Introduction
Le refroidissement par laser et l’obtention de gaz d’atomes ultrafroids sont des progrès remar-
quables réalisés il y a moins de deux décennies et qui ont abouti à l’observation de la condensation
de Bose-Einstein de gaz atomiques. Ces progrès ont été récompensés par deux prix Nobel : le pre-
mier a été attribué en 1997 à S. Chu, C. Cohen-Tannoudji et W. Phillips pour leurs travaux sur le
refroidissement laser et le second, en 2001, à E. Cornell, W. Ketterle et C. Wieman pour l’obtention
d’une condensation de Bose-Einstein pour les gaz alcalins bosoniques en 1995.
Dès lors, l’intérêt s’est tourné vers les gaz fermioniques. Dans le cas des bosons, le passage dans
le régime quantique (qui se produit lorsque la distance moyenne entre particules est inférieure à la
longueur d’onde de de Broglie thermique Λth =h/√2πmkBT) s’accompagne d’une transition de
phase vers un état superfluide où toutes les particules s’accumulent dans l’état fondamental : c’est la
condensation de Bose-Einstein. Pour des fermions sans interaction, l’état fondamental du système
est déterminé par le principe de Pauli qui interdit à deux particules fermioniques d’occuper le
même état quantique : les fermions peuplent donc tous les états dont le vecteur d’onde est inférieur
au vecteur d’onde de Fermi kFavec exactement un atome par niveau et par état de spin (ou
par état hyperfin) , c’est la mer de Fermi caractérisée par l’énergie de Fermi EF=~2k2
F/2m. Les
phénomènes quantiques se manifesteront naturellement si la température est typiquement inférieure
à la température de Fermi TF=EF/kB.
Effet des interactions dans un gaz de fermions
L’introduction des interactions donne une dimension supplémentaire au problème. Ainsi, dans
le cas des électrons dans les solides, la présence d’interactions attractives médiée par les phonons
provoque à basse température l’apparition d’une phase supraconductrice, également présente dans
les noyaux atomiques ou les étoiles à neutrons. Bien que les superfluides fermioniques soient au cœur
d’une immense variété de systèmes physiques, la compréhension de leurs propriétés n’est encore
que très partielle et constitue l’un des enjeux majeurs de la physique contemporaine.
Les interactions permettent aux fermions de s’apparier : les paires ainsi formées sont bosoniques
et peuvent à leur tour former un condensat de Bose-Einstein pour une température inférieure à une
température critique Tc. Cependant, la nature de ces paires et du superfluide dépend du signe de
la longueur de diffusion a.
Pour anégatif et faible l’interaction effective entre les atomes est attractive, la taille des paires
est grande devant la distance moyenne entre particules et la superfluidité est de type BCS (du nom
de ses inventeurs J. Bardeen, L. N. Cooper et J. R. Schrieffer) analogue à celle des supraconduc-
teurs [14] et de 3He. Ces « paires de Cooper » sont cependant radicalement différentes des molécules
usuelles : l’appariement ne résulte pas simplement de l’interaction des deux particules constitutives
de la paire, mais implique la mer de Fermi dans son ensemble. Ce caractère collectif se manifeste
de deux façons : les deux particules sont très éloignées l’une de l’autre et l’énergie de liaison de la
paire, ∆, dépend explicitement de la densité de particules. En effet, on montre que dans la limite
a→0−on a ∆∝EFexp(−1/kF|a|), quantité qui dépend de la densité via EFet kF. Une des
conséquence fondamentale de cette origine collective est que les paires de Cooper apparaissent à la
même température que l’ordre quantique.
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