Mohamed Arkoun au sommet d’un minaret
Amine
Zaoui
La mosquée d’un village en Kabylie sera inaugurée prochainement au nom de Mohamed Arkoun !
Je suis fier d’appartenir à ce peuple où on donne le nom de Mohamed Arkoun à une mosquée. Je suis fier de
mon pays. Je suis fier de ce noble village qui respecte les enfants de la grande Algérie. Je suis fier que l’islam
algérien, en ce temps atroce où règne la loi des brebis galeuses de Daech et ses dérivés, en ce temps de pluie
en fatwas et de sang déversées au nom de la religion islamique, en cette noirceur je suis fier que l’islam
algérien avance vers un nouveau temps des lumières. Une mosquée baptisée au nom de l’islamologue moderne
Mohamed Arkoun est un bon signe. Un acte positif qui dit beaucoup de choses. Un signe qui révèle le respect de
la liberté, de El Ijtihad et de la diversité. Le jour des vrais Ulémas s’approche. Je suis optimiste !
Si l’Algérie des institutions officielles a oublié Mohamed Arkoun, les enfants de Taourirt Mimoun ne l’ont jamais
oublié. N’ont jamais abandonné son combat pour une société de lumière et de vivre ensemble.
Par un jour des vaches maigres, je vous rappelle qu’un certain Mohamed Al Ghazali a chassé notre grand
Mohamed Arkoun, en lui interdisant la participation et la prise de parole dans un colloque sur la pensée
islamique organisé par les Algériens et sur le sol algérien. Et ce Mohamed Al Ghazali n’est que celui qui a justifié
l’assassinat de l’écrivain Faraj Fouda par les intégristes islamistes du Caire. Il n’est que celui qui n’a pas
condamné la tentative d’assassiner le Nobel de la littérature Naguib Mahfouz.
Aujourd’hui, Mohamed Arkoun revient chez lui, dans son village, avec ses nobles villageois, les siens, pour
s’installer en nouveau croissant sur le sommet du minaret de la demeure d’Allah, d’où les appels à la prière sont
levés cinq fois par jour. L’oiseau libre est de retour pour libérer l’islam pris en otage par des fanatiques, des
politiques et des commerçants. Lui qui aimait son pays. Défendait “le vivre ensemble”, qui fut ambassadeur
extraordinaire pour un nouvel islam, celui de la civilisation, de la vie et de la science.
Lui qui adorait les villageois de son village. Un village appelé Taourirt Mimoun qui a enfanté deux géants, un de
la création littéraire et l’autre de la philosophie, pour ne citer que ces deux figures, Mohamed Arkoun (1928-
2010) et Da LMouloud Mammeri (1917-1989). La première est une fierté pour la littérature, pour la culture et
pour l’identité et l’autre une fierté pour l’islam des Algériens, l’islam maghrébin, l’islam d’Ibn Ruchd, celui de la
raison et la réflexion.
À la fleur de l’âge, cette semaine, nous avons perdu une autre grande figure de la pensée moderne, par
excellence l’ambassadeur d’un islam des lumières, l’islamologue et anthropologue Malek Chebel, fils de Skikda.
Y a-t-il quelqu’un, parmi vous, dans cette belle ville qui ose proposer son nom pour une mosquée afin de faire
barrage, encore une fois, à l’obscurantisme d’Orient !?
Ces noms : Mohamed Arkoun, Malek Chebel, Mouloud Mammeri, Kateb Yacine, Djamel Eddine Bencheikh, Ali
Elkenz, Abderrahmane Moussaoui, Djamila Benhabib… sont le barrage algérien contre l’islam bédouin, l’islam
du sable et du sabre. Ils sont les apôtres d’un autre islam, l’islam citadin, l’islam du questionnement, un islam à
la recherche d’une connexion fiable et moderne au temps qui l’entoure.
Et la mosquée d’un village en Kabylie sera inaugurée prochainement au nom de Mohamed Arkoun !
A. Z.
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