ANALYSE DES PROGRAMMES POLITIQUES DE CANDIDATS À LÉLECTION
PRÉSIDENTIELLE DE 2015-2016
Étude réalisée par Fritz DORVILIER, Ph. D.
22 septembre 2016
Analyse de Programmes politiques de candidats à l’élection présidentielle de 2015-2016
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Table des matières
INTRODUCTION .................................................................................................................................3
I : Le Programme politique de Jude CÉLESTIN ......................................................................................8
1. Synthèse du Programme .........................................................................................................8
2. Analyse du Programme ......................................................................................................... 11
a) Les points forts .................................................................................................................. 11
b) Les points faibles ............................................................................................................... 14
II : Le Programme politique de Jovenel MOISE .................................................................................. 16
1. Synthèse du Programme ....................................................................................................... 16
2. Analyse du Programme ......................................................................................................... 19
a) Les points forts .................................................................................................................. 19
b) Les points faibles ............................................................................................................... 20
III : Le Programme politique de JEAN-CHARLES MOISE ...................................................................... 22
1. Synthèse du Programme ....................................................................................................... 22
2. Analyse du Programme ......................................................................................................... 29
a) Points forts ....................................................................................................................... 29
b) Points faibles .................................................................................................................... 31
IV : Le Programme politique de Jean Henri CEANT ............................................................................. 34
1. Synthèse du Programme ....................................................................................................... 34
2. Analyse du Programme ......................................................................................................... 36
a) Points forts ....................................................................................................................... 37
b) Points faibles .................................................................................................................... 37
Analyse de Programmes politiques de candidats à l’élection présidentielle de 2015-2016
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INTRODUCTION
aïti connait à nouveau, à l’ère démocratique, une période électorale présidentielle.
En effet, depuis 1987, année démocratique fondationnelle où le sang du peuple haïtien
a abondamment coulé sur l’autel de la politique notamment à la ruelle Vaillant, une
demi-douzaine de scrutins présidentiels ont été réalisés. Chacun a ses spécificités politiques,
mais ils ont tous été caractérisés par l’entrée en scène des Partis politiques et la mobilisation
effrénée de l’électorat par les candidats.
Ces derniers, à travers divers moyens de communication politique : Meeting, affiche,
prospectus, publicité radio-télédiffusée et document de programme, font part de leur offre
politique spécifique aux électeurs. Parallèlement à cette euphorie politique, du côté des
candidats puisqu’on constate une baisse considérable du taux de participation de la population
ayant l’âge et le droit de voter, on a constaté une progressive et nette dégradation des
conditions de vie de la population.
Cette situation résulte du fait que l’économie haïtienne stagne voire régresse depuis
plusieurs décennies. En effet, comme le montre la Banque Mondiale dans son dernier rapport
sur Haïti, « Globalement, la croissance économique d'Haïti est restée décevante au cours des
quatre dernières décennies. De 1971 à 2013, la croissance du PIB s'est établie en moyenne à 1,2
% par année, restant ainsi bien inférieure à la moyenne de la région LAC (3,5 %) et de celle des
économies affichant un niveau de développement similaire (3,3 %). Les rares périodes de
croissance positive sont restées éphémères, et ont souvent été suivies d'un ralentissement de
l'activité économique. De plus, compte tenu de la croissance démographique importante du
pays, le PIB par habitant a même reculé de 0,7 % par année en moyenne entre 1971 et 2013.
Pendant que les pays à faible revenu affichaient en moyenne une hausse de leur PIB par
habitant depuis le milieu des années 90, Haïti est demeuré à la traîne. »
1
Ce marasme économique a plonla population dans une trappe de pauvreté. En effet, « Le
taux de pauvreté global s'établit à environ 59 %, et 24 % des Haïtiens vivaient dans la pauvreté
extrême en 2012, ce qui signifie que près de 6,3 millions de personnes étaient incapables de
subvenir à leurs besoins essentiels et que 2,5 millions ne mangeaient pas à leur faim. Les taux
de pauvreté et de pauvreté extrême sont beaucoup plus élevés en zones rurales. Plus de 80 %
des Haïtiens qui vivent dans la pauvreté extrême se trouvent en zones rurales, et 38 % ne sont
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Banque Mondiale, Haïti : des opportunités pour tous. Diagnostic-pays systématique, Port-au-Prince, Mai, 2015.
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pas en mesure de satisfaire à leurs besoins nutritionnels, contre 12 % dans les zones urbaines et
5 % dans les zones métropolitaines (c'est-à-dire dans la région de la capitale nationale). Les
régions les plus pauvres sont les plus éloignées de la capitale et les plus isolées. Les
départements les plus pauvres sont géographiquement concentrés dans le nord : le taux de
pauvreté extrême dépasse les 40 % dans le Nord-Est et dans le Nord-Ouest, contre 5 % dans
l’agglomération de Port-au-Prince. »
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Dans ce contexte, la majorité de la population haïtienne fait face à de difficiles problèmes :
logement, malnutrition, santé, éducation, insécurité. En effet, si l’ECVM
3
a montré que « 88.5%
des logements ne disposent ni d’une douche, ni d’une baignoire dans l’ensemble du pays. Les
logements de l’Aire Métropolitaine de Port-au-Prince sont plus fréquemment équipés d’une
douche ou d’une baignoire individuelle (20.3%) que ceux des autres villes (7.9%) ou du milieu
rural (2.5%). A l’échelle nationale, 44.1% des logements n’ont aucun lieu d’aisance. Les lieux
d’aisance à l’extérieur sont bien plus fréquents (50.5%) que ceux localisés à l’intérieur du
logement (5.4%). »
Et selon l’EMMUS-V, « un peu plus d’un cinquième des enfants de moins de 5 ans (22 %)
souffrent de malnutrition chronique (modérée ou sévère) […]. 5 % d’enfants de moins de 5 ans
sont atteints de malnutrition aiguë […]. Les enfants âgés de moins de 18 mois sont ceux qui
souffrent le plus fréquemment de malnutrition aiguë, avec une prévalence qui varie entre un
minimum de 7 % à 12-17 mois et 10 % à 6-8 mois. […] Il en ressort que près de la moitié des
femmes (49 %) sont atteintes d’anémie : 37 % sous la forme légère, 11 % sous la forme
modérée et 1 % sous la forme sévère. Une proportion plus élevée de femmes de 15-19 ans
souffrent d’anémie (56 %) et d’anémie légère (43 %) que les femmes âgées de plus de 20 ans. »
4
Aussi, selon l’EMMUS-V, « Une très faible proportion de femmes et d’hommes (4 %) ont
déclaré avoir une assurance médicale et cette proportion est très basse quelles que soient les
modalités des caractéristiques sociodémographiques. »
5
Le système éducatif n’échappe pas à cette logique sociale négative. Malgré la forte
croissance du taux de scolarisation depuis les trente dernières années, il s’est révélé défaillant
6
.
Selon le dernier recensement scolaire réalisé par le Ministère de l’Education Nationale et de la
2
Ibid.
3
MEF, IHSI, ECVH-2001, Vol. 2, op. cit.
4
Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP), Enquête Mortalité, Morbidité et Utilisation des
Services (EMMUS-V), Port-au-Prince, Avril 2013.
5
Ibid.
6
Cf. Dorvilier, F., « La défaillance éducative », Chapitre 2, in La crise haïtienne du développement : essai
d’anthropologie dynamique, PUL, Sainte-Foy, 2012.
Analyse de Programmes politiques de candidats à l’élection présidentielle de 2015-2016
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Formation Professionnelle (MENFP)
7
, « De 1996 à 2014, le nombre d’écoles est passé de 15268
à 17828, soit un taux d’accroissement annuel moyen de 1.9%. Cet accroissement, il est vrai, est
largement influencé par le secteur privé qui a toujours occupé la plus grande part du parc
scolaire haïtien. Malgré les efforts développés par l’Etat au cours de ces dernières années pour
augmenter le nombre d’institutions scolaires au niveau du secteur public, le secteur privé
domine encore le système avec 85% des écoles. » Or, une grande partie des ménages sont
incapables de payer les frais de scolarité de plus en plus hauts
8
de leurs enfants par manque de
revenus. Quand ils s’efforcent à le faire, leurs enfants reçoivent une éducation de mauvaise
qualité. Cette situation occasionne un cercle vicieux de la pauvreté intergénérationnelle,
compte tenu du fait que l’éducation est de nos jours le principal moteur de la mobilité sociale
ascendante.
L’insécurité, naturelle et humaine, gagne du terrain d’années en année. En ce qui concerne
la première, il est révélé que « De tous les pays des Caraïbes, Haïti est celui qui subit le plus
grand nombre de catastrophes par kilomètre carré. En 2008, les tempêtes tropicales et les
ouragans ont entraîné dans ce pays des pertes évaluées à 15 % du PIB. Le séisme du 12 janvier
2010 a entraîné la mort de 220 000 personnes, forcé le déplacement de 1,5 million de
personnes, et provoqué des destructions d'une valeur équivalant à 120 % du PIB. Ces
catastrophes ont tendance à toucher en plus grands nombres les populations pauvres et
marginales installées dans les zones inondables et sur la côte, notamment dans le cas des
tempêtes tropicales presque 50 % des dommages et des pertes dans les secteurs productifs
se sont concentrés dans le secteur de l'agriculture. Les données historiques disponibles
conduisent globalement à conclure que les catastrophes liées aux conditions météorologiques
auraient entraîné des dommages et des pertes annuels estimés à environ 2 % du PIB de 1975 à
2012. » S’agissant de la seconde, il réfère au banditisme, au crime organisé et aux accidents de
la circulation.
Ces données montrant nettement la mauvaise condition de vie de la population haïtienne
doivent interpeller les candidats à tous les postes électifs, notamment celui de Président de la
République. C’est pourquoi nous jugeons nécessaire de synthétiser et d’analyser les
programmes politiques communiqués par des candidats à la présidence sur les ondes de
7
MENFP/DPCE, Recensement scolaire 2013-2014, Résultats préliminaires, Port-au-Prince, 2015.
8
Cf. Moisset, J. J. et Mérisier, G. G., Coûts, financement et qualité de l’éducation en Haïti : perspective comparative
école publique, école privée, Port-au-Prince, Juin 2001 ; Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation
Professionnelle (MENFP), La stratégie nationale d’action pour l’éducation pour tous, Port-au-Prince, MENFP, 2007 ;
Groupe de Travail sur l’Éducation et la Formation (GTEF), Pour un pacte national sur l’éducation en Haïti. Rapport
au Président de la République, Port-au-Prince, Aout 2010 ; MENFP, Vers la refondation du système éducatif haïtien.
Plan opérationnel 2010-2015 des recommandations du Groupe de Travail sur l’Education et la Formation, Port-au-
Prince, 2011.
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