Seule la version anglaise fait foi
Mercredi 25 mai 2011
Déclaration de Christine Lagarde, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie
aux Gouverneurs et Administrateurs du FMI
Chers Gouverneurs,
Chers membres du Conseil d’Administration,
Ces dernières années, nous nous sommes résolument engagés sur la voie d’une amélioration
de l’efficacité et de la légitimité du Fonds monétaire international (FMI). Je crois fermement
que la direction du FMI doit être sélectionnée selon un processus ouvert, transparent et fondé
sur le mérite. Cela autorise des personnalités de toutes les régions à se présenter sur la base
des mérites de leur candidature. Je me félicite de la décision prise par le Conseil
d’administration du FMI vendredi dernier.
Je présente aujourd’hui ma candidature au poste de directeur général du FMI et je vous en
soumets ici les raisons.
*
Durant les dernières années, le Fonds a considérablement changé, pour le meilleur. Il s’est
remis au centre du système économique et financier mondial. Il a su tirer les leçons de la crise
en s’ouvrant davantage à de nouvelles idées, dans le respect de ses valeurs et de ses principes.
Preuve de ce renouveau, la communauté internationale a confié au FMI un rôle-clé dans la
coopération économique et financière mondiale.
Sous la conduite de Dominique Strauss-Kahn, le FMI a renforcé ses ressources, ses
instruments, sa gouvernance et ses interventions sont devenues moins stigmatisantes.
L’accroissement de ses ressources lui a permis de répondre plus efficacement à la plus grave
crise économique et financière depuis la seconde guerre mondiale. Le Fonds dispose
désormais d’instruments réformés avec des conditionnalités mieux adaptées pour prévenir et
répondre aux crises. Enfin et surtout, sa gouvernance a été largement refondée pour mieux
refléter le poids des pays émergents dans l’économie mondiale tout en protégeant les pays à
faible revenu.
La légitimité et l’efficacité du FMI ne vont pourtant pas de soi et doivent être continuellement
réaffirmées, et améliorées quand cela est possible et nécessaire. Je crois fermement que le
FMI a besoin de poursuivre son évolution vers plus de réactivité, d’équité et d’équilibre dans
son action pour la stabilité économique et financière mondiale, afin de mieux servir
l’ensemble de ses membres.
*
Durant le mandat du prochain directeur général, le FMI devra préserver et développer ce qui
constitue son atout principal son universalité et sa capacité à se réinventer pour fournir de
l’aide sous toutes ses formes, à tous ses membres, dans des circonstances économiques et
financières qui évoluent.
Ce que le FMI a été en mesure de faire pour l’Europe dans des circonstances exceptionnelles
est remarquable et nous devons nous assurer que le Fonds est capable d’atteindre des résultats
similaires et de continuer à faire preuve d’une réactivité équivalente pour d’autres gions du
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monde qui feraient face à des difficultés. Aujourd’hui, le défi le plus pressant pour le Fonds
n’est pas seulement de jouer pleinement son rôle en Europe, mais aussi de répondre à la
demande d’assistance de certains pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient : sa
contribution au soutien à la croissance de ces économies sera l’illustration de la capacité du
Fonds à répondre à ses membres en tenant compte de leur situation spécifique et de leurs
besoins. Plus généralement, le FMI a un rôle clé à jouer auprès des pays à faible revenu,
notamment en Afrique. Nous devrions utiliser pleinement les politiques, les instruments et
l’assistance technique pour répondre aux besoins et aux spécificités des pays en
développement. Pour y parvenir, la coordination avec les partenaires, notamment la Banque
mondiale, sera décisive.
Pour permettre une meilleure prévention des crises et prodiguer des conseils de politique
économique ajustés et pertinents, le FMI doit se doter d’une surveillance plus forte, plus
efficace et plus cohérente. Au-delà de son mandat premier de stabilité des taux de change, le
Fonds doit mieux intégrer l’analyse du secteur financier au sein de la surveillance, en en
collaborant avec le Conseil de stabilité financière et les autres organisations concernées. Il
doit aussi renforcer la surveillance multilatérale en travaillant sur les interdépendances
globales. J’estime que les rapports sur les effets de débordement doivent devenir un
instrument permanent de la surveillance. Au-delà, celle-ci doit aussi prendre en compte les
réformes structurelles et les finances publiques, ainsi que les politiques sociales et de
l’emploi.
Afin de s’adapter aux réalités économiques, le Fonds devra disposer de ressources suffisantes
et d’instruments adéquats, ce qui demandera une attention continue. A mes yeux, cela sera
particulièrement important pour répondre aux défis régionaux, face auxquels une coopération
renforcée entre le Fonds et les enceintes financières régionales est nécessaire. Nous devons
également nous assurer que le FMI est en mesure de répondre aux chocs systémiques. Plus
généralement, le Fonds doit continuer à être au cœur du projet de long terme qu’est le
renforcement du système monétaire international.
Une légitimité renforcée sera la pierre angulaire de toutes ces réformes. La mise en œuvre de
la réforme historique de la gouvernance décidée l’année dernière est clairement un prérequis.
Un renforcement de la redevabilité du Fonds pourrait être étudié et je pense que le lancement
d’une revue par le Président du Comité monétaire et financier international serait bienvenu.
Plus largement, je suis convaincue que la représentation des pays au Fonds doit continuer à
s’adapter aux évolutions des réalités économiques.
Le plus précieux atout du FMI est son personnel. Son professionnalisme et son expertise
doivent être renforcés et protégés, en promouvant en outre l’égalité des chances et la diversité
sous toutes ses facettes.
Si vous me confiez cette tâche, je m’efforcerai, durant les cinq prochaines années, de bâtir un
FMI qui soit :
Réactif – prêt à répondre à tous les défis, qu’ils soient prévus ou imprévus ;
Coopératif à l’écoute de tous et dans une coordination effective avec toutes les
parties prenantes, recherchant en permanence le consensus ;
Légitime et équitable – reflet d’un monde qui évolue.
[Mention manuscrite : « Je souhaite vous démontrer que mes connaissances, mes
compétences et mon expérience peuvent contribuer au succès de cette mission exigeante »]
Christine LAGARDE
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Née à Paris en 1956, je suis mère de deux grands enfants.
Après avoir été admise au barreau de Paris, je suis entrée en 1981 au cabinet d’avocats
international BAKER & McKENZIE, me spécialisant en droit du travail, en droit de la
concurrence et en fusions-acquisitions. Devenue membre du comité exécutif mondial en 1995,
j’ai été nommée président de ce même comité en 1999, puis président du comité stratégique
mondial en 2004.
Après près de 25 ans d’exercice dans le secteur privé, à la demande du Président Jacques
Chirac, j’ai rejoint le Gouvernement français en 2005 pour mettre mes compétences et mon
expérience au service de mon pays, comme secrétaire d’Etat au Commerce extérieur. Après
l’élection du Président Nicolas Sarkozy, j’ai brièvement occupé les fonctions de ministre de
l’Agriculture et de la Pêche avant d’être nommée, en juin 2007, ministre des Finances, de
l’Economie et de l’Emploi.
A ce poste, j’ai eu la charge de la politique économique de la France et j’ai occupé la fonction
de gouverneur pour la France au FMI, à la Banque mondiale, dans les banques régionales de
développement et dans le Fonds pour l’environnement mondial. Avant de présider les
réunions des ministres des finances du G20 et du G7 en 2011, j’ai présidé le conseil ECOFIN
de l’Union européenne durant la seconde moitié de 2008 et j’ai contribué à la mise en place
des outils de réponse à la crise.
Pendant la crise, mon action sur le plan national a été double. En termes de gestion de crise,
j’ai conduit les efforts des autorités françaises pour protéger l’économie française de l’impact
de la crise bancaire internationale. Au début de la crise, la France a décidé de soutenir son
système bancaire de manière à éviter une contraction du crédit et son impact récessif. Mais
ma responsabilité a également été de poser les bases d’une croissance durable au lendemain
de la crise. Mes deux priorités ont été l’assainissement des finances publiques et la
compétitivité. L’assainissement des finances publiques, incluant une réforme d’ensemble des
retraites, car la crise avait pesé lourdement sur nos comptes. Ma deuxième priorité a été
d’identifier les prochains moteurs de la croissance française. Nous avons décidé non
seulement d’investir lourdement dans la recherche et développement (R&D) avec une
puissante incitation fiscale à développer des sites de R&D en France mais aussi d’investir
dans les industries du futur.
En parallèle, j’ai eu à cœur d’améliorer la régulation du système financier international de
manière à supprimer les excès d’un système que des forces de marché insuffisamment
régulées avaient conduit au bord de l’effondrement. Le G20 peut à juste titre s’attribuer le
mérite de la toute première initiative de l’histoire visant à mieux réguler les marchés de gré-à-
gré ainsi que le renforcement historique du capital des banques dans le cadre des gles de
Bâle III. En France, j’ai conduit une réforme ambitieuse du système de contrôle des banques
et des assurances pour tirer les leçons de la crise.
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