Saura-t-on s`adapter à un climat qui change?

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Saura-t-on s’adapter à un climat qui change?
Stéphane Hallegatte
Centre International de Recherche sur l’Environnement et le Développement, ENPC
École Nationale de la Météorologie, Météo-France
Les impacts observés
Un exemple de changement
Changement de la couverture
neigeuse du Mt. Kilimanjaro,
entre 1912 et 2003.
IPCC, 2007
Ce que l’on sait des impacts
futurs
1. Ecosystèmes et biodiversité
2. Ressources en eau douce
Conséquences sur la France: ETE & AUTOMNE
Sur la France en été & automne
Points cerclés de noir: accord de 85%
des modèles sur le signe
Changement des
Précipitations (%), 2046/2065
Zoom sur la France: travail de Julien Boé (Cerfacs)
Changement des
Débits (%), 2046/2065
3. Agriculture et sécurité alimentaire
Conséquences sur l’agriculture: des effets de
seuil et un besoin d’adaptation
Secteur agricole
fait vivre 90% des 22 millions d’hb,
assure 80% emplois,
représente 45% du PIB et 90% des exportations
Culture du café assure 65% des
apports de devises étrangères
Production totale et sécurité alimentaire
régionale
•  Pour des réchauffements limités (<3°C), on s’attend à:
–  De faibles gains de production dans les pays développés;
–  De fortes pertes de production dans les pays en voie de
développement (notamment l’Afrique);
–  Un effet limité (<5%) à l’échelle globale.
•  Au-delà, des pertes nettes à l’échelle globale.
•  Les pays pauvres seront dépendants des marchés mondiaux de
biens agricoles.
•  Problème de sécurité alimentaire, et d’accès à ces marchés.
•  Les pays pauvres agricoles devront trouver d’autres secteurs
d’exportation
•  Conclusion: c’est un problème de distribution, pas de production
4. Infrastructures et sociétés
La canicule de 2003: la fraîcheur de 2080?
Modèle
Modèle moyenné sur 50 ans
Observations au 20ème siècle
L’adaptation des villes aux fortes températures
En supposant la mise en place de mesures spécifiques pour limiter l’îlot
de chaleur urbain
Un refroidissement de 2 à 3°C
Source: CNRM, Météo-France (V. Masson, G. Pigeon, A. Lemonsu, C. Marchadier)
Et le lien avec les réductions d’émissions
Des émissions
plus faibles à
Barcelone qu’à
Atlanta car:
1 – Les distances
parcourues sont
plus courtes
2 – L’usage des
transports en
commun est plus
simple
Barcelona a 99 km
de lignes de métro.
Source: Alain Bertaud
Pour fournir le
même service, il
faudrait 3400 km à
Atlanta…
Les changements des précipitations imposent
des changements de plans d’urbanisme
La crue de temps de retour de 200 ans à Mumbai, en Inde
Aujourd’hui (à gauche), en 2080 (à droite)
Inondation plus importante
dans les zones inondables
Nouvelles zones inondées
Quel plan d’urbanisme?
-  Mumbai a 18
millions d’habitants
-  50% de la
population habitent
dans des
bidonvilles et
travaillent dans le
secteur informel.
- Dharavi est le
plus grand
bidonville du
monde
Credit: Joe Harder Buxtehude
Montée du niveau de la mer:
un risque de migrations massives?
En France aussi
Zones urbanisées vers Agde
Zones à risque d’inondation en raison
de la montée du niveau de la mer
Superposition des deux cartes: zones
urbanisées à risque
La fonte du permafrost et les conséquences
sur les infrastructures
Permafrost degradation can
result in ground subsidence,
alter drainage
characteristics and
infrastructure stability, and
can result in increased
emissions of methane
Méthodologies d’évaluation économique
Scénarios socio-économiques et d’émissions
Scénarios climatiques (GCMs + descente d’échelle)
Impacts sectoriels ou régionaux
Agriculture
Adaptation
spontanée
Risques et
assurance
Adaptation
spontanée
Impacts nonmarchands
…
Stratégies
planifiées
d’adaptation
Adaptation
spontanée
Total des impacts directs sectoriels
Impacts socio-économiques avec interactions
sectorielles
Impacts hors des
frontières et
propagations spatiales
Les évaluations agrégés ne sont pas
convaincantes
• 
De W. Nordhaus to N. Stern, les coûts économiques d’un changement
climatique de +2°C ont toujours été estimés autour de quelques pourcents
de PIB. Certains (R. Tol, R. Mendelsohn) prédisent même des bénéfices
jusqu’à une augmentation de 2°C.
Le GIEC a toujours été très prudent avec ces estimations:
1.  Les évaluations d’impacts sont incomplètes, et mettent en jeu des
jugements de valeur sur lesquels il n’y a pas de consensus.
e.g., quelle est la valeur d’un paysage, d’une espèce animale? Quel
poids accorder aux générations futures?
2.  Le changement climatique peut engendrer des instabilités politiques,
en particulier entre groupes à l’intérieur des pays.
3.  Les méthodes économiques utilisées ne sont pas capable de prendre en
compte des effets indirects des chocs, et en particulier des
catastrophes naturelles
e.g., Peut-on tolérer un cyclone Katrina par an aux USA?
4.  Ces méthodologies ne sont pas capable de prendre en compte
l’adaptation et ses limites de manière satisfaisante.
Méthodologies d’évaluation économique
Dépend du scénario
Scénarios socio-économiques et d’émissions
Scénarios climatiques (GCMs + descente d’échelle)
Impacts sectoriels ou régionaux
Agriculture
Adaptation
spontanée
Risques et
assurance
Adaptation
spontanée
Impacts nonmarchands
Adaptation
spontanée
…
Stratégies
planifiées
d’adaptation
incomplet
Adaptation
et ses
limites
Jugements de valeurs
Total des impacts directs sectoriels
Effets indirects
Impacts socio-économiques avec interactions
sectorielles
Impacts hors des
frontières et
propagations spatiales
Conclusions
•  La gravité des impacts futurs ne peut être prédite.
•  Elle va dépendre:
–  de nos efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre,
–  de comment on anticipe les besoins d’adaptation,
–  des trajectoires de développement dans les pays pauvres.
•  Le changement climatique n’est pas un problème isolé des autres
problématiques environnementales, sociales, économiques.
•  Séparer le changement climatique de l’accès à l’eau, de la sécurité
alimentaire, des risques naturels, n’a aucun sens.
Le rôle de l’adaptation
Définition de l’adaptation
•  « l’ensemble des évolutions d’organisation,
de localisation, d’activités, et de techniques
que les sociétés devront opérer pour limiter
les impacts négatifs de ces changements et
maximiser leurs effets bénéfiques »
•  Attention à la situation de départ, non optimale!
Quatre caractéristiques
•  IncertitudeS:
–  Émissions futures, climat global, climat local, impacts,
technologies, évolutions socio-économiques, etc.
•  Dynamique
–  On ne s’adapte pas à un nouveau climat, mais à un climat
qui change
•  Inertie
–  L’adaptation touche à des secteurs inertes (p. ex.,
l’urbanisme), et demande donc une anticipation: risque de
maladaptation.
–  Peu de retour sur expérience
•  Bifurcations vs. changements marginaux
–  On pense l’adaptation comme « maintenir l’existant ».
Parfois, il vaut mieux effectuer une reconversion.
Un exemple d’adaptation: la Nouvelle Orléans
• 
• 
• 
• 
Localement, le niveau de la mer a augmenté de 50cm au XXème siècle
Après chaque inondation, les défenses ont été améliorées
Aucune procédure d’analyse et de gestion du risque n’a été mise en place
En 2005, 80% de la ville est inondée, et 1800 personnes perdent la vie.
Flood
Risque
Flood
Flood
Flood defence
improvements
Time
From
Muir-Wood
et al.
(2006)
From
Muir-Wood
et al.
(2006)
Un autre exemple d’adaptation: la Hollande
•  Localement, le niveau de la mer a augmenté de 20cm au XXème siècle
•  Après l’inondation de 1953, des processus de gestion du risque ont été
mise en place (Delta Commission, Delta Plan, Delta Work)
•  Depuis, ces risques sont suivis et contrôlés régulièrement
•  Le changement climatique est pris en compte naturellement
Selon comment les aléas
sont gérés, ils se
transforment – ou non –
en castastrophes.
La gestion du risque
n’est pas (seulement) un
problème financier ou
technique, c’est un
problème institutionnel.
Uncertainty, dynamics, and inertia
•  Adaptation will require technical know-how and substantial funding.
•  Adaptation requires also anticipation, especially in sectors with longterm investments:
–  Water management infrastructure (lifetime: up to 200 years);
–  Energy production and distribution infrastructure (up to 80 years);
–  Transportation infrastructure (50 to 200 years) ;
–  Natural disaster protections (50 to 200 years);
–  Urbanism, housing and architecture (25 to 150 years).
•  These infrastructures represent about 300% of GDP in developed
countries; in France, more than 1000 billion euros will be invested in
these sectors in the next 10 years.
•  In developing countries, these infrastructures are currently being built
and it is urgent to take climate change into account.
Adapting to a changing climate
Climate analogues in 2070, Hadley Centre Model, SRES A2
After Hallegatte, Ambrosi, Hourcade (2007)
It is neither more difficult nor expensive to design a building for the Cordoba
climate than for the Paris climate. But it is more difficult (and more expensive)
to design a building able to cope with both climates.
Coping with uncertainty
Climate analogues in 2070, Météo-France Model, SRES A2
After Hallegatte, Ambrosi, Hourcade (2007)
The « optimal » strategy is very different depending on the model that is used.
We need new decision-making methods to cope with this new problem.
IPCC, 2007
Rechercher les stratégies « robustes »
• 
• 
• 
• 
• 
• 
Sélectionner les stratégies sans regret, qui sont positives même en l’absence
de changement climatique:
–  Améliorer les normes de construction des bâtiments;
–  Plan d’occupation des sols plus restrictifs;
Favoriser les stratégies réversibles et flexibles:
–  Plan d’occupation des sols plus restrictifs;
–  Réduction de la demande en eau vs. réservoirs supplémentaires;
Investir dans les “marges de sécurité”:
–  Surdimensionnement des infrastructures de drainage à Copenhague.
Réduire la durée de vie des investissement:
–  Les temps de rotation dans le secteur forestier;
–  Qualité des bâtiments dans les zones à risque;
Favoriser les stratégies financières et institutionnelles:
–  Alerte précoce, évacuation et assurance vs. digues;
–  Planification de long terme: le California Water Plan et ses exercices de
prospective à 25 ans;
Tenir compte des synergies et conflits entre les stratégies d’adaptation et avec
les réductions d’émissions:
–  Digues, tourisme et biodiversité;
–  Neige artificielle et disponibilité en eau;
–  Désalement de l’eau de mer, consommation d’énergie,
et prix du carbone
Examples of adaptation options
Des politiques publiques pour
l’adaptation?
Rôle des pouvoirs publics
•  L’atténuation produit un bien public: sans action
publique, les acteurs privés n’agissent pas
suffisamment
•  L’adaptation produit un bien largement privé: on
peut attendre une action des acteurs privés
•  Il faut définir la répartition des rôles entre les
pouvoirs publics et les acteurs privés.
Justification de l’action publique
•  Accès insuffisant à l’information & routines de
décision
–  Production d’information (recherche)
–  Diffusion de l’information
–  Détection des signaux précurseurs
–  Cohérence vs. autonomie
•  Barrières à l’adaptation
–  Besoin de coopération entre acteurs privés
–  Besoin de coopération entre acteurs privés & publics
–  Rôle des normes et réglementations (ex., génie civil)
Justification de l’action publique
•  Externalités de l’adaptation
–  Les actions des uns ont des impacts sur les autres
•  Agriculture & eau
•  Air conditionné & confort en ville
–  Modification des normes & réglementations
–  Création/modification des institutions (ex. PPP, ou
gestion des risques)
•  Pauvreté et contraintes de budget
–  Solidarité & rôle protecteur des pouvoirs publics
•  Investissements directs de l’Etat et des
collectivités
Mise en œuvre pratique
•  Une approche parmi les nombreuses possibles
•  Une série d’étapes:
1- Définition des scénarios climatiques & socioéconomiques
2- Identification des impacts & mesures possibles
3- Définition des priorités (ne pas tout faire!):
–  Impacts proches
–  Impacts lointains et sûrs, adaptation lente
–  Impacts lointains et incertains, adaptation lente et
impacts potentiels graves.
Mise en œuvre pratique
4- Analyse multi-critère
–  Plusieurs métriques:
• 
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Coût économique
Conséquences sanitaires & santé
Conséquences sur la qualité de vie
Conséquences sur les inégalités
Conséquences sur les écosystèmes
–  Analyse de la cohérence avec d’autres objectifs
politiques – recherche de synergies
–  Analyse de la robustesse des mesures à l’incertitude
climatique et socio-économique
–  Première sélection des mesures prometteuses
Mise en œuvre pratique
5- Sur les mesures sélectionnées:
–  Analyse plus poussée (ex. analyse coût-bénéfice)
–  Sélection des mesures
–  Analyse de la cohérence
6- Définition des indicateurs d’efficacité
7- Revue régulière de l’efficacité, et ajustement
des mesures
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