La fièvre de la vallée du Rift afaitune première incursionàMayotte,
un département français
La fièvre de la vallée du Rift (FVR)est unearboviroseàcaractère zoonotique[1].Parmi lesanimaux,elleaffecte essentiellement
lesruminants,provoquant avortements chezlesfemellesgravides et mortalité chezlesjeunes animaux[2].
Chezl’Homme,l’infection parlevirus de la FVRest généralementasymptomatique ou caractérisée parunsyndrome fébrilesans gravité.
Cependant dans 1à3%des cas, desformesplussévères (hépatite, encéphalite,rétinite, fièvre hémorragique) peuventconduireaudécès
despersonnesatteintes ou àdes séquellesimportantes. Identifiépourlapremièrefois dans lesannées1930au Kenya, le virus de la FVR
( Phlebovirusde la familledes Bunyaviridae)agagné presquetous lespaysafricains,àl’exception notabledes paysduMaghreb,
en causantparfois d’importantes épizooties/épidémies.En2000,levirus aémergé, horsdel’Afrique,auProche-Orient dans la péninsule
arabique.En2007-2008, lespaysdel’Afriquedel’Est,ycomprisMadagascar, ontconnu desépisodes de FVRimportants et le virus
agagné l’archipel desComores et l’îlefrançaise de Mayotte.Apriori ,cette incursionétait la première dans l’archipel.
Tout acommencé en août 2007avec l’hospitalisationd’unjeunecomorienàMayotte.Cecas,sans historique de voyageenAfrique
de l’Est, démontraitque le virus circulaitdans l’archipel.Compte tenu deséchangesimportants,légauxet illégaux,entre lesComores
et l’îledeMayotte touteproche, lesautorités sanitairesfrançaisesont misenplace un systèmedesurveillanceactivedelaFVR,
doublé d’uneinformationimportante verslepublic. La surveillanceaconcerné (i)les troupeauxde ruminantsprésents sur l’île
pour la partie santéanimaleet(ii)l’analyse sérologiqueet/ou parPCR despatientsprésentant un syndrome fébrileetprélevés
dans le cadredelasurveillancedéjàenplace pour la dengue(DEN),lechikungunya(CHIK)etlaleptospirose pour la partie santépublique.
Àlasuite d’unepremièremiseenévidencesérologique de la circulationimportante du virus de la FVRenmars, maietjuin 2008
(chez23 %des cheptels bovinset69%des cheptels de petits ruminantstestés) et d’un casd’avortement chezunechèvre
(11juillet 2008), le suivide5élevages caprinssentinellesarévélé, lors de la 3 ecampagne de prélèvements,endécembre2008,
5animauxséropositifsenIgM (= infectionrécente)sur les79testés[3].En2009, l’enquêtesérologique àl’échelle de l’îleest toujours
en coursdans ces5élevages caprins. Parailleurs, uneétude rétrospectivesur dessérumsanimauxantérieursàl’épisode2008arévélé
quelevirus étaitprésentàMayotte déjà en 2005(C. Cêtre-Sossah,communicationpersonnelle).
Côtésanté publique, l’enquêtechezdespatientsavec fièvre et DEN-/CHIK- apermisdedétecter10cassans mortaliténimanifestations
neurologiquessévères.Ces 10casont étéconfirmés parRT-PCRet/ou parsérologie ELISAIgM positive, signantpourtous cescas
uneinfection récente. Parmiles 9cas ayantdonnélieuàune enquêteépidémiologique approfondie, 5ont étéencontactavec
desanimaux(éleveur,jardinier,etc.),3n’ont pasété en contactdirectavec desanimauxmais habitaientauprèsdesites de pullulation
de moustiques et le derniercas aindiqué n’avoir aucun contactavec lesanimauxet vivre éloigné de tout gîte larvaire.
Notons quel’hypothèsed’une contaminationvia l’ingestiondelaitcru aété retenuepourundes malades[4].
Cetépisode de FVR2007-2008dans l’îlefrançaise de Mayotte pose la question de l’originedecette émergence(avec toutefois
unesuspicion forteenfaveur de l’introduction illégale d’animauxmaladesenprovenancedes îles voisines, voiredel’Afrique de l’Est),
démontrelapertinencedel’analyse de risque faitepar l’Afssa,àlademande de la Directiongénéraledelasanté (DGS), sur l’introduction
possible du virus de la FVRdans lesîlesfrançaisesdel’OcéanIndienetrappellel’importance de se tenir prêt face àune possible
émergenceduvirus de la FVRdans d’autresparties du monde,ycomprisenFrancemétropolitaine [3]. Compte tenu de la capacité
du virus de la FVRàs’étendre au-delàdeson foyer d’origine, deschangements climatiquesactuels pouvantmodifierlarépartition
desvecteursdelaFVR et/ouleur compétenceetdes échanges internationauxtoujours en augmentation [5], la vigilancefaceàlafièvre
de la valléeduRiftest doncdemise.
Michel Pépin, Maëlle Dampfhoffer, Afssa, Laboratoired’étudesetderecherchesenpathologiebovine et hygiènedes viandes,Lyon
Véronique Chevalier,Catherine Cêtre-Sossah,CIRAD, Montpellier
Bibliographie
[1]Flick R.,BouloyM. (2005).RiftValleyfever virus.Current Molecular
Medicine, 5(8):827-834.
[2]Pépin M.,GuiguenF., ChevalierV., BouloyM. (2008). La fièvre de
la vallée du Rift:prochaine maladieinfectieuse émergenteenFrance?
Bulletin desGTV,Hors-série 2008: 21-28.
[3]RapportAfssa (2008). Risquedepropagationdelafièvre de la vallée
du Rift (FVR)dans l’OcéanIndien(La RéunionetMayotte). 1-124.
(accessible sur www.afssa.fr)
[4]SissokoD., GiryC.,Gabrie P.,Tarantola A.,Pettinelli F.,ColletL.,
D’ortenzio E.,Renault P.,PierreV.(2009).RiftValleyfever,Mayotte,
2007-2008. Emerging Infectious Diseases,15(4):568-570.
[5]DufourB., Moutou F.,HattenbergerA.-M.,RodhainF.(2008).
Global change: impact, management, risk approachand health
measures-the case of Europe.Revue Scientifique et Technique de l’OIE ,
27(2): 529-550.
GP d’Albopictus
z
14 -BulletinépidémiologiqueN°33
2 12 69BE 33. in dd 1 411/ 0 9 / 0 91 6 : 2 3 : 5 1