Une fois définis l'architecture institutionnelle, le cadre comptable et budgétaire
dans lequel inscrire leurs opérations et la répartition des compétences (au double sens
de délégation et de dévolution), les collectivités décentralisées doivent pourvoir
disposer de ressources financières adéquates. Celles-‐ci doivent provenir à la fois de
ressources financières transférées par l'Etat (qui seront traitées au chapitre 5), et de
ressources propres sur le volume desquelles elles doivent pouvoir disposer d'un
pouvoir de décision, fût-‐il limité. Il n'y a pas de décentralisation effective sans
possibilité pour chaque collectivité locale de moduler, dans le respect de la loi, le
montant des impôts, taxes ou redevances locales de façon à financer la fourniture de
services collectifs locaux selon les modalités par elle souverainement choisies dans les
domaines de compétences dévolus ou délégués. Si tel n'était pas le cas, la
décentralisation se bornerait à reconnaître aux CTs une « autonomie financière » (ou
un pouvoir de « libre administration ») limités au seul pouvoir de répartir librement
entre des usages alternatifs des ressources financières décidées par l'Etat. Elles se
trouveraient alors dans une situation très voisine de celle des organes déconcentrés de
l'Etat disposant d'un budget global. Or la dévolution implique qu'une CT puisse, hors
mandats impératifs reçus de l'État pour lesquels elle agit comme délégataire, décider
de fournir plus ou moins de services collectifs qu'une autre, et de le faire selon des
modalités par elle choisies. Cela implique également qu'elle doive financer les
dépenses correspondantes en toute transparence et responsabilité vis-‐à-‐vis du
contribuable et de l'usager en mobilisant à cet effet des impôts, taxes ou redevances
dont elle a le pouvoir d'ajuster le taux ou/et les modalités d'assiette. La question de la
flexibilité fiscale est donc consubstantielle à la décentralisation. Elle sera évoquée dans
le cas tunisien dans la dernière section de ce chapitre.
Une autre question essentielle, sinon de point de vue juridique, du moins du point
de vue économique, consiste à bien distinguer le cas des « impôts locaux »
prélèvements obligatoires requis des contribuables locaux sans relation directe avec la
fourniture d'un service public local individualisable, de celui des « taxes locales » qui
ont le caractère d'un paiement requis pour l'accès aux services offerts par la
collectivité, et de celui des redevances acquittées par les usagers. Comme la loi
tunisienne n'institue pas formellement d'imp6ts locaux mais seulement des « taxes »
locales et d'autres types de prélèvements (contributions et redevances), il est apparu
important de préciser les termes de la distinction.
C'est dans cette perspective d'ensemble que le système fiscal local tunisien est
analysé dans ce chapitre. Dans une première section (4.1 Les bases institutionnelles)
on rappelle sur quels textes législatifs et réglementaires se fondent le système tunisien
de ressources fiscales locales. Les termes utilisés pour caractériser et distinguer les
impôts des taxes et des redevances, de même que la classification utilisée dans les
textes légaux tunisiens portant à confusion, la deuxième section précise les termes qui
devraient être utilisés et le vocabulaire de référence. Dans une troisième section (4.3