T. BougerolS148
Au total, on retrouve donc dans la catégorie « troubles
psychotiques aigus et transitoires » (F23) quatre tableaux
caractéristiques :
le trouble psychotique aigu polymorphe sans symptôme –
schizophrénique, qui comprend certaines « bouffées déli-
rantes » et la « psychose cycloïde sans symptôme schi-
zophrénique »
le trouble psychotique d’allure schizophrénique, qui com- –
prend la « réaction schizophrénique » et la « schizophré-
nie aiguë indifférenciée »
les autres troubles psychotiques aigus essentiellement –
délirants, qui comprennent la « psychose paranoïaque
psychogène » et la « réaction paranoïaque ».
On retrouve aussi deux entités moins structurées : les
autres troubles psychotiques aigus et transitoires, et les
troubles psychotiques aigus et transitoires sans précision,
qui comprend la « psychose réactionnelle brève ».
Le 5e digit permet de spécifi er la présence ou l’absence
d’un facteur de stress aigu associé au début du trouble, ou
dans les 2 semaines précédentes.
Dans le DSM IV, ces troubles sont classés de manière
franche du côté des schizophrénies, dont ils se distinguent
seulement par un critère de durée :
le trouble psychotique bref, de début brutal est de durée –
inférieure à 1 mois ;
le trouble schizophréniforme, de début brutal ou insi- –
dieux, est de durée supérieure à 1 mois et inférieure à
6 mois. On y décrit la présence ou l’absence des facteurs
classiques de bon pronostic, familiers aux psychiatres
français : un début rapide, avec survenue de symptômes
psychotiques prononcés dans les 4 semaines qui suivent le
premier changement observable du comportement, la
présence d’une confusion ou d’une perplexité à l’acmé
du trouble, un bon fonctionnement social et profession-
nel prémorbide et l’absence d’émoussement ou d’abra-
sion de l’affect.
Diffi cultés diagnostiques
Face à ces états délirants aigus, les pièges diagnosti-
ques sont évidemment nombreux. Akiskal et Puzantian, [2]
en soulignaient certains, parmi les plus fréquents :
distinction clinique souvent diffi cile entre anhédonie ou –
dépersonnalisation dépressive et émoussement affectif
schizophrénique,
expressions d’une personnalité prémorbide, en particu- –
lier la personnalité introvertie, sur laquelle surviennent
les symptômes psychotiques maniaques ou dépressifs,
comorbidité entre symptômes psychotiques affectifs et –
retard mental, qui modifi e profondément le tableau clini-
que,
l’allure évolutive qui peut égarer le diagnostic : rémission –
inter-épisodique incomplète avec symptômes résiduels,
évolution à cycles rapides, états mixtes…
Les psychoses cycloïdes de Leonhard et al. [12, 13],
caractérisées par une évolution sous forme d’accès récur-
rents, appartiennent avec les « schizophrénies atypiques »
au groupe des « psychoses atypiques » qu’il propose de
défi nir. Leonhard en décrit 3 grandes formes cliniques : soit
des « psychoses avec troubles de la motilité » (psychose
motrice hyperkinétique, psychose motrice akinétique), soit
des « psychoses confusionnelles » (psychose confusionnelle
agitée, psychose confusionnelle inhibée), soit, enfi n, des
« psychoses avec anxiété - félicité » correspondant peu ou
prou à nos états schizo-affectifs.
Autre apport aux débats, les psychoses paranoïdes à
évolution périodique décrites par Sutter en 1970 [18]. Il
décrit sous ce terme des tableaux aigus marqués par un
remaniement délirant de l’existence, vécu dans une
ambiance affective bouleversante. Il note leur caractère
récurrent, avec la périodicité des accès séparés par des
intervalles libres, sans signe séquellaire. La clinique asso-
cie en proportions variables des signes de dissociation et
des symptômes thymiques (principalement du registre
maniaque), de la manie atypique à la bouffée délirante
polymorphe. La personnalité sous-jacente est fragile (schi-
zoïdie ou sensitivité), et Sutter et al. en font des formes de
transition entre la PMD et la schizophrénie, avec deux for-
mes extrêmes, la forme cycloïde et la forme paranoïde.
Les états délirants aigus dans
les classifi cations internationales
Dans les classifi cations actuelles, les états délirants aigus
sont décrits comme des troubles psychotiques aigus, le
terme « psychotique » renvoyant à la « présence d’halluci-
nations, d’idées délirantes ou de comportements manifes-
tement anormaux » (CIM 10) ou à la « présence de l’une ou
l’autre des manifestations suivantes : idées délirantes, hal-
lucinations prononcées, discours désorganisé, comporte-
ment désorganisé ou catatonique » (DSM IV TR).
Dans la CIM 10, la catégorie F23 regroupe les troubles
psychotiques aigus et transitoires. Ces troubles présentent
un caractère aigu, avec passage d’un état exempt de symp-
tômes psychotiques à un état manifestement psychotique
en moins de 2 semaines (le début est qualifi é de brutal s’il
se fait en moins de 48 h) ; ils présentent un caractère tran-
sitoire, avec une durée des manifestations psychotiques
inférieure à 1 mois en présence de symptômes schizophré-
niques, ou inférieure à 3 mois en l’absence de symptômes
schizophréniques.
La CIM 10 identifi e des syndromes typiques, avec un
trouble psychotique aigu polymorphe caractérisé par des
symptômes multiples, changeant rapidement de nature et
d’intensité, (avec 2 sous-types en fonction de la présence
ou non de symptômes schizophréniques typiques), et un
trouble psychotique aigu non polymorphe, caractérisé par
la présence de symptômes schizophréniques typiques ou
par des symptômes délirants ou hallucinatoires sans symp-
tôme schizophrénique.