Réveil religieux et sortie de la religion en Chine contemporaine

Perspectives chinoises
2009/4 | 2009
Reconfigurations religieuses en République populaire
de Chine
veil religieux et sortie de la religion en Chine
contemporaine
Benoît Vermander
Édition électronique
URL : http://
perspectiveschinoises.revues.org/5352
ISSN : 1996-4609
Éditeur
Centre d'étude français sur la Chine
contemporaine
Édition imprimée
Date de publication : 31 décembre 2009
ISBN : 978-2-95333678-7-4
Référence électronique
Benoît Vermander, « Réveil religieux et sortie de la religion en Chine contemporaine », Perspectives
chinoises [En ligne], 2009/4 | octobre-décembre 2009, mis en ligne le 01 décembre 2012, consulté le
09 octobre 2016. URL : http://perspectiveschinoises.revues.org/5352
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D o s s i e r
L’étude des religions en contexte chinois se heurte dès
l’abord à des difficultés de principe: le terme même
de « religion », emprunté des langues occidentales
par l’intermédiaire du japonais, est-il pertinent pour définir
les formes sociales étudiées (1)? Et si l’on s’autorise à parler
d’une «sphère religieuse», les concepts occidentaux fournis-
sent-ils autre chose que des analogies souvent trompeuses
pour en décrire les structurations mentales et sociales (2),
même lorsqu’ils sont spécifiquement aménagés pour rendre
compte des réalités chinoises (3)? Mais alors quel vocabulai-
re et quelles catégories employer pour rendre compte de
l’ordre des phénomènes ordinairement étudiés par les
« sciences religieuses » occidentales ? À l’inverse, une
concentration trop étroite sur les problèmes lexicographiques
ne dissimule-t-elle pas ce quont d’universel les expériences
et manifestations religieuses chinoises, interdisant du coup
l’entrée dans une démarche comparatiste? Enfin, dans quel-
le mesure la détermination par l’État de formes religieuses
authentiques et « acceptables » oriente ou déforme-t-elle
notre perception du fait religieux chinois dans la spontanéi-
de ses manifestations sociales? Ces questions, qui peu-
vent être enrichies et multipliées, montrent les difficultés de
principe rencontrées par toute étude portant sur «les reli-
gions en Chine».
Les religions en Chine:
démographie et ethnographie
Un cadre dexercice
Rappelons tout d’abord que, depuis 1949 et jusqu’à présent,
cinq formes religieuses seulement sont légalement recon-
nues, que chacune de ces religions est «encadrée» par une
association qui fait office de courroie de transmission entre
cette expression donnée de la société civile et l’État-Parti
dont elle transmet les orientations et consignes (4), et que, par
ailleurs, l’Administration d’État des affaires religieuses (5),
aux différents échelons territoriaux, fonctionne comme une
sorte de «ministère des Cultes» aux compétences très éten-
dues. Enfin, dès les débuts du nouveau régime, les «cultes
hétérodoxes» et les «superstitions», distingués des «reli-
gions», ont été formellement bannis, et les premiers ont fait
parfois l’objet d’une répression systématique, illustrée dès
1951 par la violente campagne menée contre le mouvement
Yiguandao. Ce rappel préliminaire sugre déjà des
schèmes de compréhension. En effet, le système ainsi mis
Réveil religieux et sortie de
la religion en Chine
contemporaine
BENOÎT VERMANDER
1. Joël Thoraval, « Pourquoi les “religions chinoises” ne peuvent-elles apparaître dans les
statistiques occidentales ? », Perspectives chinoises, n° 1, mars 1992, p. 37-44 ;
Vincent Goossaert, « 1898: The Beginning of the End for Chinese Religion? », Journal of
Asian Studies, 65(2), 2006, p.307-336.
2. Liu Xiaogan, cité par Fan Lizhu, qualifie d’ « interprétation analogique inversée » la pra-
tique des chercheurs chinois d’appliquer un concept occidental à la compréhension de
leur propre univers de croyance, travaillant ainsi à l’inverse des philosophies chinois des
premiers siècles de notre ère qui faisaient usage de concepts familiers tels celui de Dao
pour rendre compte de notions bouddhistes importées. Cf. Fan Lizhu, « The Dilemma of
Pursuing Chinese Religious Studies in the Framework of Western Religious Theories »,
Fudan Journal of the Humanities and Social Sciences, 2(2), Juin 2009, p.29-48, notam-
ment p.30.
3. Fan Lizhu note que le célèbre concept de diffused religion articulé par C.K. Yang pour
rendre compte de la spécificité des formes sociales du religieux en Chine a été traduit
en chinois parfois avec la connotation de « dispersée » (sankaide), de « élargie » (kuo-
sanxing), de « répandue » (misanxing) ou de « distribuée » (fensanxing) (Fan, « The
Dilemma of Pursuing Chinese Religious Studies in the Framework of Western Religious
Theories », art. cit., p. 38)
4. Le « Comité patriotique protestant des trois autonomies » fut fondé en 1954,
l’Association bouddhiste de Chine en 1955, les associations islamiste, taoïste et catho-
lique en 1957. Les structures peuvent être plus complexes que ne l’indique ce rapide
résumé. À strictement parler, l’Église protestante est formée par l’association du
« Conseil chrétien chinois » (fondé en 1980) et du « Comité patriotique » mentionné à
l’instant. Le rapport entretenu entre l’association patriotique catholique et la conféren-
ce épiscopale des évêques « officiels » est de même nature.
5. Auparavant appelé Bureau des affaires religieuses.
perspectives
chinoises
Cet article étudie à la fois le renouveau d’organisations et de pratiques religieuses en Chine et ce que l’on pourrait
appeler une « sortie de la religion » caractérisée par la perte de tout socle religieux soudant le lien social et par une
instrumentalisation des pratiques et des discours religieux. Il défend l’idée suivant laquelle la prise en compte de ce
double phénomène de « renouveau » et de « sortie » facilite non seulement notre compréhension de la sphère
religieuse et de ses évolutions, mais aussi celle de la configuration sociopolitique dans laquelle le pays est engagé.
Réveil religieux et sortie de la religion en Chine contemporaine
en place instaure une double coupure, tout en maintenant la
possibilité de sauvegarder un «continuum» de la sphère reli-
gieuse: coupure entre formes religieuses reconnues et non
reconnues (quel que soit le degré d’institutionnalisation de
ces dernières); et, à l’intérieur même des religions recon-
nues, coupure entre les groupes et personnalités participant
aux structures mises en place par l’État-Parti et ceux qui s’y
soustraient. Pourtant, l’observation amène à parler moins de
coupure que d’un «continuum» déterminé par la variété de
stratégies des différents acteurs quant à leur degré d’inclu-
sion dans l’appareil officiel (de l’adhésion totale à la dissi-
dence, en passant par tous les intermédiaires).
L’article 36 de la Constitution de la RPC (6) stipule que:
les citoyens de la République populaire de Chine dis-
posent de la liberté de croyance religieuse. Aucun
organe d’État, organisation publique ou individu ne
peut contraindre des citoyens à croire, ni discriminer
les citoyens croyants ou non-croyants. L’État protège
les activités religieuses normales. Personne ne peut se
servir de la religion pour engager des activités qui per-
turbent l’ordre public, ni altérer la santé des citoyens
ni interférer dans le système d’éducation de l’État.
Les corps religieux et les affaires religieuses ne sont
sujets à aucune domination étrangère.
Contrôle public, liberté individuelle de croyance, détermina-
tion par l’État de la «normalité» des croyances et de leurs
manifestations, cadre national strictement assigné au reli-
gieux - tels sont donc les principes énoncés.
Abstraction faite de la période 1966-1979, la continui du
cadre légal et idéologique mis en place par le régime pour la
gestion des religions l’emporte sur les évolutions. Le cadre
légal actuel est déterminé en 1982, mais les principes qu’il
énonce étaient mis en action dès le tout début des années
1950 (une exception notable est l’affirmation que la dispari-
tion des religions est un objectif de long terme, affirmation
énoncée en 1982). Une évolution sourde s’esquisse au tour-
nant du siècle : la lutte contre les «cultes pervers», essentiel-
lement, à partir de 1999, contre Falungong, a renforles
positions des formes religieuses sanctionnées par l’État. Il
s’agit d’une évolution et non d’une rupture dans la mesure
les religions ont été fonctionnalisées par le gouvernement chi-
nois au fur et à mesure du développement de la politique de
forme et d’ouverture, au titre de pourvoyeuses subordon-
nées de moralité, d’encadrement social et d’ouverture inter-
nationale. Par ailleurs, à la reconnaissance du rôle social posi-
tif que peuvent jouer les religions s’ajoute désormais une
reconnaissance prudente de la différence entre les «cultes
pervers » (
xiejiao
) (désormais assimilés aux « sectes » du
monde occidental) et les «nouveaux mouvements religieux»
(
xinxing zongjiao
), ouvrant peut-être ainsi la voie à un assou-
plissement progressif des catégories régissant le champ reli-
gieux (7), assouplissement implicitement suggéré par les
gulations sur les affaires religieuses de mars 2005.
Enfin, la nature me du cadre institutionnel fourni par les
associations-relais renvoie à l’histoire des 100 dernières
années, laquelle a connu la constitution progressive de reli-
gions «nationales» et «modernes»: des associations reli-
gieuses nationales voient le jour dès 1912 et son cooptées par
l’État au cours des années 1930 (8), même si elles sont refor-
matées en fonction des besoins du nouveau régime à partir
de 1949. La rupture de 1949 ne doit donc pas dissimuler la
constitution d’une sphère «moderne» du religieux à partir de
la fin du XIXesiècle, mais il faudra nous demander s’il est
suffisant de reporter la rupture instauratrice à une date anté-
rieure à 1949 (aux alentours de 1898(9)) pour rendre comp-
te de la dynamique du phénomène religieux chinois.
Compter les croyants
Le contrôle étatique des expressions religieuses ne va pas
de pair avec la collecte de données statistiques. Les recen-
sements ne comprennent pas de questions sur l’appartenan-
ce religieuse. L’Institut chinois de sondages d’opinion
Horizon Group (
Lingdian jituan
) a réalisé deux enquêtes
en collaboration avec «Pew Global Attitudes Project» en
2005 et 2006, et une autre enquête en 2007 avec C100,
une organisation non partisane de citoyens américains d’ori-
gine chinoise (10). La base d’enquête surreprésente le milieu
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6. Rendu public en mars 1982, le « document 19 » du Comité central avait déjà formulé
les principes qui servent de base à l’article 36.
7. Cf. David Palmer, « Heretical Doctrines, Reactionary Secret Societies, Evil Cults: Labeling
Heterodoxy in Twentieth-Century China », in Mayfair Mei-hui Yang (éd.), Chinese
Religiosities, Afflictions of Modernity and State Formation, Berkeley, University of
California Press, 2008, notamment p.129-134.
8. Constitution de deux associations bouddhistes concurrentes vers 1912, l’une d’orienta-
tion plus laïque et l’autre plus monastique; situation à peu près similaire pour la structu-
ration nationale du taoïsme ; création d’une association islamique nationale; floraison des
tentatives d’organisation nationale du confucianisme; structuration nationale plus tardi-
ve des églises chrétiennes, du fait des divisions confessionnelles, des influences étran-
gères et du poids des associations spécialisées déjà existantes. Cf. Vincent Goossaert,
« Republican Church Engineering: The National Religious Associations in 1912 China », in
Mayfair Mei-hui Yang (éd.), Chinese Religiosities, Afflictions of Modernity and State
Formation, Berkeley, University of California Press, 2008, p. 209-232.
9. Cf. Vincent Gossaert, « L’invention des “religions” en Chine moderne », in Anne Cheng
(dir.), La pensée en Chine aujourd’hui, Paris, Gallimard, col. « Folio Essais », 2007, p.
185-213 ; du même : « 1898: The Beginning of the End for Chinese Religion? », Journal
of Asian Studies, 65(2), 2006, p. 307-336.
10. Synthèse des trois enquêtes disponible sur pewforum.org, 2 mai 2008, consulté le 30
juillet 2009. Analyse effectuée par Brian J. Grim, Pew Forum on Religion & Public Life.
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chinoises
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urbain (11) et est donc représentative d’environ la moitié de
la population adulte de la Chine. Six villes et leurs environs
immédiats ont été sondés en 2005 et 2006, et sept en
2007. L’enquête de 2006 donne les indications suivantes :
31 % des interrogés considèrent la religion comme étant
«très ou assez importante dans (leur) vie», 11% affirmant
qu’elle n’est pour eux «pas du tout importante». L’enquête
de 2005, avec une formulation quelque peu différente de la
question, donnait un pourcentage plus élevé encore (56%)
de personnes considérant la religion comme très ou assez
importante dans leur vie.
Dans ces trois enqtes, entre 14% et 18% des personnes
interrogées ont revendiq une appartenance religieuse. À titre
de comparaison, une autre étude mee par des chercheurs affi-
liés avec l’Université normale de la Chine de l’Est (Shanghai),
et disponible sous la forme de résultats publiés dans
China
Daily
(12), indiquait que «31,4% des Chinois de 16 ans et plus,
ou environ 300 millions de personnes, sont religieux.» Lintérêt
de cette dernière enquête ne réside pas tant dans le chiffre
annon que dans le fait que, pour la première fois, un média
sous contrôle de l’État ne citait pas le chiffre habituel de «100
millions de personnes professant une foi religieuse(13) ».
Dans les trois études effectuées par Horizon Group, les
bouddhistes forment le premier groupe religieux en Chine,
entre 11 % et 16 % de la population adulte. Ces études
confirment aussi la répugnance de la population chinoise à
s’identifier comme «taoïste», puisque cette appartenance est
revendiquée par moins de 1% des sondés. Et elles indiquent
que moins de 4% des sondés se revendiquent chrétiens. Les
ticences associées à la revendication de cette appartenance
dans le cas de sondés n’appartenant pas à des groupes ou
églises officiellement reconnus permettent de supposer que
ce chiffre minore le pourcentage effectif (l’effet de la surre-
présentation urbaine de ces sondages est plus difficile à esti-
mer). Les questions du sondage de 2005 en incluaient cer-
taines sur la «croyance personnelle» dans «la fortune(
yun
(40% de réponses affirmatives)(14), «Bouddha» (8%) et «le
Dieu Jésus (
shangdi Yesu
)» (6%). Ces réponses ne sont
pas en contradiction flagrante avec celles portant sur les
appartenances: une revendication plus élevée d’appartenan-
ce bouddhiste peut correspondre par exemple à une apprécia-
tion positive du système de moralité qui est attaché au boud-
dhisme, sans croyance affirmée à une figure particulière (15),
tandis que la croyance en la figure de «Jésus» peut aller de
pair avec l’absence d’appartenance déclarée à une église. Le
recoupement des enquêtes et la prise en considération de la
marge d’erreur statistique permettent de penser que, pour la
population urbaine au moins, les estimations ainsi proposées
ne sont pas infondées. Les mêmes enquêtes livrent le chiffre
de près de 1% de la population adulte déclarant son appar-
tenance à la religion musulmane, probablement une forte
sous-estimation liée aux limites géographiques des enquêtes.
Une estimation de l’appartenance à l’Islam basée sur les don-
nées ethniques livre un chiffre compris entre 20 et 23 mil-
lions de personnes, encore que cette base d’estimation soit
bien entendu elle aussi sujette à critique.
Une enquête parallèle aux précédentes et menée en avril et
mai 2005(16) ne décèle pas de différence dans l’intérêt mani-
festé envers la religion par les hommes et les femmes, ni de
variation significative en fonction des groupes d’âge (17). Elle
constate aussi un intérêt plus élevé chez les citadins (24%)
que parmi la population rurale (18%) (mais l’enquête est
probablement limitée à la périphérie immédiate des villes et
aux ruraux vivant en milieu urbain). Les titulaires d’un diplô-
me universitaire expriment un intérêt religieux plus marqué
(26%) que ce n’est le cas chez les détenteurs d’un diplôme
d’un collège d’enseignement professionnel (18%). Les fonc-
tionnaires de l’État et du Parti expriment l’intérêt le plus fort
(33%). En termes de catégories de revenu, l’intérêt pour le
sujet est presque identique dans tous les groupes, sauf pour
ceux qui nont pas de revenu ou aucun revenu fixe (15%).
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11. Les études sur l’évolution présente des activités religieuses dans les campagnes chinoises
sont plus rares, et les difficultés rencontes dans l’étude de terrain rendent leurs conclusions
prudentes. Par ailleurs, les chercheurs chinois sebattent avec la signification de la « fièvre
religieuse » des campagnes, fièvre que la plupart s’accordent pourtant à détecter. Les expli-
cations avancées incluent : une liaison organique de la croissance économique et de la crois-
sance religieuse ; le poids croissant des « quatre groupes nombreux » (les vieux, les femmes,
les non éduqués, les malades et handicapés…) plus susceptibles de s’en remettre aux
croyances religieuses ; la liaison entre influence culturelle de l’Occident et fièvre religieuse ;
l’activité plus grande des religions dans la sphère profane ; la confusion entre religions et
superstitions populaires en progrès. Cf. notamment Dong Jianbo, Li Xuechang, « Zhongguo
nongcun zongjiao xinyang de bianqian » (Les transformations de la croyance religieuse dans
les campagnes chinoises), Shanghai Xinzhengyuan xuebao (Journal of Shanghai
Administrative Institute), septembre 2004, 5 (5), notamment p. 102-103.
12. 7 février 2007, chinadaily.com.cn, dernière consultation le 30 juillet 2009.
13. Il est vrai que ce chiffre, souvent répété depuis la fin des années 1990, ne correspon-
dait plus à grand chose, puisque Xinhua affirmait par exemple le 12 avril 2006 que l’on
compte environ 100 millions de bouddhistes en Chine (xinhuanet.com.english, consulté
le 30 juillet 2009).
14. Il est intéressant de noter qu’avec un taux 40 %, la croyance dans la chance ou la for-
tune (yun), réalité spirituelle « manipulable », est plus forte que celle dans le destin
(ming) (29 %), dont on ne peut maîtriser le cours.
15. Les enquêtes menées à Taiwan ont souvent montré la revendication d’une appartenan-
ce bouddhiste avec faible corrélation des réponses portant sur les croyances et les pra-
tiques. Synthèse in Benoît Vermander, « Le paysage religieux de Taiwan et ses évolu-
tions récentes », L’Ethnographie, 1995, 118, p. 9-59.
16. Enquête menée par le groupe InterMedia. Données achetées et analysées par Pew, cf.
pewforum.org, 2 mai 2008, consulté pour la dernière fois le 30 juillet 2009. La question
posée est sujette à multiples interprétations : « Êtes-vous intéressé par la religion et par
le fait que le sujet soit abordé dans les médias? » Une réponse positive ne présuppose
donc ni croyance ni appartenance religieuse.
17. En contraste, l’enquête de l’Université normale de la Chine de l’Est citée dans l’article
du China Daily du 7 février 2007 relève que les deux tiers des personnes qui se décla-
rent « religieuses » sont âgées de 16 à 39 ans.
perspectives
chinoises
Enfin, l’intérêt pour la religion est beaucoup plus marqué
dans l’ouest de la Chine que dans les zones côtières (de
30% dans les provinces de Sichuan, Qinghai et Gansu à
11% dans les provinces du sud-est).
Les ethnographes et les historiens seront quelque peu acca-
blés par cette démographie du fait religieux chinois, pointant
l’artificialité des catégories utilisées et les autres limites inhé-
rentes à pareille approche, dont l’utilité nous semble pour-
tant indéniable pour autant que ses leçons soient croisées
avec celles fournies par d’autres disciplines. Nous revien-
drons en deuxième partie sur le débat méthodologique asso-
cié à la constitution de la sphère religieuse. Il nous faut préa-
lablement compléter cette présentation d’ensemble par des
incursions plus ponctuelles sur la démographie et l’évolution
des formes particulières qui composent le paysage religieux
d’ensemble.
... et décompter les fidèles
Lorsqu’on aborde l’examen de l’état présent des religions
actives en Chine, les problèmes méthodologiques liés au
décompte des fidèles et à l’appréciation de la vitalité sociale
des formes religieuses considérées varient grandement en
fonction des religions considérées. Dans le cas de l’islam,
l’estimation du nombre des fidèles est strictement corrélée,
dans toutes les études, avec celui des membres des minori-
tés ethniques dont la religion traditionnelle est l’islam. Dans
le cas du taoïsme ou dans celui de la «religion populaire»
on estimera à l’inverse qu’un décompte est impossible, tant
en pratique que par la nature même des formes religieuses
en question.
Le décompte des fidèles bouddhistes et l’estimation de leur
influence pose d’autres problèmes encore. Pour évaluer
l’ampleur et les limites de la «force sociale» que le boud-
dhisme représente aujourd’hui en Chine, il est sans doute
justifié de prendre comme point de repère premier la crois-
sance numérique et qualitative des communautés monas-
tiques. En effet, dès la fin du IVesiècle ou le début du Ve,
la communauté monastique constitue l’axe autour duquel
tournent les pratiques dévotionnelles, l’expression croyante
et la continuité institutionnelle du bouddhisme. Les temples
s’affirmèrent donc comme l’épicentre de l’expansion boud-
dhiste dans toute la Chine: lieu liturgique, le temple joue le
rôle d’intercesseur collectif pour la communauté croyante qui
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Communauté musulmane Hui dans le district de Pi, à proximi de Chengdu (Sichuan).
Le nombre de croyants est étroitement corlé à celui des communautés ethniques.
© Liang Zhun, Taipei Ricci Institute
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