1.1M - CEA Inac

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LA
N° 577 novembre 2011
SBT
feuille
rouge
inac.cea.fr
I SCIB I SPINTEC I Spram I SPSMS I SP2M
cryogénie
LE DUC AU CALOT SE FAIT REFROIDIR
Contact : Philippe Gully – SBT – [email protected]
Les liens thermiques de type boucle capillaire permettent de transférer
de fortes puissances sur de grandes longueurs avec un rapport efficacité/masse avantageux. Ils nécessitent des systèmes d’amorçage afin
d’atteindre leur plage de fonctionnement. Le SBT a conçu, construit et
testé un système novateur d’amorçage appliqué avec succès au caloduc
oscillant.
Les boucles capillaires, ou caloducs,
sont des liens thermiques basés sur un
équilibre liquide/vapeur capables de
transporter de fortes puissances sur plusieurs mètres. Ce sont les forces capillaires qui font circuler le liquide caloporteur par évaporation/condensation. Le
liquide (hydrocarbures, azote, hélium)
est choisi en fonction de la plage
de température de fonctionnement. À
température cryogénique, ces caloducs
ont besoin d’être amorcés, ou prérefroidis. Le système d’amorçage mis au
point par le SBT est composé de deux
réservoirs en équilibre liquide/vapeur
La recette À mmr
pour dÉtecter
les parois
connectés à la source froide.
Ces deux réservoirs sont reliés
entre eux par un tube capillaire
via l’objet à refroidir (Fig.). On
chauffe le premier réservoir, la
Et dans un nanofil, n’est-ce
pression augmente et chasse
pas magnon tout plein ?
le liquide dans le tube vers
l’objet à refroidir,
où il s’évapore. Le
Au verso
gaz se condense
ensuite au second
réservoir. Le chauffage alternatif des deux réservoirs permet
ainsi de drainer rapidement la chaleur de l’objet à refroidir
vers la source froide.
Ce système d’amorçage a été utilisé avec succès pour
le pré-refroidissement d’un caloduc oscillant cryogénique
testé au laboratoire. Initialement de 9 heures, la durée du
refroidissement de 60 à 4 kelvins été réduite à moins de 2
heures. La puissance appliquée aux réservoirs est 5 mW.
Elle représente seulement 5 % de la puissance extraite.
Cette technologie fait l’objet d’un dépôt de brevet.
résonances magnétiques
LA RPE PULSÉE TRIE LES SPINS
Contact : Vincent Maurel – SCIB – [email protected]
Comment les spins d’un matériau paramagnétique complexe et
désordonné contribuent-ils à l’aimantation macroscopique ? Par l’étude
d’échantillons de polyaniline dopée, le laboratoire SCIB/RM associé au
SPRAM/LEMOH et à l’Université Polytechnique de Varsovie a montré que
la résonance paramagnétique électronique (RPE) pulsée est une méthode
de choix pour « trier » et identifier les états de spin.
Comment quantifier les propriétés
magnétiques d’un échantillon ? Avec un
magnétomètre on additionne indistinctement toutes les contributions. La spectroscopie RPE en onde continue est plus
spécifique des systèmes paramagnétiques,
mais ne permet pas d’identifier facilement
les états de spin présents dans un mélange
complexe. Par RPE pulsée, il est possible
de mesurer les contributions des différents
états de spin—le fameux S de la mécanique quantique—de manière univoque.
Nous avons appliqué cette méthode à des nouveaux matériaux
d’intérêt pour les aimants moléculaires : les polyanilines dopées. Ces
polymères principalement étudiés pour leurs propriétés électriques ont
récemment attiré l’attention pour leurs propriétés magnétiques. Nos
collègues de Varsovie ont synthétisé des polymères spécifiques afin de :
i) atteindre un dopage élevé : jusqu’à 70% des monomères
porte un électron célibataire et donc un spin électronique ;
ii) favoriser le couplage ferromagnétique entre les spins créés
par dopage. Sur la figure, on voit un spectre correspondant à un
polymère branché qui contient plusieurs états de spin distincts :
des spins non couplés (S=1/2), mais aussi des états de spin
plus élevés montrant qu’une fraction notable des électrons sont
couplés par deux (S=1), par trois (S=3/2) et par quatre (S=2).
Le second spectre, correspondant à un polymère linéaire est
très différent : tous les électrons sont couplés, mais seulement
deux par deux (S=1). Ainsi il est possible de mieux comprendre
les interactions magnétiques qui existent au sein du polymère
et de proposer de nouvelles structures afin d’atteindre des états
de spin plus élevés.
Unités associées à
nanomagnétisme
LA RECETTE À MMR POUR DÉTECTER LES PAROIS
Contact : Van Dai Nguyen – SP2M - [email protected]
Les techniques d’imagerie magnétique permettent d’observer des parois magnétiques. Nous venons de montrer que l’on pouvait aussi le faire
par une mesure de résistance électrique. Ce sont les vibrations collectives des moments magnétiques (les magnons) qui nous en ont fourni le moyen.
Nous sommes capables de positionner une paroi de domaine dans un nanofil lithographié avec une précision de l’ordre du pourcent.
Dans un métal ferromagnétique, les moments
magnétiques, ou spins, ne sont pas rigoureusement alignés si le champ magnétique externe
n’est pas très fort ou si la température est suffisamment élevée. Pour autant leurs directions
et leurs mouvements ne sont pas quelconques
et obéissent à une discipline collective décrite
par les « magnons » (voir encart). Comme les
phonons, les magnons interagissent avec les
électrons de conduction du métal et influent
donc sur la résistance. C’est un effet de magnétorésistance (voir encart) appelé MMR, magnétorésistance de magnons. La MMR est connue
depuis longtemps, ainsi que son caractère
linéaire et symétrique en champ magnétique,
lorsqu’il est fort. Nous avons étudié ce qui se
passe à faible champ appliqué et dans des
matériaux « magnétiquement structurés » comme
des nanofils, contenant des domaines magnétiques séparés par une paroi.
On étudie un nanofil de FePt, matériau
ferromagnétique à aimantation perpendiculaire
qui présente deux états stables de l’aimantation
(haut/bas ou positif/négatif). Sur la Fig. 1,
suivons les flèches vertes. En champ positif très
intense, l’aimantation est positive et le réseau
de spins est « rigidifié » vis-à-vis de l’agitation
Magnons
Lorsque qu’un matériau ferromagnétique à
température nulle est saturé, l’aimantation en
tout point du matériau est dirigée dans la même
direction. Au niveau microscopique, le moment
magnétique de chaque atome pointe dans cette
direction. Si on augmente la température ou si
on diminue le champ magnétique, les moments
magnétiques peuvent s’écarter très légèrement de
leur position d’équilibre et commencer à précesser
autour celle-ci. A cause des couplages très fort
entre moments voisins à l’origine du ferromagnétisme, la précession des moments des atomes est
cohérente. Pour une chaine d’atomes portant un
moment magnétique, on peut décrire la trajectoire
des moments portés par les atomes par une onde,
appelé onde de spin. On associe par le principe onde-corpuscule une quasi-particule appelée
magnon à cette excitation. On peut ensuite
dérouler tout l’attirail de la mécanique quantique
pour décrire l’interaction entre ces magnons et les
électrons d’un courant électrique traversant notre
matériau ferromagnétique.
Magnétorésistance(s)
Fig. 1 : Magnétorésistance d’un nanofil de FePt. L’effet « nœud papillon » est le reflet exact de la courbe
d’hystérésis de l’aimantation.
thermique : la population de magnons est faible, leur contribution à la résistance aussi. On
diminue l’intensité du champ, la population de
magnons augmente tout comme leur contribution
à la magnétorésistance. Ceci reste vrai jusqu’à
ce que l’aimantation du matériau se renverse,
pour une certaine valeur négative du champ.
On observe alors un saut de la résistance puis
une diminution continue au fur et à mesure que
le champ devient de plus en plus négatif. La
population de magnons rediminue à cause de
l’alignement des moments magnétiques sur le
champ. En regardant plus attentivement la partie de la courbe décrite par les flèches bleues,
on observe un palier lors du renversement. Cet
état intermédiaire correspond au piégeage
d’une paroi magnétique dans le fil. Une partie
du fil a son aimantation dirigée vers le haut,
l’autre vers le bas. On sait mesurer cette fraction
comme cela est expliqué sur la Fig. 2.
Fig. 2 : Détermination de la position de la paroi
responsable du palier observé sur la Fig. 1 Si on
s’arrête à ce palier et qu’on rediminue le champ
magnétique appliqué on observe une diminution
de la magnétorésistance. La pente est directement
reliée à la fraction de la longueur du fil présentant
une aimantation positive, et nous en déduisons
donc la position de la paroi dans le fil : 24%. On
confirme cette détermination en visualisant la paroi
par microscopie à force magnétique
On appelle magnétorésistance (MR) la variation de la résistance électrique en fonction d’un
champ magnétique appliqué. Suivant l’orientation du courant électrique, du champ magnétique et de la tension mesurée on a plusieurs
types de MR. Prenons un film mince. La MR
longitudinale est la MR classique avec le courant
et le champ alignés et la prise de tension sur la
même ligne. Appliquons le champ magnétique
à 90 degrés du courant et dans le plan. La
différence de résistance entre cette configuration et la configuration longitudinale s’appelle
la magnétorésistance anisotrope (AMR). Son
amplitude est de l’ordre du pourcent. Appliquons
maintenant le champ hors du plan et mesurons
la tension perpendiculairement au courant. Nous
obtenons la magnétorésistance de Hall (ou
effet Hall). Prenons maintenant un empilement
constitué de deux couches ferromagnétiques
différentes séparées une couche métallique non
magnétique. Faisons passer le courant au travers
de l’empilement et mesurons la tension pareillement. En appliquant un champ magnétique qui
renverse l’aimantation de la couche la plus
douce sans modifier la plus dure, on a deux
configurations—parallèle et anti-parallèle—des
aimantations. La résistance de la première est
beaucoup plus faible que celle de la deuxième.
On parle de magnétorésistance géante (GMR).
C’est l’effet découvert par Albert Fert et qui lui
a valu son prix Nobel. Son amplitude atteint
plusieurs dizaines de pourcent. Si on remplace
la couche non magnétique par une barrière tunnel, on parle alors de magnétorésistance tunnel
(TMR). Son amplitude est encore plus grande que
la GMR. C’est cet effet qui est utilisé de nos jours
dans les têtes de lecture des disques durs.
Il a été possible d’utiliser la MMR car le FePt
possède deux états d’aimantation bien définis,
grâce à sa forte anisotropie magnétocristalline.
Ce n’est pourtant pas une condition nécessaire
comme nous l’avons montré avec le permalloy,
un alliage de fer et de nickel. C’est un matériau
doux à aimantation planaire. Mais sous forme
de nanofil (moins de 100 nm) la géométrie
impose une aimantation alignée avec le fil,
dans un sens ou dans l’autre : voilà donc nos
deux états. Nous avons détecté le renversement
d’aimantation dans des nanofils de permalloy
par des courbes de MMR tout à fait semblables
à celle de la Fig. 1.
LA FEUILLE ROUGE - N° 577 novembre 2011 - inac.cea.fr/feuille_rouge
Comité de rédaction : E. Molva, J. Planès (DIR), P. Dalmas de Réotier (SPSMS), L. Dubois (SCIB), N. Luchier (SBT).
S. Lyonnard (SPRAM), G. Prenat (SPINTEC), P. Warin (SP2M) - Mise en page : M. Benini (DIR) tél. 04 38 78 36 33
Institut Nanosciences et Cryogénie
Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives - Direction des Sciences de la Matière - Centre de Grenoble
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