Auteur:
Nom: MEKDESSI
Prénom: Sélim
Qualité: Docteur en Sciences de Gestion (Université Jean Moulin, Lyon 3)
Appartenance institutionnelle:
- Chercheur Post-Doctorat à l'ISEOR (Lyon, France)
- Membre de l'ADERSE (France)
- Membre du RIODD (France)
- Université Libanaise (Liban)
Lieu d’exercice principal:
Professeur Associé à l’Université Libanaise
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion des Entreprises, Branche III
Chef du Département Finance
Coordonnées: Sélim Mekdessi
Kafar-Akka Koura ; Rue Principale ;
Résidence Elia Mekdessi ; Face à l’Ecole Publique Secondaire de Kafar-Akka
LIBAN Nord
Téléphone: 00 961 3 49 48 60
Fax: 00 961 6 95 04 82
Courriels: [email protected]
selim.mekdessi@yahoo.com
Résumé :
La Responsabilité Sociale des Entreprises et le Développement Durable ont des
applications fort différentes selon les secteurs d’activités des entreprises. Il s’avère pertinent
d’analyser comment la responsabilité sociale des entreprises influence les stragies des
institutions financières et des banques. Sur la base de quelles méthodes et de quels critères
évalue-t-on la responsabilité sociale des banques ? La RSE et le DD soulèvent la question de
la socialisation du risque, qui trouve son fondement dans la recherche d’une démocratisation
des effets de la mondialisation et de la « marchéisation » dans le sens d’une humanisation de
l’économique en général et des nouveaux risques en particulier.
La RSE doit être adaptée aux différents secteurs d’activité relevant de la sphère
financière ; la responsabilité sociale des banques s’analyse sous une dimension particulière,
soit celle d’objectifs socio-économiques comme l’inclusion sociale et la cohésion sociale.
Notre communication explicitera le champ d’investigation retenu pour l’étude et la
méthodologie consistant à repérer les pratiques innovatrices en matière de RSE et d’inclusion
sociale adoptées par les banques ; les pratiques relevées seront regroupées par pays, ce qui
permettra d’examiner les causes de leur mise en œuvre et de vérifier si elles sont rattachées
aux caractéristiques du contexte institutionnel encadrant l’activité des banques et l’intégration
du concept d’inclusion.
De nouvelles réalités pour la contribution au renforcement
de la cohésion sociale à travers les activités de la finance :
la Responsabilité Sociale dans les Banques
Les questions de responsabilité sociale des entreprises et de développement durable
ont pris une telle ampleur au cours des dernières années qu'elles en sont venues à interpeller
toutes les entreprises, qui peuvent difficilement demeurer indifférentes faces à ces
phénomènes. L'idée de responsabilité sociale des entreprises s'inscrit dans la continuité d'un
ensemble de débats récurrents depuis les années 1960
1
, mais c'est particulièrement à la suite
des scandales financiers et de gouvernance d'entreprise des dernières années que les pressions
sur les entreprises se sont accentués, obligeant celles-ci non seulement à adopter des stragies
de responsabilité sociale, mais aussi à devenir plus sensibles aux enjeux sociaux, éthiques et
environnementaux liés à leurs activités, et à s'évaluer par rapport à des standards de
performance plus stricts et plus diversifiés, ne se limitant plus aux critères purement
financiers.
Le débat engagé depuis quelques années autour du concept de responsabilité sociale
des entreprises se conjugue avec les interrogations soulevées au niveau mondial sur le devenir
de notre planète dans ses dimensions environnementale, économique et sociale autour du
concept de développement durable formalisé par l'Organisation des nations unies (O.N.U.) en
1992 au sommet de la Terre de Rio De Janeiro. Le veloppement durable appliqué à la
sphère économique s'est formalisé au travers du concept de responsabilité sociale des
entreprises, dont la Commission européenne a donné la définition suivante: "L'intégration
volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs
activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes". Cette définition implique
pour les entreprises une triple démarche: L'adoption volontaire d'une stratégie de
responsabilité sociale par des entreprises qui ne peuvent se limiter à la stricte application du
droit ; la poursuite de la performance financière qui n'exclut plus le social, l'environnemental
et l'économique; la nécessité d'une plus grande transparence et d'une reddition de compte
auprès des parties prenantes, et non seulement des actionnaires.
1. Le système bancaire et la responsabilité sociale
La responsabilité sociale de l'entreprise est un enjeu très actuel, mais il ne s'agit pas
pour autant d'un concept nouveau. Depuis les activités philanthropiques des sociétés
industrielles visant à améliorer les conditions de vie et de travail jusqu'à la mise en valeur des
dimensions économique, sociale et environnementale d'aujourd'hui la perspective de la
responsabilité sociale de l'entreprise a évolue de façon considérable. D'ailleurs, comme le
souligne Pasquero (2004:35), l'évolution des exigences de la responsabilité sociale de
l'entreprise repose sur les acquis du passé.
1.1. Les institutions bancaires ont-elles une responsabilité sociale distincte?
L'exigence d'un comportement socialement responsable est de plus en plus pressante
pour toutes les organisations. Dans les années 1970, le public réclamait déjà des entreprises
qu'elles assument les conséquences de leur activité
2
. Dans le cas des institutions financières,
1
Déjean et Gond, 2003:2
2
Heard et Bolce, 1981
la question d'une responsabilité sociale spécifique est traitée selon différentes perspectives
dans la littérature. D'une part, on considère que le devoir des institutions financières est de
fournir à leurs clients la meilleure gamme de produits et de services pour faire face à leurs
engagements en tant que gestionnaires des fonds qui leurs sont confiés, sans que la société
puisse leur demander d'adopter un comportement particulier
1
. Selon une autre tendance, le
secteur financier est vu comme un service public puisqu'il fournit des produits et des services
essentiels qui ne peuvent être obtenus autrement. Entre ces deux courants se trouve celui qui
estime que les institutions bancaires sont des entreprises semi-publiques, non seulement parce
qu'elles jouent un rôle crucial dans la gestion de l'épargne, mais aussi parce qu'elles assument
plusieurs fonctions névralgiques au sein de l'économie
2
.
Nous pouvons observer que les institutions financières sont de plus en plus préoccupées par la
responsabilité sociale. Cet intérêt marqué reflète une volonté de l'entreprise de satisfaire aux
attentes de la société en général, ce qui leur permet d'accroitre leur performance à moyen
terme, tout en rehaussant leur image pour déployer les mêmes efforts que leurs concurrents en
ce qui a trait à l'adoption de pratiques socialement responsables
3
.
Dans plusieurs pays développés, le secteur bancaire est relativement concentré. En
conséquence, les institutions financières sont grandes, rentables et très visibles. Ces facteurs
expliquent les attentes élevées tant du public que des gouvernements face à ses institutions
pour qu'elles redistribuent à l'ensemble de la société une partie de leur richesse et qu'elles
soient à l'avant-garde du développement durable.
A l'échelle internationale, plusieurs programmes ont été établis en vue d'appuyer les
institutions du secteur bancaire dans la mise en œuvre de leurs pratiques en matière de
responsabilité sociale. Nous signalerons les principales initiatives :
- Tout d'abord, le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), reconnaissant
l'importance du système financier dans la promotion du développement durable, a émis en
1992 la Déclaration des institutions financières sur l'environnement et le développement
durable ; cette initiative a donné lieu à la création d'un partenariat entre le PNUE et les 200
institutions financières adhérentes sur la base de leur engagement en faveur du développement
durable, de la gestion environnementale et de la communication au public.
- En outre, la Société Financière Internationale, membre du groupe de la Banque Mondiale, a
élaboré les Equator Principles pour établir des normes sociales et environnementales liées au
financement de ses projets de développement. En Octobre 2005, 34 institutions financières
avaient signés ces principes.
- Une autre initiative vient du réseau Banktrack, un regroupement international de plus de 200
organisations de la société civile visant à surveiller les opérations du secteur financier privé et
leurs effets sur la société. Il s'agit de la Collevecchio Declaration on Financial Institutions, qui
exige les institutions financières un engagement en six points liés au développement durable.
- Finalement, la Global Reporting Initiative (GRI), qui est sans doute l'initiative la plus
connue, est née en 1997 et est maintenant affiliée aux Nations unies à titre de Centre de
collaboration du PNUE. Elle a pour mission le développement et la promotion de méthodes
d'information comptable (reporting) sur le développement durable.
Les particularités des institutions financières ont nécessité l'élaboration de suppléments
sectoriels pour mesurer leur performance sociale et environnementale.
1
Zeegers, 2000
2
Schuster, 2000
3
Dembinski, 2000
1.2. Faire face à l'exclusion bancaire: le défi à relever
S'il est évident que la mondialisation nécessite une évolution rapide des stratégies de
toutes les organisations, pour les institutions financières, dont les activités ont longtemps été
très fortement réglementées par les pays, la concurrence intense et l'internalisation des
activités imposent des changements encore plus radicaux. Paradoxalement, alors que le
secteur financier se caractérise par un grand dynamisme et une grande capacité d'innovation,
le niveau de rentabilité exigé dans un contexte très concurrentiel rend plus difficile
l'accessibilité à ce secteur pour une partie de la population dont les activités n'apparaissent pas
suffisamment rentables.
Cette dynamique nouvelle, de même que l'augmentation de la pauvreté relative de certains
segments de la population, accroit le risque d'exclusion sociale dans certaines communautés
1
.
La complexité de la problématique rend difficile l'obtention de données précises sur l'état de
la situation.
2. Responsabilité sociale des banques et inclusion sociale
L'accès aux services financiers est reconnu comme un facteur permettant d'atteindre la
cohésion sociale. En conséquence, l'inclusion sociale constitue un enjeu social particulier pour
les banques. Le défi de l'inclusion sociale est à la mesure des effets de l'exclusion sociale, qui
se définit comme "le processus par lequel une personne rencontre de telles difficultés d'accès
et/ou d'usage dans ses pratiques bancaires, qu'elle ne peut pas ou plus mener une vie sociale
normale dans la société qui est la sienne"
2
. La contribution des banques à la cohésion sociale
peut se mesurer à leurs engagements sociaux et communautaires, à leur responsabilité sociale
et notamment à leur responsabilité en matière d'inclusion sociale.
Cette action s'inscrit dans le cadre des relations de l'organisation avec son
environnement, puisant dans les fondements à la fois de la théorie de la contingence, de la
théorie institutionnelle et de la théorie de la responsabilité sociale des organisations. La
théorie de la contingence
3
met en lumière la faculd'adaptation de l'organisation considérée
comme un système ouvert à l'influence de facteurs de contingence, tels que les technologies,
les types d'activités, de structures, de stratégies ou de taille. La littérature sur la responsabilité
sociale des entreprises traite abondamment des motifs pour lesquels les entreprises adhèrent
ou devraient adhérer à ce principe, surtout lorsque ce n'est pas une obligation gale. La
conception de la responsabilité sociale d'une entreprise ne fait pas l'unanimité. La
responsabilité ne doit pas être imposée ou être arbitrairement déléguée aux organisations,
selon Barnard (1958). "L'entreprise a une et une seule responsabilité sociale: utiliser ses
ressources et exercer ses activités destinées à accroître ses bénéfices, dès lors qu'elle respecte
les gles du jeu, à savoir prendre part à une concurrence ouverte et libre, sans tromperies ni
fraude"
4
. Selon la littérature sur la responsabilité sociale des entreprises, celle-ci peut être
considérée en tant qu'une réponse organisationnelle au questionnement social (d'ordre
institutionnel) auquel font face les entreprises. La théorie institutionnelle soulève les aspects
social et culturel de l'environnement, qui se reflètent dans le cadre légal et les valeurs
véhiculées au sein d'un contexte donné.
1
Kempson et al., 2000
2
Gloukoviezoff, 2004:188
3
Lawrence et Lorsh, 1967
4
Friedman, 1962:133, traduction libre
Appliqué à l'étude des organisations, le fondement de la conformité peut être l'obéissance
(lois, règlements, codes obligatoires), l'obligation sociale (normes, standards, codes
volontaires) ainsi que les convictions socialement tenues pour acquises
1
.
Ces fondements conceptuels soulèvent certaines interrogations au point de vue du
management stratégique. Les entreprises adoptent ou devraient adopter généralement des
pratiques dites responsables pour être perçues comme éthiques, pour gérer leurs relations avec
la société ou pour tenir compte des enjeux sociaux dans le cadre de la gestion stratégique.
Elles le font d'abord pour elles-mêmes, pour conserver leur gitimité et pour assurer leur
pérennité et leur position socioéconomique. La première étape pour qu'une banque conserve
sa légitimité auprès de la société comme du gouvernement est de se conformer aux exigences
légales et réglementaires. Si les banques adoptent des pratiques en matière de responsabilité
sociale des entreprises et d'inclusion sociale, la question est de savoir si elles y sont
contraintes ou si elles le font de façon volontaire. Si elles le font volontairement, est-ce dans
le but de se démarquer, d'en retirer un avantage concurrentiel et d'en retirer ainsi une valeur
ajoutée
2
? Si elles le font uniquement pour se conformer à des exigences, faut-il une loi pour
qu'une banque soit forcée à prendre en considération les conséquences sociales de ses
activités non seulement par rapport à ses actionnaires, mais aussi par rapport à ses autres
partenaires, au sens l'entend Freeman (1984), incluant la société dans laquelle elle évolue?
Doit-on s'assurer que la responsabilité sociale des entreprises se confond avec sa
responsabilité juridique
3
? Dés lors, quelles sont les règles du jeu et comment peut-on les
influencer pour amener les entreprises, et notamment les banques, à se questionner et à être
plus responsables socialement?
3. Démarche de détermination des pratiques en matière d'inclusion sociale
Une recherche a été menée dans le but de relever chez les grandes banques,
spécifiquement celles qui sont constituées en sociétés à capital-actions et dont les titres se
transigent sur le marché financier, les pratiques innovatrices privilégiant l'inclusion sociale et
d'élaborer des critères pour évaluer et comparer leur leadership en cette matière. Les pratiques
ont été recensées à partir des échantillonnages de 50 banques réparties en Amérique,
Angleterre et France .
Les pratiques en matière d'inclusion sociale sont segmentées selon six thèmes, émanant des
préoccupations généralement soulevées sur la définition et les limites de la responsabilité
sociale des banques:
- Le surendettement.
- Le microcrédit et la microfinance, regroupant les pratiques visant autant les ménages que les
entreprises;
- La discrimination bancaire concernant plusieurs pratiques liées à l'accès des clientèles
traditionnellement mal servies par les banques (personnes démunies, petites entreprises,
étudiants, minorités ethniques, personnes handicapées, personnes vivant dans des régions
éloignées ou peu populeuses, etc.) au crédit et aux services bancaires pouvant être similaires
ou même recouper celles qu'on trouve sous les thèmes "microcrédit et microfinance" et
"services bancaires de base;
- Le développement du territoire, incluant des pratiques pouvant chevaucher celles qui sont
associées à la microfinance, aux services bancaires de base et à la lutte contre la
discrimination;
1
Scott, 1995
2
Kanter, 1999
3
Lisée, 1991
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