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manquer même lorsqu’elle semble humainement hors de portée. On
ne devrait jamais entendre, dans des établissements supposés
« chrétiens », des remarques du genre : « Avec un tel, on ne fera jamais
rien de bon. » « Qu’est-ce que vous voulez, avec tel milieu social, avec
telle famille, on n’arrive à rien. » La pédagogie chrétienne s’enracine
dans l’espérance d’une victoire, déjà acquise dans le Christ, sur toute
forme de mort, et donc aussi, d’échec.
2. Ce que cela raconte de Dieu
Ce que je viens de dire du cœur de la foi chrétienne change aussi notre
vision a priori de Dieu – la christologie nous conduit à la théologie. Si
Jésus est tellement important pour nous, ce n’est pas seulement pour
la consistance du personnage historique. C’est que sa destinée
singulière raconte à tous les âges ce qu’est Dieu, l’identité de Dieu.
Nous croyons qu’en Jésus, en ce qu’il dit et fait, lorsqu’il soigne, guérit,
relève, enseigne, est injustement condamné et exécuté, et ressuscite, il
y a Dieu qui se donne à voir et presqu’à toucher, qui se raconte.
Or, ce qui est constant dans le comportement du Christ, c’est, comme
des signes de sa victoire sur toute forme de mort, les gestes de vie qu’il
prodigue : guérir les petits, les redresser, les réhabiliter, quitte à
s’opposer aux puissants de son temps. Qu’est-ce que Dieu ? Non pas
une espèce de super-machin super-géant super-goldorak super-
puissant au-dessus de nos têtes, vaguement menaçant. C’est quelqu’un
qui, par amour, se donne entièrement et, comme dit encore Paul,
« s’anéantit » devant l’autre (Ph 2, 6-11), non pas affirmant
péremptoirement sa présence, mais s’effaçant en quelque sorte devant
l’autre, pour que l’autre soit, soit reconnu, soit estimé.
Si la pédagogie catholique se veut témoin, à son tour, de ce Dieu-là, ce
ne sera donc pas en affirmant avec faste et péremptoirement sa
présence, en se faisant bastion inexpugnable de la vérité, etc., mais en
se penchant elle aussi vers les sans grade et les petits pour les relever,