21 métiers pour le XXIe siècle
Il y a l'informatique et le multimédia. Mais on
commence aussi à rechercher des aromaticiens,
des truquistes et même des espions économiques.
Témoignages.
"Que faites-vous dans la vie? - Interface!" Tel pourrait être, demain, le début d'une banale
conversation de bistrot. C'est l'un des paradoxes du monde du travail confronté aux grands
chambardements qui ont commencé à s'opérer à l'aube du IIIe millénaire.
Avec la mondialisation de l’économie, les entreprises «dégraissent» à tour de bras,
«externalisent» leur gestion pour améliorer leur productivité, et font de la «flexibilité» leur
mot d'ordre pendant qu'on enterre «l'État-providence»; sur les faire-part de décès, on
déplore l'émiettement du travail, la précarité de l'emploi, en additionnant chômeurs, CDD
et autres CES (contrats emploi-solidarité), voire emplois-jeunes, sacrifiés sur l'autel de la
compétitivité. La norme traditionnelle éducation-travail-retraite fait l'objet de nos regrets
éternels : place à l'adaptabilité, à la mobilité professionnelle et à leur corollaire, la
formation continue tout au long de la vie. La messe est dite !
Mais, paradoxalement, de nouveaux métiers naissent de l'accélération des échanges
économiques… et de la désagrégation du tissu social. La part de l’activité aux entreprises
devrait progresser encore :hier, les grands groupes confiaient l’informatisation de leur
gestion aux SSII(sociétés de services et d’ingénierie informatique) ; aujourd’hui ,elles
délèguent les ressources humaines à des consultants extérieurs, tandis que les PME
confient leur site Web à des free-lance .«L'externalisation correspond à une très forte
professionnalisation du service, explique A B (Bureau d'information et de prospective
économiques). Sous-traiter permet à la fois au chef d'entreprise de se décharger d'activités
qu'il maitrise mal et d'en connaître le coût exact, tout en augmentant sa productivité.»
Dans un paysage où les frontières se brouillent, les experts ne se risquent guère à
quantifier les gisements d'emplois de demain. Même dans le secteur informatique, où l'on
sait qu'il manque aujourd'hui quelque 10 000 spécialistes en France, et dans celui du
multimédia qui va «booster» le marché de l'emploi, la prospective fait défaut. «Au-delà des
applications urgentes qui exigent de la main-d’œuvre, le secteur est naturellement en
expansion, explique C.M., responsable du recrutement informatique à l'Apec (Association
pour l'emploi des cadres). Les chiffres existent, ils sont faramineux.» Combien ? «Personne
ne se hasarde à les avancer, on s'est trop souvent trompé… » Néanmoins, on a quelques
certitudes : le secteur des télécoms va générer d'énormes besoins en ingénieurs et
architectes de réseau. On mise par ailleurs sur le développement des services de proximité.
Mais il faut surtout compter avec l'essor de l'emploi associatif (un million d'acteurs
actuellement). Définissant, selon le sociologue Roger Sue, un nouveau secteur
«quaternaire», «l'économie associative fondée sur les échanges mutuels de services et la
réciprocité, sur la formation et l'information, sur le lien social et la socialisation des
besoins» apparait comme le moteur d'«une nouvelle phase d'expansion». Plus que jamais,
l'emploi relève de l'initiative locale. L'imagination au pouvoir, en somme.
Catherine Cochereau
et Isabelle Pia