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Le judaïsme, le christianisme et l’islam : parentés et dissymétries
Olivier MILLET
Parmi les grandes religions mondiales, le judaïsme, le christianisme et l’islam se caractérisent par des
traits communs qui les apparentent. Historiquement, ces trois religions sont liées entre elles, dans un ordre
de succession chronologique indiqué par le titre de cette communication. A ces liens de filiation
historique correspondent naturellement des thèmes et des valeurs communs sur le plan spirituel. Mais par
ailleurs, ces liens historiques et ces parentés spirituelles se sont accompagnés, et s’accompagnent encore,
dans l’histoire commune de ces trois religions, de désaccords religieux entre les porte-parole autorisés
(notamment théologiques), ainsi que de conflits politiques, sociaux et culturels entre les populations
concernées. Je voudrais ici présenter, sur les grandes questions qui unissent et divisent en même temps ces
trois religions, une vue d’ensemble qui tient compte simultanément des rapports qu’entretiennent ces trois
religions ensemble (et pas seulement un regard chrétien par rapport aux deux autres), et qui d’autre part,
en les respectant comme il se doit, permette au christianisme de mieux comprendre sa propre situation
dans l’histoire religieuse de l’humanité. Peut-être ce point de vue peut-il également éclairer, au-delà de la
conscience chrétienne, le monde dans lequel nous vivons, et dans lequel ces grandes religions jouent, à
côté d’autres encore, un rôle déterminant. Je partirai d’une brève présentation historique, pour en venir à
une présentation culturelle, puis religieuse. Ce qu’il me semble important de souligner, maintenant et au
cours de tout l’exposé qui va suivre, c’est que les relations respectives entre ces trois religions sont chaque
fois distinctes, et que par exemple celles que le christianisme entretient avec d’une part le judaïsme et
d’autre part avec l’islam ne doivent pas être confondues.
Je voudrais d’abord relever le caractère assez récent, du côté chrétien, de la prise en compte attentive
et respectueuse du judaïsme et de l’islam. Dans le passé, et jusqu’aux deux derniers siècles, le
christianisme a eu tendance à se satisfaire d’images inexactes et polémiques des deux autres religions (ce
qui est au demeurant également vrai pour les juifs et les musulmans à l’égard du christianisme). Dans le
cas du christianisme, cela s’explique par des raisons évidentes. Le christianisme se pensant comme vraie
religion prétention qu’il a héritée de la religion juive, et que l’islam a son tour fera sienne il a eu
tendance à juger le judaïsme, qui le précédait, comme une religion appartenant au passé et qui était
dépassée par la révélation chrétienne, comprise comme suite et achèvement de la révélation donnée au
peuple hébreu. De là, dans l’histoire du christianisme, à chaque époque concernée, une méconnaissance
du judaïsme vivant et contemporain, et parfois l’utilisation du judaïsme ignoré mais nécessaire à
l’existence même du christianisme comme sa propre base comme un repoussoir négatif, qui exprime
seulement des idées chrétiennes négatives sur le judaïsme, mais ne correspond pas à la réalité de la
religion juive vivante. Par exemple, les chrétiens ont souvent présenté le judaïsme comme une religion
ignorant la possibilité d’une interprétation symbolique et spirituelle des textes bibliques ce qui est faux
afin de mettre en valeur le caractère spirituel du christianisme. Quant à l’islam, le christianisme a pu se
permettre le luxe, jusqu’au XVIesiècle au moins, de le considérer soit simplement comme une secte ou
une hérésie chrétienne erreur qu’explique le fait que l’islam est apparu après le christianisme et qu’il
comporte des éléments religieux et spirituels qui proviennent en partie du christianisme soit même
comme une religion idolâtre (erreur également fréquente dans l’histoire du judaïsme et de l’islam, mais à
Professeur à l’Université de Bâle, Suisse.
March
l’égard, cette fois, du christianisme).
Du point de vue historique, la religion juive précède le christianisme, ce que le christianisme lui-même
a interprété en parlant, pour les écrits bibliques juifs qu’il avait reçus, d’Ancien Testament, et de Nouveau
Testament pour les écrits chrétiens postérieurs ou étrangers à la tradition juive. Il convient cependant de
noter que le judaïsme que nous connaissons aujourd’hui s’est lui-même défini, à l’époque de la première
grande propagation du christianisme (pendant les deux premiers siècles de notre ère), de manière
implicite, par rapport au christianisme et contre lui, de même que le christianisme se définissait à la même
époque par rapport au judaïsme et contre lui. Le résultat, c’est que ces deux religions, dans leur forme
classique et moderne, se sont en partie mutuellement définies et comprises l’une par rapport à l’autre et
contre l’autre, même si cela n’est pas toujours explicite ou conscient. Revenir, comme on le fait de plus en
plus aujourd’hui dans les milieux savants ou informés, à une meilleure connaissance des origines
historiques juives du christianisme (par exemple au judaïsme de l’époque de Jésus) signifie pour le
christianisme un retour vivifiant à ses propres sources, mais cela signifie aussi retrouver une religion juive
qui était encore plus diverse que ne l’est le judaïsme post-chrétien.
Si le christianisme a succédé dans la chronologie à la religion juive, l’islam à son tour a succédé au
christianisme. Je n’insisterai pas sur ce point, évident. Il convient de mesurer cependant les conséquences
de cette situation. En se suivant dans le temps, le christianisme par rapport au judaïsme et l’islam par
rapport au judaïsme et au christianisme, chacun des deux a repris le message (ou une partie du message)
de la religion ou des deux religions précédentes, tout en prétendant accomplir ce message ou le présenter
dans sa forme la plus authentique. La continuité historique, certaine, s’accompagne donc d’une
contestation successive de l’un par l’autre. Dans ce schéma, il convient de noter que seul le judaïsme peut
se passer de faire référence au moins théoriquement à une autre religion, puisqu’il est premier par
l’origine de sa révélation. La question s’est posée, cependant, pour les penseurs juifs, au cours de l’histoire,
et elle se pose encore aujourd’hui, de savoir comment interpréter, du point de vue juif, le christianisme et
l’islam, ces deux religions qui reprennent certaines affirmations juives tout en les implantant dans un
nouveau contexte.
Dans les faits, la coexistence historique des trois religions dans le même espace (autour de la
Méditerranée et à partir d’elle, vers l’Orient et l’Occident) les a obligées, et les obligera de plus en plus, à
tenter de se comprendre elles-mêmes en tenant compte du point de vue des autres, compréhension dont il
faut espérer qu’elle se fondera de plus en plus sur une connaissance exacte et respectueuse des traditions
respectives des deux autres religions.
Ce rappel historique me conduit maintenant à un deuxième point de vue, de nature culturelle.Ona
l’habitude de définir les liens de parenté entre ces trois grandes religions d’un point de vue essentiellement
théologique et spirituel, à travers le monothéisme, qui leur est commun, à travers la figure d’Abraham,
première grande figure (biblique) de la foi monothéiste, antérieure à Moïse (et à Jésus, et Mahomet),
commune et fondamentale pour les trois religions, à travers enfin l’idée d’un Dieu unique se révélant
comme tel à son peuple et à l’humanité, au moyen de la prophétie. Tout cela est vrai, mais peut-être trop
rapide et abstrait des réalités. Comme historien, je tiens à souligner, avant ces points importants, un point
de vue proprement culturel qui est décisif. Nous avons affaire à trois religions dont les origines se situent
dans l’ère sémitique de la civilisation humaine. Chacune des trois religions est née au sein de peuples
sémitiques : c’est évident pour le peuple hébreu, en raison des origines araméennes et cananéennes de
l’ancien Israël. En ce qui concerne le christianisme, il s’agit de la société juive (très diverse, et parlant
l’araméen) de la Palestine de l’époque de Jésus ainsi que de l’empire romain et de ses nombreuses
communautés juives, où le christianisme a d’abord été prêché, et, pour l’islam, il s’agit de la population de
l’Arabie centrale. Dans l’histoire des grandes civilisations, on peut même souligner le fait que les groupes
sémitiques en question sont marginaux par rapport aux prestigieux empires et civilisations sémitiques qui
dominèrent l’ancien Proche-Orient : Phénicie, Mésopotamie, etc. Dans les textes fondateurs (Bible juive,
Nouveau Testament, Coran) des trois religions, le thème du désert lieu de la révélation de Dieu
signifie symboliquement ce caractère au départ marginal des peuples de la révélation : la vocation divine
s’entend et se retrouve loin des grands empires et de leurs capitales, dans le silence et la solitude,
même si le peuple tout entier peut se trouver dans le désert (comme c’est le cas avec le peuple hébreu,
dans l’épisode de l’Exode).
Cette origine sémitique (elle-même très particulière, on l’a vu, dans l’ensemble sémitique)
s’accompagne d’une autre singularité celle des langues dans lesquelles s’expriment les textes fondateurs.
L’hébreu et l’arabe sont des langues sémitiques ; quant au christianisme, il s’est singularisé en diffusant de
manière universelle ses nouveaux textes (le Nouveau Testament) d’abord dans une langue non-sémitique,
le grec, ainsi ensuite que dans toutes les langues possibles, y compris d’autres langues sémitiques
(syriaque, éthiopien, arabe, etc.). Même si la langue grecque du Nouveau Testament laisse entendre un
arrière-plan sémitique (hébreu, araméen) dont ces textes proviennent, il y a là, pour le christianisme, un
facteur décisif de différenciation par rapport aux deux autres religions. Le christianisme ne s’est pas
attaché, dans ses traditions religieuses, liturgiques et exégétiques, à ses origines sémitiques comme l’ont fait
le judaïsme, resté fidèle au seul hébreu, et l’islam, resté fidèle au seul arabe. A cet égard, le christianisme
est une religion sémitique qui, souvent ignore ou tend à oublier son propre caractère sémitique. Si le
christianisme partage avec le judaïsme des textes communs (la Bible hébraïque, ou Ancien testament pour
les chrétiens), alors que l’islam ne partage aucun texte avec le judaïsme et le christianisme, cependant le
judaïsme et l’islam se fondent sur une tradition textuelle différente, certes, mais sémitique dans les deux
cas. Il y a là une parenté culturelle spécifique à ces deux religions, parenté que souligne aussi la parenté
des langues modernes, hébreu moderne et arabe moderne, parlées aujourd’hui dans la même région du
monde.
En quoi consiste ce caractère sémitique des trois religions ? Il serait trop long, et difficile, de le
préciser, mais on peut signaler que les notions utilisées pour signifier le temps, la nature et la conception
de l’homme, les structures sociales et familiales, ainsi que les moyens d’expression poétiques et littéraires
des langues sémitiques diffèrent largement des notions et moyens d’autres grands groupes de langue (par
exemple indo-européens, comme le latin et les grandes langues modernes européennes). Il suffit de lire
n’importe quel passage dans la Bible, même en traduction, pour deviner une différence, par exemple avec
la langue ordinaire (non sémitique) d’un article de journal ou d’un roman modernes. Même si le Coran
arabe est un livre très différent de la Bible juive et chrétienne, il y a entre ces différents corpus des affinités
culturelles, mentales et poétiques qui les rendent plus proches entre eux qu’ils ne le sont des langues
modernes européennes. Même si ces dernières ont été, à travers le christianisme, marquées à leur tour par
la langue biblique, elles l’ont été beaucoup également par la culture occidentale classique non sémitique
(grecque et latine), fondée, elle, sur la philosophie grecque, et non sur la révélation biblique.
Cette proximité culturelle des religions d’origine sémitiques souligne d’autant plus le rapport complexe
que chacune d’entre elles entretient avec l’esprit moderne et occidental, perçu parfois (dans le judaïsme et
l’islam) comme étranger, voire hostile, à l’inspiration divine et à la tradition religieuse. Le christianisme,
quant à lui, est exposé de manière très intime à sa double identité, à la fois sémite-orientale et occidentale.
Je rappelle ici que 15 millions d’arabes sont chrétiens, mais qu’inversement le christianisme est parfois
perçu ce qui est faux historiquement comme étranger à la sphère arabe ou sémitique. Quant au
judaïsme, il est parfois, depuis environ un siècle, présenté de manière calomnieuse, dans certains milieux
musulmans intégristes, comme une inflation mauvaise du christianisme « occidental » à l’intérieur de la
société musulmane, afin de pervertir celle-ci. C’est la thèse des mouvements intégristes et terroristes
responsables des attentats de l’an dernier aux Etats-Unis.
En fait, la façon dont les trois religions comprennent leur rapport à leur origine sémitique et à leur
environnement non-sémitique est décisive pour leur avenir et leur façon de considérer leurs relations avec
les deux autres religions. La vocation du christianisme est de faire dialoguer en lui sa double identité, à la
fois sémitique et occidentale ; le judaïsme moderne est riche de courants divers qui insistent, chacun à sa
manière, sur l’articulation de l’esprit hébraïque avec les expériences juives dans des sociétés non
sémitiques (notamment occidentales) ; quant à l’islam, qui a produit de si belles civilisations en dehors de
son berceau arabe, il peut trouver dans son passé des exemples de rencontre réussie avec les cultures les
March
plus diverses.
Dans un troisième et dernier point, je voudrais souligner quelques grands principes religieux communs
aux trois religions. Ce que j’ai dit précédemment prépare ce dernier point, et me permettra d’aller à
l’essentiel en étant bref. Je voudrais insister sur les traits communs aux trois religions. Les différences,
nombreuses et fondamentales, soit sont assez bien connues, soit méritent un exposé particulier, de nature
théologique, assez technique, qui est ici inutile. Les traits communs, eux, remontent tous à la religion juive,
et ils ont été reçus d’elle par le christianisme et l’islam. Comme religions universelles (avec des traits
différents, dans chacune des trois, de ce caractère universel, c’est-à-dire qui concerne, directement ou
indirectement, toute l’humanité) et comme religions de salut, elles présentent certains points communs
avec d’autres religions mondiales (par exemple le bouddhisme). Il convient donc de souligner d’autres
aspects, plus originaux. Ce que je vais indiquer est en tout cas fondamental pour comprendre le monde
moderne, qui est très largement issu de ces trois religions et de la mentalité (politique, morale, etc.) qui en
résulte.
Je me situerai d’abord (1) sur le plan du mode d’apparition et de constitution de ces religions, en
soulignant trois traits.
Premier trait, il s’agit de religions révélées et historiques, c’est-à-dire qui situent elles-mêmes un
moment précis où elles sont nées historiquement, et situent ce moment, de façon assez précise, dans une
histoire universelle de l’humanité. Il s’agit de Moïse, dans l’épisode biblique (livre de l’Exode dans l’Ancien
Testament) du buisson ardent (et de ses suites), pour le christianisme de Jésus, baptisé par Jean-Baptiste
au Jourdain évangiles), et pour l’islam de Mahomet recevant en 610 de l’ère chrétienne (Sourate 96 du
Coran) l’ordre d’un ange : « Lis », c’est-à-dire « Récite » (en arabe, « Iqra », d’où provient le nom de
Coran), ce qui est le point de départ de son action.
Deuxième trait, les trois religions sont prophétiques. Une personne particulière a été appelée, comme
on vient de le voir à propos de Moïse, Jésus et Mahomet, à jouer un rôle particulier d’intermédiaire entre
le Dieu unique et un groupe ou un peuple, et, à travers celui-ci, à l’intention de l’ensemble de l’humanité.
Chaque fois, la communication divine passe à travers le message, d’abord oral, d’un prophète, porte-parole
de Dieu. Ce prophète vient dévoiler le sens de l’histoire humaine. Il propose ce message au groupe
humain en question, constitué véritablement comme peuple par cette seule parole. Ce peuple peut et doit
alors participer activement, par sa manière de vivre, à ce sens de l’histoire voulu par Dieu. Dans la religion
juive ancienne et dans le christianisme ancien, cette révélation peut ensuite continuer à être expliquée par
d’autres prophètes ultérieurs, qui doivent cependant se fonder sur la tradition initiale et fondatrice. Notons
que l’islam revendique pour Mahomet le rôle de dernier prophète, venant après Moïse et Jésus, mais qu’il
le fait en contestant l’authenticité des sources juives et chrétiennes qui exposent la tradition judéo-
chrétienne au sujet de Moïse et chrétienne au sujet de Jésus. Au contraire, le christianisme ne conteste pas
l’authenticité des sources juives sur lesquelles il se fonde. Quant au judaïsme, il rejette les prétentions du
christianisme et de l’islam, et, comme on l’a vu plus haut, il n’a même pas besoin, lui, de contester ce qui
dans le christianisme et l’islam lui semble étranger et extérieur à sa propre tradition, première.
Ensuite (troisième trait), ce message oral se fixe, à un moment donné, dans des écrits, qui finissent
par constituer un texte dit canonique (servant de source et de règle à la foi). Il n’y a alors plus de
prophètes possibles, et c’est le texte lui-même qui fait l’objet d’interprétation. L’exégèse remplace la
révélation orale. Naturellement, l’interprétation des textes est diverse, à l’intérieur de chacune des trois
religions, et peut donner lieu à des divergences profondes, qui fondent à leur tour des traditions religieuses
distinctes (par exemple le catholicisme et le protestantisme dans le christianisme occidental).
Je me situerai ensuite (2) sur le plan sociologique et spirituel. Les trois religions ont en commun une
partie du contenu de leur message. Chacune présente en effet un caractère révolutionnaire, du fait que la
révélation initiale qui la fonde s’accompagne d’une rupture, plus ou moins prononcée, avec son
environnement respectif. Moïse arrache le peuple hébreu à l’esclavage en Egypte, et fait de lui un peuple
libre ; Jésus remet en cause, par son message, les autorités, diverses, de la société juive et romaine de son
temps, et il y apporte une parole et des gestes qui libèrent les individus qu’il rencontre des aliénations qui
pèsent sur eux ; Mahomet, lui, lutte contre les grandes familles de la Mecque et leur religion polythéiste.
Cet aspect contestaire, ou même révolutionnaire, est une constante à l’intérieur des trois religions, même
s’il leur arrive aussi, dans leur histoire respective, de se confondre avec un ordre (religieux, social,
politique, etc.) qu’elles acceptent un temps de légitimer. Parfois, cette contestation prend la forme
d’une véritable idéologie, comme on peut le voir avec certaines tendances sociales du christianisme
modernes, depuis le XIXesiècle, ou avec l’islamisme moderne (ce ne sont que des exemples parmi
beaucoup d’autres). La plupart du temps, cette contestation reste implicite, et consiste seulement dans le
rappel de principes éthiques qui remettent en cause le monde tel qu’il va.
Enfin (3), sur le plan proprement théologique, ces religions sémitiques, révélées et contestatrices,
s’adressent à l’homme au nom d’un Dieu unique, qui n’est pas le Dieu unique abstrait envisagé par les
philosophes. Il est unique et incomparable comme l’est sur un autre plan une personne humaine.
Surtout, comme créateur du monde, il est absolument différent par rapport à toute réalité créée par lui.
Cela veut dire que l’homme n’a sur lui aucune prise, ni intellectuelle, ni magique. C’est pourquoi ces trois
religions ont tendance à contester les autres religions, jugées idolâtres. Dieu reste libre et souverain par
rapport à sa création ; mais cette liberté est ce qui lui permet d’être juste et miséricordieux envers
l’homme ; l’homme, lui, ne sait pas être juste et miséricordieux comme Dieu, mais il est invité à le devenir.
Créateur, ce Dieu transcendant (comme disent les philosophes dans leur langage) oriente l’histoire du
monde (voir au-dessus), et il jugera le monde à la fin de celle-ci.
Pour conclure, je voudrais souligner et lier entre eux deux points qui ont été mentionnés. Les trois
religions se situent elles-mêmes, on l’a vu, dans un processus de révélation historique ; d’autre part, elles
annoncent toutes les trois que l’histoire humaine sera, à la fin des temps, jugée (avec toutes les actions qui
auront été commises au cours de cette histoire), afin que justice soit enfin rendue. Il y a évidemment un
lien entre ces deux faits. A propos du premier fait, les trois sont l’une par rapport à l’autre souvent en
rivalité, peut-être aussi en complément. Mais les trois affirment que la vérité divine qu’elles proclament est
liée à la justice de ce Dieu absolument différent de toute réalité créée, et elles se soumettent à l’avance à
cette justice qui leur échappe, et qui sera manifestée par Dieu lui-même. Il est donc consolant, sur le plan
humain et religieux, que les trois religions rivales soient d’accord entre elles sur le critère ultime qui
permettra de les juger il s’agit du Juge transcendant et misécordieux lui-même, dont l’identité est
supérieure à toute faiblesse humaine.
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