Rapport de l’UNESCO sur la science, vers 2030 ÉTAT DES LIEUX PAR RÉGION Sous embargo jusqu’au 10 novembre 2015 Afrique (subsaharienne) Pour l'Afrique subsaharienne, la période sur laquelle porte ce Rapport de l’UNESCO sur la science, vers 2030 se caractérise par une forte croissance économique, par une activité politique croissante en science, technologie et industrie (STI), ainsi que par l'apparition de pratiques exemplaires dans ce domaine, même si la région dans son ensemble affiche toujours une allocation de ressources relativement faible en faveur des STI. Ainsi, bien que la part de l'Afrique subsaharienne dans la population mondiale ait gagné un point de pourcentage entre 2007 et 2013, son PIB n'a augmenté que de 0,3 % et sa dépense brute en R&D (DIRD) n'a progressé que de 0,1 %. Parallèlement, l'Afrique présente des perspectives prometteuses de plus en plus nombreuses. Ainsi, plusieurs pays, dont l'Éthiopie, le Ghana, le Mozambique et le Rwanda, ont vu leur production scientifique s'accroître considérablement. Si l'Afrique du Sud représentait 46 % des publications de l'Afrique subsaharienne en 2014, le niveau de productivité scientifique (nombre d'articles par million d'habitants) de pays à revenu faible comme le Bénin et la Gambie était comparable à celui d'économies à revenu intermédiaire. Ces dernières années, les activités de R&D (DIRD exprimée en pourcentage du PIB) en Éthiopie (0,61 % en 2013) et au Kenya (0,79 % en 2010) ont progressé et se situent à un niveau semblable à celui d'une économie à revenu intermédiaire. Le Malawi a vu sa DIRD augmenter pour atteindre 1,06 % du PIB ces dernières années ; par rapport à tous les autres pays ayant un volume de population similaire, les scientifiques de ce pays publient en quantité plus importante dans des revues de grande diffusion – par rapport au PIB . L'Afrique de l'Ouest dans son ensemble n'a pas progressé aussi rapidement que le reste du continent en ce qui concerne le nombre de publications scientifiques. Toutefois, plusieurs initiatives devraient favoriser la coopération, la mobilité et la production des scientifiques : la mise en place récente de réseaux de centres d'excellence dans cette sous-région, dans des disciplines allant des mathématiques appliquées aux sciences environnementales ou à l'agriculture, par le biais de projets en coopération avec la Banque mondiale et l'Union économique et monétaire ouest-africaine ; et le Réseau africain d’expertise en biosécurité (ABNE), dont le siège est au Burkina Faso depuis 2010. L'Institut africain des sciences mathématiques (African Institute for Mathematical Sciences [AIMS]) est un réseau panafricain de centres d'excellence axés sur les études supérieures, la recherche et la diffusion des connaissances en sciences mathématiques. À ce jour, il est présent en Afrique du Sud (depuis 2003), au Sénégal (2011), au Ghana (2012), au Cameroun (2013) et en Tanzanie (2014). Le financement extérieur de la R&D est déterminant dans plusieurs pays d'Afrique, notamment dans ceux dont le ratio DIRD/PIB est bien supérieur à celui d'autres pays en développement. C'est par exemple le cas du Kenya (0,79 % en 2010, dont 47 % financés par des fonds étrangers) ou encore du Mozambique (0,42 % en 2010, dont 78 % financés par des fonds étrangers). Les regroupements et les pôles d'innovation jouent un rôle essentiel dans la mise en relation des divers intervenants publics et privés, ainsi que dans la hausse du niveau global d'investissement en STI, tout particulièrement au Kenya, en Éthiopie, au Gabon et en Ouganda. D'autres, comme le Malawi et le Mozambique, affichent un investissement en R&D bien supérieur à ce que l'on attendrait d'eux, notamment parce qu'ils attirent un volume important de fonds étrangers pour la recherche. Le Rwanda, pays enclavé, développe son infrastructure en TIC et son interconnexion par le biais de réseaux à haut débit mondiaux (basés en mer), et ce, en coopérant avec ses voisins tanzanien et ougandais. Il existe aussi des initiatives de R&D dans le secteur manufacturier qui cherchent à dépasser le stade du développement expérimental. En Ouganda, le College of Engineering Design, Art and Technology de Makerere développe un prototype de voiture électrique pour deux passagers (baptisée Kiira EV), qu'il espère commercialiser. À l'heure où la région s'efforce de mettre en œuvre sa stratégie axée sur l'avenir intitulée « Science, Technology and Innovation Strategy for Africa » (STISA-2024), elle s'appuie sur une assise bien plus solide qu'il y a dix ou cinq ans. États arabes La période visée par ce Rapport a été marquée par le Printemps arabe et les instabilités politiques qui s'en sont suivi dans une grande partie de la région arabe. Malgré cela, de nombreux indicateurs de production de STI et d'initiatives en la matière reflètent une augmentation, la région ayant notamment multiplié par deux ses efforts de publication. Elle a également vu augmenter sa participation globale à l'activité de R&D (en moyenne 0,30 % du ratio DIRD/PIB en 2013, contre 0,22 % en moyenne en 2007), même si l'on ne dispose pas de données récentes pour tous les pays. Collectivement, les États arabes comptaient pour 1 % de la dépense mondiale en R&D en 2013, en hausse par rapport au 0,8 % de 2007, bien que les pays arabes les plus riches n'aient joué qu'un rôle modeste dans cette progression. Toutefois, on observe dans les États arabes les signes précurseurs d'une importance accrue des STI. Alors que la participation des femmes à l'économie est généralement faible dans la région, dans la science et la recherche, en revanche, des États arabes comme l'Égypte et Bahreïn s'approchent davantage de la parité des sexes que l'Europe, par exemple (43 % de femmes en Égypte et 41 % à Bahreïn). Dans dix pays arabes, les femmes représentent entre 34 % et 57 % des diplômés de l'enseignement supérieur en science, en ingénierie et dans l'agriculture –ce qui constitue une proportion relativement élevée. Les États arabes mettent en œuvre des initiatives conjointes afin que les programmes d'études des universités correspondent davantage aux besoins de l'économie. En 2014, l'Organisation de la Ligue arabe pour l'éducation, la culture et la science (ALECSO) et l'UNESCO ont décidé de mettre en place un observatoire en ligne de la science et de la technologie, qui proposera un portail pour les projets de recherche mais répertoriera aussi les universités et centres de recherche scientifique arabes, ainsi que les brevets, les publications, et les mémoires de master et thèses doctorales au format numérique. Avec 1 394 chercheurs par million d'habitants en 2013, la Tunisie est en tête des États arabes pour la densité de chercheurs. Elle affiche aussi la plus grande densité de production scientifique (276 articles par million d'habitants) en dehors des économies à rente pétrolière. L'Égypte a réussi à accorder une plus grande priorité politique à l'économie du savoir, moteur d'une expansion économique si nécessaire. Jusque-là inactif, le parc scientifique et technologique Zewail (Zewail Park of Science and Technology) a été remis en route et un observatoire des STI a été créé afin d'améliorer la collecte et l'analyse des données. Le mandat constitutionnel de 2014 charge le gouvernement d'augmenter la dépense en R&D afin que celle-ci s'élève à 1 % du PIB contre 0,68 % en 2013, niveau plutôt caractéristique des économies à revenue intermédiaire. Le Maroc, l'un des pays arabes les plus à la pointe de la technologie – si l'on se fonde par exemple sur la composante de haute technologie de sa production et de ses exportations – est également en tête pour ce qui concerne l'investissement en R&D du secteur privé. Ailleurs dans la région, les gouvernements cherchent aussi à se rapprocher du secteur privé, comme l'indique la stratégie des États arabes pour la science, la technologie et l'innovation adoptée en mars 2014. Le Maroc a l'ambition de devenir le chef de file africain pour l'énergie éolienne et l'énergie solaire. Il a inauguré le plus grand parc éolien d'Afrique à Tarfaya en 2014 et aménage actuellement un énorme parc solaire à Ouarzazate. Quelques-uns des pays arabes exportateurs de pétrole prennent des mesures visant à favoriser le transfert de technologie et son assimilation, et ce, afin d'accroître la production d'énergie renouvelable. Ainsi, par le biais de son Programme des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique adopté en 2011, l'Algérie prévoit d'installer 22 gigawatts de capacité de production électrosolaire d'ici à 2030 pour rester un important fournisseur d'énergie malgré un possible épuisement de ses réserves de combustible fossile. Bien que l'on constate de faibles niveaux d'investissement en R&D, d'autres économies à rente pétrolière ont également intensifié leurs efforts en vue d'atteindre l'excellence scientifique. Au Qatar et en Arabie Saoudite, les publications scientifiques ont fait un bond considérable, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif, comme l'indiquent différents indicateurs de citation et de pertinence (par exemple, la part dans le décile supérieur d'articles). Sur les quelque 50 sources de rayonnement synchrotron au monde, seules quelques-unes se situent dans des pays en développement. Le Centre international de rayonnement synchrotron pour les sciences expérimentales et appliquées au Moyen-Orient (SESAME) – la première source du genre dans la région – devrait être opérationnelle mi-2016 par le biais d'un projet de collaboration réunissant l'Autorité palestinienne, Bahreïn, Chypre, l'Égypte, l'Iran, Israël, la Jordanie, le Pakistan, et la Turquie, sous l'égide de l'UNESCO. Asie et Pacifique Cette vaste région, qui accueille les trois-cinquièmes (59 %) de la population mondiale et compte pour près de la moitié de la production économique (45 %) et de la dépense en R&D (42 %) du monde, abrite à la fois quelques-unes des puissances technologiques les plus dynamiques et, en Asie intérieure et dans l'océan Pacifique, les participants les moins investis dans la progression mondiale vers des économies à plus forte valeur ajoutée technologique. Par le simple fait de sa taille et de son essor, la Chine a vu augmenter considérablement sa part dans de nombreux agrégats régionaux relatifs aux STI, qu'il s'agisse des effectifs de chercheurs, du volume de publications, de l'investissement en R&D ou du volume de brevets. Ces dernières années, la part de la Chine exprimée en pourcentage des volumes mondiaux a progressé comme suit : Chercheurs : 2009 : 16,7 % 2013 : 19,1 % Publications : 2008 : 9,9 % 2014 : 20,2 % DIRD : 2007 : 10,2 % 2013 : 19,6 % D'après la base de données Web of Science de Thomson Reuter, la Chine s'apprête d'ici quelques années à prendre la tête du classement pour le volume de publications scientifiques. Mais son ambition de devenir rapidement une économie véritablement axée sur l'innovation pourrait être mise à l'épreuve par le contexte actuel de ralentissement de la croissance mondiale. Le Japon connaît une période d'activité politique extraordinaire visant à relever le triple défi qui se pose à lui, à savoir le vieillissement de sa population active, ses efforts pour sortir du nucléaire suite à la catastrophe de Fukushima et la revitalisation de son moteur de croissance anémique. Si le Japon reste l'une des économies manufacturières les plus dynamiques en matière de R&D, son quatrième plan fondamental pour la science et la technologie (2011) accorde une priorité manifeste à l'« innovation verte » ainsi qu'à l'innovation favorisant une vie plus saine. La part des nouvelles énergies renouvelables (à l'exception de l'énergie hydroélectrique) dans la production électrique totale du Japon a augmenté, allant de 1,0 % en 2008 à 2,2 % en 2013, mais la transition vers les nouvelles énergies renouvelables devrait encore s'accélérer grâce à la déréglementation, aux réductions d'impôt et à l'aide financière visant à favoriser l'investissement privé, ainsi qu'à la R&D dans l'énergie renouvelable. Le Japon fait également son retour dans le domaine de la technologie et de l'ingénierie aéronautique, puisque le Mitsubishi Regional Jet espère être compétitif sur le marché mondial des avions de taille moyenne conçus pour le transport de passagers, et ce, grâce à son rendement du carburant élevé, à son faible impact sur l'environnement et à son niveau de bruit minimal. L'énergie renouvelable est également devenue une priorité de la politique en STI en Océanie. Les Fidji, Nauru et les Tonga ont défini des objectifs d'énergie renouvelable se situant entre 50 % et 90 % de la consommation énergétique totale de ces prochaines années. Les Îles Cook, quant à elles, se sont fixé l'objectif d'atteindre 100 % d'énergie renouvelable d'ici à 2020. La République de Corée étant maintenant l'une des économies les plus actives au monde en matière de R&D (sa DIRD représentait 4,15 % du PIB en 2013), son troisième plan fondamental pour la science et la technologie 2013-2017 a modifié la priorité du gouvernement vers la promotion de la recherche fondamentale ainsi que de l'esprit d'entreprise et de la créativité dans l'activité de production. Parallèlement, plus d'un tiers (35 %) du budget du gouvernement destiné à soutenir les industries stratégiques sur la période 2013-2017 (6 200 milliards de wons sud-coréens, soit 5,5 milliards de dollars des États-Unis environ) est alloué à de nouveaux secteurs de croissance industrielle, comme l'énergie solaire, les lanceurs spatiaux, etc. La République de Corée est parvenue à faire progresser la part de la recherche fondamentale dans sa DIRD en pleine expansion, atteignant ainsi 11 % en 2013, soit un niveau plus de deux fois supérieur à celui de 2007. Elle met actuellement en place une technopole à Daejeon. Baptisée « International Science Business Belt », celle-ci accueillera 18 universités, ainsi que plusieurs parcs scientifiques et centres de recherche, y compris un accélérateur d'ions lourds. Elle devrait être achevée d'ici à 2021, pour devenir un environnement urbain d'envergure mondiale réunissant la science, l'éducation, la culture et l'art. De nombreuses économies œuvrent pour repousser les confins du développement économique axé sur les STI. Elles cherchent en particulier à adapter leurs systèmes scientifiques et de R&D pour appuyer les moteurs de croissance de demain, comme la biologie moléculaire, la nanotechnologie ou encore les sciences des matériaux, où l'innovation dépend davantage des progrès en recherche fondamentale et nécessite donc que l'on accorde une place prépondérante à la collaboration entre la science et l'industrie. En Malaisie, les responsables politiques s'efforcent d'encourager le développement des services à forte valeur ajoutée pour venir compléter une activité importante du pays, savoir la fabrication de produits électroniques. La fin de la croissance axée sur le prix des ressources incite un grand nombre d'économies normalement très différentes – telles que l'Iran, l'Asie du Sud-Est ou encore l'Australie – à promouvoir l'investissement en R&D du secteur privé. Ces pays doivent toutefois parvenir en parallèle à maintenir l'investissement public dans la recherche publique ainsi que les ressources humaines de R&D nécessaires pour en tirer le meilleur parti. L'Australie fait figure d'exception parmi les économies avancées, en ce qu'elle ne dispose pas de données à jour concernant sa DIRD et ses effectifs de chercheurs. Ces dernières années, le système universitaire a pris les rênes de la recherche financée par des fonds publics, supplantant les institutions de recherche publique du pays. Le gouvernement se concentre sur les sciences océaniques et les sciences médicales. Parallèlement, le financement public de la recherche s'est réorienté vers un système de subventions et privilégie de plus en plus la recherche adaptée aux besoins du secteur privé, même s'il reste des questions en suspens quant à la manière de combler le fossé qui sépare les besoins de l'industrie et ceux du milieu universitaire. Qu'il s'agisse des aspirations de la Malaisie à devenir un pôle d'enseignement supérieur, des projets de communauté économique de l'ASEAN, de la place prépondérante accordée par la Nouvelle-Zélande à la diplomatie scientifique ou encore des initiatives pour le développement durable menées par la Communauté du Pacifique, la région a tendance à privilégier la coopération et la mobilité transfrontalières. En mettant en place sa communauté économique fin 2015, l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) cherche à faire de la région (qui représente près de 9 % de la population mondiale) une plateforme de production unique, soutenue par des programmes conjoints, comme le plan d'action de l'ASEAN pour la science, la technologie et l'innovation, qui prône une approche intégrée de la science, de la technologie et de l'innovation, et qui créé de nouvelles perspectives de coopération scientifique régionale pour ses membres à revenu plus faible. En décembre 2014, le Cambodge a lancé son premier plan directeur national pour la science et la technologie 2014-2020, avec le soutien de l'Agence coréenne de coopération internationale (KOICA, 2014), dans le but de favoriser l'innovation dans l'agriculture, dans d'autres secteurs de production primaire et dans les TIC. En Inde, l'investissement en R&D, y compris dans le secteur privé, est en hausse bien qu'on ne constate pas d'intensification notable ces dernières années. En termes de volume, toutefois, la place de l'Inde dans la R&D mondiale est comparable à celle des grandes économies européennes. L'innovation est fortement concentrée dans certaines régions ainsi que dans certains secteurs industriels, comme les produits pharmaceutiques et les services dans le domaine des TIC – ces derniers ont d'ailleurs un impact considérable à l'échelle internationale par le biais des relations commerciales et des IDE. À l'inverse, l'innovation dans l'industrie pharmaceutique indienne reste principalement sous contrôle national (pour ce qui concerne la propriété des brevets, par exemple). L'Inde se caractérise aussi par l'émergence de l'« innovation frugale », qui s'accompagne du développement d'un marché local pour les inventions favorables aux démunis, à l'image du matériel médical abordable ou encore de la Nano Twist, la toute dernière minivoiture fabriquée par Tata. L'Inde s'efforce de consolider ses activités de recherche en milieu universitaire, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif, afin d'élargir l’impact de la croissance liée aux STI sur son économie – ambition qu'affichent également ses voisins d'Asie du Sud, qui partent de plus loin. Au Nord, l'Asie centrale traverse une période de transition visant à abandonner les systèmes de recherche sous contrôle exclusif de l'État. Europe et Amérique du Nord Aux États-Unis, une légère reprise commence à se faire sentir et l'investissement en R&D du secteur privé est en hausse. À l'échelle internationale, les États-Unis restent en tête de la R&D, puisqu'ils participent pour 28,1 % à la DIRD mondiale. Le gouvernement américain s'affaire à mettre en œuvre certaines réformes structurelles qui conditionneront fortement l'orientation future de la science et de la recherche. Cela est particulièrement manifeste dans le domaine de la santé, comme en témoignent la loi sur les soins abordables (Affordable Care Act [2010]) et l'initiative BRAIN du Président américain (Brain Research through Advancing Innovative Neurotechnologies Initiative [2013]). L'administration s'efforce de maintenir les investissements américains en science, en technologie et en innovation industrielle. Parallèlement, la recherche en défense et dans les domaines connexes est en baisse ces dernières années. Malgré le manque de soutien du corps législatif, le changement climatique est une priorité de premier plan dans la politique scientifique de l'administration américaine. Usant de ses pouvoirs de réglementation, l'Agence des États-Unis pour la protection de l'environnement a défini des réductions d'émissions de carbone et certains États se sont fixé des objectifs stricts en la matière – la Californie en particulier. Ces objectifs ne pourront être atteints que par le biais de progrès technologiques majeurs et avec la coopération des parties prenantes de l'industrie. L'American Business Act on Climate Pledge, annoncé par la Maison-Blanche en juillet 2015, est soutenue par 13 grandes entreprises du secteur manufacturier et des services (Alcoa, Bank of America, Berkshire Hathaway Energy, Coca Cola, Google, Walmart…), qui se sont engagées à réduire leurs émissions de carbone. Le gouvernement américain finance également des initiatives d'envergure en matière d'énergie de remplacement, en particulier par le biais de l'Advanced Research Projects Agency – Energy (ARPA-E). Créé en 2009, cet organisme pour la recherche avancée en énergie dispose d'un financement annuel se situant entre 180 millions de dollars en 2011 et 280 millions en 2015. Les pays riches en ressources de matières premières, comme le Canada et la Russie, ont traversé la période d'après-crise avec une relative facilité jusqu'à la chute des prix du pétrole et d'autres matières premières en 2014. Ils voient aujourd'hui leurs efforts en STI mis à rude épreuve alors qu'ils ont fortement besoin de nouveaux moteurs de croissance. Avec 54 631 articles scientifiques publiés en 2014 (4,3 % du volume mondial), le Canada est en tête des grandes économies avancées (pays du G7) pour le volume de publications par million d'habitants (1 538 articles). Mais c'est aussi l'une des rares grandes économies avancées à enregistrer une baisse de son ratio DIRD/PIB ces dernières années (de 1,92 % en 2007 à 1,63 % en 2013). Particulièrement soucieux d'inverser la tendance à la baisse de son investissement en R&D du secteur privé, le Canada prend actuellement des mesures visant à renforcer les liens entre l'industrie et le monde universitaire, ainsi qu'à tirer parti de ses atouts industriels dans des domaines comme l'énergie, les produits pharmaceutiques, les TIC, etc. L'Union européenne continue, dans l'ensemble, d'afficher une croissance ralentie de sa production économique et de sa dépense en R&D. Seuls les trois membres nordiques (le Danemark, la Finlande et la Suède) dépassent l'objectif fixé par l'UE, à savoir un ratio DIRD/PIB de 3 %, tandis que l'Allemagne en est proche. Le huitième échelon des Programmes cadre (FP) pour la recherche et le développement technologique, baptisé « Horizon 2020 » et axé sur la période 2014-2020, apporte près de 80 milliards d'euros (soit une augmentation de 23 % par rapport à son prédécesseur, FP7) pour favoriser l'innovation mettant l'accent sur l'utilisation efficace des ressources, la croissance durable et des sociétés inclusives. En complément, la Commission européenne a mis en place un plan d'investissement pour l'Europe afin d'encourager l'innovation dans les entreprises plus petites et d'accélérer les réformes structurelles. Dans de nombreux pays de l'UE, toutefois, la recherche n'est pas assez dynamique pour atteindre les objectifs fixés, et ce, malgré ces initiatives. Cependant, Horizon 2020 reste un instrument puissant qui favorise la mobilité et la coopération au sein de l'Union, et qui constitue aussi un attrait important pour les régions voisines de l'UE, comme l'Europe du Sud-Est, les pays du bassin de la Mer Noire, ou encore les pays bordant les côtes sud de la Méditerranée. Malgré des tensions politiques, la Russie est aussi un acteur clé des programmes-cadre de l'UE. Depuis 2012, elle prend également des mesures capitales pour améliorer les conditions des chercheurs, favoriser le développement de technologies stratégiques clés comme les nanotechnologies, et créer de meilleures synergies entre le secteur privé et le monde universitaire par le biais d'une réforme de son académie des sciences. Si leur histoire récente leur a conféré un paysage économique structurel hétéroclite, les pays du bassin de la Mer Noire convergent aujourd'hui en ce qui concerne leur niveau d'industrialisation, de réussite scolaire et de dynamisme scientifique et technologique. À des degrés divers, ils cherchent tous à intégrer l'Espace européen de la recherche. Alors que le dynamisme en R&D de l'économie est en hausse en Turquie, il reste considérablement en deçà de ses niveaux d'autrefois dans les États issus de l'ancienne Union soviétique de la région. Amérique latine et Caraïbes De nombreux pays d'Amérique latine ont mis en place des instruments politiques de STI sophistiqués. Sur la période visée par ce Rapport, on constate une augmentation considérable de leur participation dans l'enseignement supérieur, dans la disponibilité de ressources humaines en R&D et dans la production scientifique. Pourtant, à l'exception du Brésil, ils sont peu nombreux à afficher un dynamisme en R&D comparable à celui des économies des marchés émergents dynamiques et, dans l'ensemble, ne cherchent pas à être compétitifs à l'échelle internationale dans les activités de haute technologie. L'activité scientifique et de recherche du Brésil éclipse celle du reste de l'Amérique latine, aussi bien en termes de volume que de dynamisme. Parallèlement, elle affiche une forte concentration géographique et reste assez isolée du reste de la société et de l'économie, qui souffre d'une productivité stagnante. Malgré le repli de l'investissement public en énergie propre depuis la fin des années 2000 – époque à laquelle le Brésil avait attiré l'attention du monde entier en raison de son intérêt pour le biodiesel – le développement durable y reste un secteur prometteur, où des exemples novateurs font leur apparition dans des domaines comme la cosmétique axée sur une utilisation durable de la biodiversité. À l'exception du Brésil, aucun pays d'Amérique latine ne dépense plus de 1 % de son PIB en R&D. La plupart dépensent moins de 0,5 %, ce qui les situe en dessous de la moyenne des économies à revenue intermédiaire de tranche inférieure. Dans l'ensemble, toutefois, la part de l'Amérique latine dans la dépense en R&D mondiale a augmenté, passant de 3,1 % en 2007 à 3,4 % en 2013. Par ailleurs, la région nourrit un intérêt politique grandissant pour le savoir autochtone et accroît son investissement dans les sciences liées au développement durable. La part des articles scientifiques axés sur le savoir autochtone a progressé dans tous les pays d'Amérique latine et est supérieure ou égale à 0,5 % en Bolivie, en Colombie, au Guatemala et au Nicaragua – des proportions bien supérieures à celles observées dans les pays en développement. Le Costa Rica se démarque par la part élevée des produits de haute technologie dans ses exportations de produits manufacturés. Le pays s'est également imposé dans le club mondial relativement fermé des pays capables d'attirer des investissements dans la production de micropuces. Bien qu'Intel ait annoncé en 2014 qu'il prévoyait de réduire la main-d'œuvre employée à la production, il gère et continue de développer une initiative de R&D au Costa Rica. L'Argentine et le Brésil sont dotés de programmes de recherche spatiale de plus en plus sophistiqués et ambitieux. En 2014, l'Argentine a lancé ARSAT-1, le premier satellite de communication entièrement construit en Amérique latine. De nombreux pays ont mis en place des structures réglementaires et des avantages fiscaux afin de favoriser l'énergie renouvelable et la recherche en la matière, énergie qui présente un potentiel élevé dans toute la région. Le plan du centre sur le changement climatique de la Communauté des Caraïbes (Caribbean Community Climate Change Centre) pour 2011–2021, axé sur l'atténuation des impacts et le développement résilient, soutient des initiatives régionales visant à faciliter le transfert et l'assimilation de technologie. Il s'accompagne du premier plan stratégique pour la Communauté des Caraïbes (2015–2019) [Strategic Plan for the Caribbean Community (2015– 2019)], initiative régionale favorisant le développement de l'innovation et de la créativité, de l'esprit d'entreprise, de l'alphabétisation numérique et de sociétés inclusives. A partir du 10 novembre 2015, le Rapport de l’UNESCO sur la science, vers 2030 et les ressources connexes seront disponibles en accès libre sur la page officielle du Rapport. Contact médias : Agnès Bardon Bureau de presse de l’UNESCO a.bardon(at)unesco.org ; + 33 (0) 1 45 68 17 64