• Repères
apparaît en effet logique que les malades
puissent avoir leur mot à dire sur les
essais auxquels il leur est proposé de
participer.
Plusieurs aspects peuvent à l’évidence
bénéficier de « l’expertise » que constitue
le vécu de la maladie. Tout d’abord, la
qualité de l’information écrite qui est
délivrée au moment de la proposition
d’inclusion dans un essai. Ensuite,
les modalités de prise en charge des
participants pendant la réalisation de la
recherche, dont les contraintes doivent
être compatibles avec la vie quotidienne,
même si celle-ci est altérée par la
maladie. Enfin, il est permis de penser
que les patients peuvent aussi avoir un
avis sur la pertinence d’une recherche
au regard notamment des questions
éthiques qu’elle peut poser.
un e P r o C é D u r e b i e n é t a b L i e
L’INCa s’est donc attaché à identifier
quels seraient les moyens les plus
opérants pour consulter les patients sur
les recherches cliniques qu’il soutient. Il
existe depuis 1998 un Comité de Patients
spécifiquement et régulièrement formés
à la recherche, animé conjointement
par la Ligue Nationale Contre le Cancer
et la Fédération Nationale des Centres
de Lutte Contre le Cancer (FNCLCC),
sous l’impulsion notamment des
Drs Françoise May-Levin et Jean
Genève. C’est donc naturellement que
l’Institut s’est tourné vers cette forme
d’organisation de la représentation des
patients.
Depuis treize ans, ce Comité, qui réunit
40 malades ou proches bénévoles, a
relu plus de 200 protocoles selon une
procédure bien établie. Pour chaque
protocole, deux à trois relecteurs sont
mandatés. Ils s’appuient pour leur
analyse sur des « grilles de relecture »,
l’une s’appliquant aux essais cliniques,
l’autre aux études biologiques, qui ont
été progressivement perfectionnées
au fil des années et des évolutions
réglementaires. Ces grilles portent
essentiellement sur les notices
d’information. Elles visent à déterminer
si toutes les informations nécessaires
pour les patients sont présentes, en
particulier concernant les objectifs
et les contraintes de l’essai, les effets
indésirables attendus et les modalités
de leur prise en charge, et la présence
ou non d’un plan de traitement et
de surveillance. Enfin, elles portent
(suite de la page 1)
sur l’accessibilité et la clarté des
informations présentées. Au travers
de ces grilles, les patients relecteurs
sont en mesure d’avoir une analyse
tout à la fois critique et objective des
notices d’informations. Ils peuvent
assortir leurs observations de
commentaires. Les retours des patients
sont ensuite adressés au promoteur
et à l’investigateur principal de l’essai
concernés qu’ils sont invités à prendre
en compte lors de la finalisation du
protocole. L’ensemble de la procédure,
de l’envoi des protocoles à la réception
des avis des patients par le promoteur,
s’effectue dans un délai maximal de
trois semaines.
L’expérience accumulée au fil des
années montre que la consultation du
Comité de Patients de la Ligue et la
FNCLCC a indéniablement contribué
à améliorer la qualité des notices
d’information remises aux malades
auxquels il est proposé de participer à
un essai clinique.
un a C C o r D D e P r i n C i P e
Fort de ce constat, l’INCa a donc
officiellement proposé en 2010 à la
Ligue et à la FNCLCC que le Comité
de Patients soit le lieu d’expression de
l’avis des patients sur tous les protocoles
soutenus par l’Institut. Plusieurs
réunions préparatoires ont eu lieu l’an
dernier pour préparer la mise en œuvre
de cette consultation, mais aussi pour
convaincre l’ensemble des acteurs
de la recherche de sa pertinence. Ces
réunions ont notamment rassemblé
les fédérations hospitalières, les
groupes coopérateurs (c’est-à-dire
des associations de médecins visant
à réaliser des essais cliniques) et
les laboratoires pharmaceutiques
impliqués dans la recherche clinique en
cancérologie. Un accord de principe a
été émis par chacun de ces acteurs en
faveur d’une consultation systématique
du Comité de Patients pour chaque
protocole qu’ils lanceront à l’avenir.
Début 2011, le projet a été présenté par
le Dr Auleley de l’INCa aux membres du
Comité de Patients. Ceux-ci n’ont pas
manqué d’exprimer leur intérêt, voire
une certaine forme d’enthousiasme,
considérant qu’il s’agit là d’une forme
de reconnaissance de tout le travail
accompli et de l’expertise acquise. Il n’en
reste pas moins que le projet représente
un défi particulièrement ambitieux sur
le plan organisationnel puisque ce sont
pas moins de 250 protocoles environ
qui devront désormais être relus chaque
année par le Comité, soit davantage
que le nombre de ceux que le Comité
a examiné en treize ans ! Comme l’a
expliqué Guiletta Poillerat, responsable
de l’action auprès des malades à la
Ligue, « cela demande une nouvelle
organisation afin que le Comité puisse
disposer des moyens et des outils
nécessaires pour répondre à ce défi ».
D’autant que d’autres défis tout aussi
importants attendent le Comité dans
un avenir que l’INCa souhaite proche.
L’Institut souhaite en effet que la
consultation des patients ne se « limite »
pas à la relecture des protocoles.
Il entend mettre en œuvre d’autres
actions visant notamment à permettre
une participation des patients dans la
conception et la sélection des essais,
dans le suivi de ceux-ci une fois lancés,
et dans la communication des résultats
obtenus. Des réflexions ont d’ores et
déjà été engagées en ce sens.
Grâce à la volonté de l’INCa, les malades
ont ainsi la possibilité, au travers du
Comité de Patients, d’être véritablement
impliqués dans les différentes étapes de
la recherche clinique en cancérologie
en France. C’est une avancée
particulièrement importante, susceptible
de permettre une bonne adéquation
entre les objectifs des scientifiques et
des médecins d’une part, les besoins et
les attentes des patients d’autre part. Il
ne reste plus à ces derniers qu’à relever
ce nouveau challenge !