Alicia vient d’obtenir son baccalauréat ; elle cherche à se documenter sur une discipline dont elle un peu entendu parler, la photonique. Pour cela, elle est venue au lycée Victor Bérard de Morez (Jura), qui est un centre réputé de formation en optique depuis plus de 60 ans. Là, elle rencontre le professeur Laser qui enseigne la photonique dans la section BTS Génie Optique, option Photonique. page La photonique, qu’est-ce que c’est ? Présentation de la photonique ; comparaison avec l’optique Les champs technologiques et les domaines d’application de la photonique 2 2 4 Structure d’un système photonique 5 Recrutement dans la section 6 Panorama et débouchés 6 1 Professeur Laser, présentez-nous la photonique. Eh bien, tout d’abord, sachez que dans photonique, il y a photo qui veut dire lumière, et nique qui veut dire... Euh, qui ne veut rien dire. Ça commence mal ALICIA Quelle différence avec l’optique ? Optique vient du grec opto, qui veut dire oeil. Au sens propre, l’optique est l’ensemble des sciences et des techniques qui concernent la vision. Plus généralement, on utilise les techniques de l’optique pour améliorer la vision, pour former des images ou pour agir sur un faisceau lumineux. Un microscope, un télescope, un objectif photographique sont des instruments d’optique. En revanche, un système de télécommunication ne peut certainement pas être qualifié d’instrument d’optique, même s’il utilise des fibres optiques, des sources et des récepteurs de lumière. On le qualifie de système photonique. De même, une machine d’usinage au laser est un système photonique. Pr. LASER Je comprends. Avez-vous d’autres exemples de systèmes photoniques ? Bien sûr : il y a par exemple les systèmes industriels de mesure sans contact utilisés pour le contrôle non destructif. On trouve dans cette catégorie des vibromètres (mesure des vibrations), des vélocimètres (mesure de vitesse), des pyromètres (mesure de haute température). La mesure de forme ou de déformation peut se faire avec une précision extraordinaire avec les techniques de la photonique. Il y a d’autres domaines que la mesure industrielle. Par exemple, l’enregistrement des données se fait actuellement beaucoup sur disque compact à lecture par faisceau laser donc par un processus photonique. Citons encore les capteurs photovoltaïques qui transforment l’énergie solaire en électricité ; les capteurs CCD utilisés dans les camescopes et les appareils photo numériques ; les spectrophotomètres qui permettent de déterminer la nature des matériaux grâce au rayonnement qu’ils émettent ; les systèmes de visionique qui permettent d’améliorer la perception de l’environnement... 2 La visionique sert à améliorer la vision ; c’est donc une branche de l’optique alors, plutôt que de la photonique ? Pas vraiment, car ce ne sont pas les techniques de l’optique qui sont utilisées. L’optique utilise essentiellement des composants tels que les lentilles, les prismes, les miroirs, les réseaux, des polariseurs, des diffuseurs et des pièces mécaniques de précision pour les assembler et permettre les réglages. La photonique utilise en plus de cela des composants optoélectroniques : des émetteurs, des récepteurs, des dispositifs dont les propriétés se modifient lorsqu’on leur applique une tension électrique appelés dispositifs électro-optiques. A la place de la tension électrique, certains composants réagissent aux contraintes mécaniques, tels les matériaux photoélastiques et les dispositifs acousto-optiques ; d’autres composants encore réagissent à un éclairement, tels les composants photoréfractifs et les cristaux non linéaires. Doucement professeur, je ne suis pas (encore) une spécialiste. Je voulais juste montrer ce qui différencie l’optique et la photonique, ce qui n’est pas très simple car la frontière entre ces disciplines est un peu floue. Par exemple, il est clair que la photonique utilise des instruments d’optique : pour diriger un faisceau laser dans une application photonique, on utilisera des lentilles, des objectifs, des miroirs...D’ailleurs on peut considérer que l’optique est une partie de la photonique car tout ce qui concerne la lumière entre dans le champ de la photonique. Seulement le photonicien, s’il a besoin d’utiliser un objectif optique particulier, s’adressera à un spécialiste de l’optique. On ne peut pas être spécialiste en tous les domaines. Si j’ai bien compris, quand on a un problème clairement identifié concernant l’optique, comme modifier les propriétés d’une image ou transformer un faisceau lumineux, on s’adresse naturellement à un spécialiste de l’optique. Quand par contre on est face à un problème qui ne concerne pas directement l’optique, comme transmettre des informations, mesurer une grandeur, ou travailler un matériau, alors on peut s’adresser à un spécialiste de la photonique qui saura proposer des solutions utilisant la lumière. C’est une façon de voir les choses qui me semble très bonne. On commence à trouver effectivement de plus en plus de photoniciens dans des entreprises qui ne sont a priori pas concernées par l’optique : constructeurs et équipementiers ... 3 ... automobiles, industrie aéronautique et spatiale, entreprises de télécommunications, fabricants de matériel médical, industries de l’électronique et de l’informatique... Il n’y a pas de limites à l’emploi des photoniciens. On assiste en ce moment à une prise de conscience, de la part d’industries très variées, de ce que les techniques photoniques peuvent apporter lors des processus de fabrication ou de contrôle. La photonique a de l’avenir et ça commence à se savoir. Je me demande s’il n’exagère pas un peu. Quoique, après tout, il a peut-être raison. La photonique, c’est comme l’électronique, on va finir par en rencontrer partout. Il faudra bien que les entreprises comptent des techniciens compétents. Je n’ai pas encore une vision très claire des domaines d’application de la photonique. Tout de même, elle comprend vite, mais il faut lui expliquer longtemps. Pour essayer d’être bien compris, je vais répondre en deux temps : je vais d’abord énumérer les champs technologiques couverts par la photonique, puis les domaines d’applications. On compte huit champs technologiques : - L’imagerie où on distingue l’observation (microscopes, lunettes à intensification de lumière...) et l’enregistrement d’images (caméras CCD, holographie...). - L’éclairage (lampes à fibres optiques, diodes électroluminescentes...). - La mesure (spectrométrie, pyrométrie...). - Les télécommunications (fibres optiques, diodes laser...). - Le stockage de l’information (lecteurs de codes à barres, mémoires holographiques...). - Le traitement de l’information (filtrage spatial, corrélateurs...). - Le travail des matériaux (usinage laser, chirurgie laser...). - L’énergie solaire (capteurs thermiques, capteurs photovoltaïques...). 4 En ce qui concerne les domaines d’applications, on peut citer : - Les applications médicales (imagerie, chirurgie laser...). - Les applications militaires (lunettes de vision nocturnes, écrans « tête haute » pour les pilotes d’avions...). - Les télécommunications (fibres optiques, multiplexage en longueur d’onde...). - Les loisirs (caméscope, photographie...). - L’énergie (photopiles, chauffe-eaux solaires...). - L’industrie (travail des matériaux, mesure et contrôle...). Quel bavard ! Vous parlez comme un livre, professeur. Mais, dites-moi, avec toutes ces applications, la photonique doit être d’une extrême complexité ? Ça ne finira jamais ? Je n’ai pas que ça à faire, moi. J’irais bien boire un coup. Il y a en effet un grand nombre de phénomènes qui peuvent intervenir, ou qui peuvent être utilisés dans les systèmes photoniques : propagation, réflexion, réfraction, dispersion, diffraction, interférences, diffusion, polarisation, émission, absorption, fluorescence, incandescence... Mais en fin de compte, un système photonique est toujours constitué d’une source de lumière (lampe, laser...), d’un appareil de conditionnement de la lumière (miroir, polariseur, objectif...), et d’un récepteur (capteur CCD, photodiode...). Ce n’est donc pas si compliqué que cela. Le photonicien doit savoir, pour résoudre un problème, déterminer le mode d’action sur la lumière, choisir la bonne source et le bon récepteur. Et c’est pour cela que deux années sont nécessaires pour se présenter au BTS. Tout juste ! Quelles sont les disciplines principales de la formation ? Elle ne veut pas me lâcher. 5 Toutes les disciplines sont importantes. Mais les matières spécifiques à cette formation sont l’optique, l’électronique et la construction mécanique. La réalisation d’un projet photonique nécessite toujours la maîtrise de ces trois disciplines Et pour pouvoir suivre cette formation, quelles études faut-il avoir suivi ? De nombreuses formations conviennent très bien. C’est le cas particulièrement des séries S, option TI ou SVT math ou physique, STL physique-chimie, STI2D, ou certains bacs pros techniques De toutes manières, toutes les candidatures sont examinées. Pour des étudiants qui souhaitent des études courtes, débouchant sur un diplôme permettant de trouver effectivement un emploi, le choix de la photonique est à envisager. D’autant plus que, après le BTS, il est toujours possible de poursuivre des études en école d’ingénieurs par exemple. Pour finir, comment décririez-vous l’état de la photonique en France ? Eh bien, comme je l’ai déjà dit, toute l’industrie se met à utiliser de plus en plus la photonique, et donc a besoin de techniciens d’études, de fabrication, de maintenance ou de conduite de matériel photonique. De technico-commerciaux compétents dans le domaine aussi. Donc dans toute la France des entreprises sont susceptibles d’employer le titulaire d’un BTS Photonique. Cependant, jusqu’à ces dernières années, quelques régions avaient en quelque sorte leur spécialité. Ainsi, la Bretagne (Rennes, Lannion, Brest) était spécialisée dans les télécommunications. L’Est (Strasbourg, Mulhouse, Besançon) dans le travail des matériaux. Grenoble dans l’optoélectronique et l’optique intégrée. Toulouse dans les applications aéronautiques et spatiales. Dans la région parisienne et dans la région Rhône-Alpes, tous les domaines de la photonique ont toujours été très actifs, surtout les applications militaires. Pour ce qui concerne l’Europe, on peut noter que la photonique est encore plus développée en Allemagne et au Royaume Uni qu’en France. Je n’avais demandé qu’en France, moi. 6 Dans le monde, ce sont les États-Unis d’Amérique qui dominent, devant l’Europe, le Japon, la Corée et la Chine. Je vous remercie beaucoup pour toutes ces explications. Je me demande si je l’aurai comme prof l’année prochaine ? Mais je vous en prie. Je me demande si je l’aurai comme élève l’année prochaine ? Au revoir, professeur Laser. Au revoir, mademoiselle. 7