bonheur étant défini comme le plaisir et l’absence de douleur. L’utilitarisme n’est pas
à comprendre comme le voudrait le terme « utilité » en français, c’est-à-dire « ce qui
sert à », mais au sens de « utility », c’est-à-dire une préférence, en l’occurrence celle
de telle ou telle personne. Cette utilité ne se réfère qu’à elle-même, c’est la fin
déterminée de cette manière qui est moralement bonne, la fin étant seulement
subjective. « Par "bonheur" on entend le plaisir et l’absence de douleur ; par
"malheur" [unhappiness], la douleur et la privation de plaisir. […] Le plaisir et
l’absence de douleur sont les seules choses désirables comme fins. »4 Au niveau
collectif, l’utilitarisme de Bentham préconise la « maximisation des biens », c’est-à-
dire le plus grand bien pour le plus grand nombre. C’est cette fin qui justifie
l’utilisation des moyens et les rend moralement bons. Mais si la fin est uniquement
subjective, autorisant tous les moyens pour y arriver, cela ne signifie-t-il pas que l’on
limite la moralité à l’efficacité et à la préférence ? Comment alors définir le « bien » et
le « mal », si le bien moral est mon bien ?
Dans ce contexte d’autonomie à l’anglo-saxonne, chacun est maître absolu de
son corps. Son corps lui appartient, il est sa propriété, sa privacy, personne ne peut y
avoir accès. Il est capable de réfléchir en fonction de ses objectifs personnels et
d’agir en fonction de ce qui lui semble le plus adapté. Le rôle du médecin est de
traiter en respectant ces droits du patient : « La tâche médicale ne se fonde pas sur
la nature de l’action thérapeutique, mais sur le droit du sujet à recevoir des services
qu’il juge conformes à ses besoins ; d’où la priorité donnée à l’autonomie. »5
Le patient a ainsi le droit d’être traité de la manière qu’il juge adaptée et
conforme à ce qu’il souhaite, à ce qui lui semble acceptable à ce moment donné de
sa vie. Si le médecin interfère dans ces choix, son comportement est qualifié de
paternaliste, et est injustifié.
L’autonomie est érigée en principe par T. Beauchamp et J. Childress qui le
formulent de la manière suivante : « en tant qu’obligation négative : les actions
autonomes ne devraient pas être soumises à des contraintes extérieures »6 et « en
4 J. S. Mill, L’utilitarisme, Paris, Garnier Flammarion, 1968, p. 49.
5 H. Doucet, Au pays de la bioéthique. L’éthique biomédicale aux Etats-Unis, op cit., p. 76.
6 T. L. Beauchamp, J. F. Childress, Les principes de l’éthique biomédicale, Paris, Les Belles Lettres, 2008, p.
102.
B. Birmelé – Espace de réflexion éthique région Centre – 06/11/2015