
L’Enlèvement au sérail est né de la volonté de deux hommes de créer un théâtre musical en 
langue allemande, celle de l’empereur du Saint Empire romain germanique, roi d’Autriche et 
de Hongrie, JosephII et celle de Mozart pour endiguer, affronter l’invasion déferlante de 
l’opéra buffa italien et de l’opéra comique français, sans rival. 
A l’origine le terme de Singspiel, littéralement, jeu chanté (jeu pris dans le sens médiéval du 
terme : pièce de théâtre.) désigne une comédie musicale typiquement germanique, en 
langue allemande qui enchaîne dialogues parlés et structures musicales simples. Pratiqué 
essentiellement en Allemagne du Nord, son caractère populaire s’atténue peu à peu vers 
1750, dans les productions élaborées de Johann Adam Hiller, 
données à Leipzig durant cette période. A Vienne, dans les années 1770, il n’existait pas 
d’équivalent des Singspiele de Hiller. Plus tard, ce terme fut même employé dans l’annonce 
des opéras italiens de Mozart ! 
Dans sa conception politique et esthétique, Joseph II, en monarque éclairé du Siècle des 
Lumières,envisage de faire du théâtre et de l’art national un facteur de développement 
culturel de la nation allemande et décide, en 1778, d’associer au Burgtheater, le Théâtre 
national de Vienne, une section d’opéra allemand appelée Singspiel national. 
Voilà qui sert le projet de Mozart et sa conception d’un opéra allemand: Et moi je tiens (je 
suis partisan de) aussi pour l’opéra allemand : même s’il me coûte plus de peine, je l’aime 
encore mieux. Chaque nation a son opéra : pourquoi nous autres allemands, ne l’aurions-
nous pas ? La langue allemande n’est-elle pas aussi chantante que la française et que 
l’anglaise ; plus chantante que la russe ? Bon ! J’écris à présent un opéra allemand pour moi 
(lettre à son père, Vienne, 5 février 1783). 
 
Mozart et Gottlieb Stephanie le jeune, son librettiste 
Gottlieb Stephanie le jeune adapte pour Mozart le texte de Christoph Friedrich Bretzner 
(1748-1807). 
Et puis, je ne sais, mais dans un opéra, il faut absolument que la poésie soit la fille 
obéissante de la musique. Pourquoi les opéras bouffes italiens plaisent-ils donc partout, 
avec tout ce que leurs livrets renferment de misérable ? […] C’est que la musique y règne 
sans partage et dès lors on oublie le reste (à son père, Vienne, 13 octobre 1781). 
Mozart se comporte en dramaturge inspiré, clairvoyant, décidé, et trouve en Stephanie le 
jeune un librettiste flexible, soumis à toutes ses suggestions et propositions d’adaptation : 
L’opéra commençait par un monologue, et j’ai prié M. Stephanie d’en faire une petite ariette 
et aussi, après la petite chanson d’Osmin, au lieu de laisser bavarder ensemble les deux 
personnages, d’en tirer un duo. Osmin, qui n’avait dans le livret original, que cette seule 
petite chanson à chanter, et rien d’autre que le trio et le final, je lui donné un air au premier 
acte, et un autre au second. Cet air, je l’ai entièrement suggéré à M. Stephanie, même, 
l’essentiel de la musique en était déjà achevé avant que Stephanie en sût un mot. Je ne puis 
rien composer de plus parce que toute l’histoire pour l’instant est remaniée sur ma demande, 
il est vrai. Tout le monde fait la moue quand il s’agit de Stephanie, mais il n’en arrange pas 
moins fort bien son livret pour moi, et comme je veux, à un cheveu près. 
Il intervient aussi au niveau du vocabulaire et de la prosodie, non sans humour : Le ‘hui’ je 
l’ai changé en ‘schnell’, ce qui donne « doch wie schnell schwand meine Freude » (Mai ma 
joie bien vite s’en est allée). Je ne sais pas à quoi pensent nos poètes allemands : peut-être 
ne comprennent-ils rien au théâtre, mais en ce qui concerne l’opéra, ils ne devraient pas 
faire parler leurs personnages comme s’ils s’adressaient à des cochons. 
Mozart est donc un compositeur passionné de théâtre : Ma seule distraction est le théâtre. 
Je voudrais que tu pusses voir, ici, une tragédie ! D’une façon générale, je ne connais aucun 
théâtre (en dehors de Vienne) où l’on représente remarquablement tous les genres de 
spectacles ; mais c’est le cas ici. (A Vienne). (Lettre du 4 juillet 1781 à sa soeur). 
 
Un sujet dans le vent 
Cependant, le sujet de L’Enlèvement au sérail n’est pas plus de Bretzner, de Stéphanie le 
jeune, que de Mozart : l’amour réciproque d’un homme et d’une femme, nerf de leur 
libération d’un despote, est dans l’air de ce temps de L’Aufklärung, de ce Siècle des