Même dans les cas qui s’annoncent bien, le
diagnostic reste traumatisant
Pauline Léna
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« LE MOT LEUCÉMIE est porteur de beaucoup d’anxiété, essentiellement associée aux
formes aiguës, souligne le Pr Philippe Rousselot, professeur d’hématologie à l’université
Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Il faut prendre le temps d’expliquer pourquoi il n’y a
pas d’urgence et, qu’il y ait traitement ou pas, ce qui va se passer après le diagnostic. »
L’annonce d’une leucémie chronique, myéloïde (LMC) ou lymphoïde (LLC), doit pouvoir se
faire comme pour tous les autres cancers, par le biais d’une consultation d’annonce, gérée
par le médecin hospitalier en collaboration avec une équipe spécifiquement formée, qui
permet d’expliquer le diagnostic et de décider des choix de traitement.
Les progrès des dix dernières années ont considérablement modifié la prise en charge de ces
deux types de leucémies. La LMC conduit à la prise d’un traitement de très longue durée,
dont l’efficacité repose sur l’observance du patient, particulièrement difficile à respecter face
à une maladie qui ne provoque aucun symptôme. « Avant l’apparition des traitements
révolutionnaires dont nous disposons aujourd’hui, la gravité de la maladie était plus claire
avec un pronostic peu favorable », rappelle le Pr Rousselot. D’un autre côté, la LLC ne
nécessite pas toujours de traitement et, pour de nombreux patients, l’attente peut être difficile
à vivre lorsque les années s’écoulent, même s’ils savent que des traitements efficaces sont
disponibles.
« Les associations de patients jouent alors un rôle déterminant, à la fois pour tempérer la
violence de l’annonce et pour aider le patient tout au long de son parcours », indique le Pr
Véronique Leblond, professeur d’hématologie à l’université Pierre-et-Marie-Curie et
responsable du service d’hématologie clinique de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.
L’association de soutien et d’information à la leucémie lymphoïde chronique et la maladie de
Waldenström (SILLC) a d’ailleurs lancé une grande enquête par questionnaire au mois
d’avril dernier, pour connaître l’impact de la maladie sur la qualité de vie. Le Pr Leblond
souligne l’un des premiers résultats de cette consultation : l’annonce d’une leucémie reste un
choc majeur.
L’étude permet aussi d’observer que l’accès au soin reste inégal entre les zones rurales et les
zones urbaines, un paramètre sur lequel les associations de patients peuvent agir en guidant
les malades et leurs familles vers les structures les plus proches. L’enquête montre d’ailleurs
le rôle déterminant de la famille : le conjoint du patient apporte la plus grande aide, suivi par
l’hématologue, les enfants et, en dernier lieu, le généraliste, sur lequel repose pourtant la
prise en charge au long cours.
Les questionnaires continuent à être recueillis jusqu’en décembre et les résultats définitifs
devraient être publiés au cours du premier trimestre de l’année prochaine. Les observations
majeures devraient permettre de prendre conscience des obstacles majeurs que rencontrent
les patients et d’offrir des pistes d’amélioration à tous les niveaux de la prise en charge. P. L.