
MAGSACEM # 95 jAnvIER-AvRIl 2016
À LA UNE
08 09
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dépenses de l’État de 4 %, tandis que le soutien
des collectivités territoriales reculait, « pour la
première fois en trente ans », insiste l’étude. Elle
montre aussi que l’économie culturelle est rési-
liente, car elle s’appuie sur une diversité de situa-
tions et de modèles, depuis les « entrepreneurs
individuels » que sont les créateurs, jusqu’aux
grandes entreprises mondialisées, en passant par
de très nombreuses TPE et PME. Une polyvalence
qu’on trouve, par exemple, chez Roy Music, label
positionné à 360°. « Les artistes n’utilisent pas for-
cément tous nos services, précise son cofondateur,
Rodolphe Dardalhon , mais cela nous confère une
vision globale de l’économie de notre industrie. » Le
compo si teur Christophe Héral ne choisit pas, lui
non plus, entre le cinéma, la télévision, le court
et le long-métrage, le jeu vidéo, l’opéra ou encore
la scène : « Mon travail consiste à agencer des notes
de musique, estime celui qui a, notamment, créé
des musiques pour les jeux d’Ubisoft. La diversi-
fication nourrit les différentes activités entre elles ».
Cette activité multiple de l’individu, tant souhaitée
« L’emploi dans l’économie
culturelle continue de croître
à un rythme supérieur
à la croissance de l’emploi
en France. »
Panorama de l’économie de la culture en France, EY, 2015
La culture en France, un secteur
toujours aussi dynamique
Malgré la crise, la culture et la création confirment leur vitalité économique, en répondant,
en particulier, aux problématiques d’emploi.
E n France, les secteurs culturel et créa-
tif persistent et signent. Deux ans après
une première étude qui avait mis au
jour le poids économique important
de la culture en France, le nouveau
panorama EY France Créative (disponible sur
francecreative.fr) montre que l’économie cultu-
relle a su résister malgré la crise. Arts visuels,
musique, spectacle vivant, cinéma, télévision,
radio, jeu vidéo, livre, presse, publicité et com-
munication… avec près de 84 milliards d’euros
de revenus, ces secteurs, qui reposent sur la créa-
tion, ont progressé de 1,2 % entre 2011 et 2013,
pendant que le PIB augmentait, lui, de 0,9 %. Et
le nombre d’emplois a crû de 1,3 %, avec 1,3 mil-
lion d’emplois en 2013, et même de 1,5 % sur le
1,25 million d’emplois directs.
Résilience et fragilité
La progression s’est pourtant faite dans un
contexte de crise, qui n’a pas épargné la culture.
Entre 2012 et 2013, celle-ci a subi une baisse des
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par d’autres, est déjà une réalité dans les secteurs
de la culture et de la création.
Des réponses en termes
d’emploi
Le panorama, en braquant un projecteur sur les
métiers et les parcours, montre, d’ailleurs, combien
la culture répond aux problématiques actuelles de
l’emploi en France. Elle fait appel à des compétences
multiples – jusqu’à près de cent cinquante métiers
différents dans l’audiovisuel ou le graphisme et le
design –, dont plus de la moitié relèvent de la
création. Et nombreuses sont les personnes à tra-
vailler simultanément dans plusieurs branches –
72 % des intermittents collaborent avec au moins
deux secteurs différents de la création –, voire à
exercer différents métiers.
En outre, les secteurs culturels bénéficient d’une
population active constituée de gens en moyenne
plus jeunes que dans l’économie globale, et les neuf
cent quatre-vingt-deux métiers qui y participent
couvrent un large spectre en termes de diplômes
ou de formation. Ces catégories davantage confron-
tées au chômage trouvent plus facilement des pers-
pectives dans cet univers, « une tendance plus parti-
culièrement marquée dans les secteurs en expansion »,
précise l’étude, avec par exemple 60 % de moins de
40 ans dans les arts graphiques ou la décoration.
Même constat pour la parité, avec 47 % de femmes
en 2010, mais avec « de fortes disparités entre les diffé-
rents secteurs », nuancent les auteurs du panorama.
Il est vrai que les indicateurs globaux masquent des
évolutions qui diffèrent d’une activité à l’autre. Si
les arts visuels, la musique et le spectacle vivant
peuvent se réjouir de revenus et d’emplois à la hausse
entre 2011 et 2013, la presse, le livre, voire la radio
ont subi un sort inverse. Quant à la télévision, elle
a, comme le cinéma, accusé une baisse de ses reve-
nus, mais le petit écran a vu pa ral lè lement ses effec-
tifs augmenter, à la différence du septième art. « Il
est parfois difficile de voir ce qui relève du conjoncturel,
comme ce que rencontrent le cinéma et le jeu vidéo,
commente Claire Giraudin, et ce qui appartient au
structurel ; exception faite pour la presse et le livre, qui
traversent actuellement la phase de transformation
numérique qu’a connue la musique il y a quelques
années. » La distinction est d’autant moins évidente
que le seul secteur des arts visuels couvre à la fois
les musées, l’architecture ou encore la vente d’œuvres
d’art. Or, chaque composante connaît une évolution
propre, mais presque toujours positive, contribuant
au dynamisme général.
•
> EN RÉGION
Un levier de croissance pour les territoires
« La création d’une structure culturelle, d’un festival représente un apport essentiel en termes d’économie et d’emploi
pour les territoires », explique Claire Giraudin, directrice de Sacem Université. Un impact sur l’économie locale et
régionale que ce deuxième panorama s’est attaché à illustrer à travers de nombreux exemples. Claire Giraudin
cite, ainsi, le Louvre-Lens, qui « a permis de créer un pôle dynamique avec le démarrage d’un ensemble de petites
entreprises culturelles », ou Arles, « une ville portée par ses différents acteurs culturels », avec les sociétés
d’Harmonia Mundi, la maison d’édition Actes Sud, les Rencontres de la photographie… et, bientôt, sa fondation
d’art contemporain.
Dans l’ouest, les Vieilles charrues – un des leaders des deux mille festivals organisés en France, avec deux cent
cinquante mille spectateurs en 2014 – boostent la région de Carhaix. « Cinq des 13 millions d’euros de dépenses
restent sur le territoire, car nous travaillons avec les artisans locaux puis élargissons le cercle des fournisseurs au
département, à la région », précise son directeur général, Jérôme Tréhorel, qui choisit du Breizh Cola plutôt que du
Coca pour abreuver ses festivaliers. Outre une visibilité exceptionnelle pour la commune de neuf mille habitants,
l’événement accorde « 100 000 euros aux associations locales dont les bénévoles collaborent à son organisation ».
Et, bien que sans soutien public, il a « financé l’agrandissement de l’espace Glenmor et la rénovation de la toiture
du château situé à l’entrée du festival », ajoute son dirigeant. Toutefois, les Vieilles charrues subissent une
concurrence croissante de festivals « qui ne poursuivent pas les mêmes objectifs », remarque Jérôme Tréhorel.
Conséquence : le budget artistique est passé, en quelques années, de 1,7 à 4 millions d’euros. Quant aux
dépenses liées à la sécurité, déjà de l’ordre de 1 million d’euros, après les attentats de 2015, « il faudra sans doute
les augmenter », estime le directeur. De quoi fragiliser un équilibre déjà précaire.
Ci-dessous : le festival
des Vieilles charrues 2015.
Les industries culturelles
et créatives représentent,
en France :
près de 84
milliards d’euros
de revenus en 2013 ;
1,3
million d’emplois en 2013 ;
47 %
de femmes en 2010.
© DENOUAL COATLEVEN
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