« Tout a des révolutions réglées et l’obscurité se terminera par un nouveau siècle de
lumière » écrivait D’Alembert dans son Discours préliminaire à l’Encyclopédie. Comme lui
beaucoup de personnes pensent que la lumière prend le pas sur l’obscurité, que le clair doit
chasser l’obscur afin qu’il disparaisse du monde. Mais l’obscur est-il vraiment à bannir de
notre monde ? N’avons-nous pas chacun de nous une part d’obscur ? C’est alors qu’on peut
penser que rejeter l’idée d’obscur du monde serait de nous retirer une partie de notre être
et c’est ici que nous rejoignons les paroles d’Alain Finkielkraut selon lesquelles il faut
« sauver l’obscur ».
Pourtant l’obscur n’est-il pas définit en fonction du clair et n’enlèverions nous pas la
complémentarité qu’ils forment en luttant contre l’obscur ? Interrogeons-nous d’abord sur
le fait que le clair soit aussi privilégié par rapport à l’obscur. Mais qu’est-ce au juste que
l’obscur ? C’est ce qui est du domaine de l’inintelligible, le confus, le difficile à saisir mais
aussi l’erreur, l’illusion, l’aliénation, le non-philosophe, le non-savant, l’ignorance.
Mais alors « sauver l’obscur » reviendrait à se poser la question : faut-il privilégier le
clair à l’obscur ? Et même doit-on laisser une place à l’obscur ? Ce sont les deux grandes
interrogations que nous choisirons de traiter.
Depuis les premiers philosophes, le monde s’est conditionné autour du clair, c'est-à-
dire du côté de la lumière, du soleil, de l’intelligible, de la libération, de la vérité,…
Cela signifierait que l’obscur viendrait s’opposer à la vérité, il représenterait une menace
pour celle-ci. La vérité est la concordance entre le réel et la pensée, l'erreur, dit Platon, est
une ignorance double, c'est-à-dire une ignorance qui ne se sait pas ignorante, une ignorance
doublée d'une illusion. Alessandro Baricco , lui, prétend que « l’obscurité suspend tout. Il ,’ya
rien dans l’obscurité qui puisse devenir vrai. »
« La hâte engendre en tout l'erreur, et de l'erreur sort bien souvent le désastre. » déclarait
Hérodote, historien grec. L’erreur engendrerait donc des « désastres » c'est-à-dire un mal
pour l’homme, pour l’humanité. Il est donc préférable pour nous d’éviter cette obscurité
qu’est l’erreur. Le mythe de la caverne où Platon met en scène Socrate et Glaucon, est une
bonne représentation de l’erreur et même de l’illusion. Le monde de la caverne métaphore
de ces derniers opposés au soleil, le monde de l’intelligible et de la vérité, l’homme ne peut
de fier à ses impressions sensibles et premières, c’est l’éducation de l’esprit qui lui permettra
d’atteindre la vérité et de se débarrasser de l’obscur. L’homme libéré représente le
philosophe ,ou bien la part philosophique en tout homme, un philosophe qui aime la vérité
plus que tous les autres amours.
Cela nous amène donc à nous intéresser au phénomène de la religion. La religion au
départ a été une forme inventée par l’homme afin de répondre aux questions sans réponses,
une forme non rationnelle pour se satisfaire, forme qui impose la présence d’un Dieu, un
être transcendant qui aurait réponse a tout. De la religion il en ressortirait une croyance
dévouée c'est-à-dire une adhésion non rationnelle qui donnerait comme explication l’exploit
d’une divinité. L’homme a donc essayé d’expliquer son ignorance par une idée irrationnelle
qui lui permettait de se sortir de l’erreur et de l’obscurité.
Mais pendant un moment, la religion a été associée à l’obscurantisme. Ce dernier est un
dérivé du latin « obscurus », c’est à dire obscur, ténébreux. L'obscurantisme désigne une
attitude, une opinion ou une doctrine opposée à la diffusion des connaissances et au progrès