Année 2008-2009 Cours de Sédimentologie (GEOL-F-204) Processus d’érosion mécanique Xavier Devleeschouwer Altération physique (érosion) 1/109 L’érosion Elle correspond à la mobilisation des produits de l’altération. Une fois libérés, ces produits sont transportés par l’air, l’eau, la glace, etc. laissant certaines « formes d’érosion » ou de paysages caractéristiques de l’érosion sur le massif rocheux qui est soumis à l’altération. On va détailler ci-après les formes d’érosion les plus courantes. 1. EROSION EOLIENNE Le vent qui souffle sur une surface désertique emporte les particules les plus fines et peut permettre à la surface rocheuse d’apparaître (hamadas sahariennes), on parle de déflation. Les hamadas sont des plateaux rocheux tabulaires limités par des falaises. Ils sont d'origine sédimentaire, le plus souvent calcaire. Lorsqu'ils sont recouverts de grès, ils sont nommés tassilis (par exemple: Tassili N’Ajjer en Algérie). En général la surface montre de la roche nue, lissée par l'érosion éolienne. Le Tassili N'Ajjer est un haut plateau aride, situé à plus de 1 000 mètres d'altitude et s'étendant au centre du Sahara sur 50-60 km d'Est en Ouest, et sur 800 km du Nord au Sud. Sur toute sa surface se dressent des formations rocheuses fortement érodées, qui évoquent de loin les ruines des villes antiques. Ce paysage lunaire fut créé par l'érosion. Altération physique (érosion) 2/109 Résultat de la déflation Altération physique (érosion) Le Tassili du Hoggar Algérie 3/109 Altération physique (érosion) Le Tassili du Hoggar Algérie 4/109 Altération physique (érosion) Le Tassili du Hoggar Algérie Sahara, Algérie, Tadrart 5/109 Altération physique (érosion) 6/109 Quand le sol comporte des roches de taille variée, la déflation élimine la fraction la plus fine, laissant sur place un désert pavé de cailloux (reg). Le reg (serir, en Libye) est le type de désert le plus répandu, formé par des étendues de cailloux arrondis et de graviers, particulièrement inhospitalières; seuls quelques très rares espèces, comme l'addax et l'acacia épineux, réussissent à y survivre. C'est le Tanezrouft en Algérie, le Ténéré du Tafassasset au Niger, ou encore le reg libyen. Par opposition à l'erg qui est le désert de sable, produit final de l'érosion des reliefs, constitué par un ensemble étendu de dunes sans cesse remodelées par le vent. Il ne couvre que 20% de la superficie du Sahara. Les dunes sont généralement regroupées en cordon de quelques dizaines de mètres; elles peuvent atteindre plus de 300 m de hauteur. Elles sont sans cesse en mouvement : poussées par les vents, leurs grains de sable se propagent par saltation. Principaux ergs : Grand Erg oriental, Grand Erg occidental, Erg de Mourzouk, Erg Makteir, Erg Admer, Ténéré, Erg Oubari, Erg Mehedjebat, … Observations sur cette photo ? Altération physique (érosion) Le Grand Erg Oriental de Tunisie 7/109 Altération physique (érosion) Le Grand Erg Oriental de Tunisie 8/109 Altération physique (érosion) 9/109 Dunes de sable (mégadunes) dans le désert de Gobi Altération physique (érosion) Grand Erg Oriental, Tunisie Rose des sables 10/109 Altération physique (érosion) 11/109 Les yardangs désignent des rides érodées sous l’action du vent qui se forment dans des matériaux cohésifs. -> Plusieurs processus sont à l‘origine de ces rides: l’abrasion éolienne, la déflation, l’incision fluviatile, les figures de dessication, l’altération et les mouvements en masse (selon Goudie 1999). • L’abrasion est importante dans les portions inférieures des yardangs comme l’atteste les pentes polies, la présence de flûtes et de pentes décapées par le sable ainsi que le sapement de la face sous le vent très inclinée et des pentes latérales. • La déflation est probablement importante sur les sédiments plus tendres et l’incision fluviatile, causée par des orages intenses occasionnels, doivent jouer un rôle au début de la formation de la yardang. Ces processus créent des dépressions initiales dans lesquelles le vent va être canalisé. • Par ailleurs, les pentes raides des yardangs favoriseront des mouvements de masse le long de leurs pentes. Les yardangs se caractérisent par un rapport de 18.7:9.9:2.7:1 entre le volume, la longueur, la largeur et la hauteur (selon Goudie et al. 1999). Les yardangs varient en tailles entre quelques centimètres (micro-yardangs), quelques mètres de longueur et de largeur (meso-yardangs) à plusieurs dizaines de mètres de hauteur et plusieurs km de longueur (mega-yardangs) Altération physique (érosion) 12/109 Un vent très fort, souvent de direction unidirectionnelle et ayant une charge de matériaux en suspension, peut sculpter des yardangs. -> Les yardangs sont des des crêtes allongées, rocheuses (souvent de grès, de calcaire et rarement sur des roches cristallines) ou composées de matériaux consolidés ou semiconsolidés, séparées par des dépressions, creusées par l’action simultanée de l’abrasion du vent (sable) et de la déflation. Les yardangs sont au moins 3 fois plus longues que larges. Elles sont soit isolées soit en groupe (on parle de champs). Elles sont souvent plus hautes et plus larges dans la partie qui fait face au vent et deviennent plus petites et plus étroites dans la partie à l’abri du vent. On parle de koukour en Tunisie, de kalut en Iran et de « crêtes et couloirs » au Tchad Altération physique (érosion) - Mega yardangs 13/109 Altération physique (érosion) - Megayardangs – Lut Desert – 14/109 Iran Localisation des principales zones de meso- et de mega-yardangs et du type de roche d’après Goudie A.S. (2007) Mega-Yardangs: a global analysis. Geography Compass 1/1 65-81. Altération physique (érosion) - Megayardangs – Lut Desert – 15/109 Iran Altération physique (érosion) - Megayardangs – Lut Desert – 16/109 Iran Localisation des zones hyperarides et des principales zones de megayardangs d’après Goudie A.S. (2007) Mega-Yardangs: a global analysis. Geography Compass 1/1, 6581. Les mega-yardangs sont essentiellement observées: - dans les environnements hyper-arides, - pour des régions avec des précipitations totales < 50 mm/an, - dans les zones sèches où l’abrasion est maximale, le couvert végétal minimal et l’abrasion par le sable peut se produire, - dans les zones où la direction du vent est unidirectionnel voire pour des directions bimodales étroites (associés avec des dunes en barchanes), - se forment à partir de roches homogènes comme des grès - elles sont vieilles et constituent des figures formées pendant des millions d’années (avant le Pléistocène). Altération physique (érosion) - Megayardangs – Lut Desert – 17/109 Iran Les yardangs (Désert de Lut en Iran 80 m de haut, photo en haut à gauche) sont plus étudiées actuellement car on a retrouvé dans la région équatoriale de Mars des rides (assimilées à des yardangs) de plusieurs dizaines de km de long, 200 m de haut et séparées par des vallées de 1 km de large (photo en haut à droite). La compréhension des processus géomorphologiques qui forment ces rides sur Terre est importante car elle pourrait permettre de comprendre les mécanismes de formation qui sont actifs sur la planète Mars. Photo en bas à droite: provient de Mars Global Surveyor, prise dans le flanc nord du Henry Crater, un ancien bassin d’impact. Largeur de l’image = 2.3 km (Nasa ©) Altération physique (érosion) 18/109 La déflation est responsable de la formation de grandes dépressions désertiques comme les chotts du Sahara ou les playas des déserts américains. La déflation s’exerce jusqu’à ce que le niveau hydrostatique soit atteint. Des eaux permanentes dans le désert sont rares. Quand les pluies apparaissent dans le désert, l’eau dévale les pentes des collines et forment des rivières temporaires dans des zones d’altitudes faibles avant évaporation ou percolation vers la profondeur du sol. Quand les eaux arrivent dans des zones très plates, elles peuvent converger et s’accumuler dans une dépression et former un petit lac qui peut subsister un certain temps. Ce qu’il reste après évaporation ou percolation de l’eau ce sont des sédiments (argiles, silts, du sel) qui forment une large surface craquelée appelée playa. Un lac de désert bien connu est la Mer Morte (Dead Sea) d’Israel et le Grand Lac Salé de l’Utah (USA – Great Salt Lake). Altération physique (érosion) 19/109 Black Rock Desert, Nevada, USA, Playa et Mud cracks Altération physique (érosion) 20/109 Altération physique (érosion) 21/109 Le terme de chott (arabe) indique une terre salée qui entoure une dépression fermée à lac temporaire. Cette dépression temporaire (appelée encore sebkha) est le lieu de précipitations de sels et donc d’évaporites. Les eaux proviennent du ruissellement, des eaux souterraines ou encore d’arrivées d’eaux marines périodiques. (voir évaporites, environnement de dépôts en domaine côtier) Les grains de quartz transportés par le vent polissent les cailloux résiduels, comme dans le reg, et façonnent des dreikanters ou des cailloux tétraédriques selon le nombre de faces, caractérisés par des facettes planes réunies par des angles émoussés. Les grains transportés eux-mêmes sont piquetés et mats. Ils présentent des figures en V liées aux chocs. La concentration des grains de sable à proximité du sol provoque une érosion différentielle qui est donc plus intense à la base des roches. Elle donne une morphologie de rochers en champignons. Vallée de la mort (USA) Sinaï (Egypte) Altération physique (érosion) 22/109 2. RUISSELLEMENT ET EROSION FLUVIALE En terrain argileux ou schisteux, après de fortes pluies, les eaux empruntent les fissures du sol, les élargissent progressivement en chenaux parallèles qui fusionnent par éboulement des crêtes qui les séparent. En même temps, les crêtes des chenaux reculent vers l’amont (érosion régressive). Ce processus est responsable de la formation des « bad lands ». En terrain calcaire, l’usure et la dissolution des roches par les eaux acides de ruissellement provoque la formation des lapiez (ou lapiés, lapiaz - nom originaire des Préalpes vaudoises et chablaisiennes). Il s’agit d’une surface creusée sur terrain calcaire caractérisée par des rigoles larges de 1 cm à 1 m séparées par des lames tranchantes. Les lapiez sont des formes d’érosion résultant de la dissolution à la surface et sur les fronts des couches calcaires, donnant une typologie très variée. Amorce de ravinement, Colombie Réseau coalescent de ravines, Italie Altération physique (érosion) 23/109 ▲ Réseaux coalescents de ravines, Lesotho Formation de « Bad lands » ▲ Espagne ◄ Ravines très profondes en Chine Altération physique (érosion) 24/109 La formation des cheminées de fées ou des demoiselles coiffées est lié à la présence d’une roche très résistante au sommet ou coiffant des roches plus tendre en dessous. L’altération par le ruissellement va éroder mécaniquement les roches les plus tendres en dessous et créer des aiguilles. Ces morphologies sont communes en montagne, dans les versants raides composés de moraines laissées par les glaciers. Ces dépôts sont particulièrement hétérogènes et contiennent des gros blocs résistants qui serviront de chapeau. C’est le cas des cheminées de fées du Colorado de Rustrel illustrées dans le chapitre sur l’altération chimique. Altération physique (érosion) 25/109 Cheminées de fées en Cappadoce, Goreme, Turquie Hoodoos au Canada Altération physique (érosion) 26/109 Les paysages ruiniformes se développent dans des formations hétérogènes qui présentent des différences de solubilité (résistance différente à la dissolution comme les alternances dolomie-calcaire) ou de dureté (alternances de sables et de grès). Cirque dolomitique et paysage ruiniforme de Moureze, France Altération physique (érosion) 27/109 Les chaos granitiques proviennent de la mobilisation des sables issus de la désagrégation des roches granitiques ce qui dégage les boules de granite laissées sur place comme on peut l’observer en Bretagne (Ploumanach, France). Chaos granitique de Bretagne à Ploumanach Noter l’arène granitique (sable rosé) Le rocher: la bouteille en équilibre Altération physique (érosion) 28/109 Le relief monoclinal de certaines régions se caractérise par des couches stratigraphiques régulièrement inclinées avec des pendages modérés. Les couches les plus dures, en saillie (falaise), forment des cuestas ou côtes dont le côté le plus raide, tourné en sens inverse du pendage s’appelle le front, et le côté le moins raide, le revers. Une dépression longe le pied de la falaise et est creusée dans les couches tendres. Lorsqu’au sein de la couche dure s’interstratifie un horizon plus tendre, elle peut donner une cuesta double. L’érosion en s’attaquant aux couches dures, fait reculer les cuestas dont l’extension passée est attestée par la présence de lambeaux isolés de leurs terrains formant des buttes témoins. Ces dernières sont constituées par un reste de la couche dure protégeant généralement des formations tendres moins attaquées par l’érosion qu’aux alentours. Si le reste de la couche dure est enlevé, il persiste généralement un relief appelé avant-butte qui, à son tour sera la proie de l’érosion. Dans ce type de relief, on caractérise les pentes topographiques par rapport au pendage des couches. On parlera de versant cataclinal (incliné dans le même sens des couches), de versant anaclinal (en sens contraire) et de dépression orthoclinale (perpendiculaire au pendage des couches). Ces termes sont également utilisés pour les rivières et cours d’eau qui ont des pentes correspondantes mais on utilise également la terminologie suivante: Rivière cataclinale ou conséquente, rivière anaclinale ou obséquente et rivière orthoclinale ou subséquente Représentation schématique d’une cuesta en carte géologique et en bloc 3D Altération physique (érosion) 29/109 La différence de résistance à l’érosion des deux formations conditionne le caractère plus ou moins abrupt du front. Le pendage et l’épaisseur de la formation résistante contrôlent l’aspect plus ou moins rectiligne du front: une formation mince ou de faible pendage donnera un front très découpé par l’érosion et donc très sinueux, au contraire d’une formation résistante épaisse ou de pendage élevé. Rivière obséquente Graphe d’une cuesta provenant du cours de F. Boulvain (ULg) Altération physique (érosion) 30/109 La Lorraine belge offre un bel exemple de relief en cuestas, avec des formations résistantes (grès, calcaire), alternant avec des formations plus tendres (argile, marne), affectés d’un très faible pendage vers le sud. Les torrents Les torrents forment la partie amont des systèmes fluviatiles et sont localisés dans les régions les plus déclives. Le cours d’un torrent peut se subdiviser en trois parties: - le bassin de réception en forme de cirque où se rassemblent les eaux de ruissellement et où dominent les processus d’érosion, - le chenal d’écoulement souvent étroit et de forte pente, - le cône de déjection où sont déposés les matériaux mobilisés. A un moment donné et en un lieu déterminé de son cours, tout écoulement d’eau possède une certaine énergie. Cette énergie dépend du débit et de la vitesse qui est elle-même fonction de la pente longitudinale du lit du torrent. Une partie de l’énergie du cours d’eau est utilisée par le transport de la charge (sable, grains, galets, etc.) et une autre partie est consommée par les frottements internes entre les filets d’eau, surtout si le régime est turbulent. Le reste de l’énergie sert à l’érosion. On parle d’énergie brute pour l’énergie totale du cours d’eau et d’énergie nette pour celle qui est utilisée pour éroder. Si le cours d’eau n’a pas assez d’énergie, il n’érode plus et dépose sa charge. Les rivières et fleuves En s’enfonçant par érosion à travers le paysage, les cours d’eau creusent des vallées qui possèdent un profil caractéristique en V (par opposition aux vallées glaciaires qui possèdent un profil en U). En terrain massif et résistant comme des grès, la tendance est au creusement vertical avec la formation de gorges. Altération physique (érosion) L’eau qui dévale le long d’une pente devient un cours d’eau quand il y a assez d’eau pour former un chenal pour contenir l’eau. Lors de la première phase, l’eau peut-être transportée uniquement après une averse ou la fonte de neige. On parle alors de cours d’eau intermittent. On dit que le cours d’eau est permanent quand il a recoupé la vallée suffisamment pour que l’eau souterraine jaillisse dans le lit et permettent à l’eau de s’écouler entre deux averses. Toute la porosité et les fractures du sol sont remplies avec de l’eau jusqu’à un certain niveau. La surface supérieure de cette zone saturée en eau est appelée la surface de nappe phréatique. Le terme de cours d’eau est utilisé pour indiquer un courant chenalisé quelque soit la taille, depuis le plus petit ruisseau jusqu’au grand fleuve de l’Amazone. Un cours d’eau a une tendance naturelle a rejoindre son niveau de base. 31/109 Altération physique (érosion) 32/109 Le niveau de base correspond au point auquel un cours d’eau rejoint l’altitude du corps d’eau le plus grand comme un lac ou l’océan en fin de parcours. Par la gravité, les cours d’eau s’écoulent vers le niveau de sa destination finale le plus vite possible. Au plus grande est la différence d’altitude entre la source du cours d’eau et sa destination, au plus importante sera sa force érosive. Pour la plupart des cours d’eau, le niveau de base correspond à celui du niveau marin. Pour les affluents qui rejoignent de plus gros cours d’eau, le niveau de base est le point d’entrée ou le point de confluence. La vitesse d’un cours d’eau correspond à la distance parcourue par l’eau qui s’écoule par unité de temps donnée. Certains cours d’eau atteignent péniblement 0.8 km/h alors que les plus rapides atteignent 32 km/h. La capacité d’un cours d’eau a éroder et transporter des matériaux est directement reliée à sa vitesse. Plusieurs facteurs déterminent la vitesse du cours d’eau: 1°) le gradient, 2°) la forme, la taille et la rugosité ou les inégalités du chenal et 3°) le débit. - le gradient ou la pente du chenal du cours d’eau, il s’agit de la perte d’altitude d’un cours d’eau sur une distance donnée. Le gradient peut varier au cours du parcours et d’un cours d’eau à un autre: le Mississipi a un gradient de 10 cm/km alors que des cours d’eau en montagne ont des gradients de 40 m/km. - le profil de la forme du chenal détermine la quantité d’eau qui entrera en contact avec le chenal et donc déterminera l’importance du frottement. En observant les trois formes de la figure suivante, on en déduit que c’est la forme semi-circulaire qui a le moins de surface de frottement (plus petit périmètre) et donc c’est ce type de chenal qui permettra au cours d’eau d’avoir la vitesse la plus grande. - le débit d’un cours d’eau est la quantité d’eau qui passe en un certain point pour une unité de temps donné, elle s’exprime souvent en m³/s. On multiplie la surface du profil par la vitesse pour obtenir le débit. Altération physique (érosion) Quel est le plus rapide des 3 profils ? 33/109 Altération physique (érosion) 34/109 Le débit de l’Amazone est de 177 150 m³/sec, 10 fois plus que le Mississipi. Le débit est cependant variable puisqu’il dépend notamment des précipitations ou de la fonte des neiges. Quand le débit change, la largeur, la profondeur et la vitesse du cours d’eau changent également. Une des façons d’étudier un cours d’eau est d’examiner son profil longitudinal. Ce profil est simplement la vue en coupe d’un cours d’eau depuis sa source jusqu’à l’embouchure lorsqu’il rencontre une autre masse d’eau. Le profil se caractérise par une diminution graduelle du gradient tout au long du parcours. Le débit mesuré en différents endroits du parcours augmente continuellement au plus on se rapproche de l’océan … (?? Pourquoi ??) Altération physique (érosion) 35/109 Si le débit est le plus grand à proximité de l’océan, cela implique également que la largeur, la profondeur et la vitesse sont plus importants. La réalité n’est pas celle que retient l’esprit humain lorsqu’il observe un torrent de montagne car ce dernier semble très véloce. Il s’agit d’une impression car la taille et la forme du chenal près de l’embouchure d’un cours d’eau constituent des facteurs induisant des vitesses très importantes. En amont, l’étroitesse du chenal, les obstacles, etc. contribuent à ralentir le flot voire même à le projeter dans plusieurs directions. Trois paramètres caractérisent les cours d’eau: 1°) l’érosion, 2°) le transport et 3°) le dépôt. 1°) L’érosion Par les matériaux en suspension, le cours d’eau érode continuellement le chenal. Si le cours d’eau s’écoule sur un socle rocheux, la charge en suspension aura un pouvoir abrasif. 2°) Le transport La charge transportée par un cours d’eau l’est sous trois formes: charge dissoute en solution [dissolved load], charge en suspension [suspended load], charge sur le fond [bed load]. La quantité de matériel transporté par voie dissoute est très variable et dépend du climat et de l’environnement géologique. Elle s’exprime en parts par million (ou ppm) et avoisine 120 ppm en moyenne pour l’ensemble des rivières dans le monde. L’essentiel de la charge transportée l’est en suspension, cela concerne les argiles, les silts et les sables essentiellement mais des particules plus volumineuses peuvent être emportée par suspension également pendant les périodes d’inondation qui charrient une charge en particules plus élevées. Altération physique (érosion) 36/109 Des matériaux solides de taille plus importante sont transportés sur le fond du cours d’eau et provoquent une action érosive importante par broyage [grinding action]. Ces particules se déplacent sur le fond par roulement, par glissement et par saltation. On mentionne pour le Mississipi qui se jette dans le Golfe du Mexique qu’il entraîne avec lui 750 millions de tonnes de matériel chaque année dont 500 millions en suspension, 200 millions dissoute et 50 millions correspondent à la charge plus lourde. 3°) Le dépôt Quand la vitesse du cours d’eau diminue, sa capacité de transport diminue et les particules les plus lourdes par gravité vont se déposer. Les sédiments qui se déposent par ce processus sont appelés des alluvions [alluvium]. Une partie de la charge en suspension peut sédimenter dans le chenal, la majeure partie sédimente à l’embouchure du cours d’eau avec le lac, la mer ou l’océan. Le dépôt qui en résulte est un delta. Figure A page suivante La sédimentation des particules les plus lourdes se fait immédiatement dans le delta sous la forme de couches inclinées [foreset beds] qui se forment dès qu’il y a une rupture de pente. Les couches se déposent le long de la pente successivement et le front de dépôt progresse vers le large. Ces couches de sédiments grossiers sont généralement recouvertes par de fines couches horizontales [topset beds] déposées pendant les périodes d’inondation. Les particules les plus fines vont se sédimenter à une certaine distance de l’embouchure en couches horizontales (ou presque) appelées couches deltaïques de fond [bottomset beds]. Figure B page suivante Au fur et à mesure de la croissance du delta vers le large, le gradient du cours d’eau diminue et ce dernier cherche un chemin plus direct vers le niveau de base. La morphologie « palmée » se développe progressivement. Le chenal principal finit par se subdiviser en plusieurs effluents [distributaries] de taille plus petite. Altération physique (érosion) 37/109 La plupart des deltas sont caractérisés par les déplacements de ces chenaux. Après plusieurs déplacements du chenal principal, le delta grossit pour donner une forme idéale triangulaire qui ressemble à la lettre Δ (delta) du Grec qui est à l’origine du terme. Néanmoins beaucoup de deltas n’ont pas cette forme idéale qui est modifiée à partir de la configuration côtière, à partir des variations de la force et de la nature de l’activité des vagues. Altération physique (érosion) 38/109 Altération physique (érosion) 39/109 Altération physique (érosion) 40/109 Les différentes formes des deltas Altération physique (érosion) 41/109 Altération physique (érosion) 42/109 Formation des lobes du delta du Mississipi au cours du temps Altération physique (érosion) 43/109 Formation des lobes du delta du Mississipi au cours du temps Altération physique (érosion) 44/109 Zones d’érosion Site 1: 18-230 m/an sur 1 siècle Site 2: 10 m/an sur 90 ans Site 3: 1,3 m/an sur 80 ans Site 4: 3,8 m/an sur 80 ans Zones d’accrétion A: 13-14 m/an entre 19701990 Transport vers le large (offshore) (I) 3,2 millions de m³/an (II) 1,48 millions de m³/an (III) 1,8 millions de m³/an Développement du delta du Nil au cours du temps Altération physique (érosion) 45/109 swamps Altération physique (érosion) 46/109 Altération physique (érosion) 47/109 Altération physique (érosion) 48/109 De nombreux fleuves ont des deltas qui s’étendent sur des milliers de km². Le delta du Mississipi a commencé à se former il y a des millions d’années et il s’étend vers le large sur 1600 km. Les cônes de déjection [alluvial fans] se développent typiquement quand un cours d’eau quitte une vallée étroite à fort gradient en zone montagneuse pour arriver soudainement dans une large plaine plate ou le fond d’une vallée. Le cône de déjection se forme donc en réponse à la chute brutale du gradient avec le changement de morphologie dans laquelle s’écoule le cours d’eau. Ces changements induisent une chute rapide de la vitesse et provoquent le dépôt rapide de la charge en suspension qui formera une accumulation de sédiments sous la forme d’un cône ou d’un éventail. Altération physique (érosion) Credit: USGS EROS Data Center; NASA A vast alluvial fan blossoms across the desolate landscape between the Kunlun and Altun Mountains that form the southern border of the Taklimakan Desert in China's XinJiang Province. The river appears electric blue as it runs out of the mountains at the bottom right corner of the scene and then fans out into scores of intricate, braided channels that disappear into the desert. Dry channels the river's former paths appear as silvery etchings at lower right. This scene was acquired by the ASTER instrument on NASA's Terra satellite on May 2, 2002. 49/109 Altération physique (érosion) 50/109 Un cône de déjection se forme dans la mer du Wrangell-St. Elias National Park en Alaska. Altération physique (érosion) 51/109 Sédiments d’un cône de déjection En Californie - Baja Altération physique (érosion) 52/109 Le point le plus élevé du cône de déjection [apex] se trouve à la sortie de la vallée et correspond à la zone où les sédiments les plus grossiers se déposent alors que les matériaux les plus fins sont transportés vers le large. Les rivières qui se situent dans de larges vallées à fond plat peuvent former dans le paysage des levées naturelles ou digues [levee] qui sont parallèles au chenal. Ces levées sont construites par les inondations successives de la plaine alluviale sur de longues périodes de temps. Quand un cours d’eau déborde de ses rives, sa vitesse diminue très vite et les particules les plus grossières sédimentent sur les bords du chenal. Dans le reste de la plaine alluviale, on a le dépôt des particules les plus fines. La taille des particules sédimentées diminue donc graduellement depuis les bords du chenal jusqu’aux limites de la plaine alluviale. Les levées ont donc une pente douce depuis les bords du chenal. Les levées du Mississipi atteignent 6 m de haut. Altération physique (érosion) 53/109 Une levée naturelle créée par le dépôt de sédiments grossiers pendant les inondations, Millport Slough, Siletz River Estuary Levée naturelle de la rivière Sheyenne, North Dakota, USA Altération physique (érosion) 54/109 La zone située à l’arrière de la levée est généralement peu drainée, il se forme des dépressions latérales humides [back swamps] ou marais. Un affluent qui tente de rejoindre une rivière qui possède une levée doit la longer parallèlement jusqu’à ce qu’il trouve le moyen de briser la levée ou de trouver une brèche pour se jeter dans la rivière. Ce type de cours d’eau est appelé un affluent yazoo [yazoo tributary] du nom de la rivière Yazoo qui longe parallèlement le Mississipi sur plus de 300 km. Certaines levées sont édifiées artificiellement le long des rivières pour contrôler et prévenir les inondations. Les levées artificielles ont des pentes plus fortes ce qui les distinguent des levées naturelles. Les sédiments qui ne peuvent se déposer dans la plaine alluviale par suite de la présence de levées vont décharger leur matériel sur le fond du lit du chenal. Ce processus comble progressivement le lit du chenal et impliquera à un moment donné qu’une inondation puisse à nouveau franchir la levée. Les levées artificielles doivent donc être rehaussées périodiquement ce qui n’est donc pas la solution finale aux problèmes d’inondation. Les vallées des cours d’eau On peut les diviser en deux grands types: celles en forme de V et les vallées larges à fond plat. Il existe cependant entre les deux toute une série d’intermédiaires. Dans les régions arides, les vallées étroites ont des parois quasi verticales par opposition aux régions humides à fortes précipitations qui provoquent l’érosion des pentes et donnent les vallées typiques en V. Ces vallées en V indiquent que le premier travail du cours d’eau est le creusement du chenal pour atteindre le niveau de base. Les figures les plus importantes de ce type de cours d’eau sont les chutes d’eau [waterfalls] et les rapides [rapids]. Cela se produit chaque fois qu’il y a une différence de résistance et d’érodibilité du socle rocheux recoupé par le lit du chenal. Altération physique (érosion) 55/109 Les roches résistantes forment des rapides et jouent le rôle d’un niveau de base intermédiaire en attendant de pouvoir recouper plus en profondeur dès que l’érosion aura éliminé la roche résistante. Les chutes d’eau correspondent à un changement lithologique important entre une falaise de roche très résistante et une série plus tendre en-dessous. Les chutes de Niagara sont un bel exemple. On a une couche de dolomite (Lockport Dolomite) très dure qui surmonte des shales tendres. L’eau en tombant va éroder la couche de shale au pied de la chute d’eau et provoquer à terme l’éboulement de blocs de dolomite par minage du pied de la falaise. Ce processus induit le recul de la falaise en amont. On considère que depuis la formation des chutes de Niagara, celles-ci ont reculées approximativement de 11 km. Quand un cours d’eau a creusé son chenal pour atteindre son niveau de base, l’érosion vers le bas diminue et l’érosion latérale prend le dessus. Le résultat est un élargissement de la vallée par érosion de chaque côté de la vallée alternativement. C’est de cette façon que se forme la plaine alluviale [floodplain]. On parle de plaine d’inondation érosive. Altération physique (érosion) Niagara falls – photo aérienne 56/109 42/91 Altération physique (érosion) 57/109 Dans une plaine d’inondation, le cours d’eau s’écoule selon des courbes qui balaient toute la surface de la plaine et qui sont appelées méandres [meanders]. Les méandres changent continuellement de position par érosion latérale des berges et vers l’aval du flot. La vitesse d’écoulement de l’eau est différente selon l’endroit du cours d’eau, la vitesse maximale se déplace toujours vers l’extérieur de la courbure (rive concave) et correspond à la zone d’érosion alors que la vitesse du courant est plus faible à l’intérieur de la courbe et permet le dépôt de matériaux (rive convexe). Des sables et des galets se déposent sur la berge intérieure. La taille du chenal cependant ne varie pas. Les méandres se déplacent latéralement mais aussi vers l’aval car l’érosion est plus forte dans un méandre qui est situé plus en aval qu’un autre. La présence de roches plus résistantes peut ralentir l’érosion et le déplacement du méandre situé en aval. Cela permet d’expliquer qu’un méandre en amont tente de capturer celui en aval. Altération physique (érosion) 58/109 Graduellement l’érosion du méandre en amont et celle du méandre aval vont réduire la portion de terrain ou [neck] qui les séparent pour finalement se rejoindre. Le courant empruntant alors le chemin le plus direct, ce segment ayant permis le recoupement du méandre est appelé [cutoff]. Le colmatage progressif des berges latérales peut isoler complètement l’ancien méandre qui est appelé un méandre abandonné ou [oxbow lake]. Une des solutions pour éviter les problèmes d’inondation est de supprimer les méandres en recoupant artificiellement le tracé du cours d’eau. Ce processus permet d’augmenter la vitesse du courant qui est capable alors d’emporter les matériaux déposés pendant les crues. Malheureusement, le pouvoir érosif augmente et l’érosion latérale des berges peut s’accentuer et provoquer l’élargissement du cours d’eau. C’est ce qui est arrivé avec la Blackwater River au Missouri où un pont a été reconstruit trois fois de suite en 17 ans suite à l’effondrement des piles situées sur des berges érodées. A chaque fois le pont a été reconstruit sur une plus grande longueur pour enjamber la rivière. Une rivière tend cependant toujours à retourner vers la formation de méandre si elle se situe dans une plaine d’inondation. Ceci explique que certains cours d’eau sont complètement canalisés. Altération physique (érosion) 59/109 Les méandres du Mississipi observer les nombreux … Altération physique (érosion) Les méandres de la rivière Tigre en Argentine 2 observations à faire sur la photo 60/109 Altération physique (érosion) 61/109 Trois étapes caractérisent l’évolution et le développement d’une vallée : la vallée sera nommée jeune, matûre ou ancienne en fonction de critères morphologiques observables. La présence de rapides, de chutes d’eau traduit la force de l’érosion. La forme de la vallée en V, un cours d’eau assez rectiligne, sans méandres et pas de plaine alluviale sont les caractéristiques d’une vallée jeune (A). Quand un cours d’eau atteint sa maturité (B,C), l’érosion verticale diminue et l’érosion latérale prend le dessus. Il forme la plaine alluviale et des méandres. Le recoupement de méandres, la formation de méandres abandonnés et certains cours d’eau peuvent former des levées naturelles. Une vallée est ancienne (C) quand elle a une plaine alluviale nettement plus grande que la largeur des méandres du cours d’eau qui subsistent. La tâche principale n’est plus l’érosion mais le remaniement des matériaux précédemment déposés dans la plaine d’inondation. Des levées naturelles, des marais et des affluents yazoo sont observés. Altération physique (érosion) 62/109 Le terrain sur lequel se trouve un cours d’eau peut subir un soulèvement [uplift] et provoquer un réajustement du niveau de base qui entraînera le cours d’eau a redémarrer son érosion verticale. Une vallée ancienne peut voir son cours d’eau arrêter l’érosion latérale et éroder verticalement la plaine d’inondation à un niveau inférieur au précédent. Ce phénomène peut se produire plusieurs fois. Les rivières de ce type sont rajeunies [rejuvenated] et les méandres sont encaissés [entrenched meanders]. Les résidus de la plaine d’inondation ancienne sont préservés sous la forme de surfaces plates qui se trouvent étagées sur les bords de l’actuel cours d’eau, on parle alors de terrasses [terraces]. Le temps nécessaire à une vallée voire un cours d’eau pour parcourir les trois stades dépend de nombreux paramètres dont la nature des roches, la force de l’érosion, le réajustement par rapport au niveau de base, la distance qui le sépare de la mer ou de l’océan … On peut imaginer qu’une rivière, dont la source n’est pas très distante de l’embouchure, dont le dénivelé est faible et les roches tendres, peut passer les différents stades en plusieurs centaines d’années alors que l’on a estimé à plus de 10 millions d’années (Ma) le temps nécessaire à la rivière Colorado pour entailler les formations rocheuses. The Goose Necks (San Juan River), Utah Des méandres encaissés Altération physique (érosion) 63/109 Altération physique (érosion) 64/109 Altération physique (érosion) 65/109 Environnement domaine tidal Environnement d’estuaire soumis à l’action des vagues d’estuaire en Altération physique (érosion) 66/109 3. EROSION KARSTIQUE ET EAUX SOUTERRAINES Le premier travail d’érosion des eaux souterraines est de dissoudre les roches (essentiellement calcaire, dolomies, etc.). Les calcaires sont quasi insolubles dans les eaux pures mais de petites quantités d’acide carbonique suffisent à dissoudre la calcite qui est emportée en solution. Les formes d’érosion issues de l’activité des eaux souterraines dérivent d’une région de l’Istrie, non loin de Trieste en Slovénie (Kras en Slovène, Karst en Allemand). Le résultat le plus spectaculaire de l’érosion souterraine est la formation de cavernes ou de grottes dont les dimensions sont variables jusqu’à 14 fois la taille d’un terrain de football. L’eau s’inflitre dans le sol à la faveur des joints, des diaclases et des fractures qu’elles dissolvent progressivement, entaillent et donnent naissance aux grottes et à des réseaux de galeries souterraines longues parfois de plusieurs dizaines de km comme dans les grottes de Mammoth Cave aux USA (74 km). Une des figures les plus connues des grottes concernent les concrétions calcaires [dripstones] ou spéléothèmes qui se forment par le passage sans fin des gouttes d’eau chargée en carbonate de calcium dissous. La formation des spéléothèmes n’est possible que lorsque la grotte se situe au-dessus de la surface de la nappe phréatique. Dès que la grotte s’est remplie d’air par infiltration de l’eau à plus grande profondeur, la formation des stalactites démarre. Elles se forment à l’endroit où l’eau sointe par des fissures de la roche. Elles pendent du toit de la cavité. Le dépôt de calcite se fait sous la forme d’un anneau qui ceinture la goutte d’eau après dégazage d’un peu de dioxyde de carbone au contact avec l’air ou par évaporation de la goutte et précipitation de calcite. A chaque goutte qui passe, un anneau infinitésimal se précipite autour et donne naissance à une stalactite creuse à l’intérieur. La goutte s’écoule dans le tube et finit par tomber et s’écrase sur le sol de la grotte pour donner naissance aux stalagmites qui vont s’élever progressivement. Elles sont massives, n’ont pas de tube central et sont plus rondes en apparence. Lorsqu’une stalagmite et une stalactite fusionnent, on parle de pilier. Altération physique (érosion) Formation de stalactites dans la grotte de Thouzon France Spéléothèmes dans la Grotte de Villars, France Grotte de Han-sur-Lesse et spéléothèmes 67/109 Altération physique (érosion) 68/109 On trouve dans les cavités plusieurs types de concrétions: - les stalactites, cônes formés par l'eau qui dégouline de la voûte, croissent de haut en bas ; - les stalagmites, cônes formés par l’éclatement sur le sol des gouttes d’eau issues du plafond, croissent du bas vers le haut ; - les excentriques, concrétions allongées, fines, recourbées dans tous les sens ; - le mondmilch (lait de lune), dépôt minéral prenant la forme d'une pâte blanchâtre, tendre lorsqu'hydratée, crayeuse lorsqu'asséchée ; - les fistuleuses (macaronis), fines concrétions (tube de 6 à 8 mm) fréquentes, formées par le suintement d'eau provenant d'une étroite fissure dans la voûte; - les gours, concrétions en forme de petits barrages situés en travers de galeries à faible pente où la circulation de l'eau sur le sol est active mais pas torrentielle ; - les draperies, concrétions ondulées formées par un dépôt de calcite sur le trajet d'une eau percolant le long d'une arête sinueuse ; - les colonnes (piliers), soudures d'une stalactite et d'une stalagmite. L’ensemble des phénomènes karstiques souterrain correspondent à l’endokarst alors que les formes karstiques aériennes correspondent à l’exokarst. Altération physique (érosion) 69/109 La topographie karstique est complexe et se manifeste en surface par de nombreuses formes aériennes. L’absorption d’une rivière en surface par une perte laisse parfois la trace d’une vallée sèche en aval. La rivière poursuit son cours en souterrain et revient à l’air libre avec un débit important à partir d’une résurgence. On parle aussi de source vauclusienne du nom de la Fontaine de Vaucluse où naît la Sorgue, un affluent du Rhône. L’arrivée en surface d’eaux souterraines provenant de l’infiltration des eaux de ruissellement à travers les fissures et diaclases des roches calcaires se nomme exurgence. En Wallonie on évoque également pour la perte d’un cours d’eau (pérenne ou temporaire) dans une dépression bien marquée plus ou moins vaste le terme de chantoire. Les lapiez (voir dias 18) correspondent à des figures d’érosion en terrain calcaire. Les canyons ou gorges à parois verticales correspondent à des réseaux de galeries souterraines dont le toit s’est effondré. A ne pas confondre avec le Grand Canyon du Colorado qui est creusé par érosion fluviale du haut vers le bas !! Altération physique (érosion) 70/109 Altération physique (érosion) 71/109 Voici quelques types élémentaires de lapiez : - lapiez de ruissellement ou rigoles (eau circule sur le calcaire nu), - lapiez de paroi, - lapiez de fissures ou cannelures (découpage de la roche par les diaclases. L’eau y circule et intensifie la fracturation), - lapiez en méandres (lorsque la dalle est peu inclinée, il y a formation de petits méandres encaissés), - lapiez à empreinte de pas (surface horizontale, forme aiguë), - lapiez « tranchants » ou tsingy (formes très aiguës sur les bords, adoucies en surface), - lapiez émoussé (bordure des blocs émoussée car soumis à une plus forte érosion), - kamenitza (petit bassin fermé dû à la dissolution, souvent rempli d’eau – surcreusement), - table de lapiez et dallages calcaires (pavements) : lorsque les fissures constituent une trame quadrangulaire, les rainures définissent des tables de lapiez, dont les dalles glissent le long des versants en forte pente. Altération physique (érosion) 72/109 ▲ Lapiaz, d’âge Hauterivien, France Lapiaz, Chartreuse ▲ ◄ Lapiaz du Vercors, France Altération physique (érosion) 73/109 Les dolines sont des dépressions circulaire ou ovale, dont le fond est tapissé d’une argile rougeâtre (terra rossa). Cette argile de décalcification correspond au résidu de dissolution des calcaires. On les nomment également Sotchs dans les Causses (France) où elles permettent de médiocres cultures. Leur dimension va de quelques mètres à plusieurs centaines de mètres. Le mécanisme de formation des dolines est complexe, il existe 5 types de dolines selon Jennings (1985). La coalescence de plusieurs dolines donne un ouvala. Altération physique (érosion) Sotchs, Nord de Sorbs France 150-250 m de large et 50-70 m de profondeur 74/109 Vue aérienne d’une doline (sinkhole) en milieu urbain, sud de la Floride Doline en milieu urbain, Bowling Green, Altération physique (érosion) dias suivante dias suivante 75/109 Altération physique (érosion) 76/109 Subsidence doline Collapse doline Altération physique (érosion) 77/109 La doline de subsidence se forme dans les zones de karst recouvertes par des sols ou des matériaux non consolidés. Elle se forme rapidement par l’effondrement rapide des matériaux qui la recouvrent. Un trou cylindrique se crée qui se transformera en cuvette avec le temps. Ces dolines deviennent des étangs ou des lacs de taille variée. Les dolines d’effondrement se forment par effondrement brutal du toit d’une cavité souterraine ou d’une grotte voire par un mouvement en masse du réseau karstique par une chute soudaine de la surface de la nappe aquifère (en relation avec des pompages excessif). Ce type de dolines peut avoir une forme angulaire avec des parois verticales. Avec le temps, l’érosion des parois permettra de retrouver une forme circulaire ou ovale. Les dolines de cours d’eau alluvial se forment par disparition d’un cours d’eau à travers des dépôts d’alluvions vers le socle karstique rocheux. Les alluvions finissent par disparaître emportées en suspension par l’eau dans le réseau karstique. Une doline se forme dans les dépôts alluvionnaires. Altération physique (érosion) 78/109 Les poljés sont des plaines karstiques endoréiques larges de quelques centaines de mètres qui peuvent atteindre des dizaines de km de long. Souvent une rivière parcourt le poljé: elle sort par une résurgence à une extrémité et va se perdre dans un gouffre à l’extrémité opposée. Le fond du poljé est souvent accidenté par des buttes rocheuses qui correspondent à des résidus de karst qu’on appelle ‘hums’. Purdy (1974) note que la dissolution karstique en climat tropical et humide donne un karst à tourelles qui contraste avec la morphologie négative (doline, etc.) des climats plus tempérés. On retrouve ce type de morphologie karstique au Vietnam dans la baie d’Along (karst à tourelles ennoyées après par la mer) et en Chine du Sud (Guilin). Poljé à Planina, Slovénie Altération physique (érosion) Karst en tourelles, Guilin, Chine 79/109 Altération physique (érosion) 80/109 Karst en tourelles terrestres et inondés par la mer, Baie d’Along, Vietnam Altération physique (érosion) 81/109 3. EROSION GLACIAIRE Le mouvement d’un glacier solide se fait sous la forme d’un écoulement. Un des mécanismes correspond à des mouvements internes au sein de la glace. Au-delà d’une épaisseur de glace de 50-60 m, la glace située en dessous a une charge suffisante que pour devenir plastique et peut commencer à s’écouler. Le second mouvement est lié à la masse entière du glacier qui peut glisser sur le socle rocheux à l’exception de certains glaciers dans les régions polaires où le glacier est gelé au contact avec le socle rocheux. La vitesse d’écoulement est différente le long du profil du glacier. Les zones de contact avec la roche sont ralenties par le processus de friction et s’écoulent moins vite. Les couches de glaces les plus superficielles ne s’écoulent pas de manière plastique mais sont cassantes ce qui explique qu’elles se fissurent dès que les tensions en surface sont suffisantes en présence d’irrégularités de terrains. Ces fissures qui se forment en surface et qui s’ouvrent en profondeur jusqu’à 50 m sont des crevasses. La vitesse de progression d’un glacier est variable depuis des glaciers très lents qui permettent même à la végétation de se développer sur les débris rocheux accumulés à sa surface, d’autres se déplacent à des vitesses de plusieurs mètres par jour. Cependant la plupart des glaciers s’écoulent de manière très rapide pendant certaines périodes d’avancées rapides [surges] et reviennent à des périodes d’écoulement normal. Le Variegated Glacier près de Juneau en Alaska avança en 1982-83 de 54 m/jour pendant la période d’avancée rapide. Le mécanisme serait lié à la fonte de la glace à la base du glacier, l’eau jouant alors le rôle d’accélérateur de glissement. Le glacier se régénère dans la zone d’accumulation de neige en altitude et perd de la glace en aval dans la zone d’ablation. Plusieurs mécanismes induisent des pertes de glace: par rupture de gros blocs qui peuvent devenir des icebergs au contact avec la mer ou par fonte de la glace et libération d’eau sous la forme d’un torrent glaciaire à la base du glacier. Altération physique (érosion) 82/109 La limite des neiges persistantes sépare la zone d’accumulation, en amont où se déposent des neiges toute l’année, de la zone d’ablation en aval où plus de neige fond en été qu’il ne s’en accumule pendant l’hiver (on parle de neige saisonnière). Moraine latérale Glacier affluent Zone d’accumulation Zone d’ablation Limite des neiges persistantes crevasses Moraine médiane Moraine frontale Altération physique (érosion) 83/109 Les forces d’érosion liées aux glaciers se manifestent par des structures visibles à grande échelle tel que les vallées glaciaires en auges ou en U de la section transversale par opposition aux vallées fluviatiles en V. Lorsque deux ou plusieurs glaciations se succèdent, on observe dans la vallée des auges emboîtées. A ou 1: montagnes avant le développement de glacier; B ou 2: montagnes soumises au maximum de l’activité glaciaire; C ou 3: l’érosion glaciaire peu après la fonte des glaces. 84/109 Érosion glaciaire – Glacier Franz Joseph et Fox – Nouvelle Zélande Érosion glaciaire – Franz Joseph – Nouvelle Zélande 85/109 Altération physique (érosion) 86/109 Les glaciers sont de terribles machines érosives. Le glacier emporte avec lui des tonnes de roches comme le montre les blocs de toute taille déposés au front du glacier. Le pouvoir érosif d’un glacier sur le paysage s’exerce de deux façons. Lorsque le glacier s’écoule sur une surface rocheuse fracturée, il incorpore dans la glace des rochers qu’il emmènera avec lui. Ce processus d’arrachement de blocs du substratum par le glacier [plucking] se produit quand l’eau de fonte pénètre dans les fractures et les joints qui se trouve à la base du glacier. L’eau gèle et exerce une tension qui provoque la désagrégation du substratum en blocs par éclatement. Des blocs de toute taille de quelques cm à la taille d’une maison sont emportés. Le second processus d’érosion est l’abrasion liée à la charge emmenée par le glacier qui sert à broyer la surface rocheuse. La roche pulvérisée est appelée la poussière de roche [rock flour] effritée par l’action des glaciers. Le torrent glaciaire qui s’écoule possède toujours une apparence grise liée à la charge en suspension (cette poussière de roche) qu’il charrie. La présence de rochers dans la glace laisse aussi des traces, des rigoles [grooves], des rayures [scratches] ou stries glaciaires [glacial striations] sur le substratum. Ces stries sont la clé pour déterminer la direction suivie par le glacier. En cartographiant à plus grande échelle ces stries, on peut reconstruire les mouvements des glaciers. Si le glacier s’écoule sur un substratum plus fin, la surface rocheuse est fortement polie, il n’y a donc pas abrasion. Lorsqu’un glacier s’écoule dans une vallée fluviatile en forme de V, il va élargir, approfondir et redresser (mettre droit) pour la transformer en vallée glaciaire en U. L’importance de l’érosion va dépendre de l’épaisseur de glace ce qui induit que la langue glaciaire principale va entailler la vallée plus profondément que les langues glaciaires secondaires. Quand le glacier aura reculé, on observera des vallées suspendues [hanging valleys]. Elles correspondent aux vallées des langues glaciaires secondaires qui se situeront à une altitude bien supérieure à celle de la vallée principale. Altération physique (érosion) 87/109 De superbes cascades apparaissent dans le paysage à partir de ces vallées suspendues. Au sommet d’une vallée glaciaire se trouve un cirque associé aux glaciers alpins. Il représente la zone d’accumulation de neige et de formation de glace. La partie ouverte du cirque est dirigée vers la vallée glaciaire. Le cirque glaciaire se transforme en un lac après la fonte de la glace. Les fjords souvent profonds, très spectaculaires, avec des parois latérales très abruptes existent dans beaucoup de régions de hautes latitudes où les montagnes sont contiguës à l’océan le long des côtes de Norvège, du Chili, de Nouvelle Zélande, d’Alaska, etc. Ils représentent des vallées glaciaires envahies par l’eau lorsque le niveau marin a augmenté après la fin de la dernière période glaciaire (environ 10 000 ans). La profondeur des fjords peut dépasser 1000-1500 mètres. De telles profondeurs ne peuvent pas s’expliquer uniquement par la remontée du niveau marin. Un glacier épais de 300 m peut entailler sa vallée sur 250 m sous le niveau marin avant que l’érosion avale ne cesse. Les glaciers alpins impriment également d’autres figures d’érosion sur le paysage comme la présence de pics pyramidaux [horns] et d’arêtes tranchantes de roches [arêtes]. Le profil longitudinal des vallées glaciaires est lui aussi caractéristique avec des tronçons à faibles pentes correspondant à des élargissements et des tronçons à forte pente couplés avec des rétrécissements ou des verrous. Érosion glaciaire – Fjord – Milford Sound New Zealand 88/109 Érosion glaciaire – Fjord – Milford Sound - New Zealand Vallée suspendue Vallée glaciaire 89/109 fjord Stries glaciaires Les dépôts glaciaires identifiables dans le paysage 90/109 Les dépôts glaciaires liés aux glaciers continentaux ont pour effet de modifier le paysage et de niveller le relief. Le substratum rocheux n’est plus visible caché sous plusieurs dizaines à plusieurs centaines de mètres de ces dépôts. Deux types de dépôts glaciaires sont connus: ceux déposés directement par le glacier sous la forme de moraine de fond [till] et les matériaux déposés par les eaux de fonte du glacier [outwash]. La moraine de fond se forme par dépôt de la charge rocheuse transportée par la glace et déposée lors de la fonte de la glace sous le glacier. La moraine se compose de matériaux hétérogènes sans stratification et sans classement, montrant toutes les tailles (blocs, galets, sables et argiles d’où le nom d’argile à blocaux) dont les plus gros sont appelés des blocs erratiques [erratics] indiquant qu’ils proviennent d’une source située en-dehors de la zone où ils ont été déposés. Les eaux de fonte des glaciers (les torrents glaciaires) déposent un matériel qui est classé en fonction de la taille et du poids des sables et des graviers. Les particules les plus fines sont emportées à une plus grande distance du glacier. Les cotés d’un glacier alpin sont des zones où s’accumulent de grandes quantités de débris provenant des parois de la vallée. Quand le glacier se retire, ces matériaux sont abandonnés sous la forme de rides appelées moraines latérales [lateral moraines] le long des flancs de la vallée. Les moraines médianes [medial moraines] se forment lorsque deux glaciers alpins coalescent pour former une seule langue glaciaire. Les charges de débris rocheux transportées sur les bords de chaque glacier vont s’unir pour donner une bande noire de débris. C’est une nouvelle preuve du mouvement des glaciers car sans écoulement vers l’aval, les moraines médianes ne se formeraient pas. Les moraines frontales [end moraines] se déposent au pied aval du glacier. Si le glacier est stationnaire, une ride de débris rocheux se forme sur une dizaine à une centaine de mètres de hauteur. La moraine terminale [terminal moraine] est celle qui marque l’avancée la plus importante du glacier. Les moraines de retrait [recessional moraines] correspondent aux différentes étapes de stabilité du glacier au cours de son recul. Altération physique (érosion) 91/109 Moraine latérale horn arête cirque Moraine médiane Vallée suspendue Lac en chapelets Lac de cirque Vallée en U Erosion glaciaire (cirque, arête, vallée en U, moraines, horn) 92/109 Altération physique (érosion) 93/109 Le recul du glacier laisse derrière lui une couche de débris rocheux (till) qui tapisse le fond de la vallée et forme une surface qui ondule doucement ou moraine de fond [ground moraine]. Le dépôt de cette couche a pour effet de niveler le paysage et les inégalités du sol. Pendant que les moraines frontales se forment, les torrents glaciaires qui émergent de la base du glacier avec une charge en suspension et se déplacent rapidement sur la surface relativement plate en aval du glacier et perdent de leur vitesse. La charge est donc relâchée et il se forme un réseau complexe de chenaux anastomosés. Une large plaine d’épandage fluvio-glaiciare [outwash plain] se forme donc dans la partie adjacente en aval de la moraine frontale. Ces plaines fluvio-glaciaires sont marquées par des petits bassins ou des dépressions [kettles]. Elles se forment lorsqu’un bloc de glace est abandonné lors du retrait du glacier et s’enfonce dans le sédiment glaciaire. Après la fonte de la glace, il en résulte un trou dans le sédiment glaciaire qui peut donner un lac. Les dimensions dépassent rarement 2 km de diamètre et la profondeur est souvent inférieure à 10 m (certains ont cependant des profondeurs de l’ordre de 50 m). Les drumlins sont de petites collines asymétriques composées de till et dont les dimensions moyennes sont de l’ordre de 15-60 m de haut et de 0,4-0,8 km de longueur. Le profil le plus pentu est la face arrière et le profil doux indique la direction d’avancée du glacier. Les drumlins ne sont jamais isolés mais apparaissent en groupe (clusters), on évoque d’ailleurs le terme de champ de drumlins. Dans les zones recouvertes par des glaciers continentaux, des rides sinueuses composées essentiellement de sable et de graviers d’origine fluvio-glaciaire sont présentes et appelées eskers. Ces rides correspondent à des matériaux déposés par les cours d’eau, qui s’écoulent dans des tunnels à la base des glaciers, à proximité de la fin de la langue glaciaire. Ils peuvent atteindre quelques mètres de haut et s’étendre sur plusieurs km de long. Dans de nombreuses régions, ils sont exploités pour le sable et les graviers et disparaissent du paysage. Altération physique (érosion) 94/109 Drumlins près de Calgary Alberta, Canada Drumlins au Saskatchewan, Canada Kettle, Icelande Altération physique (érosion) 95/109 Moraine de retrait Socle rocheux plaine fluvio-glaciaire till kames Kettles (lacs) esker Altération physique (érosion) Esker, Concertina, Icelande Esker, Wisconsin, USA Esker au Saskatchewan Canada 96/109 Altération physique (érosion) 97/109 Des collines avec de fortes pentes, composées comme pour les eskers de sables et de graviers sont appelées kames. Il s’agirait d’un amoncellement de débris collectés au sein d’une ouverture dans la langue glaciaire pendant une phase de stabilité du glacier. Kame, La Bluff, Canada Kame, Groenland Altération physique (érosion) 98/109 4. EROSION MARINE Les principaux agents de l’érosion marine sont les vagues et les courants auxquels on peut ajouter l’action des embruns emportés par le vent (sous forme d’une altération chimique). Pendant les périodes de climat calme, l’action des vagues est à son minimum. Lors des périodes de tempêtes, par contre, l’impact des vagues de tempêtes peut être d’une incroyable violence sur la côte. La force de ces vagues est capable de déplacer une structure en béton de 2600 tonnes sur la côte comme cela fut observé à Wick Bay en Ecosse. Les vagues déferlantes sont capables d’envoyer de l’eau dans chaque orifice, fissure ou ouverture de la falaise. L’air à l’intérieur est comprimé (pression de l’eau peut atteindre 30 tonnes/m²) et se détend dès que l’eau s’en va conduisant à la dislocation de fragments de roche et à l’accroissement de la taille des fractures. En plus de l’érosion causée par l’impact des vagues et de la pression, on retrouve également l’abrasion causée par la charge transportée par l’eau (sable, graviers, galets). Le processus d’abrasion est le plus intense dans la zone des brisants [surf zone]. Des roches polies, arrondies le long du littoral sont les nombreux témoins de l’action de broyage des roches sur les rochers qui sont façonnés par ces « outils ». L’action érosive des vagues déferlantes sur un trait côtier composé de roches tendres est particulièrement importante. Certaines zones de Grande Bretagne où la côte est composée de dépôts glaciaires (sables, argiles, graviers) ont reculées de 3-5 km depuis l’époque Romaine avec pour effet de modifier le paysage et de faire disparaître certains villages situés trop près de la côte. Souvent les vagues approchent de la côte avec un angle. A faible profondeur d’eau, une pente légère induit une déviation et les vagues deviennent parallèles au rivage. Ce processus est appelé la réfraction. Altération physique (érosion) 99/109 La partie avant de la vague touche le fond et ralentit alors que la partie arrière de la vague qui se trouve toujours en eau plus profonde avance encore à la même vitesse. Le résultat net est un front qui approche quasi parallèle au rivage eu égard à la direction originale de la vague. Ce phénomène de réfraction induit un impact plus concentré des vagues sur les côtés et le front de falaise alors que la baie subit une attaque plus faible. Ce processus d’érosion sur les profils irréguliers de côte tend avec le temps à lisser le profil. Même si les vagues sont déviées, elles touchent néanmoins le rivage avec un angle. En conséquence, chaque vague déferlante arrive sur le rivage [swash] en oblique alors que le flot de retour se fait dans le sens de la pente de la plage [backwash]. Ce double effet du mouvement de l’eau implique que le transport de particules de sédiments se fait en zigzag le long de la plage [beach drift]. Altération physique (érosion) 100/109 Altération physique (érosion) 101/109 Ce mouvement de transport le long de la plage permet de transporter du sable et des galets sur des centaines ou milliers de mètres en une journée. Les vagues obliques produisent des courants dans la zone des brisants qui s’écoulent parallèlement au rivage. Ces courants qui longent le rivage [longshore currents] sont capables de transporter les fines particules de sable en suspension et de rouler les matériaux plus gros (sable et galet) sur le fond. Ces mécanismes permettent de transporter 1,5 millions de tonnes de sédiment le long du rivage à Oxnard en Californie. Altération physique (érosion) 102/109 Les vagues déferlantes qui sapent par érosion directe la base des falaises situées sur des côtes déchiquetées comme en Angleterre sont appelées [wave-cut cliffs]. Au fur et à mesure que l’érosion progresse à la base de la falaise, les roches surincombantes finissent par tomber dans la zone de brisants ce qui provoque le recul du front de la falaise. Une surface rocheuse relativement plate dans la zone de brisants est présente à l’emplacement de l’ancien front de falaise [wave-cut platform]. Certains débris produits par les vagues de déferlement restent sur place mais l’essentiel est emporté vers le large. Les avancées terrestres dans la mer sont le lieu des attaques des vagues déferlantes suite au phénomène de réfraction. Les roches les plus tendres ou celles qui présentent le maximum de fractures sont érodées le plus rapidement. La première étape est la formation de grottes sousmarine [sea cave]. Lorsque deux grottes sous-marines situées sur des côtés opposés d’une avancée terrestre se rejoignent, il se forme une arche [sea arch]. Celle-ci peut s’écrouler par poursuite de l’érosion et laisse en mer un îlot rocheux témoin de la falaise [sea stacks]. Altération physique (érosion) 103/109 Altération physique (érosion) 104/109 Falaise de craie Etretat (France) et Falaise de Craie (Angleterre) Altération physique (érosion) 105/109 Dans les zones où des courants parallèles au littoral sont présents, plusieurs figures liées au déplacement de sédiments le long de la côte peuvent se développer. Les flèches littorales [spits] sont de longues rides (ou langues) de sables et de graviers partant du continent et se poursuivant jusqu’à l’embouchure d’une baie. La fin de cette langue de sable a tendance à s’incurver vers le rivage en réponse aux courants générés par les vagues. Si cette langue de sable progresse et bloque complètement l’embouchure de la baie qui se trouve alors séparée et isolée de l’océan, on parle de flèche littorale [baymouth bar]. Ce type de figure se forme dans les baies où les courants sont faibles pour permettre le développement d’une barre littorale sableuse. Un tombolo est une ride de sables qui connecte une île avec le continent ou avec une autre île et dont le mode de formation est similaire à la flèche littorale. Les îles barrières [barrier islands] correspondent à des rides de sables en milieu marin peu profond qui sont parallèles au trait de côte. Elles séparent la zone de lagon et d’eaux calmes située entre le continent et cette barrière de l’océan et de l’agitation des vagues. spit baie vagues baie baymouth bar courants parallèles au littoral Altération physique (érosion) 106/109 Les problèmes d’érosion en domaine côtier Avec la pression urbanistique croissante le long du littoral, l’érosion du littoral côtier est un problème permanent et continu qui nécessite une surveillance et une protection des zones les plus sensibles. Un exemple correspond aux îles barrières qui protège les dunes et la plage séparée de la barrière par un lagon. La plupart de ces îles barrières font face aux océans et sont donc les premières à subir l’impact des tempêtes. Quand une tempête arrive, la barrière absorbe une partie de l’énergie via le mouvement du sable qui est poussé vers le littoral. Une succession de tempête et l’élévation du niveau-marin vont provoquer le déplacement de la barrière sableuse vers la côte, la réduction de la zone de lagon et à terme modifier la protection de la plage. Altération physique (érosion) 107/109 Plusieurs solutions de protection des plages et du littoral sont utilisées pour contrôler la dynamique de l’environnement de la plage. Il s’agit de structures artificielles comme les jetées [jetties], les brise-lames [breakwaters], les éperons [groins] et les digues [seawall]. Ces éléments peuvent induire des modifications non prévues qui sont difficiles à corriger par après. Immédiatement après Après quelques années la construction Altération physique (érosion) 108/109 Les jetées sont souvent construites aux points d’entrée des rivières dans l’océan et des ports. Elles sont souvent présentes par paires et se prolongent vers l’océan. Elles confinent le flux d’eau dans une zone étroite, le flot et le jusant causés par les marées montantes et descendantes gardent le sable en mouvement et inhibent le dépôt de sables entre les jetées. Les courants littoraux et le déplacement du sable le long de la plage induisent un dépôt en amont de la première jetée et une érosion en aval de la seconde jetée comme illustré. Jetées de la rivière Rogue, USA Venice, Floride, USA Pour maintenir ou agrandir des plages qui sont en train de perdre du sable, des éperons sont parfois construits. Un éperon est une barrière artificielle construite à angle droit par rapport à la plage avec pour objectif de capturer du sable qui est déplacé par les courants littoraux qui circulent parallèlement au littoral. Le résultat donne une plage irrégulière mais qui s’agrandit globalement. Altération physique (érosion) 109/109 Des brises-lames sont construits parallèlement au trait de côte en mer à une certaine distance du littoral. L’objectif premier est de protéger les bateaux de l’arrivée de fortes vagues brisantes en créant une zone plus calme proche du littoral. Cette barrière active, l’énergie des vagues ne permet plus au sable de circuler et il se dépose. Ce comblement de la marina peut induire une érosion et un recul de la plage en aval. Des digues sont des barrières artificielles qui servent à protéger des vagues l’environnement de plage ou du littoral qui se trouve en arrière. La meilleure approche pour stabiliser le sable sur les plages est la fourniture de sable de manière artificielle en prélevant du sable ailleurs, dans un lagon proche ou dans des barres sableuses et de le verser directement sur la plage pour qu’elle s’agrandisse vers le large. Un autre système est de déverser du sable en amont de la circulation des courants littoraux et d’attendre que le sable soit redistribuer naturellement vers l’aval. Ce système est cependant loin d’être viable économiquement et le changement de lithologie du sable peut affecter la survie de certaines colonies d’animaux comme les communautés de coraux à Hawaii qui ont vu la turbidité de l’eau se modifier par remplacement de sable calcaire grossier par du sable calcaire plus argileux.