ne devrait jamais être fondée sur cette seule donnée, mais plutôt sur la condition
générale du patient et son évolution. Le patient, affirment-ils, demeure en toute
circonstance le meilleur juge de sa situation, et il peut préférer la qualité de vie à la
quantité de vie ; sa décision lui appartient.
C’est ce que j’ai plaidé il y a déjà 3 ans devant les commissaires, en faveur de ce que l’on
appelait alors le suicide assisté. Rescapée du virus de la polio d’avant les vaccins, après 3
mois de coma, j’ai recouvré l’usage de mes jambes grâce à des mois de physiothérapie et
subi 3 opérations à la colonne vertébrale pour me redresser, tout en m’accommodant de
seulement un demi-poumon fonctionnel. En fait, j’ai rêvé ma vie avant de vivre mes rêves
! Comme journaliste, syndicaliste, attachée d’information et directrice de
communications, dans les secteurs privé et public, à Montréal, Québec et New York.
Diagnostiquée en 1992 comme souffrant du syndrome post-polio, cette maladie
dégénérative musculaire qui ne connaît pas de remède, je me retrouve aujourd’hui, à 68
ans, plus faible et moins mobile que jamais. En 1997, une thrombophlébite a permis de
découvrir une anémie qui aurait pu s'avérer mortelle. Les radiologistes ont découvert du
même coup une hernie stomacale, me disant que mes organes ne se trouvaient pas tous
où ils devraient être. En même temps, des densitométries m'apprenaient qu'à 50 ans,
mon âge osseux était de 70 ans!
J'ai la chance de pouvoir compter sur une extraordinaire médecin de famille ainsi que sur
un suivi multidisciplinaire au CUSM, sans parler d'amis merveilleux; mais il est irréaliste
d'attendre des miracles de la science ou de l'affection, comme de prétendre que les soins
palliatifs sont une panacée. La raréfaction des plaisirs me les fait certes savourer avec
encore plus d'intensité, comme l'éblouissante virtuosité du souffleur de verre Chihuly; et
grâce à Vincent, le nouveau petit-fils de mes amis, je redécouvre l'émerveillement d'un
regard neuf sur le quotidien.
Canne quadripode, déambulateur et fauteuil roulant pallient toutefois de plus en plus
difficilement à l'affaissement et au déséquilibre sans cesse croissants de mon squelette à
nouveau scoliosé, malgré les opérations de l’enfance que les spécialistes ne peuvent
répéter à cause de risques de paraplégie ; et mon demi-poumon survivant s’y retrouve