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VERS UNE ENTREPRISE PROGRESSISTE
Porteuse de performance économique ET sociétale
André COUPET
Et Alain LOREAL, Céline MAS,
Yasmina SAHED-GRANGER,
Nicolas SZYMBORSKI,
Marc DELACHAUSSEE,
Guillaume DESVIGNES
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REFACE DE
D
ENIS
T
ERRIEN
Président d'Entreprise et Progrès
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PREFACE
LE TEMPS DE L'ENGAGEMENT
Dans un environnement économique et politique fragilisé, menacé parfois de façon brutale, peu rassurant dans ses
perspectives, l'entreprise se bat pour assurer sa survie ou son développement, jonglant chaque jour davantage avec les
variables de son équation économique.
Toutefois, alors que les institutions font l'objet d'une défiance accélérée, l'entreprise bénéficie ces jours-ci du respect
des citoyens. Beaucoup d'entre eux voient bien que les entrepreneurs, à la tête de petites entités ou de grandes
organisations, ne s'amusent guère et que ce sont eux qui créent l'essentiel du Produit Intérieur Brut et de cette
croissance promise et tant attendue.
Besoin de sens
Si les citoyens mettent de nouveau leurs espérances dans l'entreprise, c'est parce qu'ils pensent qu'elle peut changer la
donne, redonner du sens et des perspectives à leur vie quotidienne et, en bout de ligne, contribuer au bien-être
collectif, au Bonheur National Brut : par la proposition de solutions, intelligentes, économiques, écologiques… par la
proposition d'un cadre de travail libérateur d'énergie, humain, épanouissant… par une contribution à dynamiser la
communauté, créer des liens, solidariser.
La Société bouge, évolue, est en attente vis-à-vis du monde des entreprises. Or celui-ci, dans la grande majorité de ses
composantes, n'a pas encore pris la mesure de cet impératif : la financiarisation de l'économie au cours des 20/25
dernières années a au contraire renforcé la création de valeur pour le seul actionnaire en incitant les entreprises à
externaliser au maximum leurs contraintes, leurs coûts sociaux et sociétaux, leurs obligations citoyennes.
Besoin d’action et de cohérence
Depuis ses origines, l'association Entreprises et Progrès rassemble des dirigeants soucieux de "Mettre l'homme au cœur
de la vie de l'entreprise et l'entreprise au cœur de la cité". Ses membres sont de vrais partisans de l'économie positive et
mettent en place quantité d'initiatives qui s'inspirent de la RSE, de l'économie circulaire, du développement territorial…
autant d'initiatives aussi diverses qu'innovantes et qui vont dans le sens du progrès humain et de ce qu'attend la
Société.
Mais ils peuvent faire encore mieux en rassemblant et en intégrant leurs initiatives dans une véritable stratégie
intégrée, avec la détermination de progresser d'année en année autour d'indicateurs précis, inscrits dans le cadre d'une
performance globale.
C'est ce que proposent André COUPET et ses amis issus du monde de l'entreprise avec leur concept d'"Entreprise
Progressiste" ; un concept volontariste et audacieux à quelques égards, mais avant tout logique, offrant enfin une vision
à 360°, et surtout destiné à un usage pratico-pratique grâce à la grille d'auto-évaluation que les auteurs ont conçue
pour reformuler la Stratégie de l'entreprise.
Il est urgent de réconcilier l'entreprise avec la Société ; on ne peut plus accepter les discours de mascarade, ni même se
contenter de "bonnes actions". Il faut, comme le dit André COUPET, "passer de la RSE palliative à la RSE stratégique",
concilier les objectifs économiques et sociétaux de l'entreprise dans une seule et même stratégie de création de valeur.
Ceci requiert une vision neuve, ouverte au monde et à ses réalités, et un authentique engagement car :
Il est temps de remettre le temps en perspective, de revaloriser le pérenne, le durable aux dépens du jetable et du
profit immédiat.
Il est temps de revaloriser l'entrepreneur, celui qui construit pour les générations futures, qui transmet ; et de
mettre la réussite financière à sa place, au service du développement.
Il est temps de donner aux valeurs humanistes un rôle effectif dans les pratiques et les comportements des
dirigeants et cesser les modes opératoires fondés sur le mépris des personnes, l'épuisement des ressources et
l'avidité.
Il est temps d'ouvrir la gouvernance de l'entreprise aux parties prenantes et de la libérer du joug des seuls
apporteurs de fonds.
Ceci, sans attendre que les pouvoirs publics imposent de nouvelles règles ou conviennent de remettre encore à plus
tard les changements structurels souhaitables ; il s'agit bien de s'engager, dans chaque entreprise, ici et maintenant.
Denis Terrien
Président 3SI & Président Entreprise et Progrès
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AVANT PROPOS
A la mémoire d’Olivier Ferrand, fondateur de Terra Nova
Ce document constitue le résumé des travaux réalisés par un groupe de professionnels français issus du
monde des affaires, préoccupés par l'urgence de faire évoluer notre modèle économique.
Ce travail, coordonné et synthétisé par André Coupet, débouche sur des propositions destinées aux Chefs
d'Entreprise, aux Dirigeants désireux de changer la donne à leur niveau, sans attendre que de nouvelles lois
ou de nouveaux accords-cadres au niveau national ou international viennent – peut-être favoriser le
changement ; aucune préconisation ne s'adresse ici aux pouvoirs publics.
Même s’il apparait évident qu’un nouveau projet ou une nouvelle entreprise pourrait plus facilement
s’inscrire dans la définition - exigeante, soyons clairs - de la nouvelle façon de faire des affaires préconisée ci-
après, il est toujours possible d’avancer, de s’inscrire dans une démarche volontariste de progrès, quels que
soient l’âge ou la taille de l’organisation. Il n’y a nulle part, dans ce document, une proposition de timing : à
chaque entreprise de faire évoluer son modèle selon sa perception des urgences, selon ses moyens.
Ce document évoque tout d’abord l'impératif à se mettre en mouvement, avant de définir ce qu'est
l'entreprise progressiste, en quoi elle se différencie des autres. Il se penche ensuite sur la stratégie de
l'entreprise progressiste, sur son processus de conception et son lien avec la notion de performance globale.
Sont ensuite passés en revue les leviers de progrès sur chacun des axes pour lesquels l'entreprise
progressiste crée de la valeur partagée, chacun correspondant à l'une des 5 parties prenantes à prendre en
considération.
Cette contribution s'achève par la présentation d'un outil d'auto-évaluation reprenant les leviers de progrès
de ces différents axes ; outil à l'attention des dirigeants qui souhaitent enclencher le changement ou avancer
plus vite, de façon déterminée. Cet outil, tout comme ce document, est également disponible sur le site
www.entrepriseprogressiste.com et se décline avec quelques différences selon qu’il s’agit d’une société
anonyme ou d’une petite entreprise (sans conseil d’administration) ou encore d’une entreprise mutualiste/
coopérative.
« La responsabilité de l’entreprise ne s’arrête pas au seuil des usines ou des bureaux. Les
emplois qu’elle distribue conditionnent la vie entière des individus. Par l’énergie et les matières
premières qu’elle consomme, elle modifie l’aspect de notre planète. Le public se charge de nous
rappeler nos responsabilités dans cette société industrielle. (…) La croissance ne devra plus être
une fin en soi, mais un outil qui, sans jamais nuire à la qualité de vie, devra au contraire la
servir. »
Antoine RIBOUD
Fondateur de DANONE, Le double projet économique et social de l’entreprise,
Discours de Marseille, 25 octobre 1972
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I. CHANGER LA DONNE AU NIVEAU DE L'ENTREPRISE : UN IMPERATIF
La défiance généralisée qui affecte toutes nos institutions n'épargne pas l'entreprise, surtout la grande, et ce
depuis bientôt 20 ans, si l'on se remémore les scandales Enron, Permalat, Worldcom…et si l’on comprend le
lien entre les pratiques scandaleuses de défiscalisation de certaines multinationales et l’appauvrissement
des classes moyennes
1
. Mais, en dépit de la financiarisation des entreprises, faut-il tomber dans la caricature
en faisant un amalgame entre le monde de la finance et celui de l'entreprise ? Faut-il oublier que le moteur
du développement d'une région, d'un pays, c'est bien l'entreprise ?
En France, les 5.000 entreprises de taille intermédiaire (moins de 5.000 salariés), les 140.000 PME (moins de
250 salariés) et les 3 millions de micro-entreprises (moins de 10 salariés) contribuent pour 67% au PIB
généré par les entreprises et pour 70% au nombre d'emplois.
La croissance, le pouvoir d'achat, la richesse nationale… dépendent de l'entreprise.
L'innovation, c'est dans l'entreprise qu'elle se réalise. Et l'entreprise est également- ou devrait être- le
creuset de l'épanouissement de tout un chacun, le travail constituant une composante essentielle à la
réalisation de soi, du bonheur.
L'avènement de l'entreprise progressiste est donc un impératif pour 3 raisons :
1. Le modèle ancien ne fonctionne plus : quand les perspectives de croissance dans les pays de l'OCDE
sont de l'ordre de 1 à 2% maximum par an pour les 5 à 10 prochaines années et que les investisseurs
exigent encore 10 à 15% de rendement sur les fonds propres quel que soit le secteur, on suscite des
objectifs inatteignables. Ce "fondamentalisme de marché", selon l'expression de Joseph Stiglitz,
génère des inégalités croissantes entre les investisseurs et les forces de travail.
2. Le court-termisme épuise… et nous épuise : Il épuise les ressources naturelles – nous utilisons chaque
année 1 fois et demie ce que la planète nous procure et, par la course effrénée à la consommation
qu’il suscite, il fragilise nos grands équilibres environnementaux, tarit nos régions par des
délocalisations brutales… et nous épuise à titre individuel par la pression que la course aux sultats
engendre dans nos lieux de travail.
3. Le modèle ancien empêche l'avenir d'émerger : l'entreprise "financière" n'attire pas les jeunes
générations, plus sensibles aux valeurs de solidarité, d'humanité et d'épanouissement. Le besoin de
retrouver le sens au travail interpelle la mission de l'entreprise elle-même.
II. L'ENTREPRISE PROGRESSISTE : DEFINITION ET DIFFERENCE
"L'entreprise progressiste est clairement déterminée à créer de la valeur au bénéfice des 5 parties
prenantes que sont les clients, les salariés, les fournisseurs, les actionnaires et la société :
selon une approche participative, empreinte de respect, d'équité, d'honnêteté et
d'ouverture à l’autre.
pour atteindre des objectifs de performance privilégiant systématiquement le long
terme.
en appliquant une stratégie intégrant l’économique et le sociétal.
et en se donnant une gouvernance les parties prenantes s'impliquent dans le pilotage de l'entreprise".
Le schéma de la page suivante illustre cette définition autour des 4 grandes composantes indissociables du
concept d’entreprise progressiste.
1
Voir à ce sujet : "Profits without prosperity", William LAZONICK, Harvard Business Review, sept 2014 ; "Apple mis en cause pour ses détournements
d’impôts"», Le Monde 21 mai 2013 ; "La crise fiscale qui s’en vient" Brigitte ALEPIN, VLB Editeur, 2010
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