L’économie sociale et solidaire, alternative pour un développement inclusif et durable Pourquoi l’économie sociale et solidaire (ECOSOL) ? Vue d'ensemble des participants à l'atelier ECOSOL A l’heure où le monde s’approche à grands pas des rendez-vous historiques de l’échéance des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), il est à constater que le modèle économique porté par le néolibéralisme qui prédomine a démontré ses limites notamment par cette série de crises répétitives observés dans plusieurs pays, son échec à éradiquer la pauvreté ainsi que sa fâcheuse tendance à pérenniser les exclusions. L’économie sociale et solidaire (ESS) paraît bien être une alternative. En effet, l’ESS propose de mettre l’homme au-dessus du profit dans le processus de création de la richesse, milite pour un processus décisionnel démocratique, la justice sociale, l’autonomie dans la gestion et la co-construction des acteurs dans le cadre des réseaux. Au Burundi comme ailleurs dans le monde, les acteurs de l’économie sociale et solidaire comprennent les organisations coopératives, les associations de type asbl mais qui créent de la richesse, les mutualités et les entreprises sociales. Dans certains pays, les fondations à caractère sociale peuvent également faire partie des acteurs de l’économie sociale et solidaire. Le séminaire international sur l’ESS du Burundi Ayant connu la participation de différents intervenants venus du Burundi, de la République démocratique du Congo, du Burkina Faso, de la Guinée Bissau et de la Belgique du 20 au 25 Octobre, ce séminaire a permis de construire une ‘’boussole’’, entendez, les concepts directeurs de l’ESS qui en font un mouvement social capable d’apporter des solutions alternatives aux économies et répondre encore mieux aux aspirations de la population. C’était aussi une occasion de partager les expériences et les bonnes pratiques. Ce fut l’initiative des organisations burundaises ADISCO, CNAC, FEBUTRA toutes partenaires de l’ONG belge Solidarité Socialiste et qui soutiennent des initiatives de l’économie sociale et solidaire d’organiser ce séminaire international afin de construire une compréhension commune de l’ESS. D’après Libère Bukobero, Directeur des programmes d’ADISCO, cette économie repose sur des principes économiques, sociaux et de solidarité : «C‘est un modèle économique qui dans un esprit d’auto promotion, de démocratie et d’autonomie amène les ménages et les organisations de personnes à entreprendre des activités de création de la richesse en liant les aspects économiques et sociaux, l’intérêt de la communauté entière tout en valorisant l’effort de chacun dans la répartition du profit. Les activités économiques sont entreprises en mutualisant les moyens afin de partager les risques, renforcer le pouvoir de négociation, réaliser des économies d’échelle et l’argent ainsi créé ne sert que de moyen pour réaliser des objectifs plus sociaux». Le directeur des programmes de l’ADISCO trouve que la promotion des coopératives et des mutuelles de santé participe à la construction de ce mouvement social. Et d’ajouter qu’après cet atelier, se mettront en place des réseaux d’acteurs internationaux pour promouvoir un tel modèle économique. Un atelier venu à point nommé Le monde se prépare pour l’agenda post 2015 qui vise des objectifs de développement durable (ODD), mais les indicateurs retenus se focalisent sur l’aspect économique en oubliant que d’autres aspects comme les valeurs humaines, la participation, les libertés, la valorisation des savoirs locaux sont des facteurs d’épanouissement de l’homme. Il est donc temps de démontrer que le modèle qui met l’aspect économique au service du social reste plus fiable pour asseoir un développement plus humain. Libère BUKOBERO, Directeur des Programmes / ADISCO Pour Libère BUKOBERO, directeur des programmes à ADISCO, c’est la satisfaction totale: «Nous avons fait des visites dans les coopératives accompagnées et nous avons constaté que le pas franchi est très important. » L’exemple de la coopérative Tubamurikire de Ngozi qui regroupe près de quatre cents membres, tous de petits paysans est éloquent. Ceux-ci travaillent sur les filières maïs, haricot et riz et ce sur les maillons production, transformation et commercialisation. Ces aspects économiques sont associés à des aspects de service sociaux rendus aux membres dont l’affiliation à la mutuelle de santé, la protection des récoltes des membres par stockage, l’accès à la formation et l’information. La coopérative Ntituzerinze de Busiga a été aussi visitée. Elle travaille sur les filières haricot, manioc et oignon. Libère Bukobero ajoute que les participants à cet atelier ont également visité une coopérative caféicole à Kabarore accompagnée par la CNAC en voie d’être certifiée « commerce équitable » avec tout ce que cela implique sur les conditions de travail décentes, la préservation de l’environnement, la protection sociale des employés et une mutuelle de santé de plus de neuf cents membres. Pour y arriver, il faut insister sur les principes d’autonomie, de solidarité, de démocratie, de réseautage indispensable dans la construction d’un mouvement social. « Cela nous permettra d’atteindre un monde équitable où les gens partagent ce qu’ils ont », espère-t-il. Satisfaction des participants à l’atelier Dani Ndombele de la RDC indique s’être enrichi des expériences des participants des autres pays. Ce secrétaire permanent du réseau pour la promotion de la démocratie et des droits économiques et sociaux affirme qu’il va les capitaliser dans son pays. « Grâce à cet atelier, il y aura un changement dans notre pays parce que nous avons construit une boussole que nous allons adapter à notre réalité », insiste Dani Ndombele. Gilberto Ferreira Da Costa qui travaille pour Solidarité Socialiste raconte avoir vécu un moment émouvant : « Quand nous avons visité certaines réalisations sur le terrain, j’ai été agréablement surpris par des coopératives et des mutuelles de santé. » Selon lui, les membres partagent et améliorent leurs connaissances sur l’agriculture : « La gestion est transparente. » Avec l’économie sociale et solidaire, explique Gilberto Gilberto Ferreira Da Costa Ferreira Da Costa, on essaie d’améliorer la vie des gens et ils travaillent dans des conditions dignes de la personne humaine. Ce Brésilien estime que l’économie sociale dans son pays est le résultat du travail des personnes exclues de l’économie et du marché de travail : « Elles prennent des initiatives pour améliorer leurs conditions de vie. » Il ajoute que le gouvernement brésilien a soutenu ce genre d’économie. Son souhait est que le gouvernement burundais apporte aussi son soutien à l’économie sociale et solidaire. Gilberto Ferreira encourage les Burundais à continuer à renforcer cette économie en mettant un accent particulier sur le leadership dans les coopératives. Les travaux de cet atelier international ont été clôturés par la remise des certificats aux participants. ADISCO à la rescousse des coopératives… KANA Gabriel, Président de la coopérative TUBAMURIKIRE de Mubuga (Ngozi) La coopérative « Tubamurikire » est l’une des nombreuses coopératives et mutuelles de santé accompagnées par ADISCO. Elle se trouve sur la colline Mubuga en commune Ngozi. D’après Gabriel Kana, président de cette coopérative, elle est née le 30 décembre 2011 dans l’objectif d’éradiquer la pauvreté. Ses réalisations sont admirées par tout le monde. Chacun des 378 membres a versé une part sociale qui varie entre 10 et 30 mille Fbu. « Nous avons alors acheté un terrain de 24 m sur 23 pour la construction des locaux », raconte-t-il fièrement. Gabriel Kana fait savoir que la gestion du bénéfice est prise lors d’une assemblée générale: « Les valeurs sont partagées entre tous les membres. » Il indique que le bénéfice déjà réalisé leur a permis d’acheter des unités de transformation du riz et du maïs et de produire une farine labellisée de qualité exceptionnelle. Gabriel Kana remercie l’ADISCO qui les a accompagnés jusqu’à la création des coopératives. « Nous sommes aujourd’hui imbus et mus par les principes de l’autopromotion », se réjouit-il. Gabriel Kana ajoute qu’ils ont construit des magasins de stockage : « Nous pouvons conserver nos productions et attendre le meilleur moment pour les vendre. » D’après lui, cela leur permet d’éviter les spéculateurs qui viennent acheter leurs produits sur pied ou juste au moment de la récolte. Dieudonné HAKIZIMANA