549 - La sécurité avec Tandem
En 1974, la société Tandem est créée avec l'objectif clairement exprimé de réaliser
un système d'ordinateurs assurant un service continu (Nonstop) aux utilisateurs
transactionnels de bases de données sur disques. L'annonce d'un produit réalisant cet
objectif , le Tandem 16 Nonstop avec son système d'exploitation Guardian, suivra en mai
76. Les principes de construction permettant ce résultat sont :
- redondance des matériels assurant que malgré les divers types de pannes envisagés, ce
qui continue de fonctionner assure le service désiré.
- création d'un Dynabus doublé qui permet à chaque unité centrale de diffuser à toutes
les autres les observations et compte-rendus d'incidents.
- facilité de dépannage des modules matériels permettant de minimiser les durées de
fonctionnement à effectif réduit, pour que la probabilité de deux pannes simultanées soit
négligeable.
- détection de tous les incidents invalidant chaque module actif, afin de réaliser sans
arrêt visible la commutation des tâches actives vers des modules sains, et d'initialiser dès
que possible la procédure de dépannage.
- conception d'un système d'exploitation qui assume toutes les détections ne relevant
pas du matériel, et toutes les actions de commutation.
- duplication de ce système en mémoire, et checkpoint périodique des données
dynamiques, pour faire face aux pannes de modules de mémoire et aux coupures
d'alimentation.
Peu désireux de réécrire les compilateurs, Tandem a choisi de ne pas introduire de
dispositif matériel dans les commutations ; les processus exécutés sont issus de
compilations normales sur des programmes dont la rédaction est standard. Les
commutations consistent seulement dans la modification, commandée par les détections
d'incidents, des listes de ressources sujettes à allocation et / ou des priorités.
Cependant, comme le montre une publicité incluse dans la fiche, des verbes nouveaux
ont été introduits dans le langage COBOL pour NonStop, de façon à intégrer
naturellement dans les programmes des actions importantes comme les Checkpoints ou les
reprises automatiques, plutôt que de devoir les rèdiger à chaque usage ; il ne s'agit que
de routines ajoutées au compilateur.
Nous disposons, grâce à Tandem, de documents volumineux et même redondants
pour expliquer ces principes aux usagers même peu familiers avec les techniques
informatiques :
System Description Manual T16 / 8000 -A00, 10 / 60, 441 pages. Voir boite 110;
Document commercial : Tandem, Systèmes d'ordinateurs NonStop
D'autre part, nous possèdons deux très importants manuels de Guardian, un document
pour l'opérateur et un pour le programmeur, décrivant les motifs et les moyens d'
éventuelles interventions. Ces documents resteront valables, à très peu près, pendant toutes
les années où le concept NonStop présidera au succès de Tandem, à travers plusieurs
changements de CPU.
Catalogue informatique – Volume D - Ingénieur Général de l'Armement Henri Boucher Page : 1/381
Le premier de ces processeurs est le Tandem 16, un 16 bits spécialement étudié,
et le choix stratégique de Tandem est résolument propriétaire, attitude assez généralisée à
l'époque ; c'est-à-dire que Tandem propose à ses clients la totalité des composants de la
solution qu'il préconise, à savoir :
- le matériel, processeurs et Dynabus, qu'il fabrique, et les disques qu'il achète en OEM
(chez CDC).
- le système d'exploitation GUARDIAN et l'assembleur TAL adapté à ses machines.
- un compilateur COBOL complété de verbes commodes pour la définition des
redondances désirées.
- une base de données ENSCRIBE, conçue pour travailler sous Guardian, offrant au
choix du client la possibilité de disques miroirs, c'est-à-dire de double enregistrement.
Chaque fichier peut grandir théoriquement jusqu'à 4 GB.
Prix typique : 2 CPU, 192 KB de mémoire, 2 disques totalisant 50 MB, une bande
magnétique de sauvegardes, une IP 300, 16 terminaux écran, Guardian et Enscribe,
représentent $ 175000. On peut observer que c'est vraiment la limite inférieure du
concept, et se demander si une base de données de seulement 50 MB, une fraction de la
capacité d'un dispac, que l'on pourrait copier chaque soir, justifie un tel investissement.
La réponse est que le client n'achète pas seulement la sécurité, mais aussi la disponibilité
permanente.
Quoi qu'il en soit, le succès fut important et durable : fin 77 (un an et demi après le
lancement), il y a 46 systèmes en service, avec 106 processeurs. L'un d'eux comprenant
10 CPU, on voit que presque tous les acheteurs se contentent de deux CPU, ce qui
justifie la configuration du prix typique. Trois ans plus tard, il existe 350 systèmes et
plus de 1000 CPU, ce qui indique un accroissement de taille du système moyen.
De plus, une concurrence apparait : Stratus, Auragen, et les grands constructeurs s'avisent
qu'il y a là un souhait de la clientèle auquel ils n'apportaient pas de réponse satisfaisante.
Ils négocient des alliances, qui dureront le temps nécessaire à la mise en place de
politiques conscientes et explicites de redondance dans leurs offres.
En 1981, le passage aux puces mémoire de 64 Kbits autorise des accroissements de
capacité : 16 MB de mémoire physique, 1 GB de mémoire virtuelle par processus.
Le CPU NonStop 2 est toujours un 16 bits, mais l'adressage virtuel est passé à 32 bits,
l'adressage physique à 23 bits. La micromachine acquiert de la souplesse, une WCS de
32 KB remplaçant les PROM. Les canaux virtuels (sous-canaux au sens d' IBM) dont le
nombre est porté à 255, peuvent débiter jusqu'à 5 MB/s en rafale, et transférer des blocs
atteignant 64 KB au lieu de 4 KB.
Pour la fiabilité, il y a maintenant un diagnostic processor, qui peut intervenir en
simultanéité avec l'exploitation sur une unité ayant donné lieu à incident, afin d'accélérer
le dépannage qui ne peut plus désormais profiter de personnel résident.
Prix typique : $ 144475 pour deux CPU, 512 KB de mémoire, un dérouleur de bandes.
Ce prix baissera un peu vers 1985, avec une réduction de volume de l'installation, à
cause de l'apparition du TXP.
Le NonStop TXP apparait en 1983, ouvrant à la clientèle de Tandem le monde
des 32 bits qui était de longue date celui des grands constructeurs. La nouvelle machine
a un bus mémoire 64 bits, des chemins de données et des registres 32 bits, et elle sait
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manipuler des opérandes de 64, 32 et 16 bits. Les adressages n'ont pas changé depuis le
NonStop 2, mais il y a désormais un cache de 64 KB (une ligne) à cycle de 116 ns, et
l'emploi de RAM statiques de 16 Kbits à cycle de 45 ns, coûteuses mais bien plus
rapides que les DRAM. La puissance de calcul atteint 1,5 Mips par processeur, ou 3 à 4
transactions par seconde et par CPU.
Le nouveau système est compatible, au niveau du code objet, avec le Nonstop 2. Pour
obtenir ce résultat, tout en triplant la performance, avec une technologie Fairchild FAST
TTLS qui ne donne que 50% de gain, Tandem a choisi de doter le nouveau CPU de
deux chemins de données 16 bits simultanés plutôt que d'adopter un simple chemin de
données 32 bits. Ainsi chaque cycle de microprogramme fournit quatre opérandes et non
deux : deux pour la nouvelle ALU 16 bits dite principale, et deux à répartir entre
l'ancienne ALU dite désormais "spéciale", un décaleur "barrel", une scratchpad de 4096 *
16, l'interface Dynabus et l'interface I/O conservés, et l'interface mémoire. Un pipeline à
3 étages maintient tout cela en activité simultanée.
La micromachine a donc du être complètement rebâtie , pour obtenir un cycle effectif de
83,3 ns avec deux étages de microinstructions : une première mémoire de commande 8K
* 40 bits actionne le premier étage de pipeline et fournit 12 bits d'adresse pour la
seconde mémoire, 4K * 84 bits, qui gère le parallèlisme des actions menées par le second
et le 3ème étage. Ces deux mémoires sont des WCS, qui permettent de faire évoluer les
microprogrammes même chez les clients, et de charger des microdiagnostics en cas de
pannes. Moyennant quoi il est possible d'exécuter les Load et Store en 3 CP, les
additions en 2 CP.
Cette machine est construite sur 4 cartes : SQ = bloc de commande, CC = entrée / sortie,
IP = cache, ALU principale et registres, MC = interface mémoire 64 bits, interface
dynabus, décaleur. Elle exploite un répertoire de 263 opérations, dont 43 scientifiques et
220 pour l'arithmétique entière, l' arithmétique décimale, les manipulations sur bytes, la
pile, etc...
La mémoire construite avec des puces 64 Kbits est organisée en modules de 2 MB ECC,
soit 4 bancs de 64 Kmots de 72 bits. Chaque processeur peut disposer de 4 modules.
Nouveauté également, le concept NonStop dépasse maintenant le domaine matériel
du système pour s' étendre à toute l'entreprise, à travers un réseau local à fibre optique
acceptant jusqu'à 224 CPU (clustering), et à travers un rèseau national qui peut englober
jusqu'à 4080 CPU. Le nouveau Guardian sait gèrer les ressources à cette échelle globale,
sans qu'il soit nécessaire de reprogrammer les applications.
Prix typique : $ 328550 pour deux CPU avec 2 MB de mémoire, deux disques de 128
MB chacun, une bande à 45 ips, et 4 IOP pour les divers périphériques.
Conscient que les clients souhaitent des bases de données de plus en plus
importantes, Tandem introduit en 1985 le V8, un ensemble de 1,3 GB comprenant 8 axes
Winchester de chacun 6 disques, dotés chacun d'un bras d'accès.
D'autre part, constatant que les services proposés par le TXP écrasent quelque peu
le Nonstop 2, qui par ailleurs commence à dater, Tandem propose à $ 120000 le Nonstop
EXT, qui loge dans une seule boite les deux processeurs et les disques d'un NonStop 2,
grâce aux progrès de la technologie.
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Nous ne sommes pas en mesure de présenter une histoire financière complète de
Tandem, car notre documentation sur ce point s'arrète ici. C'est la description d'une
croissance rapide et bien maîtrisée, qui va encore se poursuivre quelques années . Voir
page suivante.
On notera pourtant que le bénéfice est en régression, mais cette année -là semble avoir
été mauvaise pour tout le monde, et la croissance du chiffre d'affaires, qui désormais n'est
plus 100% informatique, reste excellente, et sera encore meilleure en 1986. C'est d'ailleurs
l'année où IBM, prenant conscience de l'importance de la disponibilité, achète des
machines Stratus pour les vendre aux banques avec des logiciels qui leur conviennent.
Cette attaque de son marché a sans doute contribué à la décision suivante : pour la
première fois, Tandem souligne dans sa publicité qu'il propose des machines dont toutes
les caractéristiques sont celles des "mainframes".
Année CA M$ Bénéfice Effectif R&D M$ Export % Parc M$
1977 7,69
1978 24,30
1979 55,97
1980 108,99
1981 238,39 27 2730 33
1982 335,2 29,1 3600 33 31
1983 450,5 33,7 39 756
1985 634,6 31,9 5494 71,6
En 1986 donc, Tandem annonce le NonStop VLX, construit au moyen de réseaux
de 2800 portes ECL, les MCA2800ALS étudiés avec Motorola, qui disposent d'interfaces
TTL
Deux cartes (I et E-unit) contenant 31 réseaux constituent le nouveau CPU, capable de 3
Mips ; une carte contenant 2 réseaux et 256 puces de 256 Kbits constitue le nouveau
module de 8 MB de mémoire. Un processeur dispose de un ou deux modules.
Le processeur d'entrées / sorties utilise deux réseaux qui remplacent environ 70 circuits
TTL, MSI et SSI . Le principal bénéfice réside dans la fiabilité, car la performance
disponible est limitée par l'exigence de compatibilité avec les modèles antérieurs.
La nouvelle machine dispose d'un Dynabus à 2 * 20 MB/s, 40% plus rapide que
l'original, et d'un processeur de maintenance Motorola 68000 qui surveille en permanence
un réseau de 6809 dans les CPU et dans les alimentations.
Tandem a décidé que le système minimal comprenait désormais 4 CPU, soit 12
Mips ou 50 TPS. La prestation de base comprend aussi 32 MB de mémoire, 4 disques
de 415 MB et 4 disques de 128 MB, une bande de sauvegarde de 128 MB, 4 canaux
de 5 MB/s, et le logiciel, le tout pour $ 995275.
Malgré cette formidable augmentation de prix, le succès de Tandem ne diminue pas : en
1986, la marque a réussi plus de 1000 installations représentant quelque 10000 CPU.
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L'étape suivante de l'évolution est CLX 700, apparu vers 1989. Le sigle suggère
qu'il s'agit d'une version allègée de VLX, mais aucun détail n'est connu sinon qu'il s'agit
de processeurs CMOS, forcément des concurrents sérieux pour le coûteux VLX Un CLX
800 lui succède en janvier 1991, qui parait n'en différer que par une nouvelle technologie
en CMOS 1 µ, de sorte qu'il est possible de procéder à un échange de cartes sur site
sans interrompre l'activité.
Ces systèmes CLX comprennent de 2 à 16 processeurs, 32 à 512 MB de mémoire, et
coûtent de 125000 à 965000 $ selon le nombre de processeurs.
A la même époque, Tandem vend des monoprocesseurs sous Unix, pour suivre la
forte pression exercée par la presse informatique et certains vendeurs de serveurs. Ces
systèmes ne sont pas NonStop mais profitent des services conviviaux si prisés des
chercheurs et de la dite presse . Cette évolution a du commencer dès 1985, et elle
explique en partie le chiffre élevé de 10000 CPU indiqué plus haut.
En 1991, c'est dans ce cadre que Tandem propose des produits logiciels conformes à la
norme X400 de messagerie : il y a ainsi MHX 400, serveur départemental de messagerie
fonctionnant sous l'Unix S2 de ces systèmes, puis NDX400, serveur de messagerie pour
PC. Et il y a OSI / MHS, qui tourne sous Guardian et qui permet de relier les systèmes
NonStop à l'un ou l'autre des précédents.
En 1993, la baisse des prix des microprocesseurs rend difficile la
commercialisation de processeurs cablés, de sorte que Tandem se trouve dans l'obligation
de faire choix d'un fournisseur. Il choisit MIPS, à cause de sa politique de license très
souple, et annonce Himalaya, famille de serveurs basés sur le R3000, avec le logiciel
NonStop qui est une évolution de Guardian vers une interface Posix pour les applications
Unix. Il y aura trois modèles :
K100 comprend 2 à 4 CPU et coûte environ 200 KFFHT, pour s'intégrer dans des
réseaux locaux.
K1000 est prévu pour le traitement distribué et coûte 1, 6 MFFHT pour 16 processeurs.
K10000 représente le groupement NonStop de l'ensemble des machines d'une entreprise,
jusqu'à 4096 CPU, le prix démarrant à 3, 5 MFFHT pour deux processeurs.
La même philosophie est reprise en 1995 avec des processeurs R4400 à 200 MHz, les
trois niveaux devenant quatre, K2, K200, K2000, K20000. Un K2, trois fois plus puissant
que le K100 de base, vaut 175000 FFHT. Ces nouvelles machines sont prévues pour
supporter ATM dans leurs liaisons à grande distance, et sauront ventiler leurs messages à
travers Ethernet dans les réseaux locaux
On voit que Tandem doit progressivement abandonner ses structures propriétaires pour
continuer à vendre à des clients fortement sollicités par une presse informatique très
orientée.
Le nom Integrity est mentionné en 1994 pour des réalisations intermédiaires à
base de MIPS R4000, et qui existent en deux versions : les NR sont simplement des
serveurs sous Unix, et ne se distinguent guère des produits concurrents; les FT sont à
tolérance de pannes, et ce sont eux qui portent encore le flambeau de la marque, comme
indiqué ci-dessus.
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