Mesure et incertitudes

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PCSI2 – Lycée Carnot, Dijon
Mesure et incertitudes
MESURE ET INCERTITUDES
Toute détermination expérimentale de la valeur d’une grandeur physique (métrologie) est entachée d’une erreur.
Exemple :
On souhaite mesurer une résistance. Le conducteur ohmique dont on souhaite mesurer la résistance est branché aux bornes d’un
ohmmètre. On utilise une première technique de mesure utilisant « quatre fils » de liaison entre le conducteur ohmique et
l’instrument.
Notre instrument communique avec un ordinateur et l’on utilise un programme d’acquisition de données. Ce programme effectue
2000 mesures m de la résistance R, repère les valeurs mmin et mmax, divise l’intervalle [ mmin ; mmax ] en 10 intervalles (classes),
calcule le nombre n de résultats dans chaque classe et affiche les résultats sous la forme d’un diagramme.
On obtient les résultats ci-dessous :
Recommençons la mesure précédente en configurant notre instrument en ohmmètre « deux fils », ce qui correspond à une mesure
courante de la valeur d’une résistance.
On obtient désormais les résultats suivants :
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Des questions se posent au vu de ces résultats (plusieurs mesurages d’une même caractéristique donnaient souvent des valeurs
différentes, la répartition des résultats avait une forme en cloche : les petites erreurs ont lieu plus souvent que les grandes).
1. Pourquoi une telle variabilité des résultats ?
2. Pourquoi ces deux méthodes donnent-elles des résultats différents ?
3. Et enfin, finalement quelle est la mesure de la résistance cherchée ?
I La notion d’erreur
1) Définition
Vocabulaire :
* Mesurage : ensemble d’opérations ayant pour but de déterminer une valeur d’une grandeur physique.
* Mesurande : grandeur particulière soumise à mesurage (longueur, masse, intensité, …) : Y.
* « Valeur vraie » d’un mesurande : mesure que l’on obtiendrait par un mesurage parfait. On ne la connaît pas et on parle
également de « valeur théorique » : y0.
* Grandeur d’influence : grandeur qui n’est pas le mesurande mais qui a un effet sur le résultat du mesurage : Xi
telle que Y = f(X1, X2, …, Xn).
U
Exemple : U ou I pour le mesurande R(U,I ) = .
I
Pour le mesurage n°i d’une grandeur physique, on obtient comme résultat : y i = y 0 + ei
où y 0 est la valeur vrai (inconnue) et ei l’erreur commise.
€
€
Cette erreur, aléatoire, explique la variabilité des résultats et a plusieurs causes :
€ d’une table (pas parfaitement rectangulaire, irrégularité de
* la grandeur à mesurer n’est pas parfaitement définie : la largeur
la surface, …), la surface€d’un liquide n’est pas plane (tension superficielle), …
* les conditions environnementales évoluent (température, pression, …).
* l’instrument de mesure est source d’erreur (temps de réponse, exactitude, sensibilité) .
* l’opérateur ne refait jamais la même mesure exactement dans les mêmes conditions (fatigue, erreurs de parallaxe, …).
Au total, pour l’ensemble du mesurage, on obtient : Y = y 0 + E
où y 0 est la valeur vrai (inconnue) et E est l’erreur commise.
€
L’objet du calcul d’incertitude sera de déterminer :
* les paramètres de la loi de probabilité€de E.
* un intervalle dont on puisse s'attendre à ce qu'il comprenne une fraction élevée des valeurs qui pourraient raisonnablement
être attribuées au mesurande.
2) Les deux composantes de l’erreur
a) La composante aléatoire
Elle provient des variations temporelles et spatiales non prévisibles de grandeurs d’influence. Ces dernières entraînent des
variations pour les observations répétées du mesurande (bien que le mesurage soit effectué dans des conditions aussi
constantes que possible).
L’erreur aléatoire est liée aux conditions opératoires.
Bien qu’il ne soit pas possible de compenser l’erreur aléatoire d’un résultat de mesure, elle peut être réduite en augmentant
le nombre d’observations.
b) La composante systématique
Elle provient d’un effet reconnu d’une grandeur d’influence, peut être quantifiée et corrigée (mais contrairement à la
précédente ne peut pas être réduite en augmentant le nombre d’observations).
Sources : présence d’instruments de mesure (exemple du début : différence d’environ 0,4Ω pour la résistance entre les deux
méthodes due à la résistance des fils, montages longue et courte dérivation pour la mesure d’une résistance en TP, …),
décalage de zéro (volume mort sur la loi de Mariotte en TP, …), …
c) Conclusion
Illustration : tir dans une cible
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Au total :
Résultat du mesurage : Y = y 0 + E avec E = Δ + ε , Δ erreur aléatoire et ε erreur systématique.
En général, la moyenne est la meilleure estimation de la grandeur mesurée :
€ « infinité » de€mesures (rappel : y i = 1
Y = y i pour une
n
n
∑y
i
pour n mesures).
1
ε
Δi
€
€
y0
Y
Valeur vraie
yi
Résultat d’une mesure
Moyenne d’une infinité de mesures
Si n → ∞ : ε = y i − y 0 = Y − y 0 soit Y = y 0 + ε .
Et pour une mesure : Δ i = y i − y i = y i − Y soit y i = Y + Δ i .
€
€
II La notion d’incertitude
€
€
€
1) Définition
Signifie doute (u pour uncertainty).
Paramètre associé au résultat d’un mesurage caractérisant la dispersion des valeurs qui pourraient être raisonnablement
attribuées au mesurande.
2) Incertitude-type
Incertitude-type sur Y notée u(y) et mesurant la dispersion des valeurs.
Il existe deux modes d’évaluation suivant la manière de procéder.
a) Evaluation de type A (incertitude de répétabilité)
Traitement statistique utilisé lorsque on établit une série de plusieurs mesures.
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Si une grandeur Y est estimée à partir de n observations répétées et indépendantes yi, alors l’incertitude-type u(y) sur son
estimation est de :
n
u(y) =
avec y =
€
2
i
σ n −1
1
=
n
n
i=1
n −1
N
∑ y la moyenne et σ
i
n −1
l’écart type (racine carré de la variance) donné par les fonctions statistiques d’une
i=1
€
calculatrice ou d’un tableur.
Exemple : des mesures de résistances ont donné R = 534, 529, 535, 527 et 530 Ω.
€ + 530
534 + 529 + 535 + 527
r=
= 531Ω .
5
σ n −1 =
€
1
n
∑( y − y)
( 534 − 531)
2
2
2
2
2
+ ( 529 − 531) + ( 535 − 531) + ( 527 − 531) + ( 530 − 531)
3, 39
= 1, 52Ω .
= 3, 39Ω et u(r) =
4
5
On peut utiliser une calculatrice ou un tableur (Excel par exemple) pour effectuer ces calculs.
€
€
b) Evaluation de type B
Traitement probabiliste utilisé lorsque l’estimation d’une grandeur ne peut pas être obtenue à partir d’observations répétées.
Si l’on sait raisonnablement que les valeurs de la grandeur X sont comprises entre M – d et M + d, le choix de la loi de
propagation de X entre M – d et M + d va décider de l’incertitude-type retenue :
d
* Si l’on suppose que la loi est normale (gaussienne), on prendra u(x) = = 0, 33d .
3
d
* Si l’on suppose que la loi est triangulaire (uniforme), on prendra u(x) =
= 0, 41d .
6
d
* Si l’on suppose que la loi est rectangulaire, on prendra€ u(x) =
= 0, 58d .
3
€
Densité de probabilité (fréquence) en fonction de x
€
Loi normale
Loi triangulaire
Loi rectangulaire
On remarque sur les résultats précédents que l’hypothèse d’une loi triangulaire est un bon compromis entre les lois normales
et rectangulaires.
Cas courants en pratique :
* Echelle graduée :
d
où d est la résolution (plus petite graduation).
2 3
12
Exemple : u(y) = 0,29 °C avec un thermomètre gradué en degré Celsius.
* Appareil numérique :
p
où p est la précision, le plus souvent le dernier digit plus un pourcentage de la valeur lue.
u(y) =
€
3
3
0, 01 +
1, 62
100
Exemple : u(y) =
= 0, 03mA pour un ampèremètre affichant 1,62 mA et dont la notice indique pour la
3
précision 1 digit + 3% de la valeur lue.
* Instrument de mesure de tolérance connue (t) :
Si l’on suppose que les valeurs affichées suivent une loi rectangulaire (même probabilité sur l’ensemble de l’intervalle de
€
mesures),
on prendra alors :
On peut montrer que u(y) =
€
d
=
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t
.
3
Cependant, s’il y a des raisons de penser que les valeurs situées près de 0 sont plus probables que celles situées près de t ou
– t on pourra penser que la loi de propagation de l’erreur est normale ou par prudence triangulaire ; on prendra alors :
t
t
.
€ u(y) = ou u(y) =
3
6
0, 02
Exemple : pour une pipette jaugée de 10,0 mL de classe A dont la tolérance est de ± 0,02 mL, on a u(y) =
= 0, 01mL .
3
Exemple : Les quatre anneaux de couleur
€ caractérisant
€ la résistance sont Brun, Noir, Noir, Or. La résistance est donc égale à
5
10
100 = 0, 29Ω .
R = 10 Ω ± 5%. L’incertitude type associée est égale à :
€
3
Exemple : Thermomètre : « Range -200 to +700°C, Temperature resolution below 700 °C : 0,01°C. »
On considère que l’indication constructeur est l’incertitude maximale liée à la résolution.
0, 01
L’incertitude due à la résolution associée à une€mesure est :
= 0, 0058°C .
3
Exemple : Boîte à décades : « Range : 1 Ω to 1,11 M Ω, number of decades : 5, full scale accuracy 0,1 %.»
On considère que l’indication du constructeur est l’incertitude maximale.
0,1
10000
€
100
L’incertitude de type B associée à une boîte réglée sur 10 kΩ est :
= 5,8Ω .
3
u(y) =
c) Cas général où il y a plusieurs composantes indépendantes de l’erreur
Erreur : E = E1 + E2 + ...+ En où les Ei sont des composantes indépendantes de l’erreur.
€
u 2 (Y ) = u 2 ( E1) + u 2 ( E2 ) + ...+ u 2 ( En ) .
€
€Exemple : une burette graduée de tolérance ± 0,05 mL est graduée en dixième de mL.
⎛ 0,1 ⎞2 ⎛ 0,05 ⎞2
Alors u(y) = ⎜
⎟ + ⎜
⎟ = 0,04mL .
⎝ 12 ⎠ ⎝ 3 ⎠
3) Incertitude-type composée (propagation des incertitudes)
€ a) Cas général
Dans le cas d’un mesurande dépendant de grandeurs d’influence : y = f(x1, x2, …, xn). avec x1, x2, …, xn indépendantes.
Alors l’incertitude-type composée sur y notée uc(y) est telle que:
n
⎛ ∂f ⎞2 2
u c 2 (y) =
où u(xi) est l’incertitude-type sur xi.
⎜ ⎟ u ( x i )
∂x i ⎠
⎝
i=1
∑
b) Cas particuliers simples
* Somme
€
∂z
z= x+y
=1
∂x
∂z
=1
∂y
u c 2 ( z ) = u 2 ( x) + u 2 ( y)
€
€
€
€
u c ( z ) = u 2 ( x ) + u 2 ( y)
2
Exemple
: u doublelecture = 2( u lecture ) = 2u lecture
€: pour une double lecture
€
1
= 0, 4mm .
12
Exemple : deux résistors en série de résistances R1 = R2 = 1,0 kΩ connues à 5% près, R = R1 + R2
€
u (R)
u 2 (R1) = u 2 (R2 ) = 50Ω ; u c (R) = 71Ω avec R = 2,0 kΩ ; c
= 3, 5% .
R
€
* Différence
∂z
∂z
z= x−y
= −1
=1
∂y
€ ∂x
€
u c ( z ) = u 2 ( x ) + u 2 ( y)
u c 2 ( z ) = u 2 ( x) + u 2 ( y)
Avec une règle graduée en millimètres,
l’incertitude sur une distance d est
€
* Produit
z = xy
€
€
∂z
=y
∂x
€
€
∂z
=x
∂y
5/6
€
€
€
2
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uc 2 (z)
u c 2 ( z ) = y 2 u 2 ( x) + x 2 u 2 ( y)
* Quotient
x
z=
y
€
∂z 1
=
∂x y
z2
=
u 2 ( x)
x2
+
u 2 ( y)
y2
∂z −x
=
∂y y 2
€
2
2
uc (z) = z
2
u 2 ( x)
x2
+
u 2 ( y)
y2
€
u c ( z ) u ( x) u ( y)
u 2 ( x) u 2 ( y )
1 2
x
=
+
u ( x) + 4 u 2 ( y)
uc (z) = z
+
2
2
2
2
z
x
y
y
y
x2
y2
€
€
U
Exemple : R = avec U = 20 V ; I = 100 mA ; u(U) = 0,4 V ; u(I) = 1 mA.
R = 200 Ω.
I
u ( R) € u 2 (U ) u 2 ( I )
€
Incertitude relative : c
=
+ 2 = 2, 23% ,
R
U2
I
€ u c (R) = 4,47Ω donc R = 200 Ω ± 4,47 Ω, soit 196 Ω < R < 204 Ω.
soit
2
uc 2 (z) =
€
€
€
€ une somme ou une différence on ajoute les u 2 ( y ) . Pour un produit ou un quotient, on ajoute les
En résumé, pour
u 2 ( y)
y2
.
* Multiplication par un nombre exact
Une grandeur y peut être obtenue à partir d’une€grandeur y0 multipliée par un nombre exact A. On a alors y = A y0.
€
Dans ce cas, l’incertitude u(y) est donnée par : u(y) = A.u(y0).
Ce résultat n’est pas le même que celui obtenu pour une somme, car, dans ce cas, les grandeurs ne sont pas
indépendantes.
u(10λ )
Exemple : si l’on mesure 10 longueurs d’onde λ, on a u(λ ) =
.
10
c) Opérations multiples
Exemple : deux résistors en dérivation de résistances R1 = R2 = 1,0 kΩ connues à 5% près
€
2
2
R1 + R2 ) − R1 ⎛ R2 ⎞
∂R ⎛ R1 ⎞
R1R2
(
∂R
= ⎜
R=
= R2
= ⎜
⎟
⎟
2
∂R2 ⎝ R1 + R2 ⎠
R1 + R2
∂R1
⎝ R1 + R2 ⎠
( R1 + R2 )
€
⎛ R ⎞4 2
⎛ R ⎞4 2
u (R)
2
1
u 2 (R1) = u 2 (R2 ) = 50Ω ; u c (R) = ⎜
= 3, 5% .
⎟ u ( R1) + ⎜
⎟ u ( R2 ) = 18Ω avec R = 0,5 kΩ ; c
R
⎝ R1 + R2 ⎠
⎝ R1 + R2 ⎠
€
€
Pour les cas complexes, il existe des logiciels permettant d’automatiser les calculs, comme GUM_MC utilisé en TP par
exemple.
€
€
4) Incertitude élargie
€
On cherche à définir un intervalle dont on puisse s’attendre à ce qu’il contienne une fraction élevée de la distribution des valeurs
qui pourraient raisonnablement être attribuées à Y.
Plus précisément, on aimerait pouvoir déterminer un nombre k tel que U (y) = ku c (y) de façon à pouvoir affirmer que
y −U(y) ≤ Y ≤ y +U (y) avec une probabilité proche de 1. U(y) est appelée incertitude élargie, et k le facteur d’élargissement.
€
En général, on considère une loi normale (gaussienne). On parle de loi normale lorsque l’on a affaire à une variable aléatoire
€ dont les effets s’additionnent et dont aucune n’est
continue dépendant d’un grand nombre de causes indépendantes
prépondérante.
On prend k = 2 pour un intervalle de confiance de 95% : l’intervalle [ y − 2u c (y), y + 2u c (y)] contient environ 95% des valeurs
que l’on peut raisonnablement associer à la grandeur Y.
On prend k = 3 pour un intervalle de confiance de 99%.
On utilise aussi la loi de Student pour de petits échantillons €
:
n
k95%
k99%
2
12,7
63,7
3
4,30
9,93
4
3,18
5,84
5
2,78
4,60
10
2,26
3,25
15
2,15
2,98
20
2,09
2,86
25
2,06
2,79
30
2,04
2,76
40
2,02
2,70
50
2,01
2,68
100
1,98
2,63
200
1,97
2,60
∞
1,96
2,58
Elle redonne une loi normale quand k tend vers l’infini en théorie, en pratique quand k devient assez grand (≥ 30).
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