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DIVAS –
Mécanismes d'interactions PneuChaussée en présence d'eau
Relation texture Adhérence
Livrable 2.B.1
Date: 25 novembre 2008
Responsable :
Frédéric SPETLER
(Michelin)
Projet financé par l’Agence Nationale de la Recherche
Acteurs :
LCPC/ESAR
CETE RA
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TABLE DES MATIERES
Introduction .....................................................................................................3
1.
Etude Bibliographique .............................................................................3
1.1
1.2
Les grandes familles de modèles............................................................. 3
Les modèles mathématiques .................................................................... 4
1.2.1
1.2.2
1.2.3
1.3
Les modèles physiques ............................................................................ 9
1.3.1
1.3.2
1.4
2.
Modèle du projet VERT (VEhicle Road Tyre Interaction)........................... 4
Modèle "Road Scaled Magic Formula"........................................................ 6
Modèle de l'Université d'Istanbul (Ergün/Agar).......................................... 8
Modèle Poil de brosse avec flexion sommet et torsion carcasse ............ 9
Modèle Fractal implanté dans un modèle pneu longitudinal .................. 12
Conclusion sur les modèles disponibles de la bibliographie .............. 13
Construction du modèle Michelin.........................................................14
2.1
Les mécanismes d'interactions adhérence pneu-chaussée ................ 14
2.1.1
Généralités sur l'adhérence sur sol mouillé ............................................. 14
2.1.2
Le mécanisme d'hydroplanage: évacuation et drainage ......................... 15
2.1.3
Le mécanisme de viscoplanage: stockage de l'eau dans les creux de
sculpture ...................................................................................................................... 18
2.1.4
Le mécanisme d'indentation gomme/sol .................................................. 20
2.1.4.1
2.1.4.2
2.1.5
2.2
Objectif fixé et choix de Michelin............................................................... 25
Synoptique ................................................................................................... 26
Zoom sur les briques du modèle............................................................ 27
2.3.1
2.3.1.1
2.3.1.2
2.3.1.3
2.3.1.4
2.3.2
2.3.3
2.4
Paramètres influents pour le niveau d'adhérence ................................... 25
Architecture générale du modèle Michelin ............................................ 25
2.2.1
2.2.2
2.3
Retrouver le contact sec ou humide (hauteur d'eau quasi nulle).................... 20
Mécanismes d'indentation en zone sèche ou humide du contact .................. 22
TameTire et Modèle d'indentation gomme/sol ......................................... 27
Introduction.......................................................................................................... 27
Modèle mécanique................................................................................................ 29
Application sur un pneu tourisme ...................................................................... 34
Conclusion ............................................................................................................ 38
Modèle d'hydroplanage .............................................................................. 39
Modèle de viscoplanage ............................................................................. 40
Premiers résultats du modèle prototype (partiel) ................................. 40
Conclusion.....................................................................................................42
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TEXTE :
Introduction
Dans le cadre du projet DIVAS subventionné par l'ANR, Michelin s'est engagé à fournir un
modèle d'adhérence prenant en compte les interactions pneu-chaussée en présence d'eau.
Le présent rapport constitue une présentation de l'état d'avancement de ces travaux à
t0+18mois.
Nous avons tout d'abord procédé à une étude bibliographique approfondie des modèles
disponibles (§1), afin de situer leurs capacités et leurs limites, et ainsi de proposer un scénario
apportant un net bénéfice vis-à-vis de l'état de l'art existant.
Ensuite, un scénario de modélisation, basé sur le savoir-faire de Michelin en matière
d'adhérence, a pu être construit. Nous présentons en §2 ce scénario fondé sur une prise en
compte complète des mécanismes d'interaction gomme/sol en présence d'eau, dans son état
d'avancement à t0+18 mois, ainsi que les pistes qui restent à explorer et/ou à compléter pour
aboutir au délivrable final à t0+36 mois.
1. Etude Bibliographique
1.1
Les grandes familles de modèles
On distingue principalement 2 familles au sein des modèles estimatifs d'une adhérence pneu
chaussée: les modèles mathématiques et les modèles physiques. Leurs caractéristiques sont
détaillées ci-dessous.
•
Modèles mathématiques:
o Ils consistent en un ensemble de formules mathématiques, dont les coefficients
sont fittés sur des mesures pneu
o Les coefficients et formules mathématiques ne représentent aucune grandeur
physique mesurable liée au pneumatique ou à la chaussée
o Ils reposent pour ce fit sur des plans d'expérience au cours desquels sont
mesurées à la fois les variables d'entrée (en fonction desquelles on veut prédire
une adhérence) et les variables de sortie (l'adhérence elle-même en
l'occurrence)
o Ces modèles tentent de reproduire au mieux ces plans d'expérience
•
Modèles physiques
o Il s'agit cette fois de descriptions du pneu à travers ses rigidités et lois
d’adhérence
o On trouve aussi des modèles de contact gomme/sol intégrés ou pas dans un
modèle pneu
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o Les paramètres, coefficients et équations d'un tel modèle représentent eux des
grandeurs physiques mesurables liées au pneumatique ou à la chaussée
De plus, on peut aussi parmi les modèles distinguer ceux qui sont capables de prédire des
efforts pneu ou une adhérence dans la direction longitudinale X, transversale Y ou de manière
couplée X-Y.
Les principaux avantages et inconvénients des stratégies de modélisation ci-dessus sont
consignés dans le tableau ci-dessous.
Inconvénients
Avantages
Modèle mathématique
•
•
Précision en interpolation: prise
en compte implicite de l’ensemble
des mécanismes.
•
•
Mauvais en extrapolation
Tributaire de la qualité du Plan
d'expérience pneu.
Ne balayent pas l’ensemble des
conditions d’usage longitudinal /
latéral, Charge, Pression, Vitesse,
Hauteur d'eau…
•
Modèle physique
•
•
•
Prédiction X-Y couplé dans un
domaine d’usage large possible
Plus de robustesse dans
l’extrapolation en dehors du
domaine de mesure
Précision: dépend de la maîtrise
de l’ensemble des mécanismes
adhérence.
Difficulté technique: relation
complexe entre mu gomme/sol et
caractéristiques sol.
Dans la suite (§1.2 et 1.3), nous présentons les modèles de la littérature les plus marquants ou
les plus complets. Cette présentation n'est pas en elle-même un jugement de valeur et ne se
veut pas exhaustive.
1.2
Les modèles mathématiques
1.2.1
Modèle du projet VERT (VEhicle Road Tyre Interaction)
Il s'agit d'un modèle mathématique, développé dans le cadre du programme européen VERT
à l'université de Darmstadt par Frank Klempau.
Le modèle est basé sur un plan d'expérience très complet dans lequel on fait varier tous les
paramètres d'entrée retenus:
• MPD: Mean Profile Depth (équivalent hauteur au sable)
• BFC20: Brake Friction Coefficient
• WT: Water Thickness, hauteur d'eau
• V: vitesse
• TD: hauteur de sculpture ou usure pneu
• Fz: charge à la roue
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•
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TW: largeur pneu
Les sorties du modèle sont:
• Coefficients d'adhérence X et Y
Figure 1.1: Principe du modèle du projet VERT (VDI 2000, F. Klempau, TU Darmstadt)
Les effets des paramètres d'entrée sont donc pris en compte par des
lois mathématiques, dont les coefficients sont fittés sur le plan
'expérience (exemple figure 1.2).
Mathématique
Physique
Sec
Mouillé
Hydro
Visco
Neige
X
Y
X-Y
Thermique
Vitesse
Charge
Pression
Heau
HSRE
loi mu(P,V,T)
LuGre
Mod. Indentation
Mesure grip sol
Temps réel
X
X
X
?
X
X
X
X
X
X
X
X
X
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Figure 1.2: Influence charge et usure pneu sur la sortie modèle
(VDI 2000, F. Klempau, TU Darmstadt)
1.2.2
Modèle "Road Scaled Magic Formula"
Il s'agit là encore d'un modèle mathématique, développé par TNO (R. Hogt et J. Van Oosten),
ayant fait l'objet d'une publication dans un rapport du VDI: Road-scaled Magic Formula for
braking performance of cars (VDI 2000).
Ce modèle produit des courbes µ(G) (adhérence longitudinale) en se basant sur la désormais
classique modélisation mathématique Pacejka (Magic Formula), mais en y ajoutant des
entrées descriptives du sol pour adapter le niveau d'adhérence atteint et la forme de la courbe
µ(G) aux variétés des sols réels.
Les paramètres d'entrée sont donc:
• Cœfficients Magic Formula Pacejka
• MPD: Mean Profile Depth (équivalent hauteur au sable)
• F50 humide: mesure sur pneu PIARC (0 et 0.5mmm de hauteur d'eau)
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Mathématique
Physique
Sec
Mouillé
Hydro
Visco
Neige
X
Y
X-Y
Thermique
Vitesse
Charge
Pression
Heau
HSRE
loi mu(P,V,T)
LuGre
Mod. Indentation
Mesure grip sol
Temps réel
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
Figure 1.3: Principe du modèle "Road Scaled Magic Formula" (VDI 2000, Road-scaled Magic
Formula for braking performance of cars, R. Hogt et J. Van Oosten)
On retrouve là encore des cœfficients fittés sur un plan d'expérience, qui permettent de
fournir en sortie du modèle la force Fx en fonction du glissement apparent G du pneu (et
donc µ(G) sous une charge connue).
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Pour exemple,on représente sur la figure 1.4 l'allure des résultats obtenus via ce modèle.
Figure 1.4: Sortie du modèle "Road Scaled Magic Formula" (VDI 2000, Road-scaled Magic
Formula for braking performance of cars, R. Hogt et J. Van Oosten)
1.2.3
Modèle de l'Université d'Istanbul (Ergün/Agar)
Dernier modèle mathématique que nous présenterons dans ce rapport: le modèle de
l'Université Technique d'Istanbul (M. Ergün et E. Agar).
Ce modèle prédit l'adhérence latérale en fonction des entrées:
• MPDmac: distance entre le point le plus haut du profil de macrotexture du sol et la
ligne de niveau moyen
• Lamic: longueur d'onde moyenne de la microtexture
Mathématique
X
Physique
• Rqmic : Ecart-type du profil de microtexture
Sec
• S: Vitesse de glissement (km/h)
Mouillé
X
Le modèle a été construit sur un panel de 18 sols différents.
La figure 1.5 en montre un schéma synthétique.
On y retrouve de plus les grandeurs:
• F0: peak skid resistance coefficient
• -1/T: slope of the curve
Hydro
Visco
Neige
X
Y
X-Y
Thermique
Vitesse
Charge
Pression
Heau
HSRE
loi mu(P,V,T)
LuGre
Mod. Indentation
Mesure grip sol
Paramètres sol
Temps réel
X
X
X
X
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Figure 1.5: Principe du modèle de l'université d'Istanbul (Optimisation of road surface friction From
macro and microtexture point of view, Université Istanbul 2000)
1.3
Les modèles physiques
1.3.1
Modèle Poil de brosse avec flexion sommet et torsion carcasse
Il s'agit ici d'un modèle assez récent (2006), développé en partenariat
entre N. Miyashita (Yokohama rubber) & K. Kabe (Akron, Ohio).
Ce modèle physique poil de brosse, s'il est assez classique du point de
vue de hypothèses prises en compte, a du moins le mérite de prendre en
compte la flexion du sommet pneu et la torsion carcasse, dont les effets
sont loin d'être négligeables pour la prédiction de l'adhérence latérale ou
des efforts Y.
Par contre, la prise en compte des mécanismes d'adhérence en mouillé est
incomplète voire inexistante et les effets thermiques (échauffement de la
gomme et effet sur l'adhérence) ne sont pas pris en compte.
Sans rentrer dans les détails du modèle, on présente toutefois sur la figure
1.6 les principes physiques généraux qui le régissent.
Mathématique
Physique
Sec
Mouillé
Hydro
Visco
Neige
X
Y
X-Y
Thermique
Vitesse
Charge
Pression
Heau
HSRE
loi mu(P,V,T)
LuGre
Mod. Indentation
Mesure grip sol
Paramètres sol
Temps réel
X
X
X
X
X
X
X
X
?
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Figure 1.6: Principe du modèle Poil de brosse avec flexion sommet et torsion carcasse
(A new analytical tire model for cornering simulation, N. Miyashita (Yokohama rubber) & K. Kabe
(Akron, Ohio), 2006)
De même, on consigne figure 1.7 des exemples de sortie du modèle. Si ce modèle est
intéressant pour études paramétriques en conditions bornées, son utilisation comme outil
prédictif d'adhérence est dificile de par sa prise en compte insuffisance des mécanismes,
notamment en présence d'eau.
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Figure 1.7: Sorties du modèle Poil de brosse avec flexion sommet et torsion carcasse
(A new analytical tire model for cornering simulation, N. Miyashita (Yokohama rubber) & K. Kabe
(Akron, Ohio), 2006)
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1.3.2
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Modèle Fractal implanté dans un modèle pneu longitudinal
Il s'agit ici d'un modèle assez intéressant du fait de son originalité, qui
a été développé par G. Heinrich (TU Dresden) et M. Klüppel (TU
Hannover).
A partir d'une description fractale de la géométrie du sol (macro et
microtexture), de caractéristiques gomme et d'une vitesse de
glissement, on prédit des courbes µ(G) d'adhérence longitudinale.
Ce modèle prend toutefois en compte surtout des effets gomme et pas
tous les effets de la mécanique du pneu. Il est donc lui aussi, comme
le modèle du §1.3.1, valable pour des études paramétriques en relatif
mais semble difficile à appliquer dans des cas de prédictions absolues
de niveau d'adhérence comme nous cherchons à la faire pour DIVAS.
Les principaux éléments de modélisation sont réunis sur la figure 1.8.
Mathématique
Physique
Sec
Mouillé
Hydro
Visco
Neige
X
Y
X-Y
Thermique
Vitesse
Charge
Pression
Heau
HSRE
loi mu(P,V,T)
LuGre
Mod. Indentation
Mesure grip sol
Paramètres sol
Temps réel
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
?
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Figure 1.8: Modèle Sol Fractal + Pneu (Rubber friction and tire traction
G. Heinrich (Dresden), M. Klüppel (Hannover), 2006)
1.4
Conclusion sur les modèles disponibles de la bibliographie
Parmi tous les modèles existant, aucun ne semble présenter des capacités suffisamment
générales pour pouvoir être utilisé conformément à ce qui est nécessaire dans le cadre du
sujet 2 du projet DIVAS, c'est-à-dire pour prédire un niveau absolu d'adhérence, dans les
directions longitudinales, latérales et couplées XY.
En effet aucun modèle physique ne traite le problème dans sa globalité, car une partie
seulement des mécanismes est modélisée, en particulier en présence d'eau où cela est très
sensible. Ces modèles ont plus vocation à réaliser des études paramétriques en relatif (ce pour
quoi ils peuvent être tout à fait satisfaisants) qu’à faire du prédictif en absolu.
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Les modèles mathématiques, quant à eux, traitent bien implicitement tous les effets, pour peu
que le plan d'expérience soit assez complet, mais il est impossible d'avoir confiance en leur
fiabilité en dehors des conditions testées au sein du plan d'expérience. Comme aucun plan
d'expérience ne pourra jamais être assez vaste pour englober toute la variété des conditions
rencontrées en réalité, il est hasardeux de vouloir les employer de manière aussi générale que
l'on entend le faire dans le cadre du programme DIVAS.
C'est pourquoi Michelin s'oriente pour la modélisation dans la voie décrite au paragraphe §2.
2. Construction du modèle Michelin
2.1
Les mécanismes d'interactions adhérence pneu-chaussée
On distingue principalement 3 mécanismes d'interaction pneu-chaussée qu'il est nécessaire de
prendre en compte pour aboutir à une estimation correcte de l'adhérence dans des conditions
de route humide ou mouillée (avec une hauteur d'eau non négligeable):
• L'indentation gomme / sol
• L'hydroplanage
• Le viscoplanage
2.1.1
Généralités sur l'adhérence sur sol mouillé
La présence d’eau perturbe les mécanismes de l’adhérence. Le mécanisme d’adhésion ne peut
s’opérer si le contact entre la gomme et le sol n’est pas parfaitement propre et sec. Le
mécanisme d’indentation est perturbé dès que la hauteur d’eau est suffisante pour couvrir les
rugosités du revêtement routier. Par temps de pluie, maintenir l’adhérence nécessite donc
d’évacuer l’eau pour restaurer un contact sec entre la bande de roulement et le sol.
La route y contribue par son inclinaison, sa structure (enrobés drainants, par exemple) et sa
rugosité. Mais cela ne suffit pas. Lorsque le sol est mouillé, de l’eau peut s’infiltrer sous
l’aire de contact, d’autant plus fortement que la hauteur d’eau sur la route est importante et la
vitesse du véhicule élevée. Cette présence d’eau dégrade le niveau d’adhérence potentiel.
Pour maintenir ce niveau, le pneu, par la forme de son aire de contact, ses creux de sculpture
et ses lamelles, va repousser vers l’avant et drainer vers les côtés une partie du bourrelet
d’eau qui s’accumule devant lui.
Ensuite, il va stocker l’eau qui passe sous l’aire de contact dans les creux de sculpture et
transpercer le film d’eau résiduel pour retrouver le contact direct avec le sol. Ces étapes
correspondent à trois phénomènes physiques qui apparaissent “progressivement” de l’avant
vers l’arrière de l’aire de contact : il s’agit de phénomènes dits hydrodynamiques (hauteur
d’eau supérieure à 0,5 mm), viscodynamiques (hauteur d’eau comprise entre quelques
microns et 0,5 mm) et humides (présence d’un film d’eau résiduel discontinu).
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Figure 2.1: Les différents mécanismes à l'œuvre dans le contact mouillé
2.1.2
Le mécanisme d'hydroplanage: évacuation et drainage
Considérons un pneu roulant relativement vite sur un sol “inondé” par une certaine hauteur
d’eau. Le pneu pousse devant lui un “bourrelet d’eau” de hauteur supérieure. La bande de
roulement vient frapper cette eau à l’avant de l’aire de contact, générant une mise en pression
de l’eau (pression hydrodynamique).
Figure 2.2: Le bourrelet d'eau à l'origine de l'hydroplanage
Si cette pression devient supérieure à la pression moyenne d’appui du pneu sur le sol (de
l’ordre de 2 bars pour une voiture, de 8 bars pour un poids lourd), le pneu ne peut plus
repousser l’eau et il est soulevé : c’est le phénomène d’hydroplanage.
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Dans le cas d’un pneu lisse, cette pression devient égale à la pression de gonflage à la vitesse
de 70 km/h pour un véhicule de tourisme (gonflage à 2 bars) et à 140 km/h pour un poids
lourd (gonflage à 8 bars). C’est la vitesse d’apparition de l’hydroplanage. On comprend ainsi
que le risque d’hydroplanage concerne plus les voitures que les camions.
L’apparition de l’hydroplanage peut heureusement être repoussée par l’entaillement de la
bande de roulement et la forme de l’aire de contact. Aujourd’hui, la vitesse d’hydroplanage
d’un véhicule de tourisme haute performance équipé de pneus neufs correctement gonflés
peut être repoussée au-delà de 100 km/h.
UNE FORME D’EMPREINTE ARRONDIE POUR DIMINUER LA PRESSION
QU’EXERCE LE BOURRELET D’EAU SUR LE PNEU
Le bourrelet d’eau (également appelé front d’onde) repoussé devant le pneu à la vitesse du
véhicule doit pouvoir être évacué rapidement vers les côtés pour que la pression qu’il génère
sur l’avant du pneu ne dépasse pas la pression locale créée par la charge du véhicule.
On comprend aisément qu’une forme arrondie pénètre plus facilement dans une masse d’eau
qu’une empreinte carrée : c’est l’effet d’étrave. Les phénomènes mis en jeu sont globalement
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ceux appliqués en mécanique des fluides : une forme plate (comme une feuille d’arbre)
“résiste” plus à l’air qu’une forme ronde (comme une bille, par exemple). De même, un
bateau à l’étrave arrondie ou pointue “fend” mieux la mer qu’un bateau à l’étrave carrée.
Figure 2.3: Visualisation de la zone d'hydroplanage sur pneu réel
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2.1.3
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Le mécanisme de viscoplanage: stockage de l'eau dans les creux de sculpture
Les moyens d’évacuation de l’eau agissant à l’avant de l’aire de contact (zone
hydrodynamique) ont permis de diminuer la hauteur d’eau qui “s’infiltre” sous l’aire de
contact jusqu’à une épaisseur d’environ 0,5 mm. L’eau qui s’infiltre sous l’aire de contact
doit alors être chassée vers les creux de sculptures pour y être stockée.
ECRASEMENT DE L’EAU PAR LES PAINS DE GOMME
Dans l’aire de contact, les pains de gomme ne roulent pas : ils se posent sur le sol à l’entrée
de l’aire de contact, un peu comme nous posons le pied sur le sol lorsque nous marchons.
Puis ils se soulèvent lorsqu’ils quittent l’aire de contact. Les pains de gomme viennent
donc écraser l’eau quasiment verticalement.
C’est cet effet d’écrasement qui va permettre de chasser l’eau vers les creux de sculpture.
Pour retrouver le contact avec le sol, une condition: l’eau doit pouvoir aller du centre d’un
pain de gomme jusqu’à sa périphérie avant que le pain de gomme ne quitte l’aire de contact.
Sinon, il ressort avant d’avoir retrouvé le contact avec le sol. Le temps de transfert vers la
zone de stockage sera d’autant plus court que la pression d’appui du pneu sur l’épaisseur
d’eau sera grande et que la distance à parcourir jusqu’à la périphérie des pains de gomme sera
petite. En première approche, cela signifie que les pains de gomme devraient être petits
et les creux importants.
En fait, la distribution des creux de sculpture doit être optimisée afin de réduire le temps de
transfert (pains de gommes petits) sans nuire à la rigidité de la bande de roulement (densité de
creux réduite).
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Les creux de sculptures peuvent être complétés par un réseau de lamelles débouchant sur les
creux de sculptures. Ces lamelles participent au drainage de l’eau vers les creux de sculpture
et créent des surpressions locales au niveau de leurs arêtes. Là encore, ce réseau doit être
conçu pour concilier drainage et rigidité de la bande de roulement.
Figure 2.4: L'évacuation de l'eau par les lamelles en zone de viscoplanage
Sur sol mouillé, les lamelles jouent un rôle clé dans le rétablissement de l’adhérence.
Une lamelle se définit comme une fente verticale formant un creux d’une largeur de 0,3 à 1,5
mm dans un pain de sculpture. Elle doit son nom aux inserts en forme de lames qui garnissent
le moule de cuisson pour former ces fentes dans la bande de roulement.
•
•
les lamelles qui débouchent sur les creux de sculpture participent au drainage de l’eau
vers ces zones de stockage
elles génèrent le long de leurs arêtes de fortes surpressions de contact qui transpercent
le film résiduel formé par l’eau qui n’a pu être évacuée ou stockée, ce qui permet de
retrouver des zones de contact direct gomme/sol.
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De par ces deux fonctions, il est intéressant de disposer d’une densité relativement élevée de
lamelles (d’où le terme de “lamellisation”).
Figure 2.5: Drainage de l'eau qui s'infiltre sous l'AdC vers les creux de sculpture
2.1.4
Le mécanisme d'indentation gomme/sol
2.1.4.1 Retrouver le contact sec ou humide (hauteur d'eau quasi nulle)
Evacuer l’eau ne suffit pas à rendre la route parfaitement sèche sous le pneu. Il reste des
traces d’eau sur le revêtement routier, tout comme il reste des traces d’eau à la surface
d’un récipient que l’on vient de vider.
Ce phénomène est dû à la tension superficielle de l’eau qui provoque la persistance de
microscopiques gouttes d’eau sur toute surface qui a été immergée. Pour les faire disparaître,
il faut essuyer ou laisser sécher.
Le pneumatique doit donc être conçu pour retrouver le contact sec, en dépit de ce film d’eau
résiduel d’une épaisseur de quelques microns.
Ce sont les arêtes des lamelles et des sculptures, conjuguées aux microrugosités du
revêtement qui, en générant des surpressions locales très importantes, vont parvenir à
transpercer ce film.
On retrouve alors un contact sec où les mécanismes d’indentation peuvent jouer pleinement
leur rôle.
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Figure 2.6: Création du contact "sec" par les arêtes des pains
La microrugosité est plus ou moins importante suivant les sols, ce qui explique la grande
variabilité des niveaux d’adhérence en condition humide.
En résumé, Sur sol mouillé, ADHERER CONSISTE A évacuer l’eau pour RETROUVER LE
CONTACT SEC ou humide.
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2.1.4.2 Mécanismes d'indentation en zone sèche ou humide du contact
Dans le phénomène d’adhérence, deux mécanismes de sollicitation interviennent sous l’effet
d’un glissement relatif entre l’élastomère et le sol :
• le premier est l’excitation fréquentielle du matériau par indentation : il s’agit d’une
déformation de la gomme par glissement sur les aspérités du sol dont la taille varie du
centimètre (domaine de la macrorugosité) au micron (domaine de la microrugosité).
• le deuxième est l’adhésion, phénomène de liaison moléculaire qui intervient à une
échelle de l’ordre du centième de micron et qui se trouve amplifié par le glissement.
Dans ces deux cas, le caractère visco-élastique de la gomme, notamment son hystérèse, joue
un rôle important.
LE PHÉNOMÈNE D’INDENTATION
La souplesse de la gomme lui permet d’épouser la forme des aspérités du sol. Lorsqu’un bloc
de gomme glisse sur le sol, sa déformation, parce que le matériau est visqueux, se produit
comme un écoulement : le bloc vient buter contre l’aspérité, se déforme, mais, par un effet
d’hystérèse, ne redescend pas immédiatement à sa hauteur initiale de l’autre côté de l’aspérité.
L’enveloppement dissymétrique de l’aspérité par le matériau visco-élastique génère des
forces de réaction qui s’opposent au glissement.
La condition essentielle pour que l’indentation de la gomme entre en jeu est la présence sur
la route d’aspérités de dimension comprise entre quelques microns et quelques millimètres.
Même en présence d’eau, le phénomène fonctionne efficacement,en tout cas pour les échelles
d'indenteurs qui ne sont pas masquées par le film d'eau.
L’indentation se produit dans une plage de fréquences de sollicitation comprise entre 102 et
106 Hz.
Figure 2.7: Vision mécanique de l'indentation
On peut modéliser l’indentation au premier ordre par un ensemble ressort-amortisseur qui
subit un cycle de compression-détente à déformation imposée. Dans l’amortisseur, la
déformation génère de l’hystérèse (donc une perte d’énergie) à chaque cycle. La déformation
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dissymétrique du pain de gomme autour de l’aspérité génère un champ de forces, dont la
composante tangentielle X s’oppose au glissement.
Figure 2.8: Plage de fréquences du mécanisme d'indentation
LE PHÉNOMÈNE D’ADHÉSION
L’adhésion résulte d’interactions moléculaires se produisant au niveau de l’interface
gomme/sol (liaisons de Van der Waals*). Ces liaisons se forment, s’étirent puis se rompent
pour se reformer plus loin. Les chaînes moléculaires de la gomme suivent donc un cycle
d’étirement-rupture qui génère un travail visco-élastique (frottement des chaînes moléculaires
entre elles dans un certain volume du matériau). Ce travail multiplie les énergies de liaison
par un facteur pouvant varier entre 100 et 1000 en fonction de la température et de la vitesse
de glissement de la gomme sur le sol.
La condition essentielle pour que l’adhésion entre en jeu est que la gomme soit en contact
direct avec le sol (distance entre la gomme et le sol inférieure à 10-6 mm), c’est-à-dire que le
sol soit propre et sec.
Les phénomènes d’adhésion se produisent dans une plage de fréquences de sollicitation
comprises entre 106 et 109 Hz.
Figure 2.9: Vision mécanique de l'adhésion
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vf 1.0
Cycle de sollicitation :
1 • La liaison se crée.
2 • La chaîne moléculaire est étirée : son caractère visqueux (représenté par le piston)
résiste à la déformation, générant une force de frottement X qui s’oppose au
glissement.
3 • La liaison se rompt, pour se reformer plus loin.
Figure 2.10: Plage de fréquences du mécanisme d'adhésion
VARIATIONS DU COEFFICIENT D’ADHÉRENCE SUR SOLS HUMIDES OU
MOUILLÉS
Sur sol humide, le coefficient d’adhérence est toujours dégradé et varie énormément avec la
nature du sol. Cela tient au fait que, en présence d’un film d’eau entre la gomme et le sol, le
mécanisme d’adhésion ne peut plus opérer, à moins de parvenir à transpercer ce film.
En revanche, le mécanisme d’indentation fonctionne encore : c’est la composante fidèle de
l’adhérence. Sur sol humide, on constate que ce sont les revêtements microrugueux qui
présentent la meilleure adhérence.
Figure 2.11: Effets de la micro- et macrorugosité
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vf 1.0
Si la hauteur d’eau augmente (sol mouillé), les microindenteurs peuvent être inondés. Les
macro-indenteurs continuent à jouer leur rôle d’indentation, de drainage et de stockage, mais,
à grande vitesse, il y a risque d’hydroplanage.
L’eau perturbe donc l’adhérence et le rôle des pneumatiques consistera à l’éliminer le plus
rapidement et le plus efficacement possible en jouant sur la forme de l’aire de contact, la
sculpture de la bande de roulement et la lamellisation.
2.1.5
Paramètres influents pour le niveau d'adhérence
En prenant en considération tous les mécanismes décrits aux paragraphes précédents, on
parvient à la conclusion que les entrées suivantes sont nécessaires pour mettre en œuvre une
modélisation physique complète.
Paramètres d'entrée
Plage de variation
du modèle
0.1-1.2
GN / SFC
Moyenne réseau
mu pneu
GN=0.6 (BPN=55)
quasi proportionnel
Significatif aux fortes vitesses et pneus usés. (-10% de mu pneu neuf, jusqu'à 50% sur pneu usé, entre MPD de 0.5mm et 1mm)
~ -1% par °C (dépend de la gamme pneu)
Significatif aux fortes vitesses et pneus usés. Perte quasi-totale d'adhérence
V>100km/h sur Heau>3mm.
Effet "négligeable" en humide (-10%). Perte quasi-totale d'adhérence sur forte
hauteur d'eau + pneus usés.
-20% neuf/usé Heau <0.5mm. Ecart augmente significativement pour les
fortes hauteur d'eau et fortes vitesses
0.5b=> 10% sur la vitesse d'hydroplanage. ~4% en mouille bas mu
Effet d'ordre 2 en mouillé et hydro
MPD
0.2mm à 3mm
T° (cond mouillé)
-10 , 32°C (VUFO)
10°C (VUFO)
Heau
0 à qques mm
humide
Vitesse
0-130
~70km/h
Usure
1.5 à 8mm
~6mm
Pg
Charge
0.5 à 1.3 Zetrto
1 Zetrto
0.6 - 0.8mm
Figure 2.12: Paramètres d'entrée à prendre en compte pour un modèle physique complet
2.2
Architecture générale du modèle Michelin
2.2.1
Objectif fixé et choix de Michelin
Pour répondre aux questions qui se posent dans le cadre du sujet 2, volet B du projet DIVAS,
il a été choisi de fournir un modèle présentant les caractéristiques / performances suivantes:
• Prédiction des efforts et de l'adhérence en X-Y couplé, c'est-à-dire en longitudinal,
transversal ou dans des conditions croisées longitudinal + transversal, qui
représentent la grande majorité des cas réels
• Prise en compte de tous les mécanismes physiques de contact gomme/sol en présence
d'eau
o Hydroplanage
o Viscoplanage
o Indentation gomme/sol
o Mécanique pneu: elle pilote la manière dont "travaille" la gomme au sol
(pondération et intensité des 3 mécanismes de contact cités)
Page 26
•
•
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vf 1.0
o Prise en compte de tous les effets thermiques
Prédiction d'adhérence visée à +/0.1 près
On choisit comme référence d'adhérence (pneu pour lequel le modèle effectuera sa
prédiction) un pneu moyen représentatif du marché: le pneu SRTT 16" 225/55R16
(norme ASTM)
Un modèle réunissant tous ces aspects constitue une nette avancée par rapport à l'état de l’art
antérieur, comme l'a montré l'étude bibliographique, notamment de par la prise en compte
couplée de tous les mécanismes et de la mécanique pneu y compris de effets thermiques.
2.2.2
Synoptique
Les entrées retenues pour le modèle sont les suivantes (cases grises de la figure 2.13):
• Le Grip Number GN: mesuré à l'aide d'un grip tester
• Le MPD: Mean Profile Depth (hauteur au sable): on peut le mesurer à l'aide d'un
rugolaser ou l'extrapoler d'une hauteur au sable
• Tair : température de l'air ambiant
• Heau : hauteur d'eau résiduelle sur la chaussée, peut s'obtenir à l'aide du modèle de
mouillage du livrable 2.B.2 du projet DIVAS.
• V: vitesse de roulage
• Pg : pression de gonflage du pneumatique
• Usure: état d'usure du pneu
MECA PNEU + GOMME/SOL
GN
MPD
Vitesse
Usure
(P,Vg,T) =
f(GN,MPD,Tair)
TaMeTirE
Tair
Heau
Pg
X-Y
HYDROPLANAGE
Légende
Vitesse
Pg
S/S0=f(V,Heau,Pg,TES,TEV)
Modèle
Mécanisme
adhérence
Modèle
Mécanique
globale
Pneu
Usure
Visco
VISCOPLANAGE
Figure 2.13: Synoptique de la Modélisation multi-physique Michelin
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vf 1.0
On notera que l'accent a été mis sur l'applicabilité du modèle pour des conditions réelles.
Ainsi, les entrées retenues sont toutes aisées à obtenir, puisqu'elles se basent sur des
techniques de mesure déjà disponibles ou sur le point de l'être.
En terme d'architecture générale du modèle, on relève les points suivants:
• On dispose de 3 briques correspondant à une modélisation de chacun des 3
mécanismes de contact sol en conditions mouillées: indentation gomme/sol,
hydroplanage, viscoplanage
• On dispose d'une brique centrale "TameTire", qui intègre les 3 briques mécanismes
locaux de contact dans un modèle global pneu comprenant également les effets
thermiques
• Les 7 entrées de notre modèle servent chaque fois à un ou plusieurs des sous-modèles
cités ci-dessus
• On est capable au final de prédire les efforts et l'adhérence dans des conditions
couplées X-Y
Dans les paragraphes qui suivent, nous présentons plus en détail chacune des 4 briques que
nous venons de voir, dans leur état d'avancement à t0+18mois. Certaines sont déjà très
matures (l'indentation et la mécanique pneu notamment), d'autres encore plus prototype
(hydroplanage et viscoplanage).
2.3
Zoom sur les briques du modèle
2.3.1
TameTire et Modèle d'indentation gomme/sol
L'intégralité du paragraphe 2.3.1 provient de la présentation du modèle TameTire faite au
congrès SIA, Lyon 14ème congrès International Dynamique du Véhicule 20-21 Juin 2007 par
P. Février et G. Fandard (Michelin).
Résumé
Ce papier présente le développement d’un nouveau modèle pneu thermomécanique basé sur
une approche physique (modèle TaMeTirE).
Le principal avantage de TaMeTirE par rapport au modèle mathématique standard (Magic
Formula) est sa capacité d’extrapolation en dehors du domaine de mesure. L’approche
thermomécanique permet ainsi de réaliser des simulations pour un large éventail de
manœuvres véhicule en prenant en compte les effets température et vitesse.
A partir d’essais effectués sur machine flat-track la comparaison de TaMeTirE et Magic
Formula montre l’intérêt d’une approche physique avec une amélioration de la prédiction des
efforts surtout dans les zones où les effets thermiques sont significatifs.
2.3.1.1
Introduction
La capacité à prédire les caractéristiques force et moment (F&M) des pneumatiques par
rapport aux points de fonctionnement sur véhicule reste une voie de progrès importante pour
la simulation dynamique véhicule. De nombreux tests montrent en effet que la réponse du
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vf 1.0
pneu dépend de la manière dont celui-ci est sollicité. Ainsi pour un même point de
fonctionnement en charge, dérive, vitesse, carrossage…, il est possible d’obtenir différents
niveaux d’efforts en fonction de l’historique des sollicitations. Ce type de comportement est
directement en relation avec les propriétés des mélanges caoutchoutiques qui ont des
caractéristiques de rigidité et de dissipation qui évoluent en fonction de la température, de la
fréquence et de l’amplitude des sollicitations.
L’état de l’art actuel de la modélisation F&M pneu pour la simulation véhicule consiste à
réaliser des mesures sur machine de test et à ajuster un modèle mathématique (ex : modèle
Magic Formula) [14]. Ce type d’approche a été validé sur un ensemble de pneus important,
toutes gammes et dimensions confondues, et a montré une bonne robustesse d’un point de
vue industriel ainsi que dans la qualité globale d’ajustement sur les mesures. Cependant, pour
les raisons évoquées précédemment, ce modèle ne permet pas de prédire correctement les
efforts pneus en dehors du domaine de mesure, car il ne prend pas en compte l’influence de
l’historique thermique sur les caractéristiques du pneu. Ceci est en particulier le cas pour les
applications ‘à la limite’ pour des manœuvres de sécurité, avec des variations importantes de
l’adhérence en fonction de la température.
Le modèle TaMeTirE est basé sur une approche thermomécanique physique et calcule les
efforts X-Y au centre roue ainsi que les températures pneu, en fonction de l’angle de dérive,
du taux de glissement longitudinal, de l’angle de carrossage, de la charge, de la pression de
gonflage, de la vitesse ainsi que de la température de l’air et du sol (voir figure 1).
Les efforts sont calculés à partir d’une approche classique de type « poil de brosse » (voir [1]
à [10]) en considérant une phase de contact adhérent en entrée d’aire de contact (ADC) et une
phase de frottement en sortie d’ADC, la transition entre les deux phases se produisant à un
certain endroit dans l’ADC. Le modèle contient des paramètres physiques des différents
constituants du pneumatiques : rigidité de la carcasse, du sommet, de la bande de roulement.
Les caractéristiques des matériaux (rigidité et coefficient d’adhérence) sont couplées aux
températures de surface et interne.
La première partie du document présente les équations et hypothèses de modélisation. La
deuxième partie concerne les résultats de validation du modèle TaMeTirE pour un pneu
tourisme et la comparaison avec le modèle Magic Formula.
• Taux de
glissement
• Angle de dérive
• Angle de
carrossage
• Force longi.
Modéle
• Force latérale
• charge
Mécanique
• Moment Mz
• vitesse
et
• Températures
• pression de
gonflage
thermique
interne et surface
• Rayon écrasé
• Temp air et sol
• Temps
• Températures
initiales du pneu
Figure 2.14: paramètres d’entrée et de sortie du modèle TaMeTirE
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ZW
V
ZW
γ<0
vf 1.0
XW
δ>0
Ω>0
XW
YW
XW
YW
YW
ZW
Figure 2.15: Système d’axe de référence : Tydex Iso-W
xW
δ' a
δV
Lateral displacement
of theCP
tread
N
K
yW
b
dF
-a
belt
Figure 2.16: représentation schématique du fonctionnement du pneu en roulage dérive. L’effort centre
roue est lié au cisaillement de la bande de roulement et au coefficient de frottement entre la gomme
et le sol. Cet effort induit des déformations du sommet et des flancs qui ont un effet rétroactif.
2.3.1.2 Modèle mécanique
2.3.1.2.1
Rigidités principales du pneumatique
Les déformations des éléments du pneumatique dans l’aire de contact (ADC) sont complexes
et ont un rôle important dans la génération des efforts centre roue. De nombreuses
simplifications sont nécessaires si l’on souhaite garder un modèle simple et rapide capable de
fonctionner avec les outils de simulation véhicule. Nous ferons donc les hypothèses suivantes
concernant le fonctionnement du pneumatique (voir figure 3) : l’effort centre roue est la
somme des efforts élémentaires de cisaillement dans l’aire de contact en régime adhérent et
frottant. Cet effort induit des déformations au niveau du sommet et des flancs du pneu qui
modifient le fonctionnement de l’aire de contact. Les rigidités principales du pneumatique
sont :
RLL
rigidité longitudinale du pneu.
RL
rigidité latérale
RZ
rigidité radiale
KT
rigidité de torsion des flancs et du sommet
1 / S 2 rigidité de flexion du sommet
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vf 1.0
En roulage dérive, la présence d’un couple d’auto-alignement Mz induit une torsion au
niveau des flancs et du sommet de sorte que l’angle de dérive effectif δ ' est plus faible que
l’angle de dérive roue (voir [10] et [11] ):
M
δ ' = δ + δ 0 + Z . [1]
KT
Où, δ 0 est l’angle de plysteer.
L’effort latéral induit de plus une déformation du sommet dans le plan X-Y. Cette
déformation est supposée de forme parabolique le long de l’aire de contact avec une
courbure :
ρ = S 2 Fy [2]
2.3.1.2.2
Dimensions de l’aire de contact et distribution de pression
D’une manière générale les dimensions de l’aire de contact (largeur Ly et longueur Lx )
varient principalement avec la charge et la pression de gonflage. Lorsque la charge augmente
la longueur augmente tandis que la largeur est limitée par le profil de la bande de roulement.
A iso charge, une augmentation de pression de gonflage se traduit par une réduction de la
surface de contact et donc de la longueur et largeur ADC. La surface effective de l’ADC en
contact avec le sol est fonction du taux d’entaillement de la sculpture et du coefficient de
forme de l’ADC :
S ADC = C forme ent Lx Ly [3]
ent est un taux d’entaillement de la sculpture (ent=1 représente un pneu lisse ).
La distribution de pression le long de l’aire de contact est variable. A faible charge le profil
de pression est de type parabolique tandis qu’à forte charge la pression tend à s’uniformiser.
L’équation du profil de pression est définie par :
2n
2n + 1 FZ ⎛⎜ ⎛ x ⎞ ⎞⎟
p( x) =
1− ⎜
[4]
⎟
2n S ADC ⎜⎝ ⎝ Lx / 2 ⎠ ⎟⎠
où n fonction de la charge
2.3.1.2.3
Equations des efforts longitudinal et latéral
On considère que l’angle de dérive du pneu est supposé suffisamment faible (inférieur à
20deg) pour pouvoir faire la simplification : sin δ ≈ δ .
Les équations sont obtenues en intégrant les efforts d’un élément de NK de la bande de
roulement le long de l’aire de contact et en faisant l’hypothèse d’homogénéité dans la largeur
du pneumatique. N représente les coordonnées de l’élément de la bande de roulement au
niveau du sommet et K les coordonnées au niveau du sol (figure 3).
Les efforts élémentaires sur l’élément NK sont :
dF X = K X ( X K − X N ) dS
et
[5]
dFY = K Y (YK − YN ) dS
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vf 1.0
où dS est la surface élémentaire de l’élément NK et K X et K Y sont les rigidités dans les
directions x et y.
En entrée d’aire de contact X = a = Lx / 2 , l’élément NK est supposé non déformé :
et
XK = XN = a
YK (a ) = YN (a ) [6]
En tenant compte des déformations au niveau des flancs et du sommet, les équations qui
gouvernent les coordonnées du point N ( X N et YN ) dans le repère iso-W sont :
1
2
X N = a − Reff Ωt et YN = δ ' X N − S 2 FY X N
2
[7]
Dans la partie adhérente de l’aire de contact les coordonnées du point K sont :
X K = a − V cos δ ' t
et
YK = YN (a ) [8]
Le taux de glissement est défini par :
Reff Ω − V cos δ '
.[9]
τ=
V cos δ '
Où Reff est le rayon de roulement et Ω la vitesse de rotation angulaire (rad.s-1).
Dans la partie glissante de l’aire de contact, le cisaillement de l’élément NK est fonction du
coefficient d’adhérence gomme/sol. L’équation d’équilibre s’écrit :
[K X ( X K − X N )]2 + [K Y (YK − YN )]2 ≤ [µp ]2 [10]
où µ est le coefficient d’adhérence et p la pression de contact
L’effort total peut être obtenu en intégrant le système d’équation non linéaire (équations 5 à
10) le long de l’aire de contact. Pour des raisons de temps de calcul, il préférable de faire
l’hypothèse qu’il existe un point unique b dans l’aire de contact qui correspond à la
transition entre contact adhérent et contact glissant. Par conséquent au delà de ce point b le
contact reste glissant jusqu’à la sortie de l’aire de contact. Les efforts longitudinal et latéral
peuvent s’exprimer en fonction du point b :
Ly / 2 a
∫ ∫K
FX =
X
( X K − X N ) dS +
− Ly / 2 b
rK τ
Ly / 2 b
∫ ∫ (r τ ) + (1 + τ )
− Ly / 2 − a
2
K
2
β
2
µ ( p,Vg , T ) p dS
[11]
Ly / 2 a
FY =
∫ ∫K
Y
(YK − YN ) dS +
− Ly / 2 b
(1 + τ )β
µ ( p,Vg , T ) p dS
∫
∫
2
2
2
− Ly / 2 − a (rK τ ) + (1 + τ ) β
Ly / 2 b
[12]
K
1
avec β = δ '− S 2 FY (a + X N ) et rK = X [13]
KY
2
Le premier terme des équations 11 et 12 est l’intégrale de l’effort de cisaillement dans la
partie adhérente et le second terme correspond aux efforts de frottement.
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Le point b satisfait la relation:
[K X ( X K − X b )]2 + [K Y (YK − Yb )]2 = [µ 0 p( X b )]2
où µ 0 est le coefficient d’adhérence au point b .
2.3.1.2.4
vf 1.0
[14]
Couplage thermomécanique
Les rigidités et pertes d’un mélange dépendent de la formulation mais aussi de la fréquence,
de l’amplitude des déformations et de la température volumique : Ti . En ce qui concerne le
module de cisaillement de la gomme G, celui-ci diminue lorsque la température augmente
(voir figure 4 ci-dessous).
Figure 2.17: évolution caractéristique du module de cisaillement de la gomme avec la température
volumique.
Si l’on fait l’hypothèse que le module G est constant dans l’épaisseur h de la bande de
roulement la rigidité d’un élément de sculpture est définie par :
G (Ti ) ent
G (Ti ) ent
KX =
AX et
KY =
AY [15]
h
h
AX et AY sont des facteurs d’assouplissement qui prennent en compte l’effet du dessin de la
sculpture sur la rigidité latérale et longitudinale.
Dans le phénomène d’adhérence, deux mécanismes de sollicitation interviennent sous l’effet
d’un glissement relatif entre la gomme et le sol. Le premier est l’excitation fréquentielle du
matériau par indentation : il s’agit d’une déformation de la gomme par glissement sur les
aspérités du sol. Le second est l’adhésion, phénomène de liaison moléculaire. Dans ces deux
cas les caractéristiques visco-élastiques de la gomme, notamment son hystérèse, jouent un
rôle important. Les mesures d’adhérence d’une éprouvette de gomme sur un sol macro et
micro rugueux montrent l’influence significative de la pression de contact, de la température
et de la vitesse de glissement sur le coefficient de frottement (voir figure 5 ci-dessous).
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vf 1.0
Figure 2.18: Evolution du coefficient d’adhérence gomme/sol avec la température et la vitesse de
glissement
D’une manière générale, le coefficient de frottement passe par un maximum avec la
température. De plus ce maximum tend à se déplacer vers les températures plus élevées
lorsque la vitesse de glissement augmente. Sur sol sec lorsque la pression de contact
augmente le coefficient d’adhérence tend à diminuer (voir [13]).
Le calcul de la température dans le contact est donc une étape importante qui permet de
connaître le coefficient d’adhérence local. La température de contact est calculée selon la
théorie de matériaux semi-infinis en contact. En entrée d’aire de contact la température à
l’interface gomme/sol est :
TS e g + Tsol esol
T0 =
[16]
e g + esol
où eg et esol sont les effusivités thermiques de la gomme et du sol. TS est la température de
surface de la gomme en entrée d’aire de contact.
Dans la partie glissante de l’aire de contact, le frottement entre la gomme et le sol est
responsable d’une élévation de la température de contact. Nous faisons l’hypothèse que la
dissipation d’énergie s’effectue à l’interface entre la gomme et le sol sous la forme d’un flux
thermique dont une fraction α est dirigée vers la gomme. Le flux thermique recu par la
gomme s’exprime en fonction du coefficient de frottement, de la pression de contact et de la
vitesse de glissement:
ϕ = α µpV g [17]
Les températures de surface et internes de la bande de roulement sont obtenues par résolution
de l’équation de conduction thermique monodimensionnelle dans l’épaisseur du mélange en
faisant une moyenne dans la largeur du pneu et sur une période de tour de roue (voir [12]). Le
modèle prend en compte les échanges avec le sol par conduction, le flux thermique de
frottement gomme/sol, les échanges avec l’air externe par convection et un terme de
dissipation d’énergie interne dans la gomme lié au cycle de sollicitation
(compression/cisaillement) dans l’aire de contact à la fréquence du tour de roue et de
l’hystérèse du matériau.
Page 34
2.3.1.2.5
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vf 1.0
Effets de la mise en trapèze de l’aire de contact
En présence d’un effort latéral ou d’un angle de carrossage, l’aire de contact se déforme et
prend une forme en trapèze. Cette déformation induit des modifications au niveau du couple
d’auto-alignement mais aussi au niveau du potentiel d’adhérence du pneu.
Concernant le couple d’auto-alignement, celui-ci est constitué de 2 contributions : un moment
N Y lié à la distribution de l’effort latéral le long de l’aire de contact. Un couple N x lié à la
distribution de l’effort longitudinal dans la largeur de l’aire de contact. Ce dernier varie en
fonction de la forme de l’aire de contact.
Le moment N Y peut être directement calculé à partir de l’approche ‘monorib’ en intégrant les
efforts élémentaires transversaux pondérés par la distance au centre de l’aire de contact. Par
contre, le couple N X ne peut être calculé directement et un modèle ad hoc est développé. Ce
modèle s’appuie sur le constat expérimental que l’allure de la courbe N x (δ ) est similaire à
celle de N Y (δ ) , bien que les mécanismes mis en jeux soient différents. Ainsi un modèle
simple est proposé :
Nx = β 1 (Fz )Ny + β 2 (Fz , δ )γ [18]
Les fonctions β 1 et β 2 sont déduites d’un ajustement du couple d’auto-alignement sur les
mesures expérimentales.
La mise en trapèze de l’aire de contact sous l’effet de l’effort transversal et du carrossage
modifie aussi le potentiel d’adhérence du pneu. Les différences de longueur ainsi que les
différences de pression suivant la largeur modifient les points de fonctionnement du matériau
en terme de température et de pression ce qui induit des variations du coefficient d’adhérence
dans l’aire de contact. Ces effets sont modélisés en prenant en compte un écart-type de
pression et de longueur au niveau des équations de la thermique et du coefficient de
frottement le long de l’aire de contact. Les écart-types de pression et longueur sont fonction
du déport latéral du pneu et du carrossage.
2.3.1.3 Application sur un pneu tourisme
2.3.1.3.1
Comparaison TaMeTirE et Magic Formula en latéral pur
Des mesures sur machine MTS flat-track en latéral pur sont réalisées avec un pneu Michelin
Pilot-Sport en dimension 245/45 R18. Les tests sont réalisés selon le protocole “MICH2MF”
(voir [14]) qui prend en compte les points de fonctionnement pneu sur véhicule sur un tour de
circuit de référence. Les deux modèles TaMeTirE et Magic Formula sont ajustés sur ces
mesures. A noter que trois jeux de coefficients sont nécessaires pour le modèle Magic
Formula pour représenter chaque pression de gonflage à 1.8b, 2.6b et 3.4b. Tandis que le
modèle TaMeTirE prend directement en compte l’effet pression de gonflage au travers des
variations de longueur d’aire de contact, des rigidités, de la thermique et du coefficient
d’adhérence.
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vf 1.0
Figure 2.19: Evolution de la rigidité de dérive avec la charge (repère iso-W)
La figure 6 représente l’évolution de la rigidité de dérive avec la charge aux trois pressions de
gonflage. A 1.8b, la rigidité de dérive augmente avec la charge puis diminue à partir de
7000N environ. Lorsque la pression augmente, le maximum de rigidité de dérive se déplace
vers les charges plus élevées. A 3.4b, la rigidité de dérive est toujours croissante dans le
domaine de mesure. Cette évolution s’explique par le fait qu’à faible charge la rigidité de
dérive est pilotée par la dimension de l’aire de contact : une augmentation de la longueur et
largeur ADC induit une augmentation de la rigidité de dérive. A forte charge l’effet des
rigidités de torsion et de flexion du bloc sommet devient important et tend à faire diminuer la
rigidité de dérive du pneu. En augmentant la pression de gonflage, les dimensions de l’aire de
contact diminuent et la rigidité de dérive à faible charge diminue. Par ailleurs la rigidité de
Torsion augmente, de sorte que la rigidité de dérive à forte charge augmente avec la pression.
Ce qui explique la forme plus linéaire de la rigidité de dérive à 3.4b.
La comparaison des deux modèles montrent une amélioration non négligeable du rendu de la
courbe de rigidité de dérive lorsque celle-ci est cintrée (c’est le cas aux faibles pressions). La
figure 7 représente les valeurs du taux d’erreur « TED » des modèles :
< (Yc − Ym) 2 >
* 100 [19]
< (Ym− < Ym >) 2 >
où Yc est la valeur prédite par le modèle et Ym le résultat de mesure.
<.> représente l’opérateur de moyenne statistique.
TED =
Figure 2.20: taux d’erreur (TED) sur la rigidité de dérive. Le premier graphe est le TED moyen pour
les 3 pressions de gonflage. Les trois autres graphes sont les TED pour chaque niveau de pression.
1=Magic Formula ; 2=TaMeTirE. Plus le TED est faible meilleur est le modèle.
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vf 1.0
Figure 2.21: évolution temporelle de l’effort latéral à forte dérive.
La figure 8 montre les résultats des modèles aux fortes dérives et pour plusieurs types de
sollicitation : des balayages triangulaires de -18° à 18° de dérive et des sollicitations en
régime permanent à 10° de dérive pendant 3s. Pour les sollicitations triangulaires les mesures
montrent que l’effort n’est pas symétrique avec la dérive. Dans le cas présent l’effort latéral
est supérieur au cycle aller (valeurs croissante des dérives en valeur absolue) par rapport au
cycle retour. Pour les sollicitations en régime permanent, l’effort latéral diminue
sensiblement au cours du temps. Le modèle TaMeTirE reproduit correctement ces effets du
fait de la prise en compte de l’élévation de température à fort glissement. A contrario, le
modèle Pacejka qui ne prend pas en compte les effets thermiques prédit des efforts
symétriques avec la dérive et constants en régime permanent.
La figure 9 présente les TED des deux modèles pour différentes plages de dérive et aux
différentes pressions de gonflage. Nous constatons un gain significatif de la prédiction de
l’effort entre 5 et 10° de dérive c'est-à-dire autour du maximum d’adhérence. La figure 10
montre en effet la capacité du modèle TaMeTirE à décrire correctement les écarts entre cycle
aller et cycle retour de dérive avec des variations de l’effort maximal de l’ordre de 10 à 20%.
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Figure 2.22: TED pour les angles de derive ( SA ) compris entre 5-10° et pour SA>10°. 1= Magic
Formula; 2= TMTE.
Figure 2.23: effort latéral en fonction de l’ angle de dérive
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2.3.1.4 Conclusion
Un nouveau modèle thermomécanique pneu a été développé pour améliorer la prédiction des
efforts centre roue pour les études comportement véhicule. La principale motivation vient du
constat que les modèles mathématiques de type Magic Formula ne prennent pas en compte
les effets de la température et de la vitesse qui sont significatifs sur les efforts pneu. En
particulier ces modèles ne sont valables, a priori, que dans le domaine de mesure sur lequel
ils ont été ajustés et ne permettent pas des extrapolations fiables lorsqu’on souhaite simuler
des manœuvres véhicule différentes.
Le modèle TaMeTirE calcule les efforts longitudinaux et latéraux en fonction de grandeurs
physiques du pneu : dimension de l’aire de contact, rigidités des flancs, du bloc sommet, de la
bande de roulement ; propriétés de la gomme et des caractéristiques de frottement. Les
caractéristiques du mélange (module, coefficient d’adhérence) sont couplées aux
températures pneu. Les équations sont écrites dans une approche monorib en intégrant les
efforts élémentaires de cisaillement en condition adhérente et frottante le long de l’aire de
contact. En faisant l’hypothèse d’un point de transition unique entre la zone de contact
adhérent et frottant, le système d’équation peut être résolu de manière rapide permettant de
réaliser des simulations véhicule avec des contraintes temps réel.
La comparaison des modèles TaMeTirE et Magic Formula a été réalisée sur un pneu PilotSport à partir de mesures en latéral pur sur machine flat-track MTS.
A faible dérive le modèle TaMeTirE permet d’améliorer la prédiction de l’effort avec la
charge pour les pressions 1.8b et 2.6b alors que le modèle Magic Formula ne rend pas
correctement le cintrage des courbes de rigidité de dérive. Aux fortes dérives, les effets
thermiques deviennent significatifs avec des variations du maximum d’effort latéral jusqu’à
20%. Le modèle Magic Formula donne une valeur moyenne de l’effort à une dérive donnée et
n’est donc pas capable de reproduire les effets transitoires thermiques aux fortes accélérations
transversales. Mais l’une des principales valeurs ajoutées d’une approche thermomécanique
est de pouvoir simuler un large éventail de manœuvres sur véhicule. En effet, à chaque type
de manœuvre véhicule correspond un historique de sollicitation pneu différent et donc des
efforts pneus qui seront variables en fonction de la température et de la vitesse.
References du § 2.3.1
[1] Clark, S.K., « Mechanics of Pneumatic Tires », U.S. Dept. of Commerce, National Bureau of Standards, Nov. 1971.
[2] Sakai, H., « Theoretical and experimental studies on the dynamic properties of tyres. Part I : Review of theories of rubber
friction ». Int. J. of Vehicle Design, vol. 2, no. 1, 1981.
[3] Dixon, J.C., « Tire Suspension and Handling », 2nd edition, SAE Inc, 1996.
[4] Hallum C. « Understanding Race Tires », Motorsports Engineering Conference Proceedings, vol. 1 : Vehicle Design and
Safety, SAE, 1998.
[5] Lacombe J. “Tire model for simulations of vehicle motion on high and low friction road surfaces”, Proceedings of the
2000 Winter Simulation Conference, 2000.
[6] Miyashita, N., Kawazura, T., and Kabe, K., « Analytical model of mu-S curve using generalized skewed-parabola »,
JSAE Review 24 pp87-92, 2003.
[7] Pauwelussen J.P., « the local contact between tyre and road under steady state combined slips », Vehicle System
Dynamics, Vol 41, 2004
[8] Gäfvert, M., Svendenius, J., « A novel semi-empirical tyre model for combined slips », Vehicle System Dynamics, Vol 43,
2005.
[9] Velenis E., Tsiotras P., Canudas-de-wit C., Sorine M., « Dynamic tyre friction models for combined longitudinal and
lateral vehicle motion », Vehicle System Dynamics, Vol 43, 2005.
[10] Holtschulze J., Goertz H., Hüsemann T., « A simplified tyre model for intelligent tyres », Vehicle System dynamics,
Vol 43, 2005.
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[11] Miyashita, N., Kabe, K., « A new analytical tire model for cornering simulation. Part II: cornering force and selfaligning torque », Tire Science and Technology, Vol 34, April-June 2006.
[12] Février,P., Le Maitre,O., « Tire temperature modelling: application to race tires », proceedings VDI 13th Int. Congress
numerical analysis and simulation in vehicle engineering, 27-28 Sept. 2006 Würzburg.
[13] Guo, K., Zhuang, Y., Lu, D., Chen, SK., Lin, W., « A study on speed-dependent tyre-road friction and its effect on the
force and the moment », Vehicle System Dynamics, Vol. 43, 2005.
[14] Buisson, J., « Michelin indoor characterization for handling applied mathematical formulae », 15 Aachener Kolloquium
Fahrzeug und motorentechnik, Aachen 9-11 Oct. 2006.
[15] Sakai, H., Mizuno, M., Oyama, K., Isomura, Y., « The influence of tire heating and surface temperature on vehicle
dynamic behavior », TOYOTA Central R&D, TOYOTA Motor Corp, 2003.
[16] Mizuno M., Sakai H., Oyama K., and Isomura Y., « The development of the tire side force model considering the
dependence of surface temperature of the tire » 18th IAVSD Symposium, Dynamics of Vehicles on road and tracks, Atsugi,
Kanagawa, JAPAN, Aug. 24-30 2003.
[17] Février, P., and Fandard, G., « Thermal and mechanical tire force and moment modelling», Tire.Wheel.Tech, TÜV SÜD
Automotive Gmbh Congress, Munich December 5-6 2006.
2.3.2
Modèle d'hydroplanage
La grandeur caractéristique de l'hydroplanage est le ratio:
S/S0
avec
S
S0
surface AdC en contact sec à la vitesse choisie
surface AdC en contact sec à faible vitesse (sans hydro)
La brique de description de l"hydroplanage consiste donc à prédire la perte de surface de
contact efficace:
S/S0=f(V,Heau,Pg,TES,TEV)
Cette perte de surface est fonction de la vitesse de roulage, de la hauteur d'eau et de la
pression de gonflage, suivant la mécanique décrite au §2.1.2. En outre, les caractéristiques du
pneu TES et TEV (taux d'entaillement surfacique et volumique) jouent elles aussi une rôle de
par leur capacité à stocker ou évacuer l'eau du bourrelet se formant devant le pneu.
Dans notre cas, ce seront celles du pneu ASTM 16" qui seront utilisées.
Effet TES
200
180
Surface [cm2]
160
140
6
120
100
80
10
Modèle fonctionnel
Hydro: perte de
surface
15
fit 6
fit 10
60
40
fit 15
S=f(V,Pg,heau,Tes, Tev)
20
0
0
20
40
60
80
100
Vitesse [km/h]
Figure 2.24: L'hydroplanage en fonction de la vitesse
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2.3.3
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Modèle de viscoplanage
Le modèle de viscoplanage est en cours de développement à l'hure actuelle, c'est pourquoi
nous n'apportons pas de précisions supplémentaires ici.
2.4
Premiers résultats du modèle prototype (partiel)
Nous présentons ici des résultats issus de l'assemblage des premières briques de
modélisation: l'indentation sur sol humide et la mécanique du pneu.
Les effets d'hydroplanage ou de viscoplanage ne sont pour le moment pas incorporé dans ces
résultats.
µ = 0.0078SRT + 0.0184T − 0.253
Modèle TaMeTirE avec loi d’adhérence mu(P,Vg)
GN = 0.014 SRT − 0.188
Plan Bordeaux
0.7
Mu(g)
0.65
Trailer
0.6
modèle
0,7
0,6
Mu
0,5
0.55
0.5
0,4
5Re_5.0_760_40_R1
5Re_5.0_760_40_R2
5Re_5.0_760_40_R3
5Re_5.0_760_40_R4
5Re_5.0_760_40_R5
Fit Pacejka
0,3
0,2
0,1
0.45
0.4
0
0.4
0
0,2
0,4
0,6
0,8
0.45
0.5
0.55
1
Glissement
ADC
R2 = 0.9694
0,8
Modèle pneu
Identification
mu(P,Vg)
Figure 2.25:Principe du modèle partiel prototype
E3A neuf
0.6
0.65
0.7
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Le principe consiste à partir d'une loi d'adhérence locale gomme/sol µ(P,V) typique mesurée
par des moyens de mesure appropriés (Trailer) et à la moduler en fonction des paramètres
sols que l'on peut mesurer facilement: GN, MPD et température. On intègre ensuite cette loi
modulée dans le modèle TameTire du pneu à simuler.
TameTire est ensuite capable de prédire les efforts générés par le pneu sous une sollicitation
donnée (du glissement longitudinal pour l'exemple ici).
Pour la démonstration, on se sert de mesures réalisées en 2007 au LCPC à Nantes, sur des
sols analytiques présentant des caractéristiques de macro- et microrugosité variables,
permettant de générer plusieurs niveaux d'adhérence. De plus, au lieu de moduler avec les
paramètres GN, MPD et température, on se contente pour l'exemple de µSRT et température
(voir loi figure 2.25).
1.2
GN=1.08 measure
GN=1.08 model
GN=0.95 measure
GN=0.95 model
GN=0.55 measure
GN=0.55 model
GN=0.1 measure
GN=0.1 model
GN=0.3 measure
GN=0.3 model
1
0.8
0.6
0.4
0.2
0
-0.2
0
0.1
0.2
0.3
0.4
Pneu Energy 3A
0.5
0.6
0.7
0.8
0.9
1
Différents sols à iso MPD
et iso Heau
Figure 2.26: Application du modèle sur le plan de mesure « Cartographie mécanismes : tests au
LCPC (2007) »
La prise en compte de la mécanique globale du pneu et notamment des effets thermiques
permet de bien reproduire les allures et même les niveaux absolus des courbes µ(G) (seul le
longi est représenté ici).
On atteint largement l'objectif de prédiction du µ à +/-0.1 près, et ce pour des niveaux
d'adhérence très variables. Des progrès sont encore possibles dans la reproduction de la
décroissance du µ après le µmax, notamment pour les adhérences les plus faibles.
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Conclusion
Dans le cadre du projet DIVAS subventionné par l'ANR, Michelin s'est engagé à fournir un
modèle d'adhérence prenant en compte les interactions pneu-chaussée en présence d'eau.
Un scénario de modélisation, basé sur le savoir-faire de Michelin en matière d'adhérence, a
pu être construit. Pour répondre aux questions qui se posent dans le cadre du sujet 2, volet B
du projet DIVAS, il a été choisi de fournir un modèle présentant les caractéristiques /
performances suivantes:
• Prédiction des efforts et de l'adhérence en X-Y couplé, c'est-à-dire en longitudinal,
transversal ou dans des conditions croisées longitudinal + transversal, qui
représentent la grande majorité des cas réels
• Prise en compte de tous les mécanismes physiques de contact gomme/sol en présence
d'eau
o Hydroplanage
o Viscoplanage
o Indentation gomme/sol
o Mécanique pneu: elle pilote la manière dont "travaille" la gomme au sol
(pondération et intensité des 3 mécanismes de contact cités)
o Prise en compte de tous les effets thermiques
• Prédiction d'adhérence visée à +/0.1 près
• On choisit comme référence d'adhérence (pneu pour lequel le modèle effectuera sa
prédiction) un pneu moyen représentatif du marché: le pneu SRTT 16" 225/55R16
(norme ASTM)
Un modèle réunissant tous ces aspects constitue une nette avancée par rapport à l'état de l’art
antérieur, comme l'a montré l'étude bibliographique, notamment de par la prise en compte
couplée de tous les mécanismes et de la mécanique pneu y compris de effets thermiques.
En effet, seule une optique de modélisation physique complète permet d'avoir un degré de
confiance / robustesse suffisant pour se permettre d'extrapoler en conditions réelles et de faire
des estimations prédictives de niveau absolu d'adhérence.
Dans le choix du scénario, l'accent a été mis sur l'applicabilité du modèle pour des conditions
réelles. Ainsi, les entrées retenues sont toutes aisées à obtenir, puisqu'elles se basent sur des
techniques de mesure déjà disponibles ou sur le point de l'être.
Les premiers résultats issus d'une version prototype partielle du modèle (prise en compte de
l'indentation & mécanique pneu, mais sans hydroplanage ni viscoplanage) sont très
encourageants.
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