protection sociale préexistant pour accompagner les populations les plus affectées, que
de créer un système de toutes pièces », souligne Stéphane Hallegatte.
A la suite du passage du typhon Yolanda en 2013, les Philippines ont ainsi mobilisé leur
programme « 4P » (Pantawid Pamilyang Pilipino Program) de subventions monétaires aux plus
pauvres, pour dégager des fonds d’urgence et augmenter le versement à ces ménages. Après
une catastrophe, la rapidité de l’aide et son ciblage sont en effet essentiels pour éviter les effets
irréversibles sur la santé des enfants et la vente en catastrophe et à bas prix d’actifs comme le
bétail.
Des études de cas en Éthiopie et au Malawi montrent que le coût d’une sécheresse
peut passer de quelque 50 dollars à 1 300 dollars, si la prise en charge est retardée de six à neuf
mois. « Un programme comme le« 4P » des Philippines est d’autant plus pertinent que les
bénéficiaires s’engagent à faire un suivi médical de leurs enfants et à les inscrire à
l’école », souligne l’économiste.
L’urgence d’une « offensive » contre les émissions
Ce renforcement de la protection sociale des plus démunis, tout comme la mise en œuvre de
politiques de développement, notamment agricoles, atténuant la vulnérabilité face au changement
climatique et bénéficiant aux plus pauvres, va de pair avec une « offensive » contre les émissions
de gaz à effet de serre. « Des mesures immédiates de réduction des émissions sont nécessaires
pour stabiliser le changement climatique et réduire la menace qu’il représente pour l’éradication
de la pauvreté à long terme. Car si on n’agit pas dès à présent, les effets après 2030 seront
beaucoup importants », insiste Stéphane Hallegatte.
Les politiques climatiques peuvent en soi constituer un levier de ressources pour financer les
programmes de protection sociale ou de développement. « Une taxe carbone, même modeste, à
10 dollars la tonne, permettrait d’intensifier considérablement, de 50 %, la protection sociale. Ou
de financer d’autres investissements (comme l’accès à l’eau, à l’assainissement ou à l’énergie
moderne) qui profitent aux gens pauvres », faitvaloir la Banque mondiale.
Un soutien « essentiel » de la communauté internationale
« Les politiques de réduction des émissions doivent protéger et même profiter aux gens
pauvres », plaident les auteurs du rapport. En Indonésie, les revenus tirés de la baisse des
subventions aux énergies fossiles ont été réinvestis dans la création d’une aide financière aux
30 % de personnes les plus pauvres : 30 dollars par trimestre « qui, pour ces personnes, fait plus
que compenser le renchérissement de l’énergie, celles-ci en utilisant peu », souligne Stéphane
Hallegatte.
Dans certains pays à bas revenus cependant, relève la Banque mondiale, le soutien de la
communauté internationale sera « essentiel », « surtout pour les investissements présentant un
coût initial élevé - tels lestransports urbains, les infrastructures énergétiques résilientes ou la lutte
contre la déforestation – mais qui sont urgents pour empêcher toute irréversibilité et tout
enfermement dans un développement très carboné ».
« Les fonds dédiés au climat doivent contribuer à la réduction de la pauvreté », insiste Stéphane
Hallegatte rappelant que le déficit de financements des infrastructures dans les pays en
développement s’élève à quelque 1 000 milliards de dollars par an. Une somme bien supérieure
aux 100 milliards de dollars annuels (88 milliards d’euros) promis en 2009 à Copenhague par les
pays développés pour aider les pays en développement à faire face au dérèglement climatique, et
dont la mobilisation fait encore l’objet de discussion à l’approche de la COP 21.