1918 : la boucherie s'achève enfin et la révolution gronde plus que jamais
une puissante gauche socialiste s'est constituée autour de jeunes militants comme Antonio Gramsci et accompagne
déjà l'ébullition sociale, paysanne et ouvrière qui fait sentir ses premiers effets au milieu de l'année 1918 dans un
pays lassé par la guerre.
En France, en pleine offensive allemande, une grève éclate le 13 mai 1918 aux usines Renault de Billancourt. Les
ouvriers, bientôt rejoints par les métallos de la région de Saint-Etienne réclament la fin de la guerre. 300 000
travailleurs sont bientôt en grève, bravant courageusement et fièrement le vieux Clémenceau.
Chef du gouvernement depuis novembre 1917, le « Tigre » n'a qu'une obsession : battre l'Allemagne. Habile et
manoeuvrier, il ouvre des négociations et le mouvement de grève se termine à la fin du mois de mai.
Cette poussée ouvrière trouve une timide traduction politique avec la conquête de la SFIO par le courant animé
depuis deux ans par Jean Longuet lors du conseil national de juillet 1918.
A la tête du journal le Populaire, le petit-fils de Karl Marx anime une tendance oppositionnelle qui réclame l'ouverture
immédiate de négociations de paix. Longuet et ses amis constituent une nouvelle majorité qui, si elle condamne sans
ambiguïté la participation ministérielle, reste réservée sur la révolution bolchévique et ne réclame pas une paix
immédiate.
Sur leur gauche, l'instituteur Fernand Loriot anime le courant internationaliste qui réclame une solidarité sans faille
avec la révolution russe par la conclusion d'une paix rapide.
Ultra-minoritaire dans la SFIO, Loriot est aussi l'un des animateurs de la fédération des instituteurs de la CGT qui,
depuis la fin 1914, est une composante majeure de l'aile pacifiste de la confédération.
Cependant, les syndicalistes révolutionnaires, dont les rédacteurs de l'École Émancipée, ne parviendront pas à
conquérir la direction du syndicat.
La poussée révolutionnaire met fin au conflit
C'est d'Allemagne que viennent les secousses les plus vives. Les bolcheviks sont très attentifs aux évènements
allemands.
Lénine pense que le maillon impérialiste peut craquer en Allemagne, desserrant ainsi l'étau autour de la Russie
soviétique. En janvier 1918, de puissantes grèves éclatent à Berlin et dans les grands centres industriels du pays.
De nombreux militants de l'USPD (parti socialiste indépendant) y jouent un rôle actif. Le gouvernement réplique par
l'état de siège et la répression. L'incendie est provisoirement éteint mais le feu couve sous la cendre.
En août et septembre 1918, la situation militaire se dégrade encore pour les armées allemandes qui ne pourront plus
redresser la barre.
Le gouvernement impérial cherche alors le moyen de sortir de la guerre au plus vite. Les ministres, les généraux et
l'Empereur ont compris que prolonger cet état de guerre favorisait un réveil du mouvement révolutionnaire et qu'ils
pouvaient être submergés par un possible soulèvement populaire.
Redoutant un tel scénario, l'état-major et Guillaume II élargissent le gouvernement. Pensant canaliser la montée des
masses, ils y font entrer deux ministres issus du SPD à la fin du mois de septembre.
Sentant qu'il faut rapidement offrir des gages aux travailleurs, les ministres sociaux-démocrates obtiennent la
libération de Karl Liebknecht le 21 octobre.
Le vaillant révolutionnaire, embastillé depuis deux ans et demi, reprend aussitôt sa place dans les rangs
spartakistes. Il souhaite que son mouvement prenne la tête des évènements, il appelle au renversement immédiat de
l'Empire et à la signature d'une paix sans condition.
Craignant un baroud d'honneur contre les Anglais, les marins stationnés à Kiel sur la Baltique se mutinent le 3
novembre et s'organisent en comités révolutionnaires. Telle une traînée de poudre, la révolution se répand dans
toutes les grandes villes allemandes où se forment des conseils ouvriers conduisant déjà, de fait, à une dualité de
pouvoir.
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