Rapport - Page professionnelle de Sébastien Giraud

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Master de Physique
Spécialité Concepts Fondamentaux de la Physique
Parcours Physique Quantique
Rapport de Stage
Janvier - Avril 2007
GAZ DE FERMIONS ULTRAFROIDS
FORTEMENT POLARISÉS
Sébastien Giraud
Encadré par Roland Combescot
et Xavier Leyronas
∗
∗
Laboratoire de Physique Statistique de l’École Normale Supérieure (LPS), 24 rue Lhomond, 75231 Paris Cedex 05.
2
Table des matières
Introduction
5
1 Cadre théorique, mise en équation
1.1 Le hamiltonien du système . . . . . . . . . . . . . .
1.2 Un calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.3 Quelques rappels sur les techniques du problème à N
1.3.1 Fonction de Green . . . . . . . . . . . . . . .
1.3.2 Equation de Dyson, Self-énergie . . . . . . . .
1.3.3 Potentiel chimique, masse effective . . . . . .
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finie
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18
3 Généralisation, résolution numérique et discussion des résultats
3.1 Une généralisation de l’approximation de la matrice T . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2 Schémas numériques de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
21
21
22
24
Conclusion
27
Remerciements
27
Bibliographie
29
A Théorie de perturbation, diagrammes de Feynman
31
B Adimensionnement, expressions analytiques
33
2 Approximation de la matrice T
2.1 Approximation de la matrice T . . . .
2.1.1 Description de l’approximation
2.1.2 Calcul de Γ . . . . . . . . . . .
2.2 Un premier calcul : l’approximation de
2.2.1 Résolution . . . . . . . . . . . .
2.2.2 Résultats . . . . . . . . . . . .
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la matrice
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3
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corps à température
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T usuelle
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4
Introduction
Le refroidissement par laser et l’obtention de gaz d’atomes ultrafroids sont des progrès remarquables réalisés il y a moins de deux décennies et qui ont abouti à l’observation de la condensation
de Bose-Einstein de gaz atomiques. Ces progrès ont été récompensés par deux prix Nobel : le premier a été attribué en 1997 à S. Chu, C. Cohen-Tannoudji et W. Phillips pour leurs travaux sur le
refroidissement laser et le second, en 2001, à E. Cornell, W. Ketterle et C. Wieman pour l’obtention
d’une condensation de Bose-Einstein pour les gaz alcalins bosoniques en 1995.
Dès lors, l’intérêt s’est tourné vers les gaz fermioniques. Dans le cas des bosons, le passage dans
le régime quantique (qui se produit lorsque la distance
√ moyenne entre particules est inférieure à la
longueur d’onde de de Broglie thermique Λth = h/ 2πmkB T ) s’accompagne d’une transition de
phase vers un état superfluide où toutes les particules s’accumulent dans l’état fondamental : c’est la
condensation de Bose-Einstein. Pour des fermions sans interaction, l’état fondamental du système
est déterminé par le principe de Pauli qui interdit à deux particules fermioniques d’occuper le
même état quantique : les fermions peuplent donc tous les états dont le vecteur d’onde est inférieur
au vecteur d’onde de Fermi kF avec exactement un atome par niveau et par état de spin (ou
par état hyperfin) , c’est la mer de Fermi caractérisée par l’énergie de Fermi EF = ~2 kF2 /2m. Les
phénomènes quantiques se manifesteront naturellement si la température est typiquement inférieure
à la température de Fermi TF = EF /kB .
Effet des interactions dans un gaz de fermions
L’introduction des interactions donne une dimension supplémentaire au problème. Ainsi, dans
le cas des électrons dans les solides, la présence d’interactions attractives médiée par les phonons
provoque à basse température l’apparition d’une phase supraconductrice, également présente dans
les noyaux atomiques ou les étoiles à neutrons. Bien que les superfluides fermioniques soient au cœur
d’une immense variété de systèmes physiques, la compréhension de leurs propriétés n’est encore
que très partielle et constitue l’un des enjeux majeurs de la physique contemporaine.
Les interactions permettent aux fermions de s’apparier : les paires ainsi formées sont bosoniques
et peuvent à leur tour former un condensat de Bose-Einstein pour une température inférieure à une
température critique Tc . Cependant, la nature de ces paires et du superfluide dépend du signe de
la longueur de diffusion a.
Pour a négatif et faible l’interaction effective entre les atomes est attractive, la taille des paires
est grande devant la distance moyenne entre particules et la superfluidité est de type BCS (du nom
de ses inventeurs J. Bardeen, L. N. Cooper et J. R. Schrieffer) analogue à celle des supraconducteurs [14] et de 3 He. Ces « paires de Cooper » sont cependant radicalement différentes des molécules
usuelles : l’appariement ne résulte pas simplement de l’interaction des deux particules constitutives
de la paire, mais implique la mer de Fermi dans son ensemble. Ce caractère collectif se manifeste
de deux façons : les deux particules sont très éloignées l’une de l’autre et l’énergie de liaison de la
paire, ∆, dépend explicitement de la densité de particules. En effet, on montre que dans la limite
a → 0− on a ∆ ∝ EF exp(−1/kF |a|), quantité qui dépend de la densité via EF et kF . Une des
conséquence fondamentale de cette origine collective est que les paires de Cooper apparaissent à la
même température que l’ordre quantique.
5
Pour a positif et faible, et pour un potentiel suffisamment profond, il existe un état lié correspondant à un dimère de deux atomes. Lorsque la temperature est plus basse qu’une certaine valeur
de l’ordre de l’énergie de liaison de ces molécules, on s’attend à observer un appariement des atomes,
dont la taille est petite devant la distance moyenne entre particules. Ces molécules subissent alors
une condensation de Bose-Einstein (BEC) similaire à celle des gaz de bosons : contrairement au
cas a < 0, les molécules apparaissent donc avant l’ordre quantique.
Entre ces deux régimes, lorsque kF |a| devient de l’ordre de l’unité au voisinage de l’unitarité,
on ne peut plus vraiment parler ni de paires de Cooper, ni de molécules quasi-ponctuelles : leurs
constituants internes fermioniques commencent à se manifester.
Fig. 0.1 – Représentation schématique des différents régimes d’un gaz de fermions au voisinage
d’une résonance de Feshbach en fonction de 1/kF a. Pour 1/kF a 1, il existe un état moléculaire
stable. Pour 1/kF a −1, l’état lié à deux corps disparaît, un appariement est possible à très basse
température sous la forme de paires de Cooper mettant en jeu la mer de Fermi dans son ensemble.
Entre ces deux régimes, la région kF |a| & 1 correspond à une situation de mer de Fermi en forte
interaction dans laquelle les paires se chevauchent et la notion de molécule perd sa pertinence.
Résonances de Feshbach
L’état fondamental d’un gaz de fermions en interaction attractive étant qualitativement très
différent dans les régimes BEC (1/kF a 1) et BCS (1/kF a −1), on est naturellement amené à
s’interroger sur la nature de la transition entre ces deux régimes et sur la transformation des paires
de Cooper en molécules : c’est la transition BEC-BCS dont les premières études théoriques, ont
été réalisées par A. J. Leggett, P. Nozières et S. Schmitt-Rink. L’observation expérimentale de la
transition BEC-BCS est rendue possible grâce à l’utilisation des résonances de Feshbach.
En effet, un atout majeur des atomes ultra-froids provient de la possibilité de manipuler la
longueur de diffusion (et donc les interactions interatomiques effectives) à l’aide d’un simple champ
magnétique. Pour comprendre le principe des résonances de Feshbach, il est nécessaire de prendre
en compte la structure interne des atomes, et notamment la possibilité qu’un des atomes passe dans
un état excité durant la collision. Considérons la diffusion de deux atomes initialement dans leur
état fondamental |f i. Cette diffusion est décrite par un potentiel d’interaction Vf du type de celui
représenté sur la figure 0.2. Si lors de la collision un des atomes peut passer dans un état excité
|ei, les deux atomes n’interagissent plus par le potentiel Vf , mais par un potentiel Ve décalé en
énergie. Lors des collisions à faible énergie que l’on rencontre en physique des atomes ultra-froids,
l’énergie cinétique des atomes est insuffisante pour faire passer les atomes de l’état |f i vers l’état
6
|ei. Cependant, il est possible qu’un état lié du puits de potentiel Ve devienne quasi-résonnant
(∆ ' 0) avec l’énergie des atomes incidents. Dans ce cas, les atomes peuvent d’aprés les inégalités
de Heisenberg passer un temps τ ∼ 1/∆ dans cet état. Lorsqu’ils se trouvent dans l’état lié, les
atomes sont localisés plus près l’un de l’autre ce qui augmente considérablement leur interaction. La
théorie de la diffusion permet d’obtenir l’expression de la longueur de diffusion en fonction de ∆ :
a = a0
Γ
1−
∆ − ∆0
.
La longueur de diffusion diverge donc en changeant de signe lorsque ∆ = ∆0 (on peut noter que la
résonance ne se produit pas exactement pour ∆ = 0).
En pratique, la valeur de ∆ est modifiée en changeant la position relative ~∆z entre les états
|f i et |ei par effet Zeeman. En effet, l’état fondamental et l’état excité ont en général des moments
magnétiques différents (par exemple |f i = |S = 1, mS = −1i et |ei = |S = 0, mS = 0i). En ajoutant
un champ magnétique externe, on obtient alors un décalage Zeeman donné par :
~∆z = −µB B .
Dans le cas du 6 Li, la variation de la longueur de diffusion en fonction du champ magnétique est
représentée sur la figure 0.2.
Fig. 0.2 – A gauche : principe de la résonance de Feshbach. On déplace un état lié de l’état excité
|ei à l’aide d’un champ magnétique. Lorsque l’énergie ~∆ de cet état devient résonnante avec celle
des atomes incidents, la longueur de diffusion diverge. A droite : longueur de diffusion entre deux
atomes de 6 Li dans des états hyperfins différents en fonction du champ magnétique. La résonance
de Feshbach est localisée au voisinage de 0.0834 T .
Réalisations expérimentales
Pour l’instant, seuls les isotopes fermioniques de deux alcalins, le 6 Li et le 40 K, ont été étudiés
expérimentalement. Le régime quantique a été atteint en 2001 pour le 6 Li. Les transitions vers les
états BCS et BEC, ainsi que la transition entre les deux phases BEC-BCS ont été effectivement
observées expérimentalement.
Pour atteindre le régime de dégénérescence quantique, on utilise dans un premier temps les techniques usuelles de refroidissement et de piégeage par laser développées au cours des années 80 [12].
Cependant le fait d’utiliser des fermions complique la dernière phase du refroidissement : le refroidissement évaporatif. En effet, le refroidissement évaporatif consiste à diminuer la température
d’un gaz en retirant sélectivement et continûment d’un gaz, les particules dont l’énergie dépasse
une valeur de coupure Ecoup : les collisions élastiques produisent des atomes d’énergie supérieure
à Ecoup qui sont retirés, les atomes restant voient alors leur énergie moyenne diminuer, donc la
7
température diminue. Dans un piège magnétique, la sélection en énergie est facilement réalisée en
utilisant un champ radio-fréquence couplant les atomes d’un état magnétiquement piégé à un état
non piégeant.
Or, un gaz polarisé de fermions se comporte à basse température comme un gaz parfait : il y a
une forte diminution du taux de collisions entre des fermions de même état. Différentes solutions ont
été apportées à ce problème, toutes faisant intervenir des collisions entre particules distinctes pour
effectuer un refroidissement sympathique : on piège par exemple magnétiquement un mélange de
bosons et de fermions, on évapore comme précédemment les bosons qui servent alors de réfrigérant,
la thermalisation de l’ensemble étant assurée par les collisions inter-espèces.
Gaz fermioniques polarisés
Tout récemment, l’étude des gaz fermioniques « polarisés » a vu un développement considérable.
Il s’agit de la situation où les atomes appartenant à des états hyperfins différents sont en nombre
inégal. En effet, précédemment nous avions considéré implicitement qu’ils étaient en nombre égal,
ce qui permettait un appariement naturel en molécules ou en paires de Cooper. Dans le cas où ces
nombres sont inégaux le phénomène d’appariement va être perturbé. Ainsi, plusieurs expériences
ont montré qu’à l’unitarité il y a 3 phases [10] : une phase non polarisée, une phase totalement
polarisée et une phase mixte.
Au cours de ce stage, je me suis intéressé au cas extrême où un seul atome d’une espèce, que nous
noterons ↓, est immergé dans une mer de Fermi d’une autre espèce d’atome, que nous noterons ↑, à
température nulle. Précisons que cette notation est utilisée par analogie avec les deux états de spin
d’un électron, mais elle désigne en fait deux états hyperfins différents. Ce problème à N -corps a été
étudié en utilisant une généralisation de l’approximation usuelle de la matrice T ou approximation
des échelles suggérée dans [7].
Plan de l’exposé
Le présent rapport se divise en trois parties.
La première partie modélise la situation et présente les techniques du problèmes à N -corps.
Après avoir introduit le hamiltonien du système, on présente un calcul variationnel qui permet
d’obtenir une première approximation du potentiel chimique des atomes ↓. Enfin, on définit les
différentes grandeurs intervenant dans le problème à N -corps qui seront utiles pour la suite de
l’exposé.
Dans la seconde partie, il est procédé à la description de l’approximation de la matrice T utilisée
pour résoudre les systèmes en interaction forte. L’utilisation de cette approximation permet une
première familiarisation avec les techniques du problème à N -corps.
Enfin, la troisième et dernière partie est consacrée à une généralisaion de l’approximation de la
matrice T qui a constitué le cœur du stage. Après avoir exposé les différentes méthodes de résolution
numérique mises en œuvre, on présentera les résultats obtenus.
On renvoie à l’Annexe A pour un rappel sur la théorie des diagrammes de Feynman et à
l’Annexe B pour le détail des expressions analytiques de la deuxième partie.
8
Chapitre 1
Cadre théorique, mise en équation
On présente dans cette section tous les outils qui vont permettre de décrire le probème de l’interaction, à température nulle, entre un atome ↓ et une mer de Fermi d’atomes ↑, au voisinage d’une
résonance de Feshbach, c’est-à-dire pour une longueur de diffusion a fortement variable et divergente. On souhaite notamment calculer le potentiel chimique et la masse effective de l’atome ↓. On
utilise pour cela les techniques du problème à N -corps. On présente également un calcul variationnel
qui permettra de comparer les résultats obtenus.
1.1
Le hamiltonien du système
On considère un système homogène (sans potentiel extérieur) formé de N↑ atomes ↑ de masse
k3
m↑ et un atome ↓ de masse m↓ . On note n↑ = F2 la densité des atomes ↑. Le hamiltonien du
6π
système s’écrit
Ĥ = Ĥ0 + V̂ ,
(1.1)
où Ĥ0 est le terme d’énergie cinétique :
Ĥ0 =
N↑
X
p2i↑
p2↓
+
,
2m↑ 2m↓
i=1
(1.2)
et V̂ le terme d’interaction entre les particules.
Dans le régime des très basses températures, seules les propriétés de collision à basse énergie
interviennent dans le calcul des propriétés de basse énergie du gaz. En particulier, cette collision est
majoritairement en onde s car le potentiel d’interaction est à courte portée, et elle est caractérisée
par la longueur de diffusion a. Selon le signe de a, l’interaction effective entre atomes peut être
répulsive (a > 0) ou attractive (a < 0) et il est possible expérimentalement de faire varier a du
régime BEC (1/kF a 1) au régime BCS (1/kF a −1) en passant par la résonance de Feshbach
(1/kF a = 0).
La nature en onde s de la collision et le postulat d’antisymétrisation de la fonction d’onde
implique que les fermions de même spin ne sentent pas une telle interaction. Le seul terme du
potentiel d’interaction important dans notre problème s’écrit :
V̂ =
N↑
X
V (ri↑ − r↓ ) .
(1.3)
i=1
En introduisant les opérateurs ψ̂σ† (r) et ψ̂σ (r) n
qui créent et détruisent
un fermion de spin σ en r
o
†
0
0
et qui satisfont la relation d’anticommutation ψ̂σ (r), ψ̂σ0 (r ) = δσ,σ δ(r − r0 ), le hamiltonien se
réécrit en seconde quantification dans l’espace réel sous la forme :
Ĥ =
X Z
σ=↑,↓
3
d
r ψ̂σ† (r)
∇2
− r
2mσ
!
Z
ψ̂σ (r) + d3 rd3 r0 ψ̂↑† (r)ψ̂↓† (r0 )V (r − r0 )ψ̂↓ (r0 )ψ̂↑ (r) ,
9
(1.4)
et en représentation des impulsions :
Ĥ =
X
εσ (k)c†k,σ ck,σ +
k,σ=↑,↓
1 X
Vq c†k+q,↑ c†k0 −q,↓ ck0 ,↓ ck,↑ ,
V q,k,k0
(1.5)
où les c†k,σ et ck,σ sont les opérateurs qui créent et détruisent un fermion dans le mode d’impulsion
n
o
k2
est l’énergie cinétique correspondante
k et de spin σ avec ck,σ , c†k0 ,σ0 = δσ,σ0 δk,k0 , ε↑,↓ (k) =
2m↑,↓
et V est le volume de quantification.
On utilisera également le hamiltonien dans l’ensemble grand canonique :
Ĥ 0 = Ĥ − µ↑ N̂↑ − µ↓ N̂↓ ,
(1.6)
qui revient à déplacer l’origine des énergies ou à remplacer εσ par εσ − µσ .
1.2
Un calcul variationnel
Après avoir obtenu le hamiltonien, on peut effectuer un calcul variationnel pour obtenir une
borne supérieure du potentiel chimique de l’atome ↓ [4, 7]. On prend pour fonction d’onde test
l’état d’impulsion totale p :
|ψi = φ0 |pi↓ |FSi↑ +
X
φq,k |p + q − ki↓ c†k,↑ cq,↑ |FSi↑ ,
(1.7)
q<kF
k>kF
où |FSi↑ =
Y
c†k,↑ |0i est la mer de Fermi d’atomes ↑ d’énergie EFS =
X
ε↑ (k) et |pi↓ est une
k<kF
k<kF
onde plane d’impulsion p pour l’atome ↓. Ainsi le deuxième terme de la somme correspond à la
création d’une paire particule-trou dans la mer de Fermi d’impulsion respective k et q, le reste de
l’impulsion étant porté par l’atome ↓.
On peut alors calculer l’énergie de cet état : E = hĤi = hĤ0 i + hV̂ i. Pour le hamiltonien libre,
on obtient :
hĤ0 i = |φ0 |2 (ε↓ (p) + EFS ) +
X
|φq,k |2 (ε↓ (p + q − k) + EFS − ε↑ (q) + ε↑ (k)) ,
(1.8)
q,k
où les sommes sur q et sur k sont implicitement limitées à q < kF et k > kF .
Comme nous l’avons déjà dit, l’interaction est à courte portée, on peut donc utiliser un potentiel
en δ [2] :
V (r) = g0 δ(r) ,
où la constante de couplage g0 est ajustée pour avoir la même amplitude de diffusion que le vrai
potentiel V dans la limite des faibles énergies. On verra dans la deuxième partie (2.4) que l’on a :
1
mr
1 X 2mr
=
−
,
g0
2πa V k k 2
où mr est la masse réduite :
mr =
(1.9)
m↑ m↓
.
m↑ + m↓
Précisons quand même que dans l’équation (1.9) la somme est divergente : il faudrait en fait
introduire une coupure kc que l’on fera tendre vers l’infini. Pour plus de clarté, nous avons choisi
de l’omettre dans cette partie. Le potentiel s’écrit alors :
V̂ =
g0 X †
c
c† 0
ck0 ,↓ ck,↑ .
V q,k,k0 k+q,↑ k −q,↓
10
En utilisant l’algèbre des c†k,σ et ck,σ , on obtient :


X
X
X
X
g0 
φ∗0 φq,k + φ0 φ∗q,k  ,
φ∗q,k φq0 ,k +
φ∗q,k φq,k0 +
|φ0 |2 +
hV̂ i =
V
q
q,q0 ,k
q,k,k0
(1.10)
q,k
où, comme précédemment, les sommes sur q et sur k sont implicitement limitées à q < kF et
k > kF . Comme on le vérifiera par la suite (1.13), on a, pour k → ∞, φq,k ∼ 1/k 2 . Donc comme
nous l’avons déjà vu la plupart des sommes sur k divergent. Ceci est compensé par la divergence
de la somme intervenant dans (1.9) : on a g0 → 0 lorsque la coupure kc → ∞. Ainsi, puisque la
troisième somme intervenant dans hV̂ i est convergente, elle donne une contribution nulle quand
elle est multipliée par g0 , on peut donc l’oublier pour la suite du calcul.
En minimisant l’énergie hĤi avec la contrainte de normalisation
1 = |φ0 |2 +
X
|φq,k |2 ,
q,k
on obtient les équations :
(ε↑ (k) + ε↓ (p + q − k) − ε↑ (q) + EFS ) φq,k +
et
(ε↓ (p) + EFS ) φ0 +
g0
g0 X
φq,k0 = Eφq,k
φ0 +
V
V k0
g0 X
g0 X
φ0 +
φq,k = Eφ0 .
V q
V q,k
(1.11)
(1.12)
où le multiplicateur de Lagrange E coincide avec l’énergie de la fonction d’onde car l’expression de
hĤi est quadratique en les φq,k .
En introduisant la fonction
χ(q) = φ0 +
X
φq,k ,
k
l’équation (1.11) donne :
φq,k = −
g0 χ(q)/V
.
ε↑ (k) + ε↓ (p + q − k) − ε↑ (q) + EFS − E
(1.13)
En réinjectant cette expression dans la définition de χ(q), on en déduit :
φ0
χ(q) =
1+
g0 X
V
k
1
ε↑ (k) + ε↓ (p + q − k) − ε↑ (q) + EFS − E
.
(1.14)
Enfin, en prenant pour origine des énergies EFS , c’est-à-dire en remplaçant E par EFS +E, l’équation
(1.12) donne :
E = ε↓ (p) +
1X
1
.
1
V q 1 + 1X
g0 V k ε↑ (k) + ε↓ (p + q − k) − ε↑ (q) + EFS − E
(1.15)
En utilisant l’expression de la constante de couplage g0 (1.9) et en notant
1
mr
1 X 2mr
1 X
1
=
−
+
,
2
f (E, p, q)
2πa V k k
V k>k ε↑ (k) + ε↓ (p + q − k) − ε↑ (q) + EFS − E
F
on obtient finalement l’équation implicite :
E = ε↓ (p) +
1 X
f (E, p, q) ,
V q<k
(1.16)
F
qui donne une borne supérieure pour le changement d’énergie E dû à l’ajout d’un atome ↓ d’impulsion p. En particulier, puisque le potentiel chimique correspond à l’énergie nécessaire pour ajouter
une particule d’impulsion nulle, on obtient une borne supérieure pour µ↓ en prenant p = 0.
11
1.3
1.3.1
Quelques rappels sur les techniques du problème à N corps à
température finie
Fonction de Green
On appelle fonction de Green à température nulle [8, 9] la fonction
Gσ (k; t − t0 ) = −ihΨ0 |T ck,σ (t)c†k,σ (t0 )|Ψ0 i
(1.17)
où ck,σ (t) est l’opérateur ck,σ en représentation de Heisenberg :
0
0
ck,σ (t) = eiĤ t ck,σ e−iĤ t ,
|Ψ0 i est l’état fondamental de Ĥ ( Ĥ|Ψ0 i = E0 |Ψ0 i ) et T désigne l’opérateur d’ordonnancement
chronologique :
T ck,σ (t)c†k,σ (t0 ) = θ(t − t0 )ck,σ (t)c†k,σ (t0 ) − θ(t0 − t)c†k,σ (t0 )ck,σ (t) .
(1.18)
La fonction de Green contient de nombreuses informations sur le système : on peut montrer par
exemple que < nk,σ >= −iGσ (k; 0− ) et que les pôles en ω de la transformée de Fourier de G,
Z +∞
Gσ (k, ω) =
−∞
dt eiωt Gσ (k, t) ,
correspondent au spectre des états excités du système.
Pour le système sans interaction (V=0), on montre que
1
,
ω − ε↓ (k) + µ↓
(1.19)
1
.
ω − ε↑ (k) + µ↑ + i0+ sign(k − kF )
(1.20)
G0↓ (k, ω) =
et
G0↑ (k, ω) =
On définit également la fonction de Green à température finie :
h
Gσ (k; τ − τ 0 ) = −
Tr e−β Ĥ T ck,σ (τ )c†k,σ (τ 0 )
0
Tr e−β Ĥ 0
i
,
(1.21)
où ck,σ (τ ) est l’opérateur ck,σ en représentation de Matsubara :
0
ck,σ (τ ) = eĤ τ ck,σ e−Ĥ
et
0
c†k,σ (τ ) = eĤ τ c†k,σ e−Ĥ
0τ
0τ
,
= ck,σ (−τ )† .
Les relations d’anticommutation permettent de montrer que Gσ (k, τ ) est β-antipériodique,
Gσ (k, τ + β) = −Gσ (k, τ ) ,
elle admet donc une représentation en série de Fourier de la forme :
Gσ (k, τ ) =
X
1 +∞
e−iωn τ Gσ (k, iωn ),
β n=−∞
Gσ (k, iωn ) =
Z β
0
où les ωn sont les fréquences de Matsubara vérifiant eiωn β = −1 :
ωn =
(2n + 1)π
.
β
12
dτ Gσ (k, τ )eiωn τ ,
(1.22)
Pour β → ∞, en notant Gσ (k, ζ) le prolongement analytique de Gσ (k, iωn ) au plan complexe des
fréquences, on montre que :
(
Gσ (k, ω) =
Gσ (k, ζ = ω + i0+ )
Gσ (k, ζ = ω − i0+ )
si ω > 0
.
si ω < 0
(1.23)
Il suffira donc de prendre la limite β → ∞ dans les différentes équations faisant intervenir Gσ pour
obtenir les équations correspondantes pour Gσ .
La densité spectrale est également donnée par :
1
A(k, ω) = − Im Gσ (k, ζ = ω + i0+ ) .
π
(1.24)
La position de ses pics donne l’énergie des quasiparticules et la largeur, leur durée de vie.
La théorie des diagrammes de Feynman que l’on rappelle dans l’Annexe A permet alors de
développer la fonction de Green en une série faisant intervenir des puissances de l’interaction V .
A chaque diagramme est associé un terme de la série. De plus ces représentations symboliques
permettent de visualiser les interactions entre les particules. Par exemple, le seul diagramme à
l’ordre 1 est le terme de Hartree, le terme de Fock étant nul puisqu’il fait intervenir une interaction
entre des particules de même spin :
↑
↓
↓
Fig. 1.1 – Diagramme de Feynman à l’ordre 1.
1.3.2
Equation de Dyson, Self-énergie
Revenons à notre système constitué d’un fermion ↓ et d’une mer de Fermi de fermions ↑ à
température nulle. On se place dans la limite thermodynamique. Dans cette limite, l’unique atome ↓
ne modifie pas la mer de Fermi d’atomes ↑, on a donc :
G↑ (k, iω) = G0↑ (k, iω) =
avec µ↑ =
kF2
.
2m↑
1
,
iω − ε↑ (k) + µ↑
(1.25)
Les règles de Feynman permettent de calculer la contribution à G↓ à n’importe quel ordre en V .
Pour obtenir la self-énergie Σ(k, iωn ), on retire tout d’abord les « pattes » externes des différents
diagrammes intervenant dans la fonction de Green G↓ (k, iωn ). On effectue alors la somme des
diagrammes qui ne peuvent être coupés en deux si on coupe une et une seule ligne de fermions.
Par exemple le diagramme de la figure 1.1 intervient dans Σ (en lui retirant les « pattes » externes)
alors que celui de la figure 1.2 n’intervient pas.
Tout diagramme se décomposant de manière unique en diagrammes intervenant dans Σ, on a :
G↓ (k, iωn ) =
+
+
Σ
13
Σ
Σ
+ ···
(1.26)
ou de manière équivalente :
G↓ = G0↓ + G0↓ ΣG↓ ,
c’est-à-dire :
G↓ (k, ω) =
1
.
ω − ε↓ (k) + µ↓ − Σ(k, ω)
(1.27)
(1.28)
Fig. 1.2 – Un diagramme de Feynman d’ordre 2 qui n’intervient pas dans Σ(k, iωn ).
1.3.3
Potentiel chimique, masse effective
Comme nous l’avons déjà dit, les pôles en ω de G↓ (k, ω) donnent le spectre des états excités, la
relation de dispersion des quasiparticules ↓ est donc donnée par :
ω − ε↓ (k) + µ↓ − Σ(k, ω) = 0 .
(1.29)
Puisque ω est l’énergie mesurée à partir du potentiel chimique et que le potentiel chimique correspond à l’énergie nécessaire pour ajouter une particule d’impulsion nulle (k = 0), on obtient :
µ↓ = Σ(0, 0) .
(1.30)
En effectuant un développement limité de Σ pour des petits k et ω :
Σ(k, ω) ' Σ(0, 0) + ω
∂Σ
∂Σ
+ k2 2 ,
∂ω
∂k
(1.31)
k2
, on obtient l’expression
et en identifiant avec la relation de dispersion de particules libres, ω =
2m∗
de la masse effective des quasiparticules :
m∗
=
m↓
∂Σ
∂ω
.
∂Σ
1 + 2m↓ 2
∂k
1−
14
(1.32)
Chapitre 2
Approximation de la matrice T
Nous avons mis en place au cours de la section précédente les outils qui vont nous permettre de
déterminer les grandeurs physiques qui nous intéressent, le potentiel chimique et la masse effective
de l’atome ↓. Au cours de cette section, nous allons présenter l’approximation de la matrice T . En
effet, un simple calcul perturbatif à l’ordre 1 n’est pas satisfaisant en présence d’une interaction
forte, il faut adopter une description permettant de mieux décrire l’interaction entre l’atome ↓ et
la mer de Fermi.
Approximation de la matrice T
2.1
2.1.1
Description de l’approximation
Une première idée pour résoudre ce problème à N -corps pourrait consister à utiliser uniquement
le terme de Hartree (Fig. 1.1) dans l’expression de Σ, et donc utiliser pour G↓ l’approximation de
champ moyen :
G↓ '
+
+
+ ···
Fig. 2.1 – Approximation pour G↓ en utilisant seulement le terme de Hartree pour Σ.
Cela est insuffisant puisque les 2 particules qui interagissent se déplacent dans un potentiel
moyen créé par les autres particules. Par exemple, l’amplitude de diffusion entre l’atome ↓ et une
particule ↑ est modifiée par la présence de la mer de Fermi puisque le principe de Pauli impose des
restrictions sur les états accessibles à la particule ↑. On souhaite également décrire un éventuel état
lié entre l’atome ↓ et un atome ↑ qui peut apparait̂re, comme nous l’avons déjà vu, dans le régime
BEC (1/kF a 1). Pour tenir compte du milieu, il faut permettre une interaction répétée entre les
particules. Pour améliorer l’approximation de champ moyen, V. M. Galitski a montré qu’à l’ordre
le plus bas, on pouvait se limiter à l’interaction entre 2 particules seulement [8, 11] , ce qui revient
à utiliser les diagrammes en échelle suivants pour Σ :
Σ'
+
+
+···
Fig. 2.2 – Approximation de la matrice T ou ladder approximation.
En définissant le vertex Γ(p, p0 ; P) qui correspond à une interaction effective entre 2 particules
(on note p le 4-vecteur (k, ω)) :
15
P − p0 , ↑
P − p, ↑
=
Γ
p, ↓
+
+
+···
p0 , ↓
Fig. 2.3 – Définition du vertex Γ.
on peut réécrire Σ sous la forme :
0 − ω ,↑
K − k, ωn
n
Σ(k, iωn ) =
Γ
k, ωn , ↓
k, ωn , ↓
Fig. 2.4 – Expression de Σ en fonction du vertex Γ.
ou, sous forme intégrale, pour ω sur l’axe imaginaire,
1
Σ(k, ω) =
2iπ
Z
d3 K
(2π)3
Z +i∞
dΩ Γ(p, p; P)G0↑ (K − k, Ω − ω) ,
(2.1)
−i∞
où, on le rappelle, on a noté p et P les 4-vecteurs p = (k, ω) et P = (K, Ω).
Calcul de Γ
2.1.2
On peut réécrire l’équation de la figure 2.3 sous la forme :
P − p0 , ↑
P − p, ↑
P − p, ↑
p0 , ↓
p, ↓
p − p0
=
Γ
P − p0 , ↑
P − p, ↑ P − p00 , ↑
+
p0 , ↓
p, ↓
p − p00
p, ↓
P − p0 , ↑
Γ
p00 , ↓
p0 , ↓
Fig. 2.5 – Équation de Bethe-Salpeter pour le vertex Γ.
On obtient ainsi une équation intégrale sur Γ appelée équation de Bethe-Salpeter :
0
Z
Γ(p, p ; P) = Vk−k0 +
d3 k00
(2π)3
Z +i∞ 00
dω
−i∞
2iπ
Vk−k00 G0↓ (k00 , ω 00 )G0↑ (K − k00 , Ω − ω 00 )Γ(p00 , p0 ; P) (2.2)
V ne dépend pas de la fréquence, l’interaction est instantanée. De plus, comme nous l’avons
déjà vu, l’interaction est à courte portée, on peut utiliser un potentiel d’interaction en δ :
V (r) = g0 δ(r) .
Cependant, pour traiter la divergence ultraviolette, on introduit une coupure kc , que l’on fera tendre
vers l’infini. Ainsi, V ne dépend pas non plus de l’impulsion k.
A l’aide de l’équation (2.2), on en déduit que Γ ne dépend pas des 4-vecteurs p et p0 . On
peut donc calculer l’intégrale sur les fréquences, après changement de variables (Ω est sur l’axe
imaginaire), en utilisant un contour fermé du côté des fréquences négatives :
Z +i∞ 00
dω
−i∞
2iπ
G0↓ (k00 , ω 00 )G0↑ (K − k00 , Ω − ω 00 ) =
Z +i∞ 00
dω
G0↓ (k00 , Ω − ω 00 )G0↑ (K − k00 , ω 00 )
2iπ
−i∞
= G0↓ k00 , Ω + µ↑ − ε↑ (K − k00 ) θ ε↑ (K − k00 ) − µ↑ .
(2.3)
16
On obtient ainsi :
Γ−1 (K, Ω) =
1
−
g0
d3 k
G0↓ (k, Ω + µ↑ − ε↑ (K − k)) θ (ε↑ (K − k) − µ↑ ) .
3
|k|<kc (2π)
Z
Différentes méthodes [1, 5, 6, 3] permettent alors de relier la constante de couplage g0 à la
longueur de diffusion a du vrai potentiel. En utilisant la théorie de la diffusion pour deux particules
↑ et ↓, on obtient :
Z
1
mr
d3 k 2mr
=
,
(2.4)
−
3 k2
g0
2πa
|k|<kc (2π)
où mr est la masse réduite :
mr =
m↑ m↓
.
m↑ + m↓
On a donc finalement, pour des fréquences sur l’axe imaginaire,
Γ−1 (K, Ω) =
mr
−
2πa
Z
d3 k
(2π)3
2mr
+ G0↓ (k, Ω + µ↑ − ε↑ (K − k)) θ (ε↑ (K − k) − µ↑ ) ,
k2
(2.5)
et
1
Σ(k, ω) =
2iπ
Z
d3 K
(2π)3
Z +i∞
dΩ Γ(K, Ω)G0↑ (K − k, Ω − ω) .
(2.6)
−i∞
L’expression donnant Γ (2.5) est une fonction analytique de Ω (en dehors de la coupure introduite par G0↓ ), c’est donc le prolongement analytique de Γ au plan complexe des fréquences. Par
contre, l’expression donnant Σ (2.6) n’est pas analytique. En effet, on peut effectuer l’intégrale sur
les fréquences en utilisant un contour fermé du côté des fréquences négatives : en supposant que Γ
n’a pas de pôle pour Re Ω < 0 (qui correspondrait à un état lié entre ↑ et ↓), on obtient
1
2iπ
Z
d3 K
(2π)3
Z +i∞
dΩ Γ(K, Ω)G0↑ (K − k, Ω − ω)
−i∞
Z
=
d3 K
Γ(K, ω + ε↑ (K − k) − µ↑ )θ(µ↑ − ε↑ (K − k) − Re ω) ,
(2π)3
(2.7)
expression qui n’est manifestement pas analytique puisque nulle pour Re ω > µ↑ . On obtient le
prolongement analytique correct de Σ en enlevant le terme Re ω :
Z
Σ(k, ω) =
2.2
2.2.1
d3 K
Γ(K, ω + ε↑ (K − k) − µ↑ )θ(µ↑ − ε↑ (K − k)) .
(2π)3
(2.8)
Un premier calcul : l’approximation de la matrice T usuelle
Résolution
Dans l’équation (2.5), Γ dépend de µ↓ via G0↓ . En évaluant l’équation (2.8) à l’origine, on obtient
donc une équation implicite sur µ↓ que l’on peut résoudre numériquement. De plus, on peut noter
que l’expression donnant Γ (2.5) peut être calculée analytiquement, on renvoie à l’Annexe B pour
le détail des expressions ainsi que pour l’adimensionnement des différentes quantités.
En utilisant la valeur de µ↓ obtenue, on peut alors calculer numériquement l’intégrale double
intervenant dans l’expression de Σ(k, ω) de l’équation (2.8) : on obtient ainsi la masse effective des
quasiparticules et la densité spectrale.
17
2.2.2
Résultats
On représente sur la figure 2.6 la variation du potentiel chimique en fonction de 1/kF a pour
différentes valeurs du rapport de masse. A l’unitarité (1/kF a = 0) et pour des masses égales, on
obtient µ↓ = −0.60664 µ↑ . Dans la limite des faibles interactions a → 0− , seul le premier terme de
l’équation (2.5) intervient, on a Γ(K, Ω) = 2πa/mr , puis Σ(k, ω) = kF3 a/(3πmr ), donc
µ↓ =
2 r+1
kF a ,
3π r
où r = m↓ /m↑ . On retrouve donc le profil hyperbolique de la figure.
Pour r → 0, le potentiel chimique tend vers −∞. Dans la limite m↓ → ∞, le hamiltonien se
ramène à un hamiltonien à 1 corps. On peut alors montrer [7] :
π
µ↓
1 1 + y2
=−
+ Arctan y + y
µ↑
π
2
(2.9)
avec y = 1/kF a. Cette courbe est également représentée sur la figure 2.6 et est en parfait accord
avec les résultats obtenus. Remarquons enfin que, dans la limite thermodynamique, les équations
obtenues par le calcul variationnel (1.16) et les équations (2.5) et (2.8) obtenues par l’approximation
de la matrice T sont identiques, à condition de remplacer E par ω + µ↓ . La valeur obtenue pour le
potentiel chimique correspond donc à une borne supérieure de la vraie valeur.
1
0.9
0.8
ρ=|µ↓|/µ↑
0.7
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2
0.1
0
−3
−2.5
−2
−1.5
−1
−0.5
0
0.5
1
1/kFa
Fig. 2.6 – Potentiel chimique des atomes ↓ en fonction de 1/kF a pour différents rapports de masse
r = m↓ /m↑ , de haut en bas r = 0.25, 0.5, 1, 2, 4, 10. La ligne noire avec des tirets représente le calcul
analytique effectué dans la limite r = ∞ donnée par (2.9).
On représente sur le figure 2.7 la masse effective des quasiparticules pour différents rapports de
masse. A l’unitarité, pour des masses égales, on a m∗ = 1.17 m↓ . Ainsi, la modification au voisinage
de l’unitarité est très faible alors que les interactions sont très fortes. Dans le régime BEC, la masse
effective augmente fortement puisqu’il va y avoir apparition d’un état lié entre l’atome ↓ et un
atome ↑.
Les figures 2.8 et 2.9 représentent la self-énergie dans le plan (k, ω) et dans le plan complexe
des fréquences. On voit ainsi la coupure de la self-énergie sur l’axe réel pour des fréquences positives : cette coupure entraînera, comme nous allons le voir dans la section suivante, des difficultés
numériques.
18
2.5
m∗/m↓
2
1.5
1
−1
−0.5
0
0.5
1
1/kFa
1
1
0.5
0.5
1/µ↑ Im Σ (k,ω)
1/µ↑ Re Σ (k,ω)
Fig. 2.7 – Masse effective des quasiparticules ↓ en fonction de 1/kF a pour différents rapport de
masse r = m↓ /m↑ . Les mêmes couleurs que pour la figure 2.6 sont utilisées.
0
−0.5
−1
−1.5
−2
6
0
−0.5
−1
−1.5
−2
6
4
k/kF
4
k/kF
2
0
−10
5
0
2
10
ω/µ↑
−5
0
−10
−5
10
5
0
ω/µ↑
Fig. 2.8 – Représentation de la self-énergie Σ en fonction de l’impulsion k et de la fréquence (réelle)
ω à l’unitarité (1/kF a = 0) et avec m↓ = m↑ .
1/µ↑ Im Σ (0,ω)
1/µ↑ Re Σ (0,ω)
1
0.5
0
−0.5
−1
−10
0
−1
−2
−10
−5
Im ω/µ
↑
0
5
−10
10
−5
0
5
−5
10
Im ω/µ
↑
Re ω/µ↑
0
5
−10
10
−5
0
5
10
Re ω/µ↑
Fig. 2.9 – Représentation de la self-énergie Σ dans le plan complexe des fréquences pour k = 0,
1/kF a = 0 et m↓ = m↑ .
19
On retrouve sur la densité spectrale une structure en pics, les quasiparticules acquiérant une
durée de vie finie. On représente enfin le vertex Γ sur l’axe imaginaire des fréquences, qui nous
permettra de comparer aux résultats obtenus dans la section suivante.
3
µ↑ A (k,ω)
2.5
2
1.5
1
0.5
0
−10
−5
0
5
ω/µ
10
↑
Fig. 2.10 – Représentation de la densité spectrale A en fonction de k et ω pour 1/kF a = 0 et
m↓ = m↑ . A gauche : dans le plan (k, ω). A droite : vue en coupe pour k/kF = 0, 0.5, 1, 2, 3.
0
−10
Re Γ (K,iΩ)
−20
−30
−40
k3 /µ
F ↑
k3F/µ↑ Re Γ (K,iΩ)
0
−10
−50
−60
−70
−40
−20
−30
−40
−50
−60
−20
40
0
Ω/µ
↑
20
20
40
0
−70
−40
K/kF
−20
0
Ω/µ
20
40
20
40
↑
30
20
Im Γ (K,iΩ)
20
10
0
−10
k3 /µ
F ↑
k3F/µ↑ Im Γ (K,iΩ)
30
−20
10
0
−10
−20
−30
−40
−20
40
0
20
20
Ω/µ↑
40
0
−30
−40
K/kF
−20
0
Ω/µ↑
Fig. 2.11 – Représentation du vertex Γ à l’unitarité (1/kF a = 0) et avec m↓ = m↑ . A gauche : représentation dans le plan (K, Ω) (K réel et Ω sur l’axe imaginaire) de la partie réelle (en haut) et
de la partie imaginaire (en bas). A droite : vue en coupe sur l’axe imaginaire des fréquences pour
K/kF = 0, 1, 2, 5, 10.
20
Chapitre 3
Généralisation, résolution numérique
et discussion des résultats
Nous abordons au cours de cette partie une généralisation de l’approximation de la matrice T
introduite dans la section précédente, généralisation qui a constitué le cœur du stage. On présente
les différents schémas de résolution numérique utilisés ainsi que les premiers résultats.
Une généralisation de l’approximation de la matrice T .
3.1
Une des faiblesses de l’approximation de la matrice T présentées dans la section précédente est
le manque d’autocohérence : la self-énergie Σ est calculée en utilisant la fonction de Green G0↓ sans
interaction alors que Σ permet de calculer la fonction de Green complète G↓ . Pour tenir compte de
plus de processus d’interaction, l’idée est donc de remplacer les différents facteurs G0↓ par G↓ [8] :
ceci a pour effet de faire intervenir le vrai spectre des quasiparticules dans le calcul de Σ à la place
du spectre des particules libres ε↓ (k) = k 2 /2m↓ et donc de mieux tenir compte de l’action du milieu.
On utilise donc l’approximation des échelles suivantes (les lignes épaisses désignent la fonction de
Green complète) :
Σ'
+
+
+···
Fig. 3.1 – Une généralisation de l’approximation de la matrice T .
Dès lors, il suffit de remplacer G0↓ par G↓ dans l’expression de Γ. Le calcul de l’intégrale (2.3)
reste valable si on suppose que la position des pôles de G↓ est peu modifiée. On obtient finalement
les équations couplées :
−1
Γ
mr
(K, Ω) =
−
2πa
Z
d3 k
(2π)3
2mr
+ G↓ (k, Ω + µ↑ − ε↑ (K − k)) θ (ε↑ (K − k) − µ↑ ) ,
k2
(3.1)
et pour ω sur l’axe imaginaire :
Σ(k, ω) =
1
2iπ
Z
d3 K
(2π)3
Z +i∞
dΩ Γ(K, Ω)G0↑ (K − k, Ω − ω) .
(3.2)
−i∞
Ces équations sont effectivement couplées puisque Σ dépend de Γ, et Γ dépend de Σ via la fonction
de Green G↓ :
1
G↓ (k, ω) =
.
(3.3)
ω − ε↓ (k) + µ↓ − Σ(k, ω)
21
3.2
Schémas numériques de résolution
Une première approche pour la résolution des équations (3.1) et (3.2) a consisté à utiliser
l’expression du prolongement analytique de Σ sur l’axe réel des fréquences donnée par (2.8). En
effet, on ramène alors la résolution des équations à la recherche d’un point fixe de la forme
Σ = F (Σ) ,
où la fonction inconnue, la self-énergie Σ, est une fonction de deux variables réelles, k et ω. Dès
lors, il suffit de discrétiser la fonction Σ sur une grille de points du plan (k, ω), les valeurs de la
fonction F (Σ) pouvant être calculées à l’aide des deux équations (3.1) et (3.2) via un processus
d’interpolation et d’intégration numérique. Enfin, le point fixe Σ peut être déterminé par itérations
successives jusqu’à atteindre la convergence.
Cependant, cette méthode s’est révélée inefficace parce que la fonction de Green est une fonction
très structurées en fréquence et a justement ses pôles sur l’axe réel des fréquences, rendant le
processus d’intégration numérique instable. De plus, le calcul d’une valeur de F nécessitant le calcul
de 4 intégrales successives, le nombre de points utilisés pour effectuer les intégrations numériques
ne pouvaient être important si on souhaitait garder un temps de calcul raisonnable.
Un deuxième point de vue, que je vais exposer, a permis de contourner ces difficultés. L’idée
consiste à travailler, non pas sur l’axe réel des fréquences, mais sur l’axe imaginaire. En effet, d’après
l’équation (3.2), le calcul de Σ sur l’axe imaginaire nécessite la seule connaissance de Γ sur ce même
axe. On choisit donc de prendre pour fonction inconnue, la fonction Γ qui est une fonction de 2
variables, K, qui est réel, et Ω, qui est imaginaire pur.
Cependant, d’après l’équation (3.1), le calcul de Γ sur l’axe imaginaire des fréquences nécessite
le calcul de G↓ , donc de Σ, en dehors de cet axe. Plus précisément, à cause de la fonction θ, on
doit évaluer la fonction Σ pour des fréquences ω de partie réelle négative. Or, comme nous l’avons
déjà vu, la formule (3.2) n’est valable que sur l’axe imaginaire ; en dehors de cet axe, il faut utiliser
le prolongement analytique donné par (2.8) qui nécessite la connaissance de Γ en dehors de l’axe
imaginaire.
On résout cette difficulté en remarquant que pour Re ω ≤ 0,
θ(µ↑ − ε↑ (K − k) − Re ω)θ(µ↑ − ε↑ (K − k)) = θ(µ↑ − ε↑ (K − k)) .
Il suffit alors de multiplier l’équation (2.7) par θ(µ↑ − ε↑ (K − k)), et de la lire de droite à gauche.
On obtient, pour Re ω ≤ 0 :
Σ(k, ω) =
1
2iπ
Z
d3 K
(2π)3
Z +i∞
dΩ Γ(K, Ω)G0↑ (K − k, Ω − ω)θ(µ↑ − ε↑ (K − k)) .
(3.4)
−i∞
On peut désormais exposer le plan de la construction numérique :
1. La fonction Γ(K, Ω), K positif, Ω imaginaire pur, est calculée sur une grille de points (on
utilise une grille en les variables Arctan K et Arctan Ω pour mieux traiter l’infini). Lorsque la
fonction Γ doit être évaluée en un point qui n’est pas sur la grille, on effectue une interpolation
avec des splines cubiques [13] (voir l’encadré) si le point est à l’intérieur du domaine délimité
par la grille et on utilise le comportement asymptotique de Γ donné dans l’Annexe B sinon.
2. On initialise les valeurs de Γ à 0.
3. On calcule les nouvelles valeurs de Γ sur la grille en utilisant l’équation (3.1). L’intégration
angulaire sur k est effectuée en utilisant une méthode de Gauss, après avoir fait le changement
de variable u = cos θ. L’intégration radiale est réalisée en utilisant une méthode de Simpson
ouverte [13] :
Z 1
3
1
1
1
3
5
f (t)dt ' f
+ f
+ f
.
8
6
4
2
8
6
0
22
L’évaluation de G↓ nécessite le calcul de Σ que l’on effectue à l’aide de l’équation (3.4) après
changement de variable :
Σ(k, ω) =
1
2iπ
d3 K
3
|K|<kF (2π)
Z
Z +i∞
dΩ Γ(K + k, Ω)G0↑ (K, Ω − ω) .
(3.5)
−i∞
L’intégration angulaire sur K est alors réalisée en utilisant une méthode de Gauss et les
intégrations sur Ω et K avec une méthode de Simpson ouverte.
4. On calcule la valeur de µ↓ = Σ(0, 0) à l’aide de (3.4) avec les nouvelles valeurs de Γ calculées.
5. On retourne au point 3. jusqu’à obtenir la convergence de la fonction Γ
Interpolation et splines cubiques
Étant donnée une grille de N points, xi i = 1, · · · , N , et une fonction y connue par ces
valeurs yi i = 1, · · · , N , on souhaite calculer une valeur approchée de y(x) pour un point
x qui n’appartient pas à la grille. La spline cubique est l’unique fonction de classe C 2 qui
est un polynôme de degré 3 sur chaque sous intervalle [xi , xi+1 ] et qui approche f avec
une courbure minimale.
Si x ∈ [xj , xj+1 ], elle est donnée par :
00
y(x) = Ayj + Byj+1 + Cyj00 + Byj+1
,
avec
A=
xj+1 − x
xj+1 − xj
B=
(3.6)
x − xj
xj+1 − xj
1
1
C = (A3 − A)(xj+1 − xj )2
D = (B 3 − B)(xj+1 − xj )2 .
6
6
00
Les valeurs yj sont calculées en imposant la continuité de la dérivée première au point xj .
On obtient un système linéaire de N − 2 équations à N inconnues :
xj − xj−1 00
xj+1 − xj−1 00 xj+1 − xj 00
yj+1 − yj
yj − yj−1
yj−1 +
yj +
yj+1 =
−
.
6
3
6
xj+1 − xj
xj − xj−1
Les deux derniers paramètres restant peuvent servir, par exemple, à imposer les valeurs
de y 0 aux bords de la grille.
Si on souhaite calculer les valeurs de la spline cubique en plusieurs points, il est important
de noter qu’il suffit de résoudre ce système une seule fois. On évalue alors la spline au point
x en utilisant la formule (3.6). Cependant, il faut déterminer à chaque fois la position de
x dans la grille, c’est-à-dire l’indice j pour lequel x ∈ [xj , xj+1 ]. Pour réduire le temps de
calcul, il a fallu optimiser cette étape. On a utilisé pour cela deux stratégies :
– donner, quand c’est possible, une indication sur la valeur de j. Cela se produit notamment lorsqu’on souhaite calculer une intégrale, on appelle alors la fonction y sur
des valeurs assez proches et qui se suivent ;
– procéder par dichotomie.
Citons encore quelques-unes des difficultés rencontrées. Dans l’équation (3.5), la fonction G0↑ est
calculée pour des fréquences de parties réelles positives, il faut traiter les singularités numériquement
comme des parties principales.
Enfin, toujours dans l’équation (3.5), la fonction G0↑ a une décroissance lente à l’infini en Ω
(en 1/Ω) qui est assez problématique pour une intégration numérique. Pour améliorer la convergence, j’ai eu l’idée d’utiliser la rigidité des fonctions analytiques. En effet, nous avons vu à l’équation
23
(2.7) que :
1
2iπ
Z +i∞
dΩ Γ(K, Ω)G0↑ (K − k, Ω − ω) = Γ(K, ω + ε↑ (K − k) − µ↑ )θ(µ↑ − ε↑ (K − k) − Re ω) ,
−i∞
en fermant le contour d’intégration du côté des fréquences négatives et en utilisant le théorème de
Cauchy. Si on multiplie la fonction à intégrer par une fonction analytique qui n’a pas de pôle dans
le demi-plan Re Ω < 0, on n’ajoute pas de contribution supplémentaire à l’intégrale, seul le résidu
est modifié. Ainsi, on a :
Z +i∞
dΩ αK−k
−i∞
Γ(K, ω+ε↑ (K − k)−µ↑ )
Γ(K, Ω)
G0↑ (K−k, Ω−ω) = αK−k
θ(µ↑ −ε↑ (K−k)−Re ω) .
(Ω − µ↑ )2
(ω+ε↑ (K − k)−2µ↑ )2
Il suffit donc d’adapter la valeur de αK−k pour obtenir le même résultat :
αK−k = (ω + ε↑ (K − k) − 2µ↑ )2 .
On a ainsi augmenté la décroissance en Ω de la fonction à intégrer, et donc la vitesse de convergence
de la méthode d’intégration numérique.
3.3
Résultats
Toutes ces améliorations numériques nous ont permis d’obtenir des premiers résultats avec
un temps de calcul raisonnable. Ainsi, à l’unitarité et pour des masses égales, on a obtenu
µ↓ = −0.67725 µ↓ . Cette valeur est assez proche de la valeur −0.6066 µ↓ obtenue dans la section
précédente. Elle est également en accord avec le calcul variationnel, puisqu’elle lui est inférieure.
On représente sur la figure 3.2 le vertex Γ. Cette figure est à comparer à la figure 2.11 (les
mêmes échelles sont utilisées). Ces deux figures sont très proches. Cette faible modification justifie
l’approximation de la matrice T utilisée. En effet, celle-ci semble raisonnable sur un plan physique,
mais sa validité dans des situations d’interaction forte est encore mal connue.
24
0
−10
−10
k3 /µ Re Γ (K,iΩ)
−20
−30
−20
−30
−40
↑
−40
−50
F
k3F/µ↑ Re Γ (K,iΩ)
0
−60
−70
−40
−50
−60
−20
40
0
Ω/µ
↑
20
20
40
0
−70
−40
K/k
−20
F
0
Ω/µ
20
40
20
40
↑
30
20
20
k3 /µ Im Γ (K,iΩ)
10
0
0
↑
−10
10
−20
−10
F
k3F/µ↑ Im Γ (K,iΩ)
30
−20
−30
−40
−20
40
0
20
20
Ω/µ↑
40
0
−30
−40
K/kF
−20
0
Ω/µ↑
Fig. 3.2 – Représentation du vertex Γ à l’unitarité (1/kF a = 0) et avec m↓ = m↑ . A gauche : représentation dans le plan (K, Ω) (K réel et Ω sur l’axe imaginaire) de la partie réelle (en haut) et
de la partie imaginaire (en bas). A droite : vue en coupe sur l’axe imaginaire des fréquences pour
K/kF = 0, 1, 2, 5, 10.
25
26
Conclusion et perspectives
Au cour de ce stage, qui m’a permis une première familiarisation avec les techniques utilisées
pour la résolution du problème à N -corps, je me suis intéressé à un cas extrême de gaz polarisé : celui
d’un seul atome d’une espèce immergé dans une mer de Fermi d’une autre espèce d’atome. Plusieurs
approches ont été utilisées. Un premier calcul variationnel a permis d’obtenir une borne supérieure
du potentiel chimique. Le problème a ensuite été traité dans l’approximation de la matrice T (qui
revient à faire un traitement approximatif à deux corps) : elle a permis de déterminer les grandeurs
physiques qui nous intéressent, le potentiel chimique et la masse effective de l’atome ↓. Enfin, une
généralisation de cette approximation à été réalisée, afin de mieux tenir compte de l’action du
milieu.
Après de nombreuses améliorations numériques, on a pu retrouver certains résultats obtenus
précédemment. Il nous faudra cependant encore déterminer la masse effective des quasiparticules
dans cette approximation. Il faudra également traiter une des difficultés fréquentes dans toutes les
techniques utilisant les fonctions de Green : l’obtention du prolongement analytique de la self-énergie
au plan complexe des fréquences. En effet, ce prolongement n’a été obtenu, pour le moment, que
pour des fréquences de parties réelles négatives. Il sera alors possible d’obtenir la densité spectrale
en énergie et de mieux comprendre les modifications induites par cette approximation.
On pourra alors essayer de généraliser cette approximation en faisant intervenir un problème
à trois, puis à quatre corps (voire plus), dans le but de parvenir à une solution quasi-exacte de ce
problème, en constatant qu’on a obtenu une convergence dans cette série de problèmes. Ceci pourra
permettre notamment de justifier la validité, encore mal connue, de l’approximation de la matrice
T dans des situations d’interaction forte.
Remerciements
Ce stage a été réalisé au Laboratoire de Physique Statistique de l’École Normale Supérieure.
Je souhaite remercier très chaleureusement mes deux responsables de stage : Roland Combescot,
qui est à l’initiative du sujet, et Xavier Leyronas, pour ses nombreuses explications lors de mes
premiers pas dans la théorie des fonctions de Green. Ils ont tous les deux été très présents pour
répondre à toutes mes interrogations et me donner de nombreux conseils tout en me laissant une
très grande autonomie. J’ai beaucoup appris en discutant avec eux et leur encadrement pendant le
stage a vraiment été parfait.
Merci également aux différents membres du LPS : son directeur, Eric Perez, et les secrétaires
qui m’ont aidé pour les différentes démarches administratives. Mais aussi les thésards avec qui j’ai
partagé le bureau en Dc21, Damien, Hervé, Laurent, Nestor, Carlos, Olaf et les autres qui ont rendu
ce stage très agréable.
Ce stage marque une nouvelle étape dans la formidable aventure, que je mène depuis maintenant
plusieurs années, un mélange fascinant entre la Physique et les Mathématiques. Il constitue le début
d’une thèse que je souhaite passionnante.
27
28
Bibliographie
[1] A. A. Abrikosov, L. P. Gorkov et I. E. Dzyaloshinski - Methods of Quantum Field
Theory in Statistical Physics, Dover, New York, (1963).
[2] Y. Castin - Fermi gases, BEC-BCS crossover and strongly interacting regime. Lecture notes,
Les Houches, 23 septembre 2004.
[3] Y. Castin - Simple theoritical tools for low dimension Bose gases. Lecture notes of the 2003
Les Houches Spring School, Quantum Gases in Low Dimensions, M. Olshanii, H. Perrin, L.
Pricoupenko Eds., J. Phys. IV France A 116 (2004) 89-132.
[4] F. Chevy - Universal phase diagram of a strongly interacting Fermi gas with unbalanced spin
populations, Phys. Rev. A 74, 063628 (2006).
[5] R. Combescot - Feshbach Resonance in Dense Ultracold Fermi Gases, Phys. Rev. Lett. 91,
120401 (2003).
[6] R. Combescot, X. Leyronas et M. Yu. Kagan - Self-consistent theory for molecular
instabilities in a normal degenerate Fermi gas in the BEC-BCS crossover, Phys. Rev. A 73,
023618 (2006).
[7] R. Combescot, A. Recati, C. Lobo et F. Chevy - Normal state of highly polarized Fermi
gases : simple many-body approaches, à paraître dans Phys. Rev. Lett.
[8] A. L. Fetter et J. D. Walecka - Quantum Theory of Many-Particle Systems, McGraw-Hill,
New York, (1971).
[9] L. D. Landau et E. M. Lifshitz - Statistical Physics, Course of Theoretical Physics Vol. 9,
Butterworth-Heinemann, Oxford, (1999).
[10] C. Lobo, A. Recati, S. Giorgini et S. Stringari - Normal State of a Polarized Fermi
Gas at Unitarity, Phys. Rev. Lett. 97, 200403 (2006).
[11] R. D. Mattuck - A Guide to Feynman Diagrams in the Many-Body Problem, McGraw-Hill,
New York, (1967).
[12] L. P. Pitaevskii et S. Stringari - Bose-Einstein Condensation, Oxford University Press,
Oxford, (2003).
[13] W. H. Press, S. A. Teukolsky, W. T. Vetterling et B. P. Flannery - Numerical
Recipes in Fortran. Second Edition. The Art of Scientific Computing, Cambridge University
Press, New York, (1992).
[14] M. Tinkham - Introduction to Superconductivity, McGraw-Hill, New York, (1996).
29
30
Annexe A
Théorie de perturbation, diagrammes
de Feynman
On introduit la représentation d’interaction en temps imaginaires pour un opérateur O :
0
0
Ô(τ ) = eτ Ĥ0 Oe−τ Ĥ0 ,
de sorte que la représentation de Matsubara s’écrit :
O(τ ) = U −1 (τ )Ô(τ )U (τ ) ,
0
0
avec U (τ ) = eτ Ĥ0 e−τ Ĥ .
0
En notant S(τ, τ 0 ) = U (τ )U (τ 0 )−1 = eτ Ĥ0 e−(τ −τ
position suivante en puissances de V̂ (τ ) [8] :
S(τ, τ 0 ) =
Z
∞
X
(−1)n τ
n!
n=0
τ0
dτ1 · · ·
0 )Ĥ 0
Z τ
τ0
e−τ
0 Ĥ 0
0
, on montre que S admet la décom-
i
h
dτn T V̂ (τ1 ) · · · V̂ (τn ) ,
(A.1)
et Gσ (k, τ ) se réécrit sous la forme :
h
Gσ (k, τ ) = −
Tr e−β Ĥ0 T ck,σ (τ )c†k,σ (0)S(β, 0)
0
h
0
i
Tr e−β Ĥ0 S(β, 0)
i
,
(A.2)
faisant intervenir des moyennes d’opérateurs fermioniques à l’équilibre thermodynamique pour le
hamiltonien libre Ĥ00 . On peut alors appliquer le théorème de Wick qui permet d’écrire la contribution à G à l’ordre n en V comme une somme de produits de 2n + 1 contractions de 2 opérateurs
fermioniques.
La contribution du dénominateur de Gσ permettant de compenser les diagrammes non connexes
du numérateur, on obtient les règles de Feynman suivantes pour évaluer la contribution à Gσ (k, iων )
à l’ordre n :
1. Dessiner tous les diagrammes connexes et topologiquement distincts contenant n lignes d’ink0 ,ωm
teraction ↓
k0 ,ωm ,−σ
↑ reliant des particules de spins différents, n lignes
correspondant
k0 ,ωm ,σ
au propagateur libre des particules −σ, n − 1 lignes
k,ωn ,σ
, une flèche entrante
k,ωn ,σ
correspondant au propagateur libre des particules σ.
et une flèche sortante
2. Attribuer une impulsion et une fréquence à chaque ligne de manière à assurer la conservation
de ces deux quantités à chaque vertex ou nœud du diagramme.
k0 ,ωm ,σ
3. Associer à chaque ligne
, le facteur G0,σ (k0 , iωm ) =
k0 ,ωm
ligne d’interaction ↓
↑, le facteur Vk0 .
31
1
et à chaque
iωm − εσ (k 0 ) + µσ
1
V
4. Sommer sur les n impulsions
!
X
et les n fréquences
k0
1
β
!
X
internes en ajoutant le
ωm
+
facteur de convergence eiωm 0 à chaque fois qu’il y a une boucle.
5. Multiplier par (−1)n+F où F est le nombre de boucles de fermions.
Rq : dans la limite thermodynamique, on a
1 X
V 0
!
Z
→
k
nulle
1X
β
ωm
!
→
1
2iπ
Z
+i∞
dω
.
−i∞
d3 k
(2π)3
et dans la limite de la température
Illustrons ces règles de Feynman sur un exemple. Le seul diagramme à l’ordre 1 est le terme de
Hartree, le terme de Fock étant nul puisqu’il fait intervenir une interaction entre des particules de
même spin :
k 0 , ωn0 , ↑
0, 0
k , ωn , ↓
k, ωn , ↓
Fig. A.1 – Diagramme de Feynman à l’ordre 1.
Ce diagramme correspond à
(1)
G↓ (k, iωn ) =
1 X
0 +
G0,↓ (k, iωn )Vq=0 G0,↑ (k0 , iωn0 )G0,↓ (k, iωn )eiωn 0
βV k0 ,ω0
n
N↑ Vq=0
=
V
1
iωn − ε↓ (k) + µ↓
!2
On retrouve ainsi l’approximation usuelle de champ moyen.
32
.
(A.3)
Annexe B
Adimensionnement, expressions
analytiques
Adimensionnement
On utilise pour unité de vecteur d’onde,
kF =
q
2m↑ µ↑ ,
pour unité d’énergie, µ↑ , et pour unité de masse, m↑ .
En posant,
Σ̃ =
Σ
,
µ↑
G̃↓ = µ↑ G↓ ,
r=
m↓
,
m↑
Γ̃ =
ρ=−
kF3
Γ = 2kF m↑ Γ ,
µ↑
µ↑
|µ↑ |
=
,
µ↓
µ↓
on obtient (en omettant les ˜) :
G0↑ (k, ω) =
ω−
1
,
+ 1 + i0+ sign(k − 1)
k2
1
G↓ (k, ω) =
ω−
k2
r
,
− ρ − Σ(k, ω)
∂Σ
1−
m∗
∂ω .
=
∂Σ
m↓
1+r 2
∂k
L’équation (2.5) se réécrit :
Γ−1 (K, Ω) =
1
r
−
4πakF r + 1
Z
d3 k
(2π)3
r
1
2
2
+
G
k,
Ω
+
1
−
(K
−
k)
θ
(K
−
k)
−
1
,
↓
r + 1 k2
l’équation (2.6) :
1
Σ(k, ω) =
2iπ
Z
d3 K
(2π)3
Z +i∞
dΩ Γ(K, Ω)G0↑ (K − k, Ω − ω) ,
−i∞
et l’équation (2.8) :
Z
Σ(k, ω) =
d3 K
Γ(K, ω + (K − k)2 − 1)θ(1 − (K − k)2 ) .
(2π)3
33
Expressions analytiques
En utilisant l’approximation usuelle de la matrice T , c’est-à-dire en utilisant G0↓ , on peut
calculer analytiquement Γ. En posant :
r
A=
r+1
K2
Ω+1−ρ−
r+1
!
,
on a
Γ−1 (K, Ω) =
1 r
4π r + 1
1−r 2
K + r(Ω − ρ) − 1
r+1
(
!
!)
(K − 1)2
(K + 1)2
× log Ω − ρ −
− log Ω − ρ −
r
r
1
1
1
− −
akF
π 4πK
√
−
√
√
A
K
K
log 1 −
− A − log 1 −
+ A
2π
r+1
r+1
√
√ K
K
+ log 1 +
− A − log 1 +
+ A
.
r+1
r+1
Comportement asymptotique
Pour K, Ω → ∞,
v
u
mr u
mr
−1
t2m
Γ (K, Ω) '
−
r
2πa
k2
− Ω − µ ↑ − µ↓
2(m↑ + m↓ )
2π
et en unités réduites,
Γ
−1
1 r
(K, Ω) '
4π r + 1
34
√
1
− −A .
akF
!
,
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