LA QUESTION DE LA CRITIQUE DANS LA
PENSÉE MUSULMANE CONTEMPORAINE :
CONCEPTIONS ET USAGES
COLLOQUE DES 16 et 17 DÉCEMBRE 2010
La rencontre avec les nouvelles sciences humaines et la découverte des approches historiques,
sociologiques, linguistiques, psychanalytiques, anthropologiques, etc., n’ont pas laissé indifférente la
pensée musulmane.
Depuis quelque deux siècles, les penseurs musulmans, ou de culture islamique, sont tiraillés entre
deux attitudes :
- l’hostilité à l’égard de ces sciences de “l’Occident matérialiste” qui “veut tout soumettre à son
hégémonie” ;
- la volonté d’intégrer les données et les méthodes de ces disciplines sans lesquelles la culture des
sociétés musulmanes restera dans une posture qui tourne le dos à l’histoire.
En cette année 2010, où l’islam continue à être perçu à travers les coups d’éclat de ses expressions
politiques les plus radicales, trois grands penseurs du monde musulman qui ont plaidé pour le
développement de la pensée critique sur la base de l’intégration des apports des sciences humaines
et sociales nous ont quittés : l’Égyptien Nasr Hâmid Abû Zaïd, le Marocain Muhammad ‘Âbid Al-Jâbirî,
et le Franco-algérien Mohamed Arkoun.
Mohamed Arkoun a débuté sa carrière académique à Lyon en enseignant dans notre université
jusqu’en 1971.
Nasr Hâmid Abû Zaïd a été invité à y donner des conférences suite à sa condamnation par les
tribunaux religieux de son pays à divorcer (son épouse partage les mêmes idées et le même combat
que lui) pour le chef d’inculpation moyenâgeux d’apostasie.
Muhammad ‘Abid Al-Jâbirî est connu par nos étudiants et nos jeunes chercheurs ne serait-ce que
parce que sa Critique de la raison arabe a fait partie des œuvres aux programmes de préparation aux
concours d’enseignement de l’arabe (CAPES et agrégation).
La critique a occupé une place centrale dans l’œuvre de chacun de ces penseurs : Nasr Hâmid Abû
Zaïd a écrit Critique du discours religieux, Muhammad ‘Âbid Al-Jâbirî a laissé une volumineuse Critique
de la raison arabe et Mohamed Arkoun a commis une Critique de la raison islamique qui lui a valu la
haine des gardiens des orthodoxies musulmanes et des adeptes de l’islam politique.