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Comment avez-vous procédé pour mini-
miser l’impact de la LGV sur les milieux
naturels traversés par la ligne ?
Une première « photographie » complète
des milieux naturels a été faite dès les
études préliminaires en 1995 et complé-
tée ensuite au gré des différentes phases
de préparation du projet : avant-projet
sommaire, enquête publique, avant-
projet détaillé et finalement dans
les dernières études de préparation
des travaux de 2004 à 2006.
Le repérage des axes de déplacement
des mammifères a été mené par des
observations sur le terrain, en liaison
avec les fédérations de chasse locales.
Des comptages des amphibiens
et des oiseaux ont été effectués
par des bureaux d’études spécialisés.
Des inventaires ont été réalisés pour
les insectes et les reptiles. Tout cela
en tenant compte des saisons, des
périodes de reproduction, des axes
de déplacement, ou encore de la
proximité avec des zones humides.
Ces observations de l’état initial du milieu
naturel nous ont permis de conce-
voir des aménagements adaptés aux
modes de vie des animaux (mares de
substitution, passages faune…).
Comment allez-vous vérifier que ces
mesures sont réellement efficaces ?
Tout un dispositif a été mis en place
pour surveiller la bonne application
de ces mesures par les entreprises
de génie civil (voir p. 6). Des contrôles
très stricts sont d’ailleurs effectués
par des bureaux d’études spécialisés
et des experts rattachés au ministère
de l’Écologie, du Développement et de
l’Aménagement durables.
Au-delà de ce suivi en phase chantier,
RFF est soumis à une obligation
de résultat et devra produire
un bilan environnemental cinq ans
après la mise en service de la ligne.
De nouveaux relevés seront donc
réalisés, afin de comparer les effectifs
des espèces présentes avec la photo-
graphie de l’état initial, et de contrôler
l’efficacité réelle des ouvrages et des
aménagements réalisés.
UNE OBLIGATION DE RÉSULTAT
➜ AMPHIBIENS
Grenouilles, crapauds, tritons et salamandres figurent
parmi les groupes les plus menacés en France et en
Europe, en raison de la disparition, de la dégradation
et de la pollution de leur habitat : les zones humides.
Des inventaires détaillés de
terrain, réalisés tous les ans
depuis 2003, ont mis en lumière
des sites recelant des amphibiens.
Dans certains cas, la LGV perturbe
les migrations de ces espèces du site
forestier où elles hibernent vers leur
site de reproduction (mares, ornières,
étangs, ruisseaux, etc.).
Pour protéger les amphibiens dans leurs déplacements,
RFF a privilégié la création de milieux équivalents se subs-
tituant aux mares existantes : 27 mares de reproduction
seront réalisées sur les 140 km en chantier.
Ces mares sont créées de part et d’autre de la ligne,
afin d’éviter l’isolement des populations. Certaines mares
existantes non concernées par la LGV ont également été
améliorées par curage et agrandissement.
➜ CHAUVES-SOURIS : LE MINIOPTÈRE DE SCHREIBERS
Les chiroptères, ou chauves-souris, sont un groupe
très vulnérable, dont les effectifs sont en fort déclin,
en raison de la raréfaction de leurs habitats, des insectes
dont elles se nourrissent et des territoires de chasse.
Ces espèces s’appuient sur les structures végétales
linéaires de type haies ou ripisylves (végétation de bord
de cours d’eau) pour se déplacer et chasser les insectes
dont elles se nourrissent.
Depuis plus de dix ans, des études ont été menées sur le
déplacement des chauves-souris dans le secteur de la mine
d’Ougney (Jura), site européen majeur de repro-
duction et d’hibernation accueillant notamment
le minioptère de Schreibers. Équipées d’émetteurs permet-
tant de suivre leurs trajets nocturnes, 19 chauve-souris
ont livré les secrets de leurs zones de chasse : seules 5 à 8 %
d’entre elles coupent l’axe de la future ligne, les autres
se dirigeant majoritairement dans la forêt.
Après simulations grandeur nature des futurs ouvrages
sur les trois sites de franchissement de la ligne, des rideaux
d’arbres ont été conçus pour inciter les chauves-souris
à passer sous les ouvrages ou au-dessus de la ligne,
afin d’éviter toute collision éventuelle avec les trains.
Cette opération était une première en France.
Selon les termes de la loi du 13 février
1997 qui a créé RFF, les missions
d’aménagement, de développement,
d’exploitation et de mise en valeur du
réseau ferré national doivent s’inscrire
dans une logique de développement
durable.
RFF veille à concilier les contraintes
techniques liées à la construction
des ouvrages avec les contraintes
économiques et les exigences environ-
nementales qui sont au cœur de la
réussite de tout projet d’infrastructure
ferroviaire. Lors de la préparation
des projets, RFF fait appel à des spé-
cialistes, afin de mener des études
de recensement et d’analyse des
milieux, des habitats, des espèces
et des corridors biologiques dans
les zones traversées.
Pour compléter et affiner ces études,
une concertation est mise en place
avec l’ensemble des acteurs locaux
concernés – riverains, élus, associa-
tions, entreprises, etc. Les échanges
qui en découlent permettent de
préparer les mesures de protection
des écosystèmes avant et pendant
le chantier de construction : dépla-
cement et re-création de milieux,
adaptation du calendrier des travaux
aux périodes de nidification et
de reproduction, réalisation de
passages spécifiques pour la faune,
suivi scientifique d’espèces d’intérêt
écologique, établissement de bilans
environnementaux…
LA PRÉSERVATION DES ITINÉRAIRES DE DÉPLACEMENT DES ANIMAUX
L’impact principal d’une ligne nouvelle à l’égard des
mammifères et des amphibiens réside potentiellement
dans l’effet de coupure de leurs axes de déplacement.
➜ GRANDE ET PETITE FAUNE
Pour les mammifères, les recensements ont consisté à
rechercher des indices de présence par repérage des em-
preintes au sol, des terriers et des cavités, des déjections…
La grande faune présente sur la Branche Est de la LGV
Rhin-Rhône est principalement constituée de chevreuils
et de sangliers, et plus rarement de cerfs. Ils ont besoin
de se déplacer entre grands massifs forestiers sur de vastes
territoires pour se nourrir et se reproduire.
Ces déplacements ont donc aussi vocation à assurer
le brassage génétique des populations.
Sur les 140 km de linéaire, 37 passages à gibier ont été prévus
en concertation avec les associations locales et les élus
locaux. Deux types de passages sont réalisés : les passages
supérieurs et les passages inférieurs. Ils sont spécifiques,
autrement dit entièrement réservés à la faune, ou mixtes,
c’est-à-dire couplés avec le rétablissement d’un cours d’eau
ou d’un chemin agricole ou forestier.
On entend par petite faune sur les territoires traversés par
la LGV une grande diversité de petits mammifères carnivores
(renards, blaireaux, martres, fouines, chats sauvages, etc.),
rongeurs et insectivores (lapins, hérissons, etc.).
La LGV constitue pour eux un obstacle aux déplacements
avec un risque d’isolement des populations. Pas moins de
51 passages petite faune seront aménagés spécifiquement,
et les petits mammifères pourront également utiliser tous
les autres ouvrages : passages grande faune, ouvrages
hydrauliques ou voies agricoles.
En phase d’exploitation, la ligne est clôturée sur l’ensemble
de sa longueur afin d’éviter l’intrusion d’animaux sur les
voies.
Anne Petit, responsable Environnement
de RFF à Besançon, a préparé le projet
durant plus de dix ans.
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LE DÉVELOPPEMENT DURABLE DANS LES GÈNES DE RFF
. . . Passage grande faune – LGV Est européenne
Principales routes de vol de la colonie de minioptères d’Ougney.
La largeur des flèches traduit le degré de fréquentation de chaque route.
Les demi-cercles localisent les secteurs de la LGV croisant les routes de vol.
Bois de la Reime
Vitreux
Ougney
Balançon
LGV
. . . Le crapaud sonneur
à ventre jaune