Rueil-Malmaison, le 11 octobre 2016 L’accord OPEP susceptible d’accélérer le rééquilibrage du marché L’analyse d’IFP Energies nouvelles Le Brent entre 40 et 50 $/b depuis avril ème Le Brent s’établit à un peu plus de 45 $/b (Fig. 1 à 2) en moyenne au 3 trimestre 2016, prix équivalent à celui observé au trimestre précédent. La moyenne sur 9 mois atteint 42 $/b contre 52 $/b en 2015. En supposant un prix compris entre 40 et 60 $/b en fin d’année, la moyenne 2016 se situerait entre 43 et 45 $/b (Fig. 3). 1 L’évolution des stocks pétroliers américains, la progression de la production OPEP ainsi que les révisions en baisse par l’AIE de la croissance de la demande pétrolière mondiale (de +1,4 à +1,2 Mb/j) ème ont constitué des paramètres importants pour orienter la tendance du marché au 3 trimestre. Les incertitudes diverses portant par exemple sur l’offre libyenne, l’évolution du taux du dollar et bien sûr la stratégie de l’OPEP ont aussi impacté le prix du pétrole. Cela explique les oscillations du prix du Brent entre 40 et 50 $/b depuis avril dernier. Un rééquilibrage du marché en cours mais fragile Ces variations reflètent la question de fond concernant les délais pour aboutir au rééquilibrage du marché, qui est actuellement caractérisé par un excès d’offre par rapport à la demande. Quand ce rééquilibrage sera confirmé, le prix du pétrole va changer de repère. Il ne sera plus défini par le prix de destruction des excédents mais par un prix en ligne avec les coûts de la dernière unité nécessaire pour équilibrer le marché. Trois facteurs principaux peuvent modifier cet équilibre : la demande, l’offre OPEP et l’offre américaine d’huiles de schiste. Sur la base des évolutions anticipées à ce jour, ce rééquilibrage est en marche. Les excédents d’offre du marché sont estimés désormais à 0,7 Mb/j en 2016 contre un record à 1,7 Mb/j en 2015. Pour 2017, sous certaines hypothèses, un déficit est envisageable au second semestre (- 0,9 Mb/j) sous réserve en particulier de l’application de l’accord OPEP de septembre. Ces niveaux de déficit ou d’excédent sont équivalents à 1 % environ de la demande mondiale de pétrole. Cela signifie que tout changement à la marge de l’offre ou de la demande aura des impacts importants sur le prix. Un accord OPEP décisif… s’il est appliqué L’OPEP, après une réunion consultative à Alger, a organisé une réunion extraordinaire le 28 septembre. Elle a acté l’objectif d’un plafonnement de la production OPEP entre 32,5 et 33 Mb/j, soit 0,5 à 1 Mb/j en moins comparé à la production du mois d’août (33,5 Mb/j). Cela signifie l’élimination de la hausse de la production OPEP observée depuis janvier. Elle a en effet progressé de 0,6 Mb/j depuis janvier (Fig. 10), du fait de l’Arabie Saoudite (0,4 Mb/j), et de façon plus surprenante en si peu de temps de l’Iran (0,6 Mb/j). L’effet pour le marché a été atténué par les baisses de production en Libye et surtout au Nigeria. La décision de l’OPEP est importante puisqu’elle signifie le retour à la régulation du marché, stratégie mise entre parenthèses en novembre 2014. Ce retournement s’explique par les risques de stagnation des prix autour des 40 $/b sous l’effet de la guerre des parts de marché et par les pressions budgétaires croissantes pour les pays producteurs. Un prix à 50 $/b permet une hausse des revenus de 25 % par rapport à 40 $/b, ce qui représente une différence non négligeable de l’ordre de 150 milliards de $ (G$) pour l’OPEP et de 40 G$ pour la Russie. 1 Abréviations - OPEP : Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (14 membres, 41 % de la production mondiale) - AIE : Agence Internationale de l’Energie - EIA : Energy Information Agency - FMI : Fonds Monétaire International. Au-delà de cette annonce, il reste à définir les modalités d’applications de l’accord non seulement au sein de l’OPEP, mais également en essayant d’impliquer des pays non OPEP à l’image de la Russie, de l’Oman, de l’Azerbaïdjan ou du Kazakhstan. Un accord ne parait pas hors de portée alors que le niveau de la baisse de la production à consentir n’est pas très important. Il faudra toutefois avoir confirmation du soutien des pays réticents ou indécis par le passé, à savoir l’Arabie Saoudite, l’Iran et l’Irak. Cet accord, portant sur des volumes relativement modestes, sera en tout état de cause décisif pour accélérer le rééquilibrage comme indiqué dans le communiqué OPEP. Ainsi, en supposant une production OPEP de 32,8 Mb/j, soit 0,7 Mb/j de moins par rapport à celle du mois d’août, le marché serait équilibré au premier semestre 2017 et en déficit au second (Fig. 9). Cela pourrait se traduire par une pression croissante sur les prix toutes choses égales par ailleurs… en particulier concernant la production américaine. L’offre américaine, un enjeu de moyen terme Un consensus semble se dessiner sur le niveau de la production américaine en 2017. L’AIE retient un niveau de 12,5 Mb/j en 2017 équivalent à celui de 2016 et en retrait de 0,4 Mb/j par rapport à 2015. L’agence américaine de l’énergie (EIA) envisage également une stabilité de la production globale l’an prochain. Les évaluations IFPEN concernant la production d’huiles de schiste (Fig.12) montrent aussi une relative stabilité quelles que soient les hypothèses retenues sur le niveau de l’activité de forage. La production américaine ne serait donc pas, sauf surprise, un élément de déstabilisation du marché en 2017. En revanche, les modèles IFPEN mettent en évidence, au-delà de 2017, des évolutions très 2 divergentes en fonction du niveau de l’activité de forage. Cette activité est relancée depuis mai 2016 avec une mobilisation croissante des appareils de forage (+ 34 %). Si, sous l’effet de la hausse des prix, cette tendance se poursuit, la production pourrait progresser significativement dès 2018. En retenant l’hypothèse réaliste de 750 appareils de forage actifs contre 1300 en octobre 2014 et 330 actuellement, la hausse de la production atteindrait 1,4 Mb/j. Ce volume est supérieur à la hausse moyenne annuelle de la demande pétrolière mondiale (Fig. 7). Un risque de pression baissière sur le prix, à l’image de ce que l’on a connu en 2015, n’est donc pas à exclure. Ainsi, en fonction du niveau de production des huiles de schiste, le prix pourrait évoluer entre le coût de la dernière unité d’huiles de schiste mobilisée (50 $/b, 60 $/b ?) et un prix de destruction des excédents si l’offre devenait trop importante. Des niveaux de prix très différents en fonction des hypothèses retenues Suivant les hypothèses retenues concernant la demande ou les niveaux de la production de l’OPEP et des États-Unis, le prix pourra connaître des variations assez marquées. Il convient aussi de ne pas sous-estimer les effets d’une situation économique et financière mondiale jugée fragile par le FMI dans une déclaration datant du 5 octobre. Par ailleurs, la décision de la FED sur les taux d’intérêt, mainte fois reportée pour le moment, pourra aussi avoir des répercussions sur le marché pétrolier par le biais direct de la hausse probable du taux du dollar (mouvement inverse sur le pétrole – Fig. 6) et des effets indirects sur l’économie mondiale. Cet environnement peut aboutir à des corrections financières violentes et à des révisions de la croissance de la demande pétrolière. Côté offre, le premier enjeu pour le marché concerne l’aboutissement ou non de l’accord OPEP, permettant de retirer 0,7 Mb/j environ du marché. En cas d’échec et de retour à une politique de défense des parts de marché, des prix du pétrole relativement faibles sont envisageables. L’Arabie Saoudite comme l’Iran et l’Irak disposent ou disposeront de capacités supplémentaires de production au cours des prochains mois (Fig. 11). Ils pourront être encouragés à les valoriser si un compromis n’est pas trouvé. A l’inverse, si l’accord est confirmé et appliqué, un prix d’équilibre à 50 $ voire plus devient crédible. C’est le niveau de prix atteint depuis l’annonce de l’accord OPEP. Pour le moment, les marchés à 2 Certains experts évoquent l’effet d’une couverture prix à cette période quand le pétrole se situait à 50 $/b. 3 terme tablent sur des prix du Brent à près de 55 $/b en 2017 contre 43 à 45 $/b en 2016 (Fig. 3). C’est dans la fourchette haute de ce qui est envisagé pour 2017 depuis un an (45 à 55 $/b). Au-delà de 2017, le potentiel de hausse de la production de l’OPEP et des Etats-Unis sera déterminant pour orienter le prix du pétrole. Il n’est pas impossible qu’il soit suffisant pour maintenir un prix modéré. Un choc pétrolier par insuffisance d’offre sous l’effet de la baisse des investissements dans le secteur de l’exploration/production (Fig. 18), n’est, dans ce contexte, peut-être pas une fatalité. Les impacts de l’évolution du prix du pétrole Si le prix du pétrole devait atteindre 55 $/b en 2017, cela représenterait une progression de 25 % par rapport à ce qui est anticipé pour 2016 (43/45 $/b), et un retour au niveau des prix de 2015 (52 $/b). Cela resterait largement en dessous des prix de 100 à 110 $/b observés entre 2011 et 2014. En France, le prix des carburants (Fig. 14) serait impacté à la hausse à hauteur de 8 ct€/l environ (hors évolution de la TICPE). La hausse du prix du pétrole aurait des répercussions plus limitées sur le prix du gaz en Europe (Fig. 16) dont l’évolution dépend de plus en plus des conditions d’équilibre du marché et de moins en moins du prix du pétrole. Enfin, la facture « pétrole et gaz » (Fig. 15) s’établirait en 2017 autour de 40 G€ pour la France comme en 2015, contre 33 G€ en 2016. Elle resterait inférieure de 16 G€ à celle de 2014. Pour le secteur pétrolier et parapétrolier, les interrogations sur le niveau futur de l’offre OPEP et américaine sont lourdes de conséquence. Elles pèsent en effet sur la stratégie à définir et sur les investissements à consentir. Certains secteurs, en particulier les plus capitalistiques comme les huiles lourdes ou l’offshore profond, pourraient être durablement impactés. Cela signifie une adaptation inévitable de la stratégie et la nécessité d’imaginer des solutions technologiques nouvelles. Service de presse : 01 47 52 62 07 - [email protected] 3 Il convient de rappeler que les cotations à terme, très corrélées aux prix de court terme, ne définissent pas des prévisions. 111 50 80 80 80 60 60 87 62 52 74 42 60 40 41,7 40 82 80 65 52,3 40 47 44 20 37 30 1,47 1,39 1,33 1,39 1,28 1,33 1,33 1,11 1,12 20 IFPEN base Reuters EuroDow Stoxx50 Jones- 2008/2015marché européen Fig. 1 - 5 2015 : 4,1 % 2016 -4,6 % (6 oct.) 4 000 120 90 90 3 500 105 80 90 Euro Stoxx 50 12 000 60 10 000 50 2 000 60 40 8 000 40 1 500 45 30 6 000 30 d-16 135 10 140 o-16 a-16 j-16 IFPEN base Reuters 0 j-15 J-16 130 20 WTI Bro ad index Bilan offre/demande 2012/2018 - 9 3,0 3,0 Mb/j 2,5 1,5 n-16 s-16 o-16 j-16 a-16 j-16 a-16 125 WTI O-1 6 A-1 6 J-16 O-1 5 J-15 A-1 5 J-15 m-16 50 Hausse production pétrole 2012/2018 - 8 Mb/j 115 120 0 O-1 6 J-16 A-1 6 J-16 O-1 5 J-15 A-1 5 J-15 15 0 0 2,0 30 Brent 500 10 0 75 1 000 20 WTI 2 000 110 60 2 500 4 000 Echelle inversée 70 j-16 3 000 70 Broad index o-15 14 000 100 80 Dow Jones Broad index & WTI - 6 100 j-15 18 000 16 000 Brent €/b a-15 Dow Dow Jones Jones - marché 2008/2015américain Fig. 1- 4 2015 : -2,3 % 2016 : 6,5 % (6 oct.) Bre nt $/b m-16 Eur o / $ j-16 0 Moyenne ann uelle 20 000 10 f-16 Jul-16 0 Oct-16 Apr -16 Jan-16 Jul-15 Oct-15 Apr -15 Jan-15 Jul-14 Oct-14 Apr -14 0 Mb/j 2,0 2,0 1,0 1,5 1,0 0,5 1,0 0,0 0,5 0,0 -1,0 0,0 -2,0 -0,5 -0,5 -1,0 -3,0 -1,0 -1,5 Monde Production pétrole16 OPEP - 10 Aoûtde/ janvier 0,6 0,4 6 0,4 5 0,1 0,1 0,2 7 4 0,0 MB/j OPE P 32,8 Mb/j OPE P 31,8 Mb/j OPE P 33,8 Mb/j 12,7 14 4,8 0,6 MB/j 6,0 0,6 5,0 0,8 Stocks histori que Production de pétrole des bassin de schiste 2007/2020 Mb/j - 12 Production et objectif - Irak et Iran - 11 4,7 3,9 Non OCDE OPE P (Hyp. 2 017/18) Non OPEP 4,4 3,6 OCDE 12,3 12 12,3 10 9,5 8 3 -0,2 -0,1 -0,1 -0,2 -0,4 OPE P Ven ezu ela EAU Ar. S. Qatar Libye Kuwait Iran Irak Gab on Ang ola Equ ate ur Indoné sie Aoû t / janvier 16 Nigeria -0,4 -0,6 Algé rie Perspectives de production de pétrole/LGN 45 44 43 Moy enne 2016 20 IFPEN base Reuters Hausse demande pétrolière 2012/2018 - 7 Marché pétrolier 2012/2018 99 112 100 99,0 Moy. 2016 - Hyp. fin 2016 : 37/47/57 $/b - 3 60 109 97 $/b 100 Bre nt spot Environnement financier & monétaire Brent annuel 2008/2016 en $ et € et €/$ - 2 120 Jan-14 Brent $ & €/b 2016 (au 6 octobre) Brent spot, mensuel et annuel - 2014/16 - 1 120 2 6 1 4 0 6,4 5,3 4,7 4,1 2 0 200 7 Irak Iran 200 9 201 1 Sc. Haut Median 201 3 201 5 201 7 201 9 Sc. Ba s Pet + LGN E IA 1,49 1,29 1,08 0,23 0,30 0,47 0,51 0,55 EU LT Pétrole + spot NBP Henry Hub Japon (Moyenne GNL) Brent 21 21 8 5 20 10 6 23 4 4 25 29 9 28 7 22 9 + CO2 CTS UK + CO2 CTS UK + CO2 ETS Europe + CO2 ETS Europe Coût elec charbon Rdt 35 % Coût elec gaz Rdt 55% 201 6 201 5 201 4 201 3 201 2 201 6 201 5 201 4 201 3 201 6 16 9 8 11 37 40 33 7 12 10 37 34 27 29 21 20 17 200 9 201 0 201 1 201 2 201 3 201 4 201 5 201 6 201 7 2016 /17: base 44/54 $/b / 4,5/5,5 $/MBtu Pétrole Pro duits Gaz naturel Pétrole & gaz Mrd€ 600 400 300 200 100 201 2 201 4 41 17 Investissements EnR et pétrole/gaz - 18 0 201 2 18 13 500 40 42 10 201 0 56 11 10 23 700 €/MWh 55 50 20 200 8 10 Gazole 40 30 9 20 201 6 201 5 201 4 201 3 201 2 Essence S P95 4 50 9 14 12 6 2 60 46 38 30 66 13 40 Coût de l'électricité en Europe - 17 Gaz Charbon Prix du gaz naturel - $/MBtu - 16 22 20 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 68 62 60 0 201 1 200 9 0,0 1,29 1,35 1,54 1,35 1,57 1,50 201 0 0,38 0,50 0,28 0,2 0,41 0,4 Mrd€ 70 50 0,6 Brent €/l Gaz / électricité Europe / Invest. ENR / Pétrole gaz 80 1,15 0,8 1,34 1,15 1,00 1,0 1,27 1,2 1,40 1,4 Fioul Lour d / B rent 1,35 1,35 1,6 Essence / Brent 1,21 Gazole / B rent Facture Française pétrole & gaz - 15 Prix du Brent et des produits pet. (TTC) - 14 1,8 €/l 200 8 Prix produits et facture énergie France Ratio produits pet. sur Brent - 13 1,8 1,7 1,6 1,5 1,4 1,3 1,2 1,1 1,0 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0 200 4 22% 200 6 200 8 201 0 51% 201 2 201 4 201 6 53% Inve stisse men ts ENR Inve stisse men ts exp lo P rod. p étro le & ga z % = ENR/Pé tro le g az