UNIVERSITE PARIS- EST FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL Année 2013 N° 1024 THESE POUR LE DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : Radiodiagnostic et imagerie Médicale Présentée et soutenue publiquement le 12 septembre 2013 à la faculté de Médecine Pierre et Marie Curie par Nadya PYATIGORSKAYA Née le 3 aout 1981 à Kharkov, Ukraine Mesure de la charge en fer par IRM dans les formes génétiques de maladie de Parkinson Président de thèse : Professeur Didier Dormont Directeur de thèse : Le conservateur de la bibliothèque universitaire Professeur Stéphane Lehéricy Jury de thèse : Professeur Jean-Christophe Corvol Professeur Damien Galanaud Signature du Directeur de thèse la bibliothèque Signature et cachet de 2 En présence des Maîtres de cette école, de mes chers condisciples et devant l’effigie d’Hippocrate, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l'exercice de la médecine. Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent, et n'exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail. Je ne permettrai pas que des considérations de religion, de nation, de race, viennent s’interposer entre mon devoir et mon patient. Admis dans l'intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe. Ma langue taira les secrets qui me seront confiés, et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs, ni à favoriser le crime. Respectueux et reconnaissant envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants l'instruction que j’ai reçue de leur père. Que les hommes m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses, que je sois couvert d'opprobre et méprisé de mes confrères si j’y manque. 3 4 A Christophe Pour le bonheur que tu m’apportes tous les jours, avec tout mon amour 5 Au Président du Jury Monsieur le Professeur Didier Dormont Vous me faites l’honneur d’accepter la présidence de mon jury de thèse. Je vous remercie pour la confiance que vous m’accordez en m’offrant bientôt la chance de rejoindre votre équipe. Permettez-moi de vous exprimer toute ma gratitude et mon plus profond respect. Au Directeur de thèse Monsieur le Professeur Stéphane Lehéricy Je te remercie de m’avoir fait confiance et d’avoir accepté de diriger ma thèse. Je te remercie également de m’avoir proposé ce riche sujet de thèse qui est devenu encore plus passionnant pour moi au fur et à mesure des progrès de mon travail. Merci de m’avoir guidée, de m’avoir fourni tes précieux conseils et de m’avoir enseigné ta rigueur scientifique. Je serai heureuse que nous continuions la recherche ensemble. Aux membres du jury Monsieur le Professeur Jean-Christophe Corvol Vous me faites l’honneur d’accepter de faire partie de mon jury de thèse et de juger ce travail. Soyez assuré de ma reconnaissance et de mon profond respect. Monsieur le Professeur Damien Galanaud Je te remercie pour l’intérêt que tu as porté à mon sujet. Tu me fais l’honneur de juger mon travail. Soit assuré de ma profonde amitié et de mon grand respect. A ceux qui ont permis la réalisation de ce travail de thèse Je tiens à remercier tout particulièrement Mickael Sharman, Romain Valabregue, Linda Marrakchi et Fabrice Poupon pour votre investissement dans ce projet, votre disponibilité et votre énergie. Je remercie également Christophe et Marie pour le travail de relecture. A toute l’équipe de la neuroradiologie de la Pitié-Salpetrière J’ai gardé les meilleurs souvenirs du semestre passé avec vous. Je suis heureuse de rejoindre prochainement votre équipe. 6 A mes maitres J’ai eu la chance de vous rencontrer au long de mes études: je vous remercie de m’avoir transmis le goût de la radiologie, et je vous suis reconnaissante pour votre temps et votre accompagnement précieux au cours de mon internat, pour tout ce que vous m’avez appris et pour tout ce que vous avez encore à m’apprendre. Professeur Rahmouni, Professeur Luciani, Professeur Sebag, Professeur Halimi, Professeur Vignaux, Professeur Frija, Professeur Cuenod, Professeur Clément, Fréderic Clarençon, Aurélie Drier, Delphine Leclercq, Sophie Gerber, Liliane Ollivier, Jean-Pierre Guichard, Jérôme Hodel, Julie Franc, Anne Tardivon, Sophie Espinosa, Laurence Champion, Pierre Brugières, Stéphane Silvera, Nadia Belarbi A tous ceux que j'ai rencontrés grâce à mon travail associatif Travailler à vos côtés au service des internes a été d’une grande richesse. Professeur Pruvo, Professeur Dion, Vincent Hazebroucq, Professeur Krainik, Professeur Grenier, Professeur Hélénon, Professeur Meder, Professeur Krause, Professeur Olivier Hélénon, Professeur Oppenheim, Laurent Verzaux, Philippe Cart, Professeur Claudon, Professeur Bellin, Professeur Boyer, Jacques Niney, Professeur Bricaut, Professeur Boudghene, Jean-Philippe Masson, Professeur SchoumanClaeys, Professeur Tasu, Professeur Taourel, Pascal Beroud, Professeur Adamsbaum, Marc Molho, Sylvia Neuenschwander, Professeur Soyer, Professeur Laurent Aux membres de bureau AFIIM : Pour ce projet qui me tient tout particulièrement à cœur Professeur Drapé, Professeur Blum, Professeur Douek, Marc Zins, Julien Savatovski, Gregory Lenczner, Jean Mani, Henri Azoulay, Jean-Claude Sadik, Philippe Levy, Alain Levy A tous les membres des bureaux APIR et UNIR, mes collègues et amis, pour tous les sondages, les longues soirées de préparations des JFR, tous les événements organisés, les soirées, les centaines de coups des fil et les milliers de mails échangés, pour tout ce que a été fait et tout ce qui reste encore à faire 7 Mickael, Julien, Audrey, Myriam, Augustin, Lucy, Josep, Liess, Chi-Tuan, François, Diane, Adrian, Jérôme, Pierre-Fleury, Alexandre, Caroline, Sébastien, Pierre, Alexia, Xavier, Amélie, Paul-Henri, Benjamin, Sonia, Manuela A mes co-internes que j’ai rencontrés au cours de mon internat et qui ont tous laissé une trace dans mon parcours et mon cœur. Mélanie, Hocine, Lucie, Karen, Caroline, Lambros, Julie, Laure, Licia, Diane, Sarah, Zainab, Anne-Laure 8 A ma famille A maman, merci pour ton soutien, pour toutes les valeurs que tu m’as transmises qui m’ont permis d’en être là aujourd’hui, merci de m’avoir soutenu tout au long de mes études, et merci d’être toujours là pour moi quelque soit la distance et l’heure du jour et de la nuit, je peux toujours compter sur toi A Garick, merci pour m’avoir soutenu dans mes choix et toujours avoir cru en moi, merci pour ton humour dans toutes les situations A Valery, merci pour toute l’aide que vous m’avez apporté pour ma thèse et pour l’analyse statistique et merci de rendre ma mère heureuse A ma sœur, Anya, pour notre complicité et pour toute ton affection. Tu me manqueras pendant la thèse. J'espère que nous nous verrons plus souvent A ma cousine préférée Masha, tu as toujours été une grande sœur pour moi, je suis heureuse de t’avoir maintenant à Paris A ma belle-famille, pour votre accueil A mes amis Merci à tous les amis qui rendent tous les jours ma vie plus belle par leur présence A Audrey, pour ton enthousiasme et ta motivation débordante, mais toujours rationnelle. Je suis heureuse de travailler bientôt dans le même hôpital que toi A Najla, pour ton sarcasme désopilant qui remonte toujours le moral, et pour avoir toujours la solution à tous mes vrais et faux problèmes A Caroline : pour tous les moments qu’on a passés à travailler, à douter et à refaire le monde dans ton studio en P1 A Alex, pour la révision de l’internat High-Tech, ça y est, on est au bout A Soufiane, pour toutes ces heures passées à réviser l’internat, bientôt on se retrouvera à la Pitié A mes amis russes grâce à qui je peux être fière de mes origines : Arina, Regina, Yula, Elena A Liat pour ta constance en amitié A Chiara, ma neurologue préférée, j’espère te voir bientôt plus souvent! 9 A Géraldine, pour ton énergie, ta joie de vivre, et bien sûr ta classe A Bruno pour ta gentillesse, ta bonne humeur, et tous les congrès à venir A Edith, pour ta complicité et tous nos rires et délires à Lariboisière A Patricia, tu as toujours été là pour moi, en vrai ou sur Viber! A Ranko, pour toutes ces blagues, que nous seuls pouvons comprendre A Teo, pour le jus d’orange A mes collègues et amis de NeuroSpin Olivier, Benjamin, Julien, Ileana, Françoise, Céline, Benoit, et Alfredo pour votre patience pour Matlab et pour toutes mes blagues pendant les pauses café A ceux que j'ai rencontrés à l’occasion des congrès et des cours et avec qui je partage depuis des moments de détente et de travail : Alexandre, Laura, Anne, Annabelle, Matthieu, Ibtissam, Frédérique, Eléonore, Kelly, Floriza, Emma A mes externes préférés, Amandine et Idriss, qui m’ont donné le goût d’enseigner A mes amis des facultés de médecine de Montpellier et de Créteil A tous mes amis non médecins pour tous les très bons moments passés ensemble et pour ceux à venir. A tous ceux que je n’ai pas pu citer faute de place, mais qui ont pour autant une place importante dans mon cœur 10 Sommaire I. Introduction........................................................................................................ 17 II. Maladie de Parkinson ........................................................................................ 20 A. Introduction .................................................................................................. 20 B. Etiologie de la Maladie de Parkinson. Formes idiopathiques et génétiques 21 1) Généralités ............................................................................................... 21 2) Facteurs environnementaux ..................................................................... 22 3) Facteurs génétiques ................................................................................. 22 C. Physiopathologie et régions impliquées ...................................................... 26 1) Neuropathologie ....................................................................................... 26 2) Atteinte des NGC et des autres régions ................................................... 28 D. Diagnostic Clinique de la Maladie de Parkinson .......................................... 35 1) Généralités ............................................................................................... 35 2) Particularités des formes génétiques ....................................................... 37 E. Traitement ................................................................................................... 38 1) Généralités ............................................................................................... 38 2) Particularités chez les patients porteurs de mutations ............................. 40 F. III. Diagnostics différentiels du syndrome parkinsonien .................................... 40 Biomarqueurs en neuro-imagerie et leurs applications ................................... 42 A. Imagerie structurale ..................................................................................... 43 1) Techniques d’imagerie ............................................................................. 43 2) Applications à la MP ................................................................................. 46 3) Diagnostics différentiels ........................................................................... 48 B. Imagerie quantitative ................................................................................... 48 1) Mesure de la surcharge en fer: relaxométrie et SWI ................................ 49 2) Transfert de magnétisation....................................................................... 54 3) Imagerie en diffusion ................................................................................ 54 11 4) C. Multimodalité ............................................................................................ 57 Connectivité anatomique et fonctionnelle .................................................... 58 1) Tractographie ........................................................................................... 58 2) Imagerie fonctionnelle : technique, applications à la MP .......................... 58 D. Particularités dans les formes génétiques ................................................... 61 1) Echographie transcrânienne .................................................................... 62 2) Imagerie conventionnelle en IRM ............................................................. 62 3) Etudes volumétriques en IRM .................................................................. 63 4) Imagerie fonctionnelle en IRM .................................................................. 64 IV. Objectifs .......................................................................................................... 66 V. Matériels et méthodes ....................................................................................... 67 A. Les sujets .................................................................................................... 67 B. L'examen neurologique ............................................................................... 68 C. Acquisition de données IRM ........................................................................ 68 D. Le stockage des images .............................................................................. 69 E. Traitement et analyse d'images ................................................................... 69 F. VI. 1) Segmentation des ROI ............................................................................. 70 2) Cartographie T2 et T2 * ............................................................................ 71 3) Recalage des ROIs et calcul des données.............................................. 71 L'analyse statistique .................................................................................... 72 Résultats ......................................................................................................... 74 A. Recueil des données ................................................................................... 74 B. Différences pour R2 et R2* entre les groupes étudiés................................. 74 C. Différence entre les groupes étudiés pour le R2* ........................................ 75 D. Corrélation entre R2* et données cliniques ................................................. 76 VII. A. Discussion ...................................................................................................... 78 Dépôt de fer dans la SN : R2* ..................................................................... 78 12 B. R2* dans la SN chez les sujets porteurs des mutations génétiques ............ 78 C. T2 et R2 comme biomarqueurs? ................................................................. 80 D. Les autres Noyaux Gris Centraux................................................................ 80 E. Méthodes d’analyse de la SN ...................................................................... 81 F. Corrélation avec les données cliniques ....................................................... 81 G. Rôle du fer dans la physiopathologie de la MP ........................................... 82 H. Rôle du fer dans la physiopathologie de la SN ............................................ 83 I. Charge en fer selon le type de mutation ......................................................... 85 J. Biais et limites ................................................................................................. 86 VIII. Conclusion et perspectives ............................................................................. 87 13 Table des figures Figure I-1: Techniques de l’IRM utilisées dans les études chez les sujets atteints de la MP ....................................................................................................................... 18 Figure II-1: Physiopathologie possible de la MP ....................................................... 25 Figure II-2: Projections dopaminergiques chez le sujet normal (a) et le sujet atteint de MP (b). Figure issue de l’article de Dauer et al. 2003 [44] ........................................ 26 Figure II-3: Noyaux mésencéphaliques (a) SN dans le plan axial (b). Figure issue de l’article de Obeso JA et al. 2008 [147] ...................................................................... 27 Figure II-4: Organisation fonctionnelle des NGC. Figure issue de l’article de Obeso JA et al. 2008 [147] ................................................................................................... 28 Figure II-5: SN sur l’image coronale T2. Figure issue de l’article de Hardy et al. 2005 [76] ........................................................................................................................... 29 Figure II-6: GP interne (GPi) et GP externe (GPe) sur l’image coronale T2. Figure issue de l’article de Hardy et al. 2005 [76] ................................................................ 29 Figure II-7: Altération de l'homéostasie du métabolisme du fer dans le cas de surcharge en fer. Figure adaptée à partir de l’article de Kaur et al. 2004 [98] .......... 32 Figure II-8: Mécanisme physiologique de la dégradation de mitochondrie dans le lysosome. Figure adaptée à partir de l’article de Lin et al. 2013 [112] ...................... 33 Figure III-1: Images Coronales T1 et T2 ................................................................... 43 Figure III-2: Images pondérés en T2 à 7T dans le plan coronal (A) et axial (B) permettant de visualiser la SN en hyposignal franc. Figure issue de l’article de Lehéricy et al. 2012 [110] ......................................................................................... 44 Figure III-3: ROI de NGC sur T1 3D (A, B coupes axiales ; C, D coupes coronales) 45 Figure III-4: SN et STN sur T2 3D (coupes coronales) ............................................. 45 Figure III-5: Relaxométrie : mesures de temps de relaxation T1, T2, T2*. Figure issue de l’article de Lehéricy et al. 2012 [110] ................................................................... 49 Figure III-6: Relation linéaire entre le R2 et R2* et le taux de fer, déterminée par la méthode de régression linéaire. Figure issue de l’article de Langkammer et al. 2010 [106].......................................................................................................................... 50 Figure III-7: Nouvelle séquence d’IRM pour l’étude de la SN. Diminution de T2ρ (déphasage dynamique en rapport avec le nombre des neurones) et l’augmentation 14 de T1ρ (nombre des neurones). Figure issue de l’article de Michaeli et al. 2005 [132] ................................................................................................................................. 51 Figure III-8: Images paramétriques extraites de la diffusion (DTI) : diffusivité moyenne (A), anisotropie fractionnelle (B, C) ........................................................................... 55 Figure III-9: Diminution de la FA dans la substance noire chez les patients atteints de MP. Figure issue de l’article de Chan et al. 2007 [37] ............................................. 56 Figure III-10: Imagerie multimodale dans la SN : imagerie pondérée en T2, cartographie R2 et carte de la FA. Figure issue de l’article de Du et al. 2011 [50] .. 57 Figure III-11: Modifications volumétriques (VBM), de la diffusivité moyenne (MD) et de l’anisotropie fractionnelle (FA) dans la PSP. Figure issue de l’article de Lehéricy et al. 2010 [109] ............................................................................................................ 57 Figure III-12: Imagerie multimodale de l’impact de la mutation Parkin chez des porteurs sains. Figure issue de l’article de Van der Vegt et al. 2009 [209] ............... 61 Figure V-1: Coupes coronales et axiales pondérées en T2 avec les ROI de la substance noire ........................................................................................................ 70 Figure V-2: Coupes coronales et axiales pondérés en T2 avec les ROI de la NGC . 71 Figure V-3: Recalage de ROI de NGC sur image EPI .............................................. 72 Figure V-4: Recalage de ROI de la SN sur image EPI ............................................. 72 Figure VI-1: R2* et R2 chez les 4 groupes inclus dans l'étude ................................. 75 15 Table des tableaux Tableau II-1: Mutations principales en rapport avec la MP. ...................................... 23 Tableau II-2: Modifications des biomarqueurs dans les syndromes parkinsoniens en IRM quantitative ........................................................................................................ 41 Tableau III-1: Techniques de l’IRM dans la MP ........................................................ 42 Tableau III-2: Imagerie structurale dans la SN ......................................................... 47 Tableau III-3: Imagerie structurale dans les NGC ..................................................... 47 Tableau III-4: Imagerie quantitative pour l’étude de la SN ........................................ 52 Tableau III-5: Imagerie quantitative pour l’étude des NGC ....................................... 53 Tableau III-6: IRMf de repos. Connectivité fonctionnelle .......................................... 59 Tableau III-7: Activation en IRMf BOLD .................................................................... 60 Tableau III-8: Echographie transcrânienne, étude de l'échogénicité de la SN .......... 62 Tableau III-9: Volumétrie chez des sujets porteurs des mutations Parkin et LRRK2 64 Tableau III-10: Imagerie fonctionnelle chez des sujets porteurs des mutations Parkin ................................................................................................................................. 65 Tableau V-1: Mutations chez des sujets inclus dans l'étude ..................................... 67 Tableau V-2: Paramètres d'acquisition ..................................................................... 69 Tableau VI-1: Données cliniques des sujets inclus dans l'étude............................... 74 Tableau VI-2: R2 et R2* (s-1) chez les sujets inclus dans l'étude (moyennes et DS). 74 Tableau VI-3: Significativité de la différence entre les groupes de l'étude (p) .......... 75 Tableau VI-4: Corrélation des données cliniques avec des valeurs de R2* chez des patients attents de la MPI ......................................................................................... 77 Tableau VI-5: Corrélation des données cliniques avec des valeurs de R2* chez des patients atteints de la MP porteurs de mutation ........................................................ 77 16 I. Introduction La maladie de Parkinson (MP) est une maladie neurodégénérative qui atteint le plus souvent les personnes âgées et qui se manifeste par des troubles moteurs qui s’aggravent au cours du temps. La caractéristique neuropathologique principale de cette maladie est une perte des neurones dopaminergiques de la substance noire (SN) ainsi qu'une perte de ses projections au striatum. La perte des neurones dopaminergiques de la SN conduit à une altération du signal dopaminergique vers les noyaux gris et le cortex. La MP est la cause neurodégénérative la plus fréquente du syndrome parkinsonien. Les autres causes fréquentes sont la paralysie supranucléaire progressive (PSP) et l'atrophie multisystématisée (AMS). La MP idiopathique (MPI) est la cause la plus fréquente de syndrome parkinsonien, cependant, les formes familiales ne sont pas rares, même si les mutations ne sont pas identifiées dans la majorité des cas. Parmi les mutations connues les plus fréquentes sont LRRK2 et Parkin. La pathogénèse de la MP n’a pas encore été complètement élucidée. La neurodégénérescence dans la substance noire apparait pendant la phase préclinique en amont de l’apparition des symptômes. Le fer semble y jouer un rôle important, tant comme origine de neurodégénérescence que comme marqueur. La découverte de mutations génétiques à l’origine de certaines formes de la MP a mis en lumière certains mécanismes de pathogénèse de la MP, mais a aussi apporté de nouvelles questions. Notamment, nous ne savons pas si les mécanismes de l’atteinte dans la MPI et dans les MP avec des mutations génétiques sont similaires ou différents. Plusieurs techniques d’imagerie sont utilisées dans la MP. Les premiers biomarqueurs de la maladie ont étés identifiés en Tomographie par Emission de Positrons (TEP) et en Tomographie à Emission de Simple Photons (Single Photon Emission Computed Tomography ou SPECT). Plus récemment, de nombreux biomarqueurs en Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) ont été développés (Figure I-1). 17 Noyaux gris centraux Mesures voxel-voxel, épaisseur corticale, perfusion Connectivité cérébrale Anatomique : tractographie Fonctionnel : IRMf Noyaux gris centraux FA, R2*, TTM Substance noire : Volumétrie, FA, R2*, TTM, SRM Locus coeruleus Imagerie de neuromélanine Figure I-1: Techniques de l’IRM utilisées dans les études chez les sujets atteints de la MP Ces techniques sont utilisées pour le diagnostic de la MP, la surveillance de la progression de la maladie, l’analyse des effets de traitements mais aussi l’étude des mécanismes et des cibles précises des atteintes dans la maladie. Parmi les biomarqueurs IRM proposés récemment, les plus intéressants semblent ceux qui étudient la charge en fer. La mesure des taux de relaxation R2 et R2* a été corrélée histologiquement à la charge en fer, permettant une étude précise de l’accumulation du fer. Dans la MPI, il a été montré que cette charge en fer, liée étroitement à la pathogénèse, était augmentée dans la SN et selon certaines études dans d’autres noyaux gris centraux (NGC). Jusqu'à ce jour, très peu d’études IRM ont analysé des groupes de patients porteurs des mutations génétiques en rapport avec la MP. De plus aucune étude n’a analysé la charge en fer en IRM chez ces sujets. Les seules études qui ont analysé la charge en fer chez ces sujets ont été réalisées en échographie et sont à l’origine de résultats discordants. 18 L’analyse de la charge en fer chez les sujets porteurs de mutations liées à la MP permettrait de mieux comprendre le rôle du fer dans la maladie ainsi que la dynamique d’apparition de celle-ci avant le début des symptômes chez des sujets porteurs sains. D’autre part, cela permettrait de déterminer la validité des biomarqueurs IRM de la charge en fer pour tenter de mieux élucider l’atteinte clinique et préclinique de la MP. 19 II. Maladie de Parkinson A. Introduction La MP est une maladie neurodégénérative à progression lente, caractérisée par un tremblement de repos, une rigidité, une bradykinésie et une instabilité posturale [90]. L'âge moyen d'apparition de la maladie se situe autour de 60 ans et la durée d'évolution varie entre 10 et 20 ans avant la survenue du décès [175]. La MP affecte 1% de la population âgée de plus de 65 ans [105]. Même si les symptômes moteurs sont les plus nombreux et les plus précoces, ils apparaissent généralement en conjonction avec une gamme de symptômes non moteurs, tels que l’hyposmie, le déclin cognitif, des troubles de l'humeur, des douleurs, des troubles végétatifs, des hallucinations visuelles et des problèmes de sommeil [107]. Dans la plupart des cas, la MP est considérée comme idiopathique, car aucune cause spécifique de la maladie n’a été trouvée. Cependant, environ 15% des patients parkinsoniens ont un parent au premier degré atteint de la maladie. Même si chez la plupart de ces patients le mode de transmission reste inconnu [158], certains gènes et loci chromosomiques en cause ont été identifiés, dénommés PARK1-13 [20,209]. La caractéristique principale de la MP est une perte sévère des neurones des projections dopaminergiques de la SN en particulier ceux en provenance du segment ventrolatéral de la substance noire pars compacta (SNc) [28,43,65]. Cette dégénérescence entraîne la perte de l'innervation dopaminergique dans le striatum et elle est souvent accompagnée d'une atteinte prononcée des structures extranigrales [28]. La perte des neurones est corrélée à une augmentation de la charge en fer. Plusieurs hypothèses pour expliquer cette corrélation ont été proposées. Selon l'une d'elle [47], la production d'espèces activées de l'oxygène, facilitée par le fer, pourrait jouer un rôle dans les lésions et dans la mort cellulaire. La SN est la première région touchée dans la MP, mais d’autres structures comme les noyaux gris centraux (NGC), certains noyaux du tronc cérébral et le cortex peuvent être également impliqués [222]. Certaines autres maladies associées au syndrome parkinsonien peuvent également affecter la SN et les NGC et sont associés à une élévation de la concentration de fer dans ces régions [193]. 20 B. Etiologie de la Maladie de Parkinson. Formes idiopathiques et génétiques 1) Généralités La plupart des formes de la MP sont considérées comme idiopathiques, car aucune cause spécifique n’a été mise en évidence. Cependant, environ 15% des personnes atteintes ont un proche de première degré ayant développé la maladie [158]. Des travaux, portant sur l’étude des liens génétiques dans la MP, recherchent la présence de marqueurs génétiques particuliers au sein des familles, afin de déterminer si ces marqueurs sont hérités exclusivement par ceux atteints de la MP. Les marqueurs génétiques sont généralement des polymorphismes nucléotidiques simples (PNS) sur une zone d'un chromosome, qui peuvent être utilisés pour identifier un gène ou une variation génétique. Des études génétiques cherchent à déterminer si une variante génétique particulière est associée à la maladie. Si c'est le cas, un allèle, un génotype un polymorphisme ou haplotype particulier apparaît le plus souvent chez les individus affectés par la maladie [10]. Au niveau cellulaire, l'atteinte résulte de la mort des cellules dopaminergiques suivi d’un dysfonctionnement neuronal et de la dégénérescence. Parmi les mécanismes clés de la MP à la fois idiopathique et génétique on trouve la dysfonction mitochondriale et le stress oxydatif, qui conduisent à un dysfonctionnement des neurones dopaminergiques [124]. Le dysfonctionnement du système ubiquitine-protéasome, qui constitue la principale voie de repliement, et de la dégradation non lysosomale des protéines intracellulaires, pourrait aussi jouer un rôle [111], tandis que la phosphorisation anormale et la pathologie Tau peuvent également être impliqués [178]. Enfin, il faut noter que l'exposition d’une famille d’individus à un environnement commun peut également être responsable de développement de la maladie, ce qui est un facteur de confusion entre les origines génétiques et environnementales [35]. La MP est donc actuellement considérée comme le résultat d'une combinaison de facteurs génétiques et de l’influence de l'environnement, sans causalité clairement établie [178]. 21 2) Facteurs environnementaux Plusieurs types d'exposition environnementale peuvent accroître le risque de développement de la MP, ou d'autres syndromes parkinsoniens cliniquement semblables répondant à la lévodopa, sans que le diagnostic de la MP puisse être formellement posé. Les neurotoxines dopaminergiques peuvent être à l'origine de symptômes neurodégénératifs identiques à ceux de la MP, suite à une exposition aiguë ou chronique. La neurotoxine 1-méthyl-4-phényl-1,2,3,6-tétrahydropyridine (MPTP) par exemple, traverse la barrière hémato-encéphalique (BHE) sous forme ionique 1-méthyl-4-phénylpyridinium (MPP +) et est responsable de la destruction des neurones dopaminergiques de la SN [107]. Les personnes vivant dans les zones rurales soumises à l'exposition accrue à des toxines telles que les pesticides sont considérées comme à risque de développer la MP, bien que les cas restent rares et que peu de pesticides spécifiques soient mis en cause [204]. Parmi les pathogènes prouvés, on trouve l’herbicide Paraquat et le pesticide Roténone, qui ont des structures similaires au MPP+ [181]. Les toxines endogènes, provenant des perturbations métaboliques, sont également à risque[44]. Paradoxalement, des comportements généralement considérés comme nocifs, tels que le tabagisme et la consommation de caféine, semblent réduire le risque de développer la MP, même si les mécanismes responsables ne sont pas clairs [2,101,137,177]. 3) Facteurs génétiques a) Mutations identifiées Les gènes et les loci chromosomiques liés à des formes familiales de MP sont nommés PARK1-13. Ils comprennent six mutations autosomiques dominantes (AD) (PARK1, 3, 4, 5, 8, 11 et 13), quatre autosomiques récessives (AR) (PARK2, 6, 7 et 9), une liée à l'X (PARK12), et une forme avec un mode de transmission inconnu pour l'instant (PARK10). La mutation du gène codant pour l’α-synucléine (PARK1) a été la première forme AD reliée à la MP [103,162]. L'immunohistochimie a montré plus tard que l’α-synucléine agrégée en corps de Lewy est retrouvée à la fois dans les formes héréditaires et non héréditaires de la MP [196]. La fréquence des mutations observées, ainsi que leur corrélation importante avec le phénotype clinique, rend maintenant les gènes Parkin (PARK2), PINK1 (PARK6) et LRRK2 22 (PARK8) les plus pertinents cliniquement [209]. L'ensemble de ces mutations et leur retentissement sur le développement de la MP sont résumés dans le Tableau II-1 et dans la Figure II-1. PARK 1/4 PARK 2 MP Locus Gène/protéine Particularités cliniques AD 4q21-q23 SNCA Survenu précoce (40 ans), démence, (α-synucléine) espérance de vie réduite Parkin Survenu précoce (30-40 ans), évolution AR 6q25.2-q27 lente, sensibilité lévodopa ++ PARK 6 AR 1p35-p36 PINK1 (PTEN- Survenu précoce (30-40 ans), évolution induced putative lente, sensibilité lévodopa ++, symptômes kinase 1) psychiatriques fréquents Survenue précoce (30-40 ans) PARK 7 AR 1p36 DJ-1 PARK 8 AD 12q12 LRRK-2 (Leucine-rich repeat kinase 2) Tableau II-1: Mutations principales en rapport avec la MP. b) Mutation PARK 6 Des mutations dénommées PARK 6 du gène PTEN 1 (PINK1) qui codent pour la sérine/thréonine kinase mitochondriale sont à l’origine de cette forme familiale de la MP. Cette mutation AR est supposée impliquée dans le dysfonctionnement mitochondrial altérant les effets protecteurs sur la cellule [208] c) Mutation PARK2 (Parkin) Les mutations PARK2 du gène Parkin ont été retrouvées sur le locus chromosomique 6q25.2–q27. C’est l’anomalie AR monogénique la plus fréquemment liée à l’apparition précoce de la MP (dans 18–49% des cas). La prévalence est similaire quel que soit l’ethnie, et l’incidence diminue avec l’âge. Ce dernier est habituellement inférieur à 45 ans. La majorité des patients sont homozygotes mais des cas d’hétérozygotes ont également été rencontrés [217]. Donnant son nom à la mutation par abus de langage, le gène Parkin code pour une composante du complexe enzymatique multiprotéique ubiquitine/ligase (E3) lié à l’accumulation d’ubiquitine sous forme de substrat codé pour être dégradé dans le protéasome. Le 23 gène Parkin est exprimé dans les cellules neuronales. L'accumulation est supposée induire une perte cellulaire dans la SNc et le locus coeruleus (LC), mais sans les corps de Lewy associés [117]. Ce gène a également été jugé responsable d’un dysfonctionnement dopaminergique présynaptique dans le striatum [79]. De multiples variations génétiques existent, incluant les mutations, insertions et délétions [10]. d) Mutation PARK8 (LRRK2) La mutation PARK8 a été identifiée sur le locus chromosomique 12p11.2–q13.1. Le gène muté, qui possède un certain nombre de variantes, code pour l’enzyme Leucine-Rich Repeat Kinase (LRRK2). Cette enzyme, par abus de langage, a donné son nom au gène comme à la mutation [10]. La LRRK2 est une enzyme présente en grande partie dans le cytoplasme mais aussi au niveau de la membrane mitochondriale externe. Elle est supposée participer aux interactions entre les protéines et la régulation de la survie cellulaire. Le gène LRRK2 est exprimé également dans le striatum: il est donc relié au système dopaminergique [10]. La mutation LRRK2 est la cause la plus courante de la MP familiale AD, représentant près de 10% des cas [154,231]. Mais des mutations liées à LRRK2 sont aussi retrouvées dans les formes sporadiques. Cinq mutations principales ont été identifiées : R1441C⁄G⁄H, Y1699C, G2019S, I2020T, et G2385R. G2019S, la plus fréquente, est responsable de 6% des formes génétiques et de 1 à 2% des formes sporadiques. Elle est surtout fréquente dans les populations de l’Afrique du Nord et du Moyen Orient [25]. La pénétrance varie entre 17 et 85% et dépend de l’âge [217]. Le début est généralement tardif, avec un âge moyen entre 59 et 63 ans, et les phénotypes sont variables [14,209]. Dans les études autopsiques, les dépôts d’α-synucléine sont prédominants pour la mutation G2019S, tandis que pour la mutation Y1699C on observe la pathologie tau et la dégénérescence nigrale [217]. 24 Figure II-1: Physiopathologie possible de la MP e) Polymorphismes En plus de mener des investigations sur le rôle de certaines mutations génétiques contribuant au risque de la MP, la recherche s'est aussi engagée dans la détermination des conséquences fonctionnelles des polymorphismes génétiques communs sur le fonctionnement cérébral et sur la réponse au traitement. Un exemple en est le polymorphisme Val158met dans le gène catéchol-O-méthyltransférase (COMT), qui code pour les enzymes responsables de la dégradation des neurotransmetteurs, y compris la dopamine [216]. La présence de Val158met conduit à un catabolisme élevé de la dopamine, qui résulte en des niveaux synaptiques dopaminergiques bas à la suite de la libération des neurotransmetteurs [115]. Val158met a donc la capacité de réduire l'efficacité dopaminergiques dans la MP. Une amélioration des des médicaments performances motrices a effectivement été observée lorsque le médicament est administré conjointement avec des inhibiteurs de la COMT [40]. Les polymorphismes des gènes liés au métabolisme du fer (transferrine, récepteur de transferrine, frataxine, lactoferrine et HFE (pour Haemochromotosis-Related Protein) ont également été étudiés. La fréquence élevée d’un polymorphisme particulier sur l’allèle de transferrine a été mise en évidence chez les sujets atteints de la MP [27]. 25 C. Physiopathologie et régions impliquées 1) Neuropathologie La neuropathologie de la MP implique une perte de neurones dopaminergiques nigrostriataux dans la SN et leurs terminaisons dans le striatum (putamen et noyau caudé) [44] (Figure II-2). Figure II-2: Projections dopaminergiques chez le sujet normal (a) et le sujet atteint de MP (b). Figure issue de l’article de Dauer et al. 2003 [44] La SN se divise en deux parties, la SNc, plutôt médiale et la SN pars reticulata (SNr) qui est plutôt latérale [41]. La perte neuronale prédomine dans la SNc [123](Figure II-3). Les neurones dopaminergiques de la SNc se projettent vers les neurones du striatum et le noyau accumbens, qui projettent à leur tour vers le globus pallidus (GP) interne et externe ainsi que vers d'autres structures au sein des NGC [197]. 26 aire tegmentale ventrale Pédoncule cérébrale Noyau rouge SNc SNr SG périaqueducal Aqueduc cérébral Figure II-3: Noyaux mésencéphaliques (a) SN dans le plan axial (b). Figure issue de l’article de Obeso JA et al. 2008 [147] Les neurones de la SNr se projettent principalement vers les noyaux thalamiques ventraux et le cortex préfrontal et reçoivent des afférences du striatum, du GP externe et du noyau sous-thalamique (NST). Les symptômes cliniques de la MP se manifestent au-delà de 70 à 80% de perte des terminaisons nerveuses nigrostriatales [15], qui peut durer près de 5 ans [56,67,121]. Cette perte peut résulter d’une dysfonction mitochondriale, de la toxicité cellulaire, de l’oxydation de dopamine ou de l’affaiblissement de la neuroprotection [199]. Les indicateurs de dysfonctionnement cellulaire ont commencé à émerger, par exemple l'activation de microglie responsable du contrôle immunitaire [151,152]. Une autre caractéristique de la MP est la présence des corps de Lewy et neurites trouvés en post-mortem. Ce sont des agrégats filamenteux intracytoplasmique comprenant principalement l’α-synucléine. Ils se développent à l'intérieur des neurones dans le cortex, l’amygdale, le LC, le noyau vagal et dans le système nerveux périphérique [51]. Ces inclusions sont corrélées avec les symptômes non moteurs de la MP, comme la démence. Cependant elles se développent avant l’apparition des symptômes et induisent la dégénérescence dopaminergique des neurones nigrostriataux [28]. Le type des lésions semble être constant entre les individus alors que la gravité varie [28]. Une hypothèse est que les protéines incluses dans les corps de Lewy pourraient être celles qui n'ont pas réussi à se dégrader correctement, conduisant à des accumulations dans des régions telles que la SNc [75,126]. Une telle agrégation peut à son tour être responsable de la mort neuronale. 27 2) Atteinte des NGC et des autres régions Les principaux changements anatomiques et fonctionnels associés à la MP se produisent dans le mésencéphale (causés par la perte des neurones dopaminergiques), dans les NGC (causés par une désafférentation dopaminergique) et dans le cortex (liés à la réorganisation fonctionnelle) [44]. Les NGC sont un groupe de noyaux sous-corticaux composé du striatum, du GP, de la SN et du NST. Ils reçoivent leurs afférences principalement du cortex à travers le striatum. L’efférence principale est dirigée vers le thalamus, qui projette en retour vers le cortex [147](Figure II-4). Figure II-4: Organisation fonctionnelle des NGC. Figure issue de l’article de Obeso JA et al. 2008 [147] a) Substance noire La région de la SN (Figure II-5) est la plus impliquée dans la MP. Cette hypothèse est étayée par des données post-mortem qui montrent que la perte de cellules dopaminergiques prédomine dans la SNC ventrolatérale [41], tandis que la perte d’innervation dopaminergique correspondante prédomine dans le putamen postérieur [123] . 28 Figure II-5: SN sur l’image coronale T2. Figure issue de l’article de Hardy et al. 2005 [76] b) Pathologie extranigrale Chez des patients parkinsoniens, des études histologiques révèlent une vaste pathologie extranigrale, notamment dans le bulbe rachidien, dans la formation réticulée pontique, dans le complexe coeruleus-subcoeruleus et dans d'autres NGC tels que le striatum, le GP ou le thalamus (Figure II-6). Dans le cas des atteintes sévères, les lésions atteignent le néocortex. Le dysfonctionnement moteur apparaît comme résultant de la dégénérescence préférentielle dans l’aire sensorimotrice des NGC. Figure II-6: GP interne (GPi) et GP externe (GPe) sur l’image coronale T2. Figure issue de l’article de Hardy et al. 2005 [76] 29 Le NST a un rôle important dans la pathogenèse de la MP [105]. Il est impliqué dans le contrôle et le transfert de signaux neuronaux au sein des circuits cortico-sous corticaux [11]. En tant que relai essentiel dans la voie «indirecte» des NGC, le NST reçoit les afférences de l’aire motrice supplémentaire et de l’aire motrice primaire via le GP externe et envoie des efférences sur le striatum, qui à son tour régule l’activité sous-corticale et, finalement, la fonction motrice [46]. Il reçoit également des afférences corticales directes par la voie « hyperdirecte ». Le NST est également impliqué dans divers aspects du développement cognitif et dans le traitement des émotions [120] . c) Noyaux gris centraux et circuits thalamo-corticaux Un certain nombre de modèles ont été proposés pour décrire les liens entre les NGC et le cortex ainsi que l'implication de ces connexions dans la MP. Selon l'approche classique, l'épuisement dopaminergique a un double effet sur la connectivité corticocorticale, en facilitant l'activité des neurones par la voie indirecte (par l'intermédiaire du GPe et du NST) et en l’inhibant par la voie directe (par GPi / SNr) [11]. d) Stress oxydatif et rôle du fer dans la pathogénèse La majorité des études s'accorde sur le rôle clé du fer dans la pathogenèse de la MP. Cependant son rôle précis dans la neurodégénérescence reste discuté, car il peut en être la cause mais aussi apparaître en conséquence de la mort cellulaire. De plus la régulation du fer peut être altérée à différents niveaux. Double origine du stress oxydatif. La physiopathologie de la neurodégénérescence dans la MP est étroitement liée au stress oxydatif induit par les dysfonctionnements protéiques et mitochondriaux qui peuvent être favorisés par l'accumulation de fer. D’autre part le stress oxydatif résulte dans la mort cellulaire qui peut induire l'accumulation du fer [98]. Les dysfonctions protéasomique et lysosomique sont également rapportées dans la MP [112]. Dysfonctionnement protéique. De nombreux auteurs ont tenté d'expliquer l'augmentation de la charge en fer chez les patients atteints de la MP. L'accumulation du fer pourrait résulter de l'altération de l'expression et du fonctionnement des protéines liées à son métabolisme [86,98]. Ces anomalies protéiques peuvent intervenir lors des différentes étapes du métabolisme du fer tels que la fixation, le transport, le stockage, le catabolisme intracellulaire, et la régulation globale [128]. 30 Dégradation de dopamine. La vulnérabilité de la SN est en grande partie liée à la présence de dopamine qui peut être dégradée de façon enzymatique par la monoamine oxydase (MAO) ou de façon non enzymatique. Cette dégradation entraîne la formation de peroxyde d'hydrogène (H2O2) qui a son tour peut être réduit en eau par la glutathion peroxydase utilisant le glutathion sous forme réduite (GSH). L’H2O2 non réduit peut être transformé en radicaux libres hydroxyle HO•, lors d’une réaction qui est catalysée par le fer. Le fer accélère également la dégradation non enzymatique de la dopamine à l'origine de l'augmentation du niveau de peroxydation lipidique et d'oxydation de l'ADN. L'ensemble de ces processus est à l'origine du stress oxydatif [86,98]. Ferritine et transferrine. La concentration en fer est contrôlée par la ferritine et par le récepteur de transferrine. La majorité du fer est fixé à la ferritine, avec une fraction restant libre. L’augmentation des récepteurs de la transferrine et la baisse de la ferritine augmentent cette fraction libre [86]. Les niveaux de ferritine et de récepteurs de transferrine dépendent d’un contrôle pré et post-transcriptionnel exercé par les protéines IRP1 et 2 (pour Iron Regulation Protein). Dans le cas d’un niveau élevé de fer, IRP1 est inactivé et IRP2 dégradé dans le protéasome [86,98] Dans une situation physiologique le stress oxydatif induit une augmentation de la ferritine, une diminution des récepteurs de la transferrine et l’inactivation de l’IRP entraînant une baisse du niveau de fer [34]. Cependant, comme il a été observé dans les modèles animaux et chez des patients dans le cas de dysfonctionnements du contrôle physiologique du stress oxydatif, des niveaux élevés de H2O2 et de fer induisent l’activation paradoxale de IRP1 [55,144] (Figure II-7). Le manque de régulation de l'expression de la ferritine peut être à l’origine de l’accumulation de fer au niveau de la microglie secondaire à la phagocytose des neurones dopaminergiques [86,87]. Il n’a pas été prouvé que la surexpression de transferrine était impliquée dans la pathogénèse de la MP [54,140]. 31 surcharge en fer ↘ récepteur de transferrine ↗ ferritine Activation de la IRP-1 stress oxydatif Mitochondrie : ↘ SDH ↘ Aconitase ↘ Complexe I Faible production d’énergie ↗ fer libre Mort cellulaire Figure II-7: Altération de l'homéostasie du métabolisme du fer dans le cas de surcharge en fer. Figure adaptée à partir de l’article de Kaur et al. 2004 [98] Lactoferrine. La lactoferrine présente une affinité élevée avec le fer et traverse le BHE sous forme libre ou saturée en fer. L’expression de son récepteur n’est pas contrôlée par le niveau de fer intracellulaire [13]. Les études ont montré la surexpression de la lactoferrine et de ses récepteurs dans la SN chez les patients atteints de la MP, ce qui rend cette protéine également responsable de la charge en fer [86]. Le dysfonctionnement mitochondrial. Le dysfonctionnement mitochondrial a également un rôle dans la pathogenèse de la MP. Le complexe IRP-IRE (Iron Response Elements) contrôle l’expression mitochondriale du complexe I, de l’aconitase mitochondriale et de la succinate déshydrogénase. Dans le cas de l’activation paradoxale de IRP1 dans la MP, l’ensemble de ces 3 enzymes est sous exprimé, induisant une déplétion énergétique. De plus, la baisse du complexe I est mise en cause dans le relargage des radicaux libres par la mitochondrie, ce qui entretient le stress oxydatif et favorise la neurodégénérescence. 32 Grâce aux connaissances sur les mutations génétiques à l’origine de la MP, de nouveaux modèles de dysfonctionnement mitochondrial dans la MP émergent. Dans ces modèles la fixation de PINK1 dans la membrane mitochondriale est suivie par sa phosphorylation, puis par la fixation de Parkin qui induit l’ubiquitination et ensuite la dégradation des substrats de la membrane mitochondriale dans le protéasome, ce qui conduit enfin à la dégradation de l’ensemble de la mitochondrie dans le lysosome (Figure II-8) [112]. Il reste à savoir si ce mécanisme de dégradation est altéré dans les formes sporadiques en dehors des mutations de Parkin ou PINK1. Parkin Mitochondrie Parkin PINK1 Membrane mitochondriale P P PINK1 PINK1 P P substrat Mitochondrie proteasome substrat Mitochondrie Lysosome Mitochondrie Figure II-8: Mécanisme physiologique de la dégradation de mitochondrie dans le lysosome. Figure adaptée à partir de l’article de Lin et al. 2013 [112] Accumulation d'α-synucléine. La surcharge en fer favorise également l’agrégation d’α-synucléine dans les corps de Lewy [77,192,209]. L’accumulation d’α-synucléine est liée à la défaillance du système de réparation cellulaire [112]. A son tour l’accumulation d’α-synucléine peut interagir avec le protéasome en inhibant sa fonction ainsi que la macro-autophagie au niveau du lysosome. e) Rôle des mutations A ce jour peu il y a peu de connaissances sur la physiopathologie particulière de développement de la maladie dans les formes génétiques de MP et les études ne sont pas toujours concordantes. LRRK2 : La mutation LRRK2, exprimée préférentiellement au niveau des neurones dopaminergiques, altère le mécanisme de phosphorylation, induisant un 33 dysfonctionnement dans la chaine du métabolisme protéique intracellulaire [14]. Son rôle exact dans la pathogénèse de la MP n’est pas encore élucidé. Chez des sujets porteurs de la mutation LRRK2, les dépôts d’α-synucléine dans les corps de Lewy semblent prédominants. Toutefois dans les mutations G2019S et Y1699C, l’accumulation de protéine tau et la dégénérescence nigrale pure ont également été retrouvées. Des dépôts d’ubiquitine ont aussi été signalés, notamment dans la forme N1437H [164]. La perte neuronale et la gliose sont fréquemment observées avec LRRK2. Parkin : Chez des sujets porteurs de la mutation Parkin, contrairement à ce que l’on observe dans la MPI, l’atteinte prédominante est liée à l’accumulation d’ubiquitine, mais l’accumulation de la protéine tau dans les NGC a également été retrouvée [18]. Le dysfonctionnement de protéine ligase (E3) est supposé être à l’origine de la défaillance du système de régulation protéasomique et de l’autophagie. La mutation Parkin résulte donc en une accumulation des divers substrats autant solubles (normalement dégradés dans le protéasome) que sous forme d’agrégats (normalement dégradés dans le lysosome). Les voies principales de la pathogenèse étudiées actuellement dans l’atteinte Parkin sont d’une part l’atteinte du complexe ubiquitine-protéasome et d’autre part le défaut d’autophagie des mitochondries défaillantes [112]. Chez ces sujets les dépôts de fer dans la SN constatés dans les études autopsiques sont plus importants que chez des sujets atteints de MPI, mais aussi plus diffus contrairement à leur distribution dans la MPI qui prédomine dans la partie médiale et intermédiaire de la SN. L’accumulation de fer dans les nérites est aussi plus importante que dans la MPI [202]. Le stress oxydatif chez les sujets atteints de la mutation semble donc jouer un rôle particulièrement important [202]. Les études histologiques montrent une accumulation importante en fer avec des dépôts dans la SN plus diffus que dans le cas de la MP, ainsi que des dépôts au niveau des neurites pouvant faire suspecter quelques différences dans les mécanismes physiopathologiques [202]. En histologie la dégénérescence nigrale, les inclusions d’ubiquitine et les dépôts de protéine tau sont retrouvés dans les cas des deux mutations. Les lésions histologiques sont hétérogènes et peuvent varier même au sein de la même famille. Les corps de Lewy jouent probablement un rôle important dans le cas de la mutation LRRK2, mais ce rôle est également retrouvé chez certains sujets porteurs de la 34 mutation Parkin. Comme expliqué précédemment le fer semble être impliqué dans l'agrégation d’α-synucléine dans les corps de Lewy [192,209]. Les dépôts de protéine tau retrouvés dans les formes génétiques ne sont pas présents dans la MPI, cependant on ne sait pas si ces dépôts et la charge en fer peuvent suggérer des différences de développement physiopathologique [17]. Globalement, laphysiopathologie de la mutation LRRK2 serait plutôt liée à une accumulation toxique des métabolites qui n’ont pas pu être dégradées en raison du défaut de phosphorylation alors que dans la mutation Parkin elle serait plutôt liée à une perte des mécanismes de protection cellulaire. Les conséquences sont cependant communes entre les porteurs des deux types de mutations et les malades atteints de la MPI avec une mort des cellules nigrostriées et un dysfonctionnement nigrostiatal. Certaines mutations permettent d’éclairer la physiopathologie de la MP. Ainsi la perte de fonction du gène codant pour l’ATPase lysosomal de type P (ATP13A2) à l’origine d’une forme juvénile de la MP démontre le rôle important du lysosome dans la pathogénèse [168]. Les sujets asymptomatiques porteurs de mutations présentent un intérêt particulier pour la compréhension de la physiopathologie notamment concernant la phase qui sépare le début de la dégénérescence des neurones dopaminergiques et l’apparition des symptômes. Une durée longue de cette phase suggère qu’il existe un potentiel cérébral important permettant de compenser la dégénérescence nigrostriatale sur une durée de temps qui reste inconnue [18]. L’étude de ces individus pourrait permettre de mieux comprendre la physiopathologie de la MP. D. Diagnostic Clinique de la Maladie de Parkinson 1) Généralités Le diagnostic clinique de la MP est difficile, surtout au stade précoce, notamment parce que les symptômes moteurs et non moteurs sont parfois semblables aux processus de vieillissement normal ou aux autres causes de syndrome parkinsonien [12]. En effet, il n’existe actuellement aucun marqueur clinique ou para-clinique permettant de faire avec certitude la distinction entre ces différents syndromes 35 parkinsoniens du vivant du patient et le diagnostic de certitude de la MP ne peut se faire par autopsie. Cependant l’analyse clinique de séries rétrospectives avec vérification neuropathologique a permis d’élaborer les critères diagnostiques de la MP. Les signes cliniques principaux de la MP sont les trois signes cardinaux du syndrome parkinsonien, à savoir le tremblement de repos, la bradykinésie et la rigidité, auxquels s’ajoutent le début asymétrique, l’absence de signes atypiques et l’absence d’autre étiologie. L'ensemble de ces signes a une valeur prédictive positive (VPP) de 90 %. Une réponse clinique marquée à la lévodopa donne une VPP de 78 % [232]. Les signes atypiques principaux qui font suspecter une atteinte autre que la MP, surtout en début de maladie, sont le syndrome cérébelleux, le syndrome pyramidal, les hallucinations visuelles, la dysphagie ou la dysarthrie précoce, la dysautonomie précoce, l'instabilité posturale, les chutes précoces et les troubles de l’oculomotricité [90]. Les symptômes non moteurs surviennent habituellement à un stade plus tardif de la maladie et sont résistants au traitement par lévodopa. Les plus fréquents sont la dépression, l'apathie, la démence, les hallucinations, les symptômes dysautonomiques et les troubles du sommeil [38,134,135]. Le diagnostic de MPI peut être remis en cause à tout moment. Il est à adapter aux caractéristiques évolutives de la maladie et peut se faire en 3 étapes, dont les signes les plus importants sont : Au début de la phase symptomatique : o la présence du tremblement de repos o l’asymétrie initiale des symptômes o l’absence de signes atypiques et d’autres étiologies Après un délai de 3 à 5 ans : o la réponse pharmacologique avec une amélioration des symptômes supérieure à 50 % selon le score moteur de l’Unified Parkinson’s Disease Rating Scale (UPDRS) en utilisant un traitement dopaminergique à doses suffisantes. 36 Après une dizaine d’années d’évolution : o la réponse pharmacologique positive o des dyskinésies et de fluctuations motrices Plusieurs échelles cliniques sont utilisées pour évaluer la MP. Parmi elles les plus utilisés sont : l’échelle d’évaluation globale : échelle de Hoehn et Yahr, permettant de classer la maladie en différents stades [66], les échelles d’évaluation analytique qui permettent de quantifier le handicap [215], les échelles fonctionnelles qui permettent de mesurer les conséquences de MP sur les activités quotidiennes telles que l’échelle de Schwab et England, PDQ-39 (Parkinson Disease Questionnary) et sa version abrégée PDQ-8 ou PDQL-37 [88,93,167], les échelles multi-dimensionnelles : principalement l’UPDRS qui est divisée en 6 sections [233] : o état mental, comportemental et thymique, o activités de la vie quotidienne (ON/OFF), o examen moteur (ON/OFF), o complications du traitement (dyskinésies, fluctuations, dysautonomie), o stades de Hoehn et Yahr, o échelle de Schwab et England 2) Particularités des formes génétiques Les études ont montré que les patients atteints de MP induite par la mutation Parkin n’étaient pas cliniquement différentiables des patients atteints de la MPI avec un début précoce [14,113]. Ainsi les symptômes tels que la dysautonomie, l’hypotension orthostatique et l’incontinence urinaire, sont aussi rares chez les patients avec MP porteurs de mutation Parkin que chez les patients avec MPI à début précoce. Les autres symptômes comme l’anxiété, la dépression et les troubles obsessionnels 37 compulsifs, bien que plus fréquents chez ces patients porteurs de Parkin, peuvent également être liés au début précoce de l’atteinte [18]. En revanche, ces patients se différencient de ceux atteints de MPI par une évolution plus lente, et une survenue plus rare de la démence. Chez les patients atteints de la MP induite par la mutation LRRK2, les signes cliniques principaux sont aussi identiques à ceux de la MPI. Selon certaines études des troubles du sommeil semblent être plus fréquents chez des patients avec la mutation LRRK2 (85% contre 45 à 70% chez des patients avec MPI). Les hallucinations et démences sont très rares chez ces patients [14]. E. Traitement 1) Généralités Il n’existe pas de traitement curatif de la MP. En revanche il existe en revanche de nombreux traitements symptomatiques. Le principal est le traitement de substitution par lévodopa qui soulage les symptômes moteurs, mais qui induit à long terme des complications motrices telles que les fluctuations motrices et les dyskinésies. La stratégie classique pour le traitement implique une approche progressive fondée sur la gravité de la maladie. Le consensus actuel consiste à commencer par les agonistes de la dopamine, puis, après diminution de leur efficacité, à poursuivre par un traitement par lévodopa. Quand les fluctuations motrices et la dyskinésie ne sont pas contrôlées par les médicaments, les thérapeutiques chirurgicales avec stimulation cérébrale profonde peuvent être envisagées. Développée en 1968, la thérapie par la lévodopa qui effectue le remplacement de la dopamine est de loin la plus efficace dans le traitement de la MP. Ce médicament améliore la fonction motrice, ralentit la progression de l'invalidité et réduit la mortalité [161]. Il est également bien toléré par les personnes âgées [145]. Même si les mécanismes exacts ne sont pas clairs, les études d’IRM fonctionnelle (IRMf) suggèrent que la lévodopa réduit les déficiences de la capacité d’initiation motrice impliquant la région sensorimotrice et diminue l’hyperfonctionnement du cortex latéral prémoteur et du cortex moteur primaire [78]. Après une période de quelques années d’utilisation de lévodopa des complications motrices peuvent apparaitre [102]. La 38 demi-vie du médicament est d'environ 1 à 3 heures ; elle peut être augmentée légèrement avec l'addition d'inhibiteurs de la COMT (par exemple, l'entacapone ou tolcapone) [160] ou avec des inhibiteurs de la monoamine oxydase B (MAOB) tels que la rasagiline [170]. Une alternative au traitement par la lévodopa est possible en utilisant des agonistes de la dopamine (par exemple, le ropinirole, le pramipexole) qui augmentent le niveau de dopamine cérébrale. L’introduction initiale de ce traitement permet de retarder l’apparition des fluctuations motrices et des dyskinésies [84]. Bien que la lévodopa et les agonistes de la dopamine traitent les symptômes parkinsoniens, ils ne ralentissent pas la dégénérescence neuronale sous-jacente [44]. La stimulation cérébrale profonde peut être utilisée chez certains patients sensibles à la lévodopa mais avec une fonction motrice qui reste altérée [139]. La procédure consiste en l'implantation d’électrodes dans les noyaux sous-corticaux. La stimulation concerne le plus souvent le NST et permet d’augmenter son activité efférente qui a son tour augmente l’activité thalamique et diminue l’activité corticale [83]. Des impulsions à haute fréquence sont alors appliquées à partir d'un stimulateur, entraînant une réduction de l'akinésie. L'implantation d'électrodes est également utile pour l'enregistrement de structures sous-corticales d'intérêt [116]. Une série d'autres traitements ont montré des résultats prometteurs dans le traitement des symptômes de la MP, mais aucun n'a la même efficacité que les traitements dopaminergiques et la stimulation cérébrale profonde. L'adénosine A2A, est un médicament non-dopaminergique qui a pour objectif de rétablir l'équilibre des connexions au sein des NGC, en ciblant les récepteurs de l'adénosine sur les neurones [58]. La thérapie génique est également explorée dans le but de restaurer la capacité de production de dopamine naturelle via la synthèse enzymatique. Les gènes sont introduits dans les NGC via des vecteurs viraux tels que la décarboxylase d'acide aminé (AAAD) [190]. La thérapie génique a également le potentiel d'accroître l'efficacité de la conversion de la lévodopa en dopamine dans le striatum [210]. La recherche concernant des traitements agissant sur la neuroprotection dans la MP a jusqu'ici échoué [183]. 39 2) Particularités chez les patients porteurs de mutations Il existe une différence de réponse au traitement entre les patients atteints de MPI et les patients présentant une forme génétique. Chez des patients porteurs de la mutation Parkin, les doses de lévodopa nécessaires sont moindres et l’apparition des fluctuations est plus tardive [113]. Cependant ces patients présentent davantage de dyskinésies et de dystonies induites par la lévodopa. F. Diagnostics différentiels du syndrome parkinsonien Tandis que la MP représente environ 80% des cas de syndrome parkinsonien, les autres troubles les plus fréquents sont la PSP et l’AMS [232]. La distinction clinique entre la MP et les autres syndromes parkinsoniens est parfois difficile [232]. La PSP a une prévalence de 4,9/100.000 et représente environ 5 % des syndromes parkinsoniens [232]. Elle est diagnostiquée en moyenne après 3 ans d'évolution avec une survie moyenne de 6 ans [232]. Les critères diagnostiques avec la meilleure VPP sont une atteinte de la verticalité des mouvements oculaires et une instabilité posturale avec chutes précoces [193]. Les signes plus rares sont un syndrome parkinsonien à prédominance axiale, la dysarthrie, le syndrome sous-cortico-frontal, la dystonie du cou, et des troubles de la déglutition avec fausses routes [232] . Les AMS sont des affections neuro-dégénératives généralement sporadiques d’évolution progressive et d’étiologie inconnue. L’âge moyen de survenue est autour de 50 ans et la survie est en moyenne de 9,3 ans [232]. Les AMS regroupent actuellement sous un même nom la dégénérescence strionigrale, l’atrophie olivoponto-cérébelleuse sporadique, la maladie de Shy-Drager et l’hypotension orthostatique idiopathique [232]. Les deux grands groupes qui se distinguent selon les signes cliniques sont l’AMS-C (AMS avec atteinte clinique prédominante au niveau du cervelet) et l’AMS-P (AMS avec une prédominance de syndrome parkinsonien) [193] Le tableau clinique complet se traduit habituellement par la combinaison de signes parkinsoniens, dysautonomiques (hypotension orthostatique et troubles génito-sphinctériens), cérébelleux et pyramidaux [193]. L’association d’un syndrome parkinsonien qui répond peu ou pas à la lévodopa avec une dysautonomie précoce et sévère, en l’absence de troubles cognitifs, possède une VPP forte [232]. 40 Les examens complémentaires pouvant apporter de l’aide au diagnostic. Dans le cas de la PSP l’enregistrement des mouvements oculaires est utile surtout pour objectiver un ralentissement des saccades (mouvements oculaires rapides volontaires) verticales et horizontales tandis que les tests neuropsychologiques permettent de révéler ou de confirmer l’existence d’un syndrome sous-cortico-frontal, éventuellement accompagné de troubles mnésiques. Dans le cas de l’AMS les explorations uro-dynamiques permettent d’objectiver une hypoactivité du détrusor (contrairement à ce qui est observé dans la MPI) et une diminution de la compliance vésicale [232]. Les anomalies du sphincter de l’urètre vues sur électromyogramme (EMG) sont souvent précoces et ont aussi une grande valeur diagnostique, mais cet examen n’est pas réalisé en pratique courante. L'IRM présente un grand intérêt diagnostique devant le manque de spécificité des signes cliniques et paracliniques. Elle a montré une bonne sensibilité et une spécificité pour distinguer la MP d'autres syndromes parkinsoniens tels que la PSP et l’AMS[146,156,165,174]. Les différences d’atteinte cérébrales entre la MP, la PSP et les AMS sont résumées dans le Tableau II-2. Localisation des changements MP PSP AMS Cortex/substance blanche +/- + + + ++ ++ + Putamen Mésencéphale SN ++ Pont Pédoncules cérébelleux Sup Moyenne Tableau II-2: Modifications des biomarqueurs dans les syndromes parkinsoniens en IRM quantitative 41 III. Biomarqueurs en neuro-imagerie et leurs applications De nombreuses séquences IRM ont été utilisées pour rechercher des biomarqueurs permettant de détecter les changements cérébraux chez des patients atteints de la MP et leur lien avec les symptômes parkinsoniens (Tableau III-1). Techniques Structurale Imagerie pondéré en T1, T2, IR, TM Information Morphométrie Changements dans la MP SN: changements du volume Cortex: diminution modérée du volume et de l'épaisseur corticale Spin-écho pondéré en T1 Imagerie avec (MT) et sans (M0), pulse TM Présence de cellules chargées en mélanine Degré de myélinisation, densité axonale Relaxometrie Mesures T2/T2* Fer intra-cérébral T2/T2* diminué R2/R2* augmenté Imagerie de susceptibilité Imagerie de phase Fer intra-cérébral Susceptibilité augmentée en rapport avec la charge en fer Neuromélanine Transfert de magnétisation DTI Diffusion Tractographie DTI Fonctionnelle IRMf de repos 1 H SRM Spectroscopie 31 Imagerie de Perfusion P SRM Diffusion de l'eau dans les tissues biologiques Reconstruction des fibres Connectivité fonctionnelle des réseaux neuronaux NAA, Cho, mIns, GABA, Glx, GSH, lactate Métabolisme énergétiques : ADP, PCr/ATP ASL rCBF Intensité de signal diminuée Taux de TM diminué (TTM=M0-MT/M0) FA diminuée Probabilité de connexion diminuée CF réduite dans le cortex sensorimoteur CF augmenté dans le cortex associatif Baisse des métabolites Baisse de l'ATP dans le mésencéphale rCBF diminué dans le cortex Variable dans le NGC Tableau III-1: Techniques de l’IRM dans la MP 42 A. Imagerie structurale 1) Techniques d’imagerie a) Imagerie pondérée en T1 et en T2 Les séquences classiques tridimensionnelles pondérées en T1 (3D T1) présentent un bon contraste entre la substance grise (SG) et la substance blanche (SB) permettant de visualiser le cortex et quelques NGC mais manquent de contraste dans de nombreuses structures d'intérêt dans la MP (SN, STN, GP, noyau rouge). Ces dernières structures contiennent des niveaux élevés de fer, qui raccourcit le temps de relaxation T1 et donc abaisse le contraste [76] (figure III-1). Cependant sur les séquences pondérées en T2 et T2*, cette charge en fer offre un meilleur contraste en raccourcissant le T2 (Figure III-1). Les structures chargées en fer apparaissent alors en hyposignal. L'anatomie du cortex est généralement mieux représentée en utilisant des séquences pondérées en T13D qui ont un bon contraste SG/SB. Figure III-1: Images Coronales T1 et T2 b) Techniques avancées La visualisation de la SN, du NST ainsi que des NGC peut être également améliorée grâce aux séquences en Transfert de Magnétisation (TM) [81], à l’imagerie de susceptibilité magnétique (SWI) [70], à des séquences sensibles à la neuromélanine [53], ou à diverses séquences telles que celles en inversion-récupération (IR) ou pondérées en densité de proton [91,133]. 43 Les techniques sensibles à la neuromélanine (pigment produit dans les neurones noradrénergiques dans le SNc et le LC [8,226] sont basées sur les effets paramagnétiques de la neuromélanine raccourcissant le T1 lorsqu'elle est combinée à des métaux tels que le fer et le cuivre [53]. Le TM améliore le contraste entre la SN et la SB, permettant de mieux délimiter la structure [82,127]. Enfin, l'augmentation du champ magnétique et notamment l'utilisation de très haut champ (7T) permet non seulement d'augmenter la résolution spatiale mais aussi d'améliorer le contraste et de mieux visualiser des contours des NGC (Figure III-2). Le volume et le contraste des NGC dépendent du contraste IRM utilisé pour la mesure [149]. Figure III-2: Images pondérés en T2 à 7T dans le plan coronal (A) et axial (B) permettant de visualiser la SN en hyposignal franc. Figure issue de l’article de Lehéricy et al. 2012 [110] c) Les régions d'intérêt Les NGC sont segmentés en régions d'intérêt (ROI). Des structures telles que le striatum, le GP ou le thalamus peuvent être segmentées en utilisant un logiciel automatisé [42,122] (Figure III-3), tandis que les structures plus petites, comme les NST ou la SN sont généralement segmentées manuellement (Figure III-4). 44 A B n. caudé putamen pallidum thalamus C D Figure III-3: ROI de NGC sur T1 3D (A, B coupes axiales ; C, D coupes coronales) Figure III-4: SN et STN sur T2 3D (coupes coronales) 45 Les techniques basées sur le tenseur de diffusion sont utilisées pour segmenter le striatum, la SN et le thalamus dans les régions sensorimotrice, associative et les régions limbiques selon leurs connexions avec le cortex [9,108,127], ce qui permet d’obtenir des informations sur les différences de forme. La segmentation manuelle nécessite une formation préalable de l'examinateur et ses limites comprennent l’imprécision dans la définition des contours ainsi qu’un manque de fiabilité inter- et intra-observateur. d) Morphométrie voxel à voxel La méthode de morphométrie voxel à voxel (VBM pour voxel based morphometry) permet d'obtenir des informations sur le volume, la densité et la concentration de la SG. Elle est sensible aux différences structurelles de SB, SG et liquide céphalorachidien (LCR)[95]. La VBM propose une analyse statistique de l'ensemble du cerveau: cette méthode est automatique et indépendante des compétences de l'observateur. e) L'épaisseur corticale et la forme Grâce aux mesures de l'épaisseur corticale [42,59,119], on peut obtenir des informations sur les caractéristiques topographiques du cortex telles que l'épaisseur, la surface et la forme de celui-ci. Ces mesures sont spécifiques d’une région, de sorte que les images du cortex sont subdivisées en parcelles basées sur les gyri avec une segmentation corticale associée [42,59,119]. Les caractéristiques de forme sont extraites en utilisant les harmoniques sphériques, l'approche paramétrique des limites de structure [64,198] ou des moments invariants [201] . 2) Applications à la MP a) La substance noire Les conclusions sur le volume de SN, mesuré habituellement avec segmentation manuelle, sont variables selon les études : ce volume serait normal [149,159], réduit [91,127,133] ou encore augmenté [39,104] (Tableau III-2). Cette variabilité peut être liée aux différences de méthodes de mesure et de contraste selon le type de séquence et l’intensité du champ magnétique. En séquence d’inversion-récupération 46 à temps d’inversion court (STIR pour Short Tau Inversion Recovery) il a été observé que l’atteinte prédominait sur les segments caudaux et latéraux de la SN [91,133], correspondant aux zones de dégénérescence préférentielle observées dans les études histologiques [171]. Une augmentation du volume de la SN a été observée en utilisant l'imagerie 7T qui peut s'expliquer par la présence d’une charge en fer prédominant dans les région dorso-ventrales entraînant une augmentation de la taille de la structure en IRM [167]. En utilisant la technique sensible à la neuromélanine, une réduction en intensité du signal a été observée dans la SNc de patients parkinsoniens, ce qui suggère l'épuisement des neurones contenant la neuromélanine [182]. Dans l'ensemble, la reproductibilité entre les différentes études parait faible. Imagerie structurale ↘ Hitchincson et al., 2003 ; Raff et al., 2006 ; Minati et al., 2006 ; Menke et al., 2009 ; Adachi et al., 1999 = Oikawa et al., 2002 ; Peran et al., 2010 ≠ Hitchincson et al., 2003 ; Raff et al., 2006 ; Michaeli et al., 2007 ; Cho et al., 2011 ; Kwon et al., 2012 ; Oikawa et al., 2002 Volume SN Forme Tableau III-2: Imagerie structurale dans la SN b) Autres noyaux gris centraux La majorité des études n'ont pas trouvé d’anomalie des NGC [26,146,156], à l’exception de quelques études qui ont montré des variations des volumes de certaines de ces régions (Tableau III-3). NGC NGC Imagerie structurale Oba et al., 2005; Paviour et al. 2006 Volume = Striatum Volume ↗ Binkofski F et al., 2007 Putamen Volume ↘ Geng et al., 2006 ; Summerfield C et al. 2005 ; Alegret et al., 2001 Pallidum Volume ↘ ↘ ↗ Geng et al. 2006 Thalamus Volume Volume Tableau III-3: Imagerie structurale dans les NGC Summerfield C et al. 2005 Cardoso et al. 2009 47 L’imagerie sensible à la neuromélanine a montré une réduction de l'intensité du signal dans le LC de patients parkinsoniens par rapport aux témoins [99,182,191] ce qui peut refléter la perte de neurones riches en neuromélanine ou une diminution de la concentration intracellulaire en neuromélanine. La réduction de l'intensité du signal dans la zone du locus coeruleus/subcoeruleus est corrélée avec la perte d’atonie lors du sommeil rapides, suggérant que le LC est impliqué dans la physiopathologie des troubles du comportement pendant le sommeil [63] . c) Les modèles de l’atrophie corticale Les méthodes volumétriques retrouvent souvent peu d’anomalies corticales chez les patients parkinsoniens sans anomalie cognitive [57,130,156,176,186]. Cependant, une diminution du volume cortical ou de l’épaisseur a parfois été observée, principalement dans les régions frontales [22,33,97], notamment préfrontale [200], mais aussi dans d’autre régions corticales [96,118,129,205]. Une atrophie isolée du tronc cérébral a été également signalée [156]. 3) Diagnostics différentiels Les études volumétriques contribuent à différencier la MP, l’AMS et la PSP, surtout à leur stade précoce. Les changements structurels chez des sujets atteints de PSP et d’AMS sont plus prononcés comparativement à la MP [146,156,165,174]. B. Imagerie quantitative Les méthodes quantitatives en IRM sont de plus en plus utilisées pour étudier les propriétés physiques de l'eau qui génèrent le contraste IRM fournissant ainsi des marqueurs qui caractérisent les propriétés tissulaires cérébrales. Les paramètres, tels que le temps de relaxation, le taux de transfert de magnétisation (TTM) et les paramètres de diffusion, comme l'anisotropie fractionnelle (FA pour Fractional Anisotropy) et la diffusivité moyenne (MD pour Mean Diffusivity), peuvent être utilisés pour le diagnostic, le pronostic et le suivi de la progression de la maladie. En dépit de leur grande sensibilité aux modifications des tissus, la FA et la MD ne sont cependant pas spécifiques des modifications micro-structurelles des tissus, et par conséquent donnent un aperçu limité de la physiopathologie. 48 1) Mesure de la surcharge en fer: relaxométrie et SWI a) Technique La charge en fer peut être estimée en utilisant les temps de relaxation T2* et T2 et plus récemment les séquences en susceptibilité magnétique (SWI pour susceptibilityweighted imaging). Le temps de relaxation T2 reflète la vitesse de décroissance de la magnétisation transversale après une excitation par une onde radio-fréquence (RF). Le temps de relaxation transversale apparent T2* reflète la contribution des éléments macroscopiques (tels que les interfaces tissulaires) et microscopiques (liés à la microstructure du tissu) à l’inhomogénéité du champ magnétique. Les taux de relaxation R1 et R2 sont respectivement égaux à 1/T1 et 1/T2 respectivement. Les structures riches en fer apparaissent hypointenses sur les séquences pondérés en T2 et T2*, et présentent une augmentation des taux de relaxation R2 et R2*. Ces taux permettent une estimation non invasive de la charge en fer. Les meilleurs résultats étant obtenus en utilisant le R2* [76,106,150] (Figure III-5). Figure III-5: Relaxométrie : mesures de temps de relaxation T1, T2, T2*. Figure issue de l’article de Lehéricy et al. 2012 [110] 49 Corrélations entre R2 et R2* et charge en fer Plusieurs études ont montré l’existence d’une corrélation entre la charge en fer et les taux de relaxation R2 et R2* [76,106]. Ces études ont été réalisées sur des cerveaux sains, puis ces taux ont été utilisés comme mesures non invasives de fer dans la MPI. Aucune étude utilisant les R2* et R2 n’a été réalisée chez des sujets atteints de la MP avec mutations génétiques à ce jour. Chez le singe : la première étude réalisée sur les cerveaux de 12 singes a montré une relation directe entre l’augmentation du taux de fer mesuré en IRM (R2 dans le GP, substance noire et cervelet) et la charge en fer histologique [76]. Il existait une bonne corrélation entre valeurs IRM et histologiques surtout pour des concentrations de fer supérieures à 150 mg/g pour lesquelles le R2 augmentait avec une sensibilité de 0,0484 ± 0,0023 s-1.mg.g-1 contre une sensibilité de 0,0013 ± 0,0073 s-1.mg.g-1 pour des concentrations plus basses [76]. Chez l’homme : une autre étude réalisée sur 7 cerveaux humains post mortem a montré une corrélation linéaire entre la charge en fer et le taux R2 et R2* a été trouvée pour l’ensemble des NGC étudiés (GP, putamen, noyau caudé, thalamus et SB), avec une corrélation plus forte pour le R2* (R2=0.9) que pour le R2, (R2=0.67) (Figure III-6). Pour la SB, où la charge en fer est moindre, seulement le R2* a montré une corrélation. Les auteurs suggèrent donc l’utilisation du R2* pour les études en vivo [106]. Figure III-6: Relation linéaire entre le R2 et R2* et le taux de fer, déterminée par la méthode de régression linéaire. Figure issue de l’article de Langkammer et al. 2010 [106] 50 Des techniques avancées Les techniques avancées telles que les séquences adiabatiques (T1ρ and T2ρ) ont permis des mesures plus précises [127,131,132] (Figure III-7). La SWI est basée sur les différences de susceptibilité magnétique entre tissus. La valeur de phase SWI est corrélée à la concentration cérébrale en fer [71,114,214]. Figure III-7: Nouvelle séquence d’IRM pour l’étude de la SN. Diminution de T2ρ (déphasage dynamique en rapport avec le nombre des neurones) et l’augmentation de T1ρ (nombre des neurones). Figure issue de l’article de Michaeli et al. 2005 [132] b) Applications à la MP La perturbation du métabolisme du fer et l'accumulation de fer dans diverses parties du cerveau font partie de la pathogenèse de la MP et des autres maladies neurodégénératives [136,226]. La SN : La charge en fer est augmentée dans la MP [47]. Les temps de relaxation T2, T2* et T2ρ diminuent, tandis que les taux de relaxation R2 et R2* augmentent [28,47,50,69,125,150,159,229]. L’augmentation du R2* prédomine dans la SNc latérale [125]. Elle est corrélée dans certaines études avec la perte de neurones dopaminergiques ainsi qu'avec un score moteur clinique élevé (UPDRS) [125]. Cependant, dans certains travaux, aucun changement du taux de relaxation R2 chez les patients parkinsoniens n’a été trouvé [132]. Dans d'autres études, des changements de R2 ont été observés uniquement dans un sous-groupe particulier [150]. Ces études sont résumées dans le Tableau III-4. 51 Imagerie quantitative : SN Relaxom -étrie T2ρ ↘ Michaeli et al., 2007 T1ρ ↗ Michaeli et al., 2007 ↗ Martin and al., 2008 ; Peran et al., 2010, Graham et al., 2000 ; Du et al., 2011 R2* = (SNr) SWI TM SRM Martin and al., 2008 Signal SWI ↘ Zhang et al., 2010 TTM ↘ Tambasco et al., 2011 ; Eckert et al., 2004 GABA ↗ Oz et al., 2006 ↘ Yoshikawa et al., 2004 ; Chan et al., 2007, Vaillancourt et al., 2009 ; Zhan et al., 2012, Peran et al., 2010 ; Du et al., 2011 = Menke et al., 2009, Menke et al., 2010 ↘ Yoshikawa et al., 2004 = Menke et al. 2010 ; Peran et al., 2010 FA Diffusion MD Chan et al., 2007 ADC = Tableau III-4: Imagerie quantitative pour l’étude de la SN Noyaux gris centraux : La plupart des études [47,150,159] ne révèlent aucune augmentation significative de R2* dans les autres NGC que la SN, ou dans le thalamus des patients parkinsoniens. Cependant, quelques recherches, en particulier celles qui utilisent la SWI [214], ont rapporté des changements de R2* dans le putamen et le GP, parfois corrélés à la sévérité des symptômes cliniques [224] (Tableau III-5). 52 Imagerie quantitative NGC R2* = Martin et al. 2008 R2 ↗ Graham et al. 2000 T2* ↘ Ye et al., 1996 R2* = Martin et al., 2008 T2* ↘ Ye et al., 1996 TTM ↘ Tambasco et al., 2011 TTM ↘ Eckert et al., 2004, Tambasco et al., 2011 - MD ↗ Peran et al. 2010 Putamen FA ↘ Yoshikawa et al., 2004, Zhan et al., 2012 FA ↘ Peran et al., 2010 Putamen Striatum Relaxo métrie Pallidum Striatum TM - Putamen Pallidum Striatum Diffusion Thalamus ↗ Peran et al., 2010 MD Tableau III-5: Imagerie quantitative pour l’étude des NGC c) Les diagnostics différentiels Chez les patients atteints de PSP une baisse des temps de relaxation T2 et T2* ont été observés dans le noyau caudé, le putamen et le GP, ce qui a permis de les différencier des patients parkinsoniens et des sujets témoins [4,24]. La présence de dépôts de fer importants chez les patients atteints d’AMS-P a été démontrée en utilisant la séquence SWI [214] ou le taux de relaxation R2* [3,24] dans le putamen et dans le noyau pulvinar du thalamus. Les patients atteints de l’AMS-P peuvent être distingués des patients atteints de MP et des sujets sains avec une bonne sensibilité et une bonne spécificité en utilisant la cartographie R2* [60] et les mesures SWI [214]. Au contraire des NGC, les mesures dans la SN ne semblent pas permettre un bon diagnostic différentiel. En effet, la surcharge en fer dans la SN étudiée avec le R2* ou la SWI est plus importante dans le groupe des patients atteints de MP et de AMS-P, mais elle n’a pas permis de différencier les deux groupes de patients [214]. Dans les cas de la PSP et de l’AMS-P, l’hypointensité putaminale sur la séquence T2* s'est avérée significativement plus importante que chez les patients parkinsoniens [3]. Enfin la SWI présente une meilleure sensibilité à la charge en fer au niveau du noyau rouge et du putamen dans la PSP [70]. 53 2) Transfert de magnétisation a) Technique L'imagerie de Transfert de Magnétisation (TM) est basée sur le transfert d'énergie entre les protons fortement liés à des macromolécules et les protons de l’eau libre [218]. Cette technique permet une évaluation quantitative du TTM: TTM = (M0-MT)/M0 où M0 et MT représentent l'intensité du signal avant et après l'impulsion de saturation respectivement [48]. Il a été suggéré que les valeurs mesurées de TM sont corrélées avec le degré de myélinisation des tissus [166] et avec la densité axonale [211]. b) Applications dans la MP Dans le cas de la MP, le TTM était diminué dans la SN, le GP, le putamen et le noyau caudé [52,99,127,203]. c) Diagnostic différentiel Dans les cas de l’AMS-P la baisse du TTM a été principalement observée dans le putamen [52] et dans le cas de la PSP au niveau du pallidum droit [60]. 3) Imagerie en diffusion a) Technique L'IRM de diffusion est une technique qui est sensible à la diffusion de l'eau dans les tissus biologiques [16]. L'IRM de diffusion fournit plusieurs indices qui caractérisent le déplacement d'ensemble de molécules (coefficient apparent de diffusion ou ADC pour Apparent Diffusion Coefficient et diffusivité moyenne ou MD pour mean diffusivity), l'orientation de la diffusion (FA) et les caractéristiques de diffusion le long de la direction principale de diffusion (diffusivité axiale ou longitudinale) et dans les directions orthogonales (diffusivité radiale ou transversale) [16] (Figure III-8). Au niveau cellulaire, l'anisotropie peut provenir de la présence d'obstacles à la diffusion en raison de structures orientées comme les membranes, la gaine de myéline, les filaments longitudinaux et le cytosquelette [16]. Les variations de diffusivité axiale pourraient refléter des lésions axonales tandis que les variations de la diffusivité 54 radiale pourraient refléter des lésions de la myéline. Même si des méthodes qui permettent de mieux caractériser les lésions des tissus cérébraux sont en cours de développement [1,5,94,228], à ce jour, l’imagerie de diffusion souffre d'un manque de spécificité et d’une mauvaise connaissance des substrats neuronaux sous jacents. B A C Figure III-8: Images paramétriques extraites de la diffusion (DTI) : diffusivité moyenne (A), anisotropie fractionnelle (B, C) b) Applications à la MP SN : Des anomalies de l’anisotropie ont été plus fréquemment retrouvées que des modifications de la diffusivité. Des études en diffusion dans la SN de patients parkinsoniens ont observé une réduction de l’anisotropie (surtout au niveau de la SN droite) même aux stades précoces de la maladie [37,50,159,207,225,227] (Figure III-9). Cette baisse d’anisotropie aux stades précoces est corrélée à la sévérité clinique [37,207,225]. Cependant dans d'autres études aucun changement de la diffusion n’a été mis en évidence [127,128,186,187]. Des changements du Kurtosis, méthode pour quantifier la diffusion non gaussienne de l’eau [94], ont également été observés [213]. 55 Figure III-9: Diminution de la FA dans la substance noire chez les patients atteints de MP. Figure issue de l’article de Chan et al. 2007 [37] NGC: Dans la plupart des études concernant la MPI, aucun changement en diffusion n’a été détecté dans le tronc cérébral, le putamen ou le noyau caudé [23,141,185] [157]. Néanmoins, quelques études ont rapporté l'augmentation de diffusivité dans le striatum et le thalamus [159,227]. Dans une étude, la MD s'est avérée plus élevée dans le putamen droit des sujets atteints de MP par rapport aux témoins, dans le noyau caudé droit et dans le thalamus [159]. Dans ce dernier cas une réduction de la FA était associée. Enfin, l’augmentation du coefficient de diffusion et la diminution de la FA dans le thalamus dorsal médial a été observée chez les patients parkinsoniens déprimés [36]. Cortex : L'utilisation de la VBM a permis d'observer une diminution significative de la trace du tenseur de diffusion (Trace D) au niveau des lobes frontaux, qui est corrélée à l’atteinte des voies olfactives [184]. Une diminution de la FA dans le cervelet a été également retrouvée chez les patients parkinsoniens [230]. c) Diagnostics différentiels Dans la PSP une augmentation de la diffusivité a été observée dans les NGC [176] [188], le mésencéphale [23,186,187], les pédoncules cérébelleux supérieurs [142] et la SB cérébrale [153]. Dans le cas de l’AMS-P, les changements comprennent une augmentation de MD et une baisse de FA dans le putamen, la protubérance et le pédoncule cérébelleux moyen [23,141,157,185]. 56 4) Multimodalité Plusieurs études ont suggéré que la combinaison de R2* et de la FA différencie mieux les personnes atteintes de la MP des sujets sains de même âge avec plus de 95% de précision [50,159] (Figure III-10). Figure III-10: Imagerie multimodale dans la SN : imagerie pondérée en T2, cartographie R2 et carte de la FA. Figure issue de l’article de Du et al. 2011 [50] Dans la PSP, l'augmentation de la diffusivité et la réduction du T2 a été fréquemment observée dans les NGC [24,176,188], dans le mésencéphale [23,186,187], dans le pédoncule cérébelleux supérieur [142] et dans la SB [148,153] (Figure III-11). En AMS-P, une MD augmentée et une FA réduite ont été trouvées dans le putamen, le pont et les pédoncules cérébelleux moyens [23,141,157,185]. Des dépôts de fer plus importants ont par ailleurs été mis en évidence dans le putamen en utilisant la SWI [214] ou la relaxométrie [3,24]. VBM MD FA Figure III-11: Modifications volumétriques (VBM), de la diffusivité moyenne (MD) et de l’anisotropie fractionnelle (FA) dans la PSP. Figure issue de l’article de Lehéricy et al. 2010 [109] 57 C. Connectivité anatomique et fonctionnelle 1) Tractographie a) Technique La connectivité anatomique peut être évaluée au moyen de la tractographie. Cette technique est basée sur l’anisotropie de la diffusion de l’eau, ce qui permet de reconstruire les fibres et les faisceaux cérébraux [45,138]. En utilisant les mesures de diffusion (MD, FA) et de connectivité (par exemple le nombre de réseaux ou la probabilité de connexion entre les régions du cerveau), les réseaux de fibres spécifiques peuvent être reconstitués. Cette approche s'est révélée fructueuse dans l'étude des circuits nigro-striataux et nigro-thalamiques, ainsi que dans l'étude de la segmentation de la SN [128] et de la NGC en territoires spécifiques [49,108]. b) Applications à la MP Une connectivité réduite a été observée dans la MP entre la SN et le putamen, la SN et le thalamus ipsilatéral ainsi qu’avec le noyau caudé gauche et le GP [128,189]. Cette réduction de la connectivité est interprétée comme l'altération des voies dépendantes de la dopamine. La segmentation de la SN basée sur la tractographie a montré une atrophie générale de la SNr et de la SNc chez les patients parkinsoniens [127]. 2) Imagerie fonctionnelle : technique, applications à la MP a) Technique Initialement conçue pour détecter des changements du signal liés à la réalisation d'une tâche, l'IRM fonctionnelle (IRMf) par effet BOLD (Blood Oxygene Level Dependant) est de plus en plus utilisée pour étudier la connectivité fonctionnelle (CF) cérébrale. Les régions distantes formant des réseaux corticaux et souscorticaux peuvent présenter des corrélations temporelles des fluctuations de leur signal en IRMf de repos [21,62]. Ces réseaux sont extraits des données brutes de l’IRMf en utilisant divers algorithmes mathématiques [32,169]. L’IRMf par effet BOLD peut également être utilisée avec une tâche motrice dans le but de détecter des 58 réseaux compensatoires chez les patients parkinsoniens mais aussi pour le suivi du traitement. b) Applications à la MP IRMf de repos (Tableau III-6): les études en IRMf de repos ont montré que la MP est associée à des changements dans la CF entre les NGC et le cortex ou le cervelet [80] ou entre le NST et les aires motrices et prémotrices corticales (Tableau III-6) [7,72,189,194,221]. Les changements prédominent dans le circuit sensorimoteur avec une diminution de couplage fonctionnel, alors que dans le territoire associatif la connectivité fonctionnelle est augmentée [72,80,92,189]. IRMf de repos : connexion fonctionnelle Région Couplage avec Cortex sensorimoteur et limbique (putamen postérieur) Territoires corticales (putamen antérieur) ↘ Helmich et al., 2010 ↗ Helmich et al., 2010 ; Wu et al., 2011 Circuit cérébello-thalamique ↗ Helmich et al., 2011 Pallidum Circuit cérébello-thalamique Helmich et al., 2011 NST Cortical motor areas : primary sensory cortex, M1 ↗ ↗ M1 droite ↗ Wu et al., 2011 Putamen gauche ↗ Wu et al., 2011 Cortex prémoteur droit ↗ Wu et al., 2011 Cortex occipito-temporal ↘ Ibarretxe-Bilbao N et al., 2011 Putamen Pré-AMS Frontal Baudrexel et al., 2011 Tableau III-6: IRMf de repos. Connectivité fonctionnelle IRMf BOLD (Tableau III-7): La diminution globale de l'activation BOLD a été mise en évidence dans les noyaux caudés, le putamen, les NST, le thalamus, et dans le GP et la SN controlatéraux. Cette diminution est corrélée avec le score UPDRS surtout en ce qui concerne la bradykinésie [163]. La normalisation de profils d’activation suite à l’administration de lévodopa était observée surtout au niveau du putamen et du thalamus. Les modifications sont résumées dans le Tableau III-7 [78,155,163,180,219,220]. 59 Activation en IRMf BOLD Région Frontal Pariétal Sous-région pré-AMS ↘ Sabatini et al., 2000 ; Haslinger et al., 2001 ; Wu et al., 2005 Partie caudale de l’AMS ↗ Sabatini et al., 2000, Wu et al., 2010 cortex dorso-latéral préfrontal droit ↘ Sabatini et al., 2000 ; Wu et al., 2005 cortex pré-moteur lateral ↗ Haslinger et al., 2001 ; Sabatini et al., 2000 cortex cingulaire antérieur ↗ Sabatini et al., 2000 ; Wu et al., 2010 M1 ↗ Haslinger et al., 2001 ; ↘ Sabatini et al., 2000 ↗ Wu et al., 2005 SN ↘ Prodoehl et al., 2010 NST ↘ Prodoehl et al., 2010 ↗ Palmer et al., 2009 ↘ Prodoehl et al., 2010 Noyau caudé ↘ Prodoehl et al., 2010 GP ↘ Prodoehl et al., 2010 ↘ Prodoehl et al., 2010 cortex pariétal inferieur Thalamus Putamen Tableau III-7: Activation en IRMf BOLD Dans l'ensemble, les résultats obtenus avec l’IRMf à l’état de repos et l'IRMf d’activation suggèrent que la déplétion en dopamine dans la MP conduit à une reconfiguration de la connectivité cérébrale qui affecte principalement le circuit sensorimoteur et l'intégration sensorimotrice. Les études peuvent prédire la MP ou permettre le suivi du traitement [195]. 60 D. Particularités dans les formes génétiques Les études en imagerie des patients avec mutations génétiques sont peu nombreuses, portent sur de petits groupes d'individus, et leurs résultats sont souvent contradictoires. Une étude chez des sujets porteurs des mutations monogéniques Parkin ou LRRK2 et qui n’ont pas encore développé la maladie pourrait potentiellement permettre d’explorer ces mécanismes dans le but de comprendre la physiopathologie de cette maladie [209]. Ces sujets porteurs asymptomatiques présentent des anomalies infra-cliniques en rapport avec une dysfonction présynaptique dopaminergique au niveau du striatum [19]. Les anomalies sont explorées en TEP, en échographie transcrânienne et depuis peu par l’IRM (Figure III-12) Figure III-12: Imagerie multimodale de l’impact de la mutation Parkin chez des porteurs sains. Figure issue de l’article de Van der Vegt et al. 2009 [209] Elle montre une hyperéchogénicité de la SN (1), une diminution de la fixation de fluorodopa (18F) au niveau de striatum en PET (2), augmentation de volume du putamen posterieur (3), augmentation de l’activation au niveau de l’aire motrice supplémentaire (6), du cingulum antérieur (rCMA) et de la zone motrice primaire droite (PMd) (4, 6) ainsi qu’une augmentation de connectivité des deux dernières zones avec le putamen (5). 61 1) Echographie transcrânienne L’hyperéchogénicité de la SN est qualitativement corrélée à la concentration en fer chez les sujets atteints de la MPI. Elle a été étudiée par plusieurs auteurs chez les sujets porteurs des mutations (Tableau III-8). L’hyperéchogénicité de la SN a été retrouvée dans le groupe de sujets avec une mutation Parkin. Elle prédomine chez des sujets symptomatiques par rapport à ceux asymptomatiques [212]. Les études sur l’hyperéchogénicité chez des sujets atteints de mutation LRRK2 sont contradictoires. Chez les sujets symptomatiques elle était diminuée [14], égale [30] ou supérieure [29] à celle des sujets atteints de MPI. Chez les sujets asymptomatiques, elle était diminuée [30] ou égale [29] à celle des sujets atteints de la MPI. Dans toutes les études, l’hyperéchogénicité chez des sujets porteurs de mutation LRRK2 était supérieure à celle des sujets contrôles. mutation Parkin MP + région - SN Echographie transcrânienne Mesure par rapport à ↗ MPI Walter et al., 2004 MPI = Walter et al., 2004 Témoins ↗ Walter et al., 2004 ↗ Brockmann et al., 2011 = N. Brüggemann et al., 2011 ↘ Berg et al., 2005 ↗ Brockmann et al., 2011 = Brockmann et al., 2011 ; N. Brüggemann et al., 2011, Berg et al., 2005 ↘ N. Brüggemann et al., 2011 Echogénicité MPI + Témoins Echogénicité LRRK2 SN - MPI ↗ Brockmann et al., 2011 Témoins Tableau III-8: Echographie transcrânienne, étude de l'échogénicité de la SN 2) Imagerie conventionnelle en IRM Une atrophie cérébrale a été décrite chez des patients porteurs de la mutation LRRK2, mais celle-ci apparait peu significative en raison du faible nombre de patients étudiés et n’était pas localisé dans une région cérébrale spécifique [14]. 62 3) Etudes volumétriques en IRM Plusieurs études en VBM ont été réalisées chez des porteurs asymptomatiques (Tableau III-9). Une augmentation bilatérale du volume du GPi et du putamen [19] ainsi que dans le striatum dans son ensemble et dans le cortex pariéto-temporooccipital associatif [173] a été mise en évidence. Cette augmentation peut être liée à un dysfonctionnement chronique dopaminergique ou à une adaptation progressive à long terme. Elle était inversement corrélée à la fixation de fluorodopa (18F) en TEP. Cette fixation prédominait au niveau du putamen postérieur qui est souvent la première région atteinte dans la MPI vue sur la TEP utilisant le fluorodopa (18F) [19]. Une augmentation du volume cortical dans la région prémotrice et au niveau du precuneus a été signalée chez des sujets asymptomatiques porteurs de la mutation LRRK2 [29]. Chez des patients atteints de la MP avec la mutation Parkin cette augmentation compensatrice n’a pas été observée. Une étude a montré la diminution globale de volume des NGC. Cette diminution de volume était corrélée à la durée de la maladie et à la sévérité clinique [172]. L’atrophie était plus bilatérale et symétrique que chez les patients atteints de MPI [172]. Une autre étude a montré une diminution de volume prédominante au niveau des noyaux caudés mais aussi au niveau des deux putamens, du GP droit, de l’amygdale droite et du tronc cérébral. Cette observation correspond à l’étude en TEP montrant une atteinte plus sévère au niveau des noyaux caudés. Chez les sujets porteurs de la mutation LRRK2, une augmentation de volume du cervelet ainsi que du gyrus précentral gauche et une atrophie des deux putamens a été mise en évidence [29]. 63 Volumétrie Mutation MP + Région Marqueur par rapport à ↘ Reetz et al., 2009 ↗ Reetz et al., 2009 ↗ Reetz et al., 2010 ; Binkofski et al., 2007 ↘ Reetz et al., 2010 ↗ Reetz et al., 2010 ; Binkofski et al., 2007 ↗ Reetz et al., 2010 ↗ Reetz et al., 2010 Putamen ↘ Brockmann et al., 2011 Gyrus pré_central ↗ Brockmann et al., 2011 ↗ Brockmann et al., 2011 ↗ Reetz et al., 2010 ↗ Brockmann et al., 2011 NGC MPI/Témoins GP externe Témoins GP interne Noyaux caudés Parkin - Putamen Volume MPI/Témoins Pariéto-témporooccipital Parkin/ LRRK2 - + LRRK2 - Noyau caudé Cervelet préfrontal oribitofrontal Pré-cuneus Volume Volume Témoins Témoins Tableau III-9: Volumétrie chez des sujets porteurs des mutations Parkin et LRRK2 4) Imagerie fonctionnelle en IRM Les études en IRMf chez des sujets dans des phases précliniques sont importantes car elles permettent d’investiguer les mécanismes compensatoires (Tableau III-10). Dans l’étude en IRMf des sujets atteints de la mutation Parkin par rapport aux patients sains, les porteurs asymptomatiques ont montré une augmentation de l’activation plus importante dans le cortex cingulaire antérieur droit et le cortex prémoteur dorsal gauche, mais seulement lorsque les mouvements étaient décidés par le patient et non guidés par une consigne externe. En outre, l'activité du cortex cingulaire droit avait une forte influence sur l'activité des NGC dans le cas de mouvements sélectionnés par le patient [31]. Une autre étude a montré une augmentation de l’activité de l’aire motrice supplémentaire et du cortex prémoteur droit [143]. Ces réorganisations du circuit moteur striatocortical pourraient refléter un mécanisme compensatoire en rapport avec le dysfonctionnement nigrostriatal. Cet effet pourrait être dû à l’augmentation du volume de la glie ou de la densité vasculaire. 64 Imagerie fonctionnelle Mutation Parkin MP Région cortex cingulaire antérieur droit ↗ Buhmann et al., 2005 cortex prémoteur ↗ Buhmann et al., 2005 ; B. F. L. van Nuenen et al., 2009 - ↗ B. F. L. van Nuenen et al., 2009 Pré-AMS Tableau III-10: Imagerie fonctionnelle chez des sujets porteurs des mutations Parkin 65 IV. Objectifs L’objectif général de notre travail est d’étudier la charge en fer dans la substance noire des sujets porteurs des mutations génétiques de la MP. Pour cela, nous étudierons des patients avec mutation LRRK2 et Parkin symptomatiques et des porteurs sains comparés à des patients atteints de MPI et des sujets témoins appariés. La mesure de la charge en fer sera réalisée par mesure du taux de relaxation transversale (R2* et R2) dans la SN et les autres NGC (putamen, GP, noyau caudé) et le thalamus. Nous rechercherons également des corrélations entre la charge en fer et l’âge, la durée de la maladie et l’atteinte clinique. Plus spécifiquement, nous testerons l’hypothèse suivante: la charge en fer est augmentée chez les patients porteurs de mutations en accord avec les données de l’échographie de la SN, et de l’histologie. Nous déterminerons si cette charge en fer est supérieure, inférieure ou égale à celle présente chez les sujets atteints de la MPI car les données de la littérature sont contradictoires à ce sujet. 66 V. Matériels et méthodes A. Les sujets L’IRM a été acquise et analysée chez 60 patients sélectionnés parmi les sujets qui ont été recrutés dans le cadre de deux études prospectives : le projet Européen FP6 GENEPARK et le Programme Hospitalier de Recherche Clinique (PHRC) LRRK2 entre avril 2008 et mars 2013. Les patients ont été recrutés dans le service de neurologie de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris, France). Vingt sujets avaient une mutation génétique liée à la MP (mutation Parkin : 6 sujets, dont 4 patients symptomatiques et 2 porteurs asymptomatiques; mutation LRRK2 : 14 sujets dont 9 patients symptomatiques et 5 porteurs non symptomatiques). Les détails sur les mutations sont présentés dans le Tableau V-1. Vingt sujets était atteints de la MPI selon les critères de la MP de la Banque du Cerveau du RoyaumeUni et ont été choisis pour être appariés en âge avec le groupe atteint de MP associée à une mutation génétique. Tous les sujets étaient âgés de plus de 18 ans. Les critères d'exclusion pour les deux groupes étaient les syndromes parkinsoniens atypiques, l'antécédent de la méningo-encéphalite, la prise des neuroleptiques, et la démence (MMSE<24). Tous les patients ont été invités à s'abstenir de prendre tout médicament le jour de l’acquisition. Le groupe de contrôle était constitué de 20 sujets volontaires sains sans antécédents de troubles neurologiques, appariés en âge. Tous les sujets ont donné leur consentement éclairé écrit pour participer à l'étude et l'étude a été approuvée par le comité d'éthique local. Porteurs asymptomatiques Atteintes de MP Parkin LRRK2 Arg275Trp 1 R1441H 3 ex8-9del 4 G2019S 1 ex3del/Arg275Trp 2 R1441H 3 ex8-9del/Arg42Pro 6 G2019S Tableau V-1: Mutations chez des sujets inclus dans l'étude 67 B. L'examen neurologique L’examen neurologique complet des patients sélectionnés a été réalisé. La sévérité des symptômes extrapyramidaux et du handicap moteur a été quantifiée en utilisant le score UPDRS III et la progression des symptômes a été quantifiée en utilisant le score Hoehn et Yahr. L'examen du handicap moteur incluait l'évaluation de la parole, de l’expression faciale, du tremblement de repos (visage, membres supérieurs et inférieurs), du tremblement postural ou d’action, de la rigidité (cou, des membres supérieurs et inférieurs), des mouvements digitaux et de la main, des mouvements alternatifs rapides des mains et des jambes, la levée d'une chaise, la posture, la démarche, la stabilité posturale et la bradykinésie du corps. Chacune de ces caractéristiques a été mesurée sur une échelle de 0 à 4 et les scores pour les jambes et les mains ont été mesurées de façon bilatérale. La déficience cognitive a été évaluée à l'aide du MMSE [61]. Les données cliniques comprenaient également l'âge des patients, le sexe et la durée de la maladie. C. Acquisition de données IRM L’acquisition IRM a été réalisée en utilisant un imageur 3 Tesla corps entier 32 canaux (Siemens, Erlangen, Allemagne), avec une antenne émission corps entier et une antenne réception tête 12 canaux. Le protocole comprenait l’imagerie anatomique de haute résolution tridimensionnelle pondérée en T1 (3D T1), en 3D T2 (3D T2), une cartographie T2* avec calcul du taux de relaxation R2* (R2* = 1/T2*) et une cartographie T2 avec calcul du taux de relaxation R2 (R2 = 1/T2), avec pour chaque séquence une série d’acquisition en écho-planaire (EPI pour Echo Planar Imaging) avec 6 temps d’écho (TE). Les détails des acquisitions sont résumés dans le Tableau V-2. 68 T1 3D T2 3D T2* T2 Séquence MP-RAGE MP-RAGE EPI EPI TR 2200 ms 3000 ms 9000 ms 9000 ms TE 2,94 ms 4,28 ms 24 ms à 94 ms 24 ms à 99 ms Angle de bascule 10 ° 120 ° 90 ° 90 ° Nombre de coups 208 208 60 60 Taille de voxel 1*1*1 mm3 1,1*1,1*1 mm3 2*2*2 mm3 2*2*2 mm3 Tableau V-2: Paramètres d'acquisition D. Le stockage des images Les données ont été acquises et stockées sur le serveur en format DICOM (pour Digital Imaging and Communications in Medicine). Elles ont été converties en format NIfTI (pour Neuroimaging Informatics Technology Initiative) utilisé pour le traitement des données. E. Traitement et analyse d'images Le traitement et l'analyse d'images ont été réalisés majoritairement en utilisant un des programmes développés par l’équipe du laboratoire CENIR sous MATLAB (The MathWorks, Inc., Natick, MA). Les autres logiciels utilisés pour le traitement des données étaient : SPM8 Wellcome Trust Centre for Neuroimaging, UK, FMRIB Software Library (FSL) v5.0: FMRIB Analysis Group, Oxford, Royaume-Uni). BrainVisa/Anatomist /Nucleist : IFR49, France Le principe général de l'analyse d'image impliquait des mesures quantitatives des taux R2 et R2* extraits dans les ROI sous-corticales. L’analyse comprenait les étapes suivantes : Extraction des ROI sous-corticales sur la base des images structurelles 3D T1 et 3D T2 Calcul de cartographies T2 et T2* 69 Recalage des ROI dans l’espace des images T2 et T2* Extraction des valeurs de T2 et T2* pour chaque voxel et calcul de la valeur moyenne sur la région d’intérêt Calcul des taux de relaxation R2* = 1/T2* et R2 = 1/T2. 1) Segmentation des ROI Les ROI ont été obtenus pour la SN, le noyau caudé, le putamen, le GP et le thalamus. La SN a été segmenté manuellement à l'aide du logiciel FSL sur la base des images 3D T2 (Figure V-1). A B Figure V-1: Coupes coronales et axiales pondérées en T2 avec les ROI de la substance noire Toutes les autres ROI ont été segmentées de façon automatique en utilisant BrainVISA / Nucleist sur la base des images pondérées en T1 (Figure V-2) [122]. 70 A B B Figure V-2: Coupes coronales et axiales pondérés en T2 avec les ROI de la NGC 2) Cartographie T2 et T2 * Pour obtenir les cartographies T2 et T2*, les images EPI des différents sujets pour chaque TE ont d’abord été réalignées entre elles, puis normalisées et recalées pour permettre une comparaison directe des sujets. Ensuite, les cartographies T2 et T2* ont été calculées en ajustant les données à la décroissance logarithmique du signal pour les six temps d’écho. 3) Recalage des ROIs et calcul des données Les ROIs extraites des images en haute résolution 3D T2 et 3D T1 ont été recalées et réalignées dans l’espace des images EPI T2* ou T2. Puis, les ROIs ont été superposées aux cartographies T2 et T2* et les valeurs de T2 et T2* ont été extraites pour chaque voxel (Figure V-3, Figure V-4). Enfin, les valeurs de R2 et R2* de chaque région ont été obtenus en calculant la moyenne des valeurs des voxels de la région. 71 A B Figure V-3: Recalage de ROI de NGC sur image EPI Figure V-4: Recalage de ROI de la SN sur image EPI F. L'analyse statistique L'analyse statistique des valeurs de R2 et R2* moyennés sur chaque ROI et des données cliniques a été réalisée avec Excel, avec le logiciel MedCalc (pour Medical Calculator) et avec le module de calcul en ligne pour le test ANOVA. Les quatre groupes de sujets (volontaires sains, patients atteints de la MPI, porteurs asymptomatiques et patients porteurs d’une mutation atteints de la MP) ont été comparés en utilisant le test ANOVA pour comparaisons multiples, avec correction de Tukey. Le seuil de signification statistique a été fixé à p<0.05 corrigé pour les comparaisons multiples (p-value/4). Les groupes ont également été comparés deux par deux en utilisant un t-test indépendant à variance différente (Welch test). 72 Ces tests paramétriques ont été choisis parce que nous données le permettent. Le Welch test, une variante du t-test indépendant à variance inégale, a été choisi car les variances des différents groupes de sujets étaient inégales. Le test de randomisation-permutation unilatéral a été utilisé pour l’analyse des sousgroupes porteurs de mutations Parkin et LRRK2. Ce test a été choisi en tenant compte du fait que l'utilisation de tests paramétriques ou non paramétriques n’est pas pertinente pour des groupes d’effectifs aussi faibles. L'analyse de la corrélation entre l'intensité du signal dans la SN et les variables cliniques a été réalisée pour les données de R2* en utilisant la corrélation de Kendall. Les paramètres cliniques utilisés dans l'analyse de corrélation comprenaient l'âge, la durée de la maladie, le score moteur UPDRS et le score HY. Le seuil de signification statistique a été fixé à p <0.05. 73 Résultats VI. A. Recueil des données Un patient atteint d’une forme génétique de MP avec mutation LRRK2 a été exclu au vu des artefacts sur l’IRM. Les données cliniques des patients sont résumées dans le Tableau VI-1. Sexe (H/F) Durée de la maladie (moyenne + DS) Handicap moteur (UPDRS III) (moyenne + DS) Progression (Hoehn & Yahr score) (moyenne + DS) Nombre Mutation Age moyen + DS (année) Témoins 20 - 55,75 ± 7,35 6/14 - - - MPI 20 - 54,3 ± 10,94 11/9 5,15 ± 4,2 18,55 ±9,13 1,6 ± 0,63 Porteurs sains 7 2 Parkin 5 LRRK2 47,71± 14,75 4/3 - - - Porteurs avec MP 12 4 Parkin 8 LRRK2 53,92 ±13,85 5/7 10,6 ± 5,2 25,3 ± 14,8 1,96 ± 0,8 Tableau VI-1: Données cliniques des sujets inclus dans l'étude B. Différences pour R2 et R2* entre les groupes étudiés Les données obtenues pour les mesures de R2 et R2* chez les sujets témoins, les sujets atteints de la MPI, les porteurs sains et les sujets atteints de la MP porteurs de mutation sont résumées dans le Tableau VI-2 et la Figure VI-1. Témoins MPI Porteurs sains MP avec mutation 25,05± 2,06 27,8 ± 1,53* 28,62 ± 3,07* 30,31 ± 2,15*, Parkin - - 29,71 ± 0,87 31,14 ± 2,96 LRRK2 - - 28,18 ± 3,67 29,89 ± 1,61 18,33 ± 1,83 18,5 ± 1,3 17,29 ± 1,86 17,6 ± 2,01 Parkin - - 18,97 ± 0,9 17,26 ± 1,18 LRRK2 - - 16,62 ± 1,72 18,26 ± 2,32 R2* R2 § -1 Tableau VI-2: R2 et R2* (s ) chez les sujets inclus dans l'étude (moyennes et DS). Les données ont été obtenues en moyennant les valeurs moyennes des ROI pour l’ensemble des patients du groupe (moyenne et écart type), *différence significative avec les sujets témoins, §différence significative avec les sujets MPI. Nous avons observé une différence significative entre les taux R2* dans la SN pour l’ensemble des groupes étudiés (F=18, p<0,0001). 74 Aucune différence significative n’a été trouvée pour le R2 dans la SN pour l’ensemble des groupes (F=1,46, p=0,24). Figure VI-1: R2* et R2 chez les 4 groupes inclus dans l'étude Aucune différence significative n’a été trouvée pour le R2* ni le R2 dans les NGC. C. Différence entre les groupes étudiés pour le R2* Les résultats statistiques sont résumés dans le Tableau VI-3. Témoins MPI Porteurs sains p<0,0001 p=0,021 p<0,0001 p<0,0001 p=0,58 p=0,0023 p=0,012 MPI Porteurs symptomatiques Porteurs de mutation symptomatiques et non Tableau VI-3: Significativité de la différence entre les groupes de l'étude (p) a) Différence entre sujets témoins et sujets atteints et porteurs sains Comparés aux sujets témoins, les sujets porteurs sains (p=0,021) et les patients avec MP (MPI et avec mutation génétique p<0,0001) présentaient une élévation significative du R2*. b) Différence entre sujets atteintes de mutation (symptomatiques et porteurs sains) et la MPI 75 Chez les sujets porteurs de mutations génétiques, le R2* était significativement plus élevé que chez les sujets atteints de la MPI (p=0,012). Chez les sujets symptomatiques porteurs de la mutation génétique, le R2* était significativement plus élevé que chez les sujets atteints de MPI (p=0,0023). Chez les porteurs sains, le R2* n’était pas significativement différent des sujets atteints de la MPI (p=0,58). Le R2* n’était pas significativement différent entre les deux groupes des sujets porteurs de mutations (symptomatiques et porteurs sains, p=0,179). c) Analyse des sous-groupes avec les mutations Parkin et LRRK2 Le faible nombre de sujets dans chacun des deux sous-groupes rendait l’analyse statistique difficile. Cependant des résultats significatifs ont été obtenus en utilisant la méthode de randomisation-permutation. Dans le groupe avec la mutation LRRK2, le R2* des sujets atteints était significativement supérieur à celui des sujets témoins (p=0,003) et à celui des sujets atteints de MPI (p=0,003). Chez des porteurs sains, le R2* était significativement supérieur à celui des sujets témoins (p=0,01). Dans le groupe avec la mutation Parkin, le R2* des sujets atteints était significativement supérieur à celui des sujets témoins (p=0,003) et à celui des sujets atteints de MPI (p=0,003). Chez les porteurs sains, le R2* était significativement supérieur à celui des sujets témoins (p=0,0067). D. Corrélation entre R2* et données cliniques Chez les sujets témoins, aucune corrélation significative entre le R2* et l’âge n’a été retrouvée (τ=-0,21 ; p=0,21). Chez les sujets porteurs sains, il n’a pas été retrouvé non plus de corrélation significative entre le R2* et l’âge (τ=0,14 ; p=0,76). Les résultats de corrélations avec les données cliniques pour les patients atteints de MPI et de MP avec mutation génétique sont résumés dans le Tableau VI-4 et le Tableau VI-5 respectivement. 76 Aucune corrélation significative avec le R2* n’a été retrouvée pour aucun de deux groupes. Chez les sujets atteints de MPI le score de handicap HY était significativement corrélé à l’âge, la durée de la maladie et le score UPDRS. Le score UPDRS était corrélé également avec la durée de la maladie. MPI Durée UPDRS III HY R2* Age τ=0,21 p=0,22 τ=0,26 p=0,12 τ=0,51 p=0,007 τ=-0,3 p=0,07 τ=0,34 p=0,047 τ=0,49 p=0,011 τ=-0,08 p=0,64 τ=0.47 p=0.013 τ=-0,12 p=0,47 Durée UPDRS III τ=0,15 p=0,42 HY Tableau VI-4: Corrélation des données cliniques avec des valeurs de R2* chez des patients attents de la MPI MP avec mutation Durée UPDRS III HY R2* Age τ=0,11 p=0,67 τ=0,17 p=0,49 τ=0,37 p=0,14 τ=-0,06 p=0,73 τ=-0,09 p=0,73 τ=0,13 p=0,64 τ=-0,11 p=0,68 τ=0,69 p=0,0086 τ=-0,015 p=1 Durée UPDRS III HY τ=0,11 p=0,69 Tableau VI-5: Corrélation des données cliniques avec des valeurs de R2* chez des patients atteints de la MP porteurs de mutation 77 VII. Discussion A. Dépôt de fer dans la SN : R2* Dans notre étude, nous avons observé une augmentation significative du taux R2* chez les sujets atteints de MPI par rapport aux sujets sains. Précédemment il a été démontré sur des études anatomopathologiques post mortem et en IRM que la MP était associée à une augmentation des dépôts de fer au niveau de la SN [47,60,69,149,150,159,206], des résultats confirmés par ceux de notre étude. Les travaux précédents ont également permis de montrer que le taux de R2* était corrélé à la charge en fer * [76,106,150]. Nos résultats confirment donc que la charge en fer est plus élevée chez les patients atteints de MPI que chez les sujets sains. Les valeurs absolues de R2* obtenues dans notre étude pour les sujets sains et les sujets atteints de MPI, correspondaient globalement à celles de la littérature. Il faut noter qu’il existe une grande variabilité des valeurs de R2* dans la littérature notamment en ce qui concerne les mesures dans la SN. En effet, pour les sujets sains, les valeurs variaient entre 19,6 et 42 et pour les sujets atteints de la MPI, entre 21,1 et 51 [60,125,159,179,206]. Cette variabilité peut être liée à de nombreux facteurs tels que l’intensité et l’homogénéité du champ magnétique de l’IRM, les paramètres d’acquisition (TE, taille des voxels), les particularités intrinsèques de chaque appareil IRM ou encore à des différences de méthodologie ou au choix des ROI. Une autre cause de variabilité pourrait être liée aux caractéristiques des sujets, telles que l’âge, la durée moyenne de la maladie ou à la sévérité clinique. Dans notre cas, les valeurs de R2* étaient dans la gamme inférieure de la dispersion. Une explication pourrait être que nos sujets présentaient un âge moyen inférieur à celui des études précédentes. Cette variabilité ne permet pas à ce jour d’envisager l’étude quantitative individuelle de la charge en fer. B. R2* dans la SN chez les sujets porteurs des mutations génétiques Par rapport aux sujets sains, nous avons observé une augmentation du R2* et donc de la charge en fer chez les sujets porteurs de mutations génétiques symptomatiques et chez les porteurs sains. Notre étude est la première à investiguer 78 la charge en fer en IRM chez les patients porteurs des mutations génétiques liées à la MP et ne peut donc pas être comparée aux études précédentes. Plusieurs études ont utilisé l’échographie pour étudier la SN des patients génétiques [14,29,30,212]. Ces études ont montré que l’hyperéchogénicité de la SN était corrélée à la surcharge en fer chez des patients atteints de MPI [89]. Les résultats de notre étude sont également cohérents avec les études plus récentes qui ont montré une hyperéchogénicité relative chez des sujets symptomatiques porteurs de mutations de la MP et chez des porteurs sains comparativement aux sujets sains [14,29,30,73,212]. De plus nous avons observé que chez les patients avec une mutation atteints de la MP, le taux R2* et donc le niveau de fer était significativement supérieur à celui observé chez les patients atteints de la MPI. Ces résultats sont concordants avec ceux de certaines études en échographie conduite auprès de les sujets avec la mutation LRRK2 [29] ou Parkin [73]. Enfin une étude anatomopathologique a montré une charge en fer supérieure chez les patients avec MP associée à la mutation Parkin par rapport à ceux atteints de la MPI [202]. Cependant, pour les sujets porteurs de la mutation LRRK2 d’autres études échographiques ont montré une charge en fer inférieure [14] ou égale [30] à celle retrouvée en cas de MPI. Chez les porteurs sains, nous avons observé que le taux R2* n’était pas différent à celui des sujets atteints de MPI et ne différait pas de celui des sujets atteints de MP porteurs d’une mutation. Ces données sont en accord avec certaines des études précédentes en échographie chez des patients porteurs de mutation Parkin [212] ou LRRK2 [29]. Mais là encore d’autres études échographiques étaient contradictoires puisqu’elles montraient une charge en fer inférieure chez les porteurs sains par rapport aux sujets atteints de MPI. Devant la diversité des résultats échographiques, montrant chez des sujets avec une mutation atteints de la MP une charge en fer inférieure [14], égale [30,73] ou supérieure [29], et chez des porteurs sains une charge en fer inférieure [30] ou égale [29] à celle de sujets atteints de la MPI, il est tentant de penser que les données en IRM pourraient être plus fiables et reproductibles. Cependant des études ultérieures en IRM ou par comparaison avec l’échographie sur des cohortes plus larges sont nécessaires pour étayer cette hypothèse. 79 C. T2 et R2 comme biomarqueurs? Même si les études précédentes ont montré une diminution du temps de relaxation T2 dans la SN [150], le T2, et donc le R2 restent des marqueurs moins sensibles à la charge en fer que le R2* et ils ne sont pas toujours contributifs [69]. Pour cette raison, le R2 était considéré comme un biomarqueur d’intérêt moindre dans les études récentes [223]. De plus les résultats de certaines mesures en T2 restent contradictoires, ayant montré une augmentation ou une diminution du R2 au niveau des NGC. De plus la diminution du R2 a été observée dans les régions sans charge élevée en fer [69]. Ces inconsistances peuvent être liées au fait que le R2 dépend aussi dans une mesure importante de la concentration d’eau dans le voxel, tandis que l’utilisation de R2* est plus précise et corrélée plus directement à la charge en fer [24,150]. D. Les autres Noyaux Gris Centraux Nous n’avons pas trouvé de modifications significatives de la charge en fer mesurée par le R2* dans les autres NGC chez l’ensemble des sujets de l’étude. Dans la littérature, les résultats sur les modifications de la charge en fer dans les NGC chez des patients atteints de la MPI sont contradictoires: la majorité des auteurs n’ont pas non plus trouvé de modifications significatives [6,47,69,150,159,206], tandis que quelques auteurs ont trouvé une augmentation du R2* notamment dans le putamen et le GP [224], surtout en utilisant les techniques plus sensibles telles que la SWI [214]. On peut donc penser que même si les modifications existent, elles sont plus discrètes et plus difficiles à détecter. Aucune donnée en relaxométrie n’existe pour les NGC chez les patients porteurs de mutations génétiques. Cependant quelques études en volumétrie ont montré une diminution du volume global des NGC, prédominant selon certaines dans le putamen, le GP ou les noyaux caudés chez des patients atteints de MP porteurs de mutations [172]. Au contraire, chez les sujets porteurs sains une hypertrophie compensatrice de ces régions était observée [19,173]. Nous pouvons donc penser que ces régions ont un rôle dans la pathogénèse de la maladie bien que nous n’ayons pas trouvé à ce jour de corrélation en relaxométie. Des études sur des 80 cohortes plus larges et probablement avec des méthodes plus sensibles sont nécessaires pour investiguer ces régions. E. Méthodes d’analyse de la SN Dans notre étude la ROI analysée correspondait à la SN dans son ensemble. Quelques études à ce jour ont analysé séparément la SNr et SNc [125,206] ou évalué l’atteinte des régions médiales et latérales de la SN [207]. Cependant, malgré la différence entre les différentes parties de la SN, leur séparation sur l’imagerie n’est pas toujours évidente et peut être source d’erreur [69]. Par conséquent nous avons décidé de les traiter de façon commune, comme dans la majorité des études précédentes [50,69,133]. Même si la charge en fer et ses variations sont inégales entre les deux régions [125], une étude a trouvé une augmentation de charge en fer dans les deux parties de la SN chez des patients atteints de la MP [206], justifiant notre approche. F. Corrélation avec les données cliniques En accord avec les études précédentes, notre étude confirme la présence d’une charge en fer de la SN dans la MP dans sa forme idiopathique autant que dans sa forme génétique. Cependant il n’existait pas de corrélation entre la charge en fer et l’atteinte clinique. Dans les études précédentes, la charge en fer a été corrélée à l’âge [71]. Pour cette raison nous avons apparenté les groupes en âge, à l’exception du groupe des porteurs sains, où l’âge moyen était inférieur à celui des autres groupes. Cependant, nous n’avons pas trouvé de corrélation significative entre l’âge et la charge en fer dans aucun de ces groupes. Il a été démontré que la charge en fer augmentait progressivement avec l’âge jusqu'à 20 ans, puis après une phase de plateau continue à augmenter à partir de 60 ans [74]. Le faible âge moyen dans la phase de plateau de notre cohorte (55 ans) peut être à l’origine de l’absence de corrélation significative. Nous n’avons pas non plus trouvé de corrélation significative avec la durée de la maladie, ni dans le groupe de MPI ni dans le groupe des patients avec une mutation 81 génétique. Ceci est en cohérence avec de précédentes études et renforce la supposition que la déposition de fer dans la MP est longue et intervient au cours de la phase préclinique [6,128]. La variation du taux de fer après le début de la maladie pourrait être plus faible même si son existence a été montrée dans une étude longitudinale chez les patients atteints de la MPI. Ceci plaide en faveur de l'hypothèse selon laquelle l'altération du métabolisme et donc du niveau de fer survient bien avant le début de la maladie. La charge en fer élevée chez les patients avec MPI malgré la durée courte d’évolution dans ce groupe est également en faveur de l’existence de modifications pré-symptomatiques, comme observé précédemment dans la littérature [125]. Concernant les symptômes de la maladie, nous n’avons pas trouvé de corrélation entre le score moteur UPDRS et le taux R2* ni chez les patients atteints de la MPI ni chez des patients atteints porteurs de la mutation. Chez les malades avec MPI, les données de la littérature sont variables: une corrélation a été retrouvée dans quelques études [68,125,128] mais pas dans d’autres [50,70,206]. Cette différence peut être liée à la durée inférieure de la maladie ainsi qu’à l’âge moyen plus bas des cohortes des études n’ayant pas retrouvé de corrélation, ce qui résulte en une charge de fer plus faible comme c’est le cas dans notre étude. Comme dans la majorité des études précédentes, nous n’avons pas trouvé de corrélation entre le stade de l’atteinte HY et le R2*, pour les sujets atteints de la MPI et de la MP avec la mutation génétique [69,125,159,206]. Nous n’avons donc pas trouvé de corrélations entre la charge en fer et le phénotype clinique chez les patients porteurs de mutations ce qui suggère que ce marqueur n’est pas un bon marqueur de la sévérité clinique de la maladie. G. Rôle du fer dans la physiopathologie de la MP Les deux causes principales avancées pour expliquer la neurodégénérescence dans la SN sont le changement dans le fonctionnement des métabolites intracellulaires et les dépôts de fer [98]. Plusieurs hypothèses ont été évoquées pour expliquer l'augmentation de charge en fer chez les patients atteints de la MP. 82 Le stress oxydatif est une des hypothèses clés dans la physiopathologie de la neurodégénérescence dans la MP [98]. Cependant le débat persiste de savoir si l'accumulation du fer est la source de ce stress ou si le fer s'accumule comme une conséquence de la mort cellulaire [128]. Les protéines régulant la concentration en fer jouent aussi un rôle dans le métabolisme énergétique, ce dernier étant altéré dans la MP. L'altération de l'expression et du fonctionnement ces protéines peut être induite par des variations environnementales mais aussi génétiques [128]. Le stress oxydatif résultant de l’ensemble des perturbations ainsi que des défaillances enzymatiques altère également le fonctionnement mitochondrial, augmentant donc la production des radicaux libres, ce qui entretient le stress oxydatif et favorise la neurodégénérescence [98]. Notre étude montre une accumulation du fer chez les patients avec atteinte nigrostriatale mais ne permet pas de déterminer à quel niveau cette charge en fer intervient dans la pathogénèse. Des études ultérieures longitudinales sont nécessaires pour répondre à cette question. H. Rôle du fer dans la physiopathologie de la SN Les mécanismes qui sont à l’origine de la MP induite par les mutations génétiques restent encore peu connus. Les études génétiques récentes montrent que les facteurs génétiques peuvent jouer un rôle plus important dans la pathogénèse de la MP que précédemment supposé [112]. Avec l’augmentation de l’espérance de vie, les familles porteuses de mutations sont plus faciles à identifier. Cependant les études génétiques sont difficiles à mener et l’identification des polymorphismes et des loci génétiques est complexe, ce qui explique que le nombre d’études concernant ces familles est faible à ce jour. Globalement bien que les mécanismes physiopathologiques soient probablement différents, les conséquences sont communes chez les porteurs des deux types de mutations et les malades atteints de MPI avec une mort des cellules nigrostriées et un dysfonctionnement nigrostiatal [112]. 83 Malades porteurs d'une mutation Dans notre étude, la charge en fer observée chez les malades avec une mutation était plus importante que chez les sujets atteints de MPI. Il n’est cependant pas connu si l’augmentation de la concentration en fer dans la SN est liée à des mécanismes physiopathologiques similaires ou différents de ceux de la MPI, ou encore si seule une partie des mécanismes sont communs aux deux maladies. La présence d’une charge en fer plus élevée chez des sujets porteurs de mutations pourrait renforcer l'hypothèse selon laquelle son rôle est plus important dans les formes génétiques de la maladie [29,209]. Porteurs sains Dans le cas des porteurs sains, la littérature signale des modifications de fonction, de structure et de métabolisme de la SN. Les modifications observées chez des patients porteurs sains dans notre série sont en accord avec l'hypothèse qu'il existe une perte neuronale progressive, pendant la période pré-symptomatique, liée au processus pathologique sous-jacent et corrélé avec une accumulation de fer. Cependant nous ne savons pas si ces sujets développeront la maladie à un stade de leur vie et si la charge en fer est liée à la probabilité ou la durée de ce risque. Parkin : Concernant la mutation Parkin qui est une mutation AR, des cas de MP chez des porteurs hétérozygotes ont été rapportés, d’incidence supérieure à celle de la population générale [209]. La question de la survenue de la maladie chez des patients hétérozygotes reste cependant controversée [85,100]. Les données cliniques concernant ces sujets sont également contradictoires, certaines études n'ayant trouvé aucune anomalie clinique [113] et d’autres ayant trouvé des symptômes extrapyramidaux [85,100]. Même si la question de savoir si ces patients peuvent ou non développer la MP reste ouverte, la mise en évidence d'anomalies infracliniques en imagerie est extrêmement intéressante car celle-ci pourront être utilisées pour investiguer la physiopathologie de la MP. Issus de familles de sujets atteints de MP, ils sont également des sujets contrôles idéaux pour les sujets porteurs symptomatiques partageant le même terrain environnemental et génétique que ceux-ci. Dans notre série nous avons trouvé une augmentation du niveau de fer chez les sujets porteurs de la mutation Parkin hétérozygotes asymptomatiques traduisant la 84 présence d’anomalies présymptomatiques dans cette structure. La présence d’anomalies de la SN chez ces sujets a également été rapportée à l’aide d’autres techniques comme la TEP qui a montré une baisse de fixation de la fluorodopa (18F) et l’échographie qui a montré une augmentation de l’échogénicité de la SN [19,212]. Les données de notre étude sur ces patients doivent cependant être interprétées avec prudence en raison du très faible nombre des sujets. LRRK2: La mutation LRRK2 est AD mais sa pénétrance est incomplète, ce qui signifie également que certains porteurs sains développeront la maladie et pas d’autres. Des modifications physiopathologiques ont déjà été signalées chez ces sujets, telles que l’hyperéchogénicité de la SN ou l’hypertrophie compensatrice des NGC [29,30]. Nous avons trouvé que la charge en fer était élevée dans ce groupe, même si l’analyse statistique séparée est difficile devant le faible nombre de sujets. On peut donc également supposer que la charge en fer représente un biomarqueur qui indique une altération métabolique pré-symptomatique dans ce groupe. I. Charge en fer selon le type de mutation L’analyse séparée et comparative entre les groupes avec la mutation Parkin et LRRK2 est statistiquement difficile devant le nombre faible de patients dans chaque groupe. Il semble que la charge en fer soit supérieure chez les patients porteurs sains de la mutation Parkin. Cette charge en fer détectée en IRM est en accord avec les résultats d’une étude histologique [202] sur des cerveaux de sujets porteurs de la mutation Parkin. Cependant une étude comparative de la charge en fer avec un nombre suffisant de sujets dans chaque groupe devra être réalisée. Au total les différences probables de mécanismes physiopathologiques dans les MP induites par des mutations génétiques rendent ce modèle d’étude d’un grand intérêt. En effet, les patients génétiques permettront d’élucider les mécanismes de ces atteintes et de tester d’éventuels traitements spécifiques avant l’apparition des symptômes. D’autre part, les similarités entre les mécanismes physiopathologiques principaux des différentes formes génétiques et de la MIP rendent la phase asymptomatique des patients génétiques d'un grand intérêt pour l’étude de la physiopathologie du 85 développement de la MP au stade présymptomatique. Ils permettront de comprendre ce développement mais aussi d’intervenir pour empêcher la survenue de la maladie. J. Biais et limites Dans notre étude, nous avons tenté de minimiser les sources potentielles d’erreurs en appariant les patients et les sujets contrôles pour l’âge, en excluant de l’étude les sujets avec une démence et par application exacte des critères diagnostiques de la Parkinson’s Disease Society. Notre étude présente cependant plusieurs limites. La limite principale est le faible nombre de sujets dans les groupes avec mutation et surtout dans le groupe des sujets porteurs sains. Pour cette raison, l’analyse statistique était faite sur l’ensemble des deux groupes porteurs de mutations. Cependant l’analyse séparée des deux groupes montre la même tendance, avec une puissance statistique moindre à cause du petit nombre de sujets. La durée plus importante de la maladie ainsi que l’atteinte clinique plus sévère dans le groupe des malades avec une mutation étaient également susceptible d’influencer la charge en fer [125] même si une corrélation directe n’a pas été retrouvée dans notre étude. Cette différence de durée de la maladie était liée à un début souvent plus précoce de celle-ci chez les patients porteurs d'une mutation. Les études précédentes ont rapporté une évolution plus lente de la maladie chez des sujets porteurs de la mutation LRRK2 [14] et Parkin [19], cependant dans notre série le déficit moteur et le handicap, même s’ils étaient significativement corrélés à la durée de la maladie, étaient plus élevés dans le groupe de patients avec la mutation que dans le groupe MPI. Enfin l’âge moyen du groupe de sujets porteurs sains était inférieur à celui des autres groupes. Cette différence était attendue car les patients plus âgés ont déjà développé la maladie. Toutefois, cette différence n’empêchait pas l’interprétation des données. En effet, la charge en fer augmente avec l’âge et le fait que les patients plus jeunes présentaient une charge en fer supérieure à celle des sujets sains et non significativement différente de celle des sujets atteints de MPI ne fait que renforcer l’hypothèse d’une participation de la surcharge en fer dans la physiopathologie de la maladie chez ces sujets. 86 VIII. Conclusion et perspectives Cette étude est la première étude de la charge en fer en IRM chez des patients porteurs de mutations LRRK2 et Parkin. Après avoir confirmé l’augmentation de la charge en fer des patients MPI par rapport aux contrôles, nous avons montré que les patients atteints porteurs de mutation avaient une charge en fer supérieure à celle de tous les groupes précédents, tandis que les porteurs sains avaient une charge en fer supérieure à celle des sujets témoins et semblable à celle des sujets atteints de MPI et de MP induite par une mutation. La charge en fer élevée chez les malades atteints de MP génétique comme chez les porteurs sains, suggère que les mesures IRM de cette charge en fer représentent un biomarqueur intéressant pour l’étude de ces deux types de sujets. Ces données devront être confirmées sur un plus grand nombre de sujets. L’augmentation du nombre de sujets pourrait également aider à rechercher les corrélations cliniques qui n’ont pas été retrouvées dans notre étude. Les deux populations de porteurs sains, ceux de LRRK2 et ceux de Parkin, présentent un intérêt particulier pour la recherche. Mise à part la fréquence élevée de la mutation dans le cas de LRRK2, cet intérêt vient de la pénétrance incomplète de la maladie. Dans le cas de Parkin qui est une mutation AR, de nombreux patients hétérozygotes présentent des anomalies métaboliques, la plupart insuffisantes pour entraîner l’apparition de la maladie. Dans les deux cas nous avons des porteurs sains permettant d’étudier le stade asymptomatique de la maladie ainsi que d’éventuels traitements permettant de s’opposer au développement de la maladie. Dans notre étude, aucune différence significative de charge en fer n’existait entre les porteurs sains et les patients atteints de MP porteurs de mutation. Cependant, comme la charge en fer était légèrement moindre dans ce deuxième groupe nous pouvons supposer que l’évolution vers la maladie pourrait être corrélée à une augmentation progressive de charge en fer. Des études ultérieures longitudinales permettront de confirmer cette hypothèse et de savoir si cette augmentation progressive est corrélée avec l’évolution vers la maladie, ou à l’inverse si la charge en fer n’est qu’un stigmate du dysfonctionnement nigrostriatal non lié à l’apparition de la MP. Il serait important de tester le taux R2* en tant que facteur prédictif d’évolution vers la maladie ainsi que d’estimer le temps entre son apparition et la 87 survenue de la maladie. Il serait également intéressant de corréler la charge en fer avec les mécanismes compensatoires mis en jeu, tels que l’hypertrophie compensatrice du striatum. L’étude des formes génétiques de MP permettrait également de tester des thérapeutiques agissant sur la progression ou même sur l’apparition de la maladie chez les sujets porteurs asymptomatiques. Des solutions possibles consisteraient à agir sur l’expression des gènes LRRK2 ou Parkin, sur les enzymes correspondantes ou encore sur l’accumulation d’α-synucléine dans les corps de Lewy. Si la majorité des études ont rapporté des résultats concordants en ce qui concerne l’augmentation de la charge en fer mesurée avec le taux R2* dans la MPI, les valeurs absolues des mesures restent discordantes. En raison de cette variabilité, il est encore difficile d’envisager aujourd’hui que cette mesure puisse avoir un intérêt diagnostique chez un patient donné. Des mesures quantitatives normatives sur chaque IRM seraient nécessaires pour connaitre des valeurs propres à l’appareil. La reproductibilité de ces mesures et la possibilité de les utiliser pour établir un diagnostic individuel fiable doivent être préalablement testées. La séparation de la SN en SNr et SNc par IRM 3T est difficile et son efficacité controversée. Cependant des études séparées de ces structures pourraient apporter plus de connaissances sur le rôle de chacune des deux régions dans le processus pathogène et permettre d’affiner les données. Des études ultérieures sur une séparation quantitative reproductible sont donc nécessaires. En conclusion la charge en fer évaluée par le taux R2* peut être considérée comme un biomarqueur de l’atteinte nigrostriatale chez les sujets porteurs de la mutation associée à la neurodégénérescence. Son rôle causal dans l’apparition de celle-ci reste à étudier et son rôle pronostique doit encore être élucidé. 88 Abréviations utilisées dans le texte et les figures AAAD Décarboxylase d'acide aminé AD Autosomique dominant ADC Coefficient de Diffusion Apparent (Apparent Diffusion Coefficient) ADP Adénosine diphosphate AMS Atrophie multi-systématisée, aire motrice supplémentaire AR Autosomique récessif ASL Arterial Spin Labelling ATP Adénosine triphosphate BHE Barrière Hémato-Encéphalique BOLD Blood Oxygene Level Dependant CF Connectivité Fonctionnelle Cho Choline COMT Catéchol-O-méthyltransférase DICOM Digital Imaging and Communications in Medicine DTI Diffusion Tensor Imaging DWI Diffusion Weighted Imaging FA Anisotropie fractionnelle (Franctional Anisotropy) FSL FMRIB Software Librar GABA Acide γ-aminobutyrique Glx Glutamine-Glutamate GP Globus pallidus GPe Globus pallidus externe GPi Globus pallidus interne GSH Glutathion HFE Haemochromotosis-Related Protein 89 HY Score Hoehn et Yahr 1 Spectroscopie par résonance magnétique du proton IR Inversion Récuperation IRM Imagerie par Résonance Magnétique IRMf Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle IRP Iron Regulation Protein LC Locus Coeruleus LCR Liquide Céphalo-Rachidien LRRK2 Leucine-rich repeat kinase 2 M1 Zone motrice primaire MAO Monoamine oxydase MD Diffusivité moyenne (Mean Diffusivity) mln Myo-inositol MP Maladie de Parkinson MPI Maladie de Parkinson Idiopathique MPP 1-méthyl-4-phénylpyridinium MPTP 1-méthyl-4-phényl-1,2,3,6-tétrahydropyridine NAA N-acétylaspartate NGC Noyaux gris centraux NIfTI Neuroimaging Informatics Technology Initiative NST Noyau sous thalamique 31 Spectroscopie de résonance magnétique du phosphore PCr Phosphocréatine PCM Pédoncule Cérébral Moyen PDQ Parkinson Disease Questionnary PHRC Programme Hospitalier de Recherche Clinique PNS Polymorphismes nucléotidiques simples PSP Paralysie supra-nucléaire progressive H-SRM P-SRM 90 RF Radio-Fréquence ROI Régions d'intérêt SB Substance blanche SG Substance grise SN Substance noire SNc Substance Noire pars Compacta SNr SN pars reticulata SPECT Single Photon Emission Computed Tomography SRM Spéctroscopie par resonance magnétique SWI lmagerie de susceptibilité magnétique TE Temps d’echo TEP Tomographie par Emission de Positrons TM Transfert de magnétisation TR Temps de relaxation TTM (MRT) Taux de transfert de magnétisation (Magnetisation Transfer Ratio) UPDRS Unified Parkinson’s Disease Rating Scale VBM Morphométrie voxel à voxel (voxel based morphometry) VPP Valeur Prédictive Positive 91 Bibliographie [1] D.C. 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