le
Syncrétisme
spéculatif
selon
les
Tantras
(Suite)
7
par
P.
MASSON-OURSEL
Nous
avons
déjà
présenlP
dans
cette
revue
quelques
réflexions
sur
les
Tantras,
littérature
religieuse
de
l'Inde
à
partir
du
IX"
siècle.
En
comparaison
des
hymnes
védiques
et
des
riles
Brahmaniques
(Dharma),
c'est
une
spéculation
tardive
mais
qui
prolonge
des
ferveurs
anciennes.
Pourquoi
qualifie-t-on
de
çuktus
les
textes
tenirillues
'!
Parce
que,
répétons-le,
ils
révèrent
ce
dieu
majeur
de
['Inde
médiévale.
Çiva
sous
l'aspect
de
sa
ça/di.
Ce
mot
désigne
la
«
puissance»
du
dieu
absolu,
celte
énergje
par
laquelle.
;,scète
exemplaire,
il est,
en
même
lemps,
généraleur.
La
plastique
le
représente
comme
un
époux
«
en
acte»,
mais
la
dogmatique
ne
commet
à cc
propos
aucune
confusion:
certes
pas
la
méprise
qui
fait
supposer
aux
Européens
l'acte
charnel.
CeUe
pan';dre
qu'éLreinl
le
dieu
n'est
pas
une
déesse;
elle
esl
moins
et
bien
plus.
Non
divinilé
féminine,
mais
symbole
de
la
capacité
génératrice
chez
l'unique
et
lotal
enrrendreur
te>
La
prélcnduc
obscénité
que
c1éI1on~'aient
naguère
de
chasles
ind
ianis
tes
n'a
clone
existé
que
tbns
l'incol11
préhen-
sion
d'un
symbole
chlssique.
Méprise
que
pourraient
com-
mettre
des
non-Européens
s'ils
se
figuraient
que
les
chré-
tiens
adorent
des
colombes
puisqu'ils
ont
symbolisé
par
ce
gracieux
oiseau
le
Sainl-Esprit.
Cetle
apparente
déité
que
le
dieu
élreint
Sl~
peut
interpréter
COlllme
ressouvenir
ob-
sédant
de
la
«Grande
Déesse
»,
unique
et
lolale
que
révé-
rait
l'Eurasie
aux
temps
préhistoriques.
Pondeuse
unique
et
universelle,
comme
la
reine
d'une
ruehe,
elle
enfanlait
sans
époux.
Lui,
Ci
va,
fut
substitué
par
des
Aryas
de
mœurs
non
«Matriarcales
»,
mais
«Patriarcales»
il
l'entité
fémi-
nine
comme
entilé
masculine
qui
se
suffirait
à
elle-même
dans
le
rôle
cr~ateur.
L'effigie
féminine
qui
lui
esl
adjointe
a
pour
seul
but
de
faire
comprendre
que
la
fécondation
est
8
app?rente,
la
génération
masculine
seule effective,
seule
véridique
aux
yeux
des
mystes.
*
**
Autre
syn,crétisme,
plus
étrange
encore.
Beaucoup
de
Tantras
sOilt ;B,ouddhistes,
selon
les
dogmes
du
Grand
Véhi-
cule
(Mahayana).
N'ignorons
pas
que
le
Bouddhisme
tibé-
tain
et
mongol
s'était
chargé
d'Hindouisme;
les
Hindous
reprenant
leur
hi
en
en
s'annexant
eomme
équivalente
de
la
carrière
des
Jivanmuktas
(délivrés
vivants)
celle des
Bodhi-
. ,
saUvas', ces
apprentis
houdhas
qui
volontiers
relardent
leur
libération
ultime
(Nirvana)
pour
gratifier
les
vivants
de
leur
bienveillance.
Comprenons
que
ce
Brahmanisme
tardif
est
contempo-
rain
d'un
Bouddhisme
lui-même
tardif;
et
que
des
no-
tions
doctrinales
analogues
s'imposèrcnt
dans
les deux.
re-
ligions;
à
tel
point
qu'on
se
peut
demander
si elles
dif-
fèrent
encore.
Expulsé
de
l'Inde
au
lemps
des
invasions
musulmanes,
le
Bouddhisme
s'était
implanté
au
Tibl't
et
en
Asie
eentrale
;
il
Y
était
devenu
Ioule
la
pensée
de
peu
pies
assez
frustes,
incapables
de
subtilités
religieuses
à
j'in-
dienne.
Il
y
était
devenu
religion
et
théologie
alors
qu'avant
notre
ère,
dans
l'Inde
propre,
il
avai
t
été
une
frénésie
de
salut
indépendante
de
tout
culte.
IIIille
ans
plus
tare!
j'Inde
tr:l(Llionncllc
récupère
l'hérésie
qu'elle
~wait
honnie
el
l'as-
si
mjh~
emllme
un
culte
analogue
aux
siens.
En
effet
le
culte
de
Vishnu,
eelui
de
Civa
étaient
de-
.,
venus
de
puissants
monolhéismes,
surtout
pour
permettre
aux
Brahmanes
de
faire
front
conlre
le
monothéisme
mu-
sulman.
On
dirait
que
ie
Bouddhisme,
après
son
évolution
en
Asie
centrale,
se
pique
au
jeu.
Ill'évère
d'autant
moins
le
Çakyamuni
qu'il
conçoit
quantité
de
Bodhisal.lv:Js et
même
de
Bouddhas,
yéritable
polythéisme
qui
se
simplifie
(si J'on
peut
dil'c)
il
mesure
qu'il
se
complique.
Toutes
ces
hiéra-
tiques
figures
ne
peuvent-elles
s'interpréter
comme
des
aspeels
multiples
d'un
même
Bouddha
originaire,
Adi-
buddha,
fondement
primordial
de
toute
réalité,
comme
Vishnu
et
Çiva
pour
les
Vaishna'Jas
et
les
Çaivas?
Dans
l'Inde,
l'abstractioIl
métaphysique
est
toujours
prête
à
ins-
pirer
une
religion.
(.4
suivre.)
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