Indiens restent réservés sur ces futurs changements.
Face à la réticence des partis politiques indiens de tous bords, le gouvernement a
décidé de suspendre son projet concernant la grande distribution. Il s’agissait
d’ouvrir ce secteur aux grandes enseignes étrangères comme l’américain Wal-Mart,
le français Carrefour ou le britannique Tesco - les trois plus grandes enseignes du
commerce au niveau mondial. Ces poids lourds de l’économie internationale ont
tous une politique agressive pour s’implanter en Asie. L’Inde fait bien entendu
partie de leurs projets de développement.
On peut comprendre la résistance de la classe politique indienne car l’arrivée de ces
grands distributeurs provoquera un bouleversement économique général au
détriment du petit commerce local. Mais le choc peut également être culturel. Au
Mexique, les vendeurs de tortilla ont souffert d’une concurrence contre laquelle il
était difficile de lutter : des grandes surfaces flambant neuves exposant les objets
les plus récents, reflets du style de vie à l’Occidentale face à des échoppes précaires
et fumantes.
L’Inde, on le sait, est un pays à forte identité. Il était donc relativement facile pour
les hommes politiques de l’opposition de jouer sur la corde sensible en défendant la
chapati contre le pain de mie américain ou le poulet tandoori contre l’épaule de
mouton des Highlands.
Protectionnisme et mondialisation
L’économie finira par reprendre ses droits mais le compromis entre les géants de la
distribution et les autorités indiennes sera certainement modifié après ce rejet. Il
faudra amortir le choc des cultures et protéger quelque peu les petits commerçants
pour qu’ils survivent à l’arrivée de nouvelles marchandises et de nouveaux modes
de consommation. Déjà, la Chambre de commerce et d’industrie indienne a fait
savoir que ce gel de l’ouverture du commerce indien aux compagnies étrangères
était « profondément décevant ». Cette instance de dialogue a proposé de changer le
rapport de force entre les actionnaires des coentreprises qui seront créées lorsque ce
projet d’ouverture aboutira. Les grands distributeurs étrangers ne seraient plus
majoritaires dans ces nouvelles structures. Ils ne détiendraient pas plus de 49 % de
la valeur de ces supermarchés et ne pourraient pas s’implanter dans les villes de
moins de 1,5 million d’habitants.
Les campagnes de l’été 2011 contre la corruption ont montré comment l’opinion
publique indienne et ses représentants peuvent faire céder le pouvoir. Mais par
ailleurs, on sait que des groupes indiens de taille mondiale comme Tata ont une
politique agressive et vendent sans état d’âme des produits made in India à
l’étranger. C’est le jeu de la mondialisation. Il y a peu, de grandes marques
françaises de luxe se plaignaient de ne pas pouvoir ouvrir de boutiques en Inde en
raison du protectionnisme de New Delhi. Mais aujourd’hui, le jour-même où les
grands de la distribution voient une fois encore le marché indien leur échapper,
SEB, la Société d’emboutissage de Bourgogne, annonce son mariage avec un
fabriquant indien d’électroménager, Maharaja Whiteline. La célèbre cocotte-minute
va donc faire son entrée dans un pays où l’on connaît déjà la cuisine à la vapeur.
SEB emmène en Inde Calor, Rowenta, Moulinex. Du petit électroménager que les
épiciers de quartier pourront vendre sur leur étal aux quatre coins de cet immense
pays. « Après une entrée en Chine réussie en 2007, SEB parviendrait à s’implanter
dans une nouvelle zone à fort potentiel », prédisait un responsable de l’entreprise
bourguignonne avant d’avoir conclu cette joint-venture.
Colette Thomas
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