B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 Chapitre 2 Le cadre d’analyse de l’économie européenne. Introduction. Appréhender le fonctionnement d’une économie comme la nôtre ne peut se faire, dans un premier temps, que dans une optique macro-économique, à partir d’agrégats synthétiques. Dans ce but, il est nécessaire de disposer d’un résumé chiffré de la vie économique de la nation, et d’un outil permettant son élaboration : c’est le système de Comptabilité Nationale. La comptabilité nationale fournit une description simplifiée des phénomènes fondamentaux de la production, la distribution, la répartition et l’accumulation des richesses. Elle permet d’établir des interactions entre les différents agrégats élaborés pour mesurer ces phénomènes. Elle a pour fonction : de fournir des informations statistiques sur les phénomènes économiques. D’agréger ces données pour les analyser et fournir un diagnostic sur l’activité des périodes passées. De permettre la mise au point de politiques économiques. De fournir des prévisions cohérentes aux agents économiques. Depuis 1998, la Comptabilité Nationale des pays de la zone Euro – 17 à ce jour – a été harmonisée. Cette harmonisation était nécessaire pour permettre une gestion appropriée de la monnaie unique européenne – l’euro – par la Banque Centrale européenne (BCE) et faciliter les comparaisons internationales, à partir d’un cadre commun : définition identique des acteurs du jeu économique, les secteurs institutionnels, et des opérations (sur biens et services, de répartition, financières) qu’ils effectuent dans ce cadre, présentation identique des documents de synthèse récapitulant l’ensemble de ces opérations sur une période de temps donnée (le trimestre ou l’année) : Comptes des secteurs institutionnels, Tableau Economique d’ensemble (TEE) et Tableaux Entrées-Sorties (TES). 1. Les secteurs institutionnels. Les multiples acteurs de la vie économique ont été regroupés en grandes catégories homogènes, les secteurs institutionnels, entre lesquels circulent des flux de biens et services (flux réels), des flux de revenus et des flux financiers de toute nature (flux monétaires). L’ensemble de ces flux constitue ce que l’on appelle un circuit économique. Le Système Européen de Comptabilité Nationale (SECN) a retenu 5 secteurs institutionnels résidents (regroupant les agents économiques exerçant de manière durable leur activité principale sur le territoire économique de la France), auxquels s’ajoute le secteur du Reste du Monde. Le classement d’un agent économique dans l’un ou l’autre de ces secteurs dépend de sa fonction principale (produire – dans un but lucratif ou non –, consommer, financer, répartir…), et de l’origine des ressources principales dont il dispose (ventes de produits, revenus du travail, prélèvements obligatoires, contributions volontaires, subventions…). 1 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 Tableau 1 : Les secteurs institutionnels Secteur Sociétés non-financières (SNF) Fonction principale Produire des biens et des services non financiers vendus sur un marché, à un prix couvrant au moins 50% des coûts de production Consommer, et, produire des biens et des services non financiers marchands (entrepreneurs individuels), ou non (par exemple production de services domestiques par les ménages ordinaires). Ménages Sociétés financières (SF) Institutions assimilées de crédit Ressources principales Vente de la production. Rémunération du travail (essentiellement salaires) et revenus du patrimoine. Transferts effectués par les autres secteurs. Produit de la vente de leur production (entrepreneurs individuels. Elles comprennent les institutions de crédit et les sociétés d’assurance. et Financer, c.a.d. collecter, transformer et répartir les disponibilités financières. Mettre en rapport les agents à capacité de financement (prêteurs) avec les agents à besoin de financement (emprunteurs). Fonds provenant des engagements contractés : Dépôts à vue, à terme, bons de caisse, obligations… La rémunération des services d’intermédiation financière se fait par prélèvement d’intérêts, commissions et agios. Sociétés d’assurances Assurer, c.a.d. transformer les Primes d’assurances contractuelles, risques individuels en risques cotisations volontaires des assurés. collectifs (= mutualisation des risques) en garantissant le paiement d’une indemnité, proportionnelle au niveau de couverture choisi, en cas de réalisation d’un dommage (logique assurantielle). Administrations publiques (APU) Produire des services non marchands destinés aux ménages ou à la collectivité. Effectuer des opérations de répartition de revenu (mutualisation des risques, logique de redistribution verticale – ex. : ménages aisés vers ménages modestes – et horizontale – ex. : bien-portants vers malades, célibataires vers familles…-). Montant des prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales obligatoires) effectués sur les autres secteurs. des services non Montant des contributions Institutions sans but lucratif Produire marchands destinés à des groupes volontaires des ménages et au service des ménages de particuliers ou des ménages. versements effectués par les (ISBLSM) administrations publiques. Le reste du monde 2 Secteur institutionnel fictif créé pour regrouper les opérations entre unités résidentes et unités non résidentes. B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 Les sociétés non financières comprennent : les sociétés (et les quasi-sociétés privées : ex. : succursales d’entreprises étrangères en France). Les sociétés publiques (et les quasi-sociétés publiques) de grande taille, dont la fonction est de produire des biens et des services vendus sur un marché (ex. : Régie Renault, La Poste, Orange). Les grandes entreprises nationales (EDF, SNCF, RATP). Les offices publics d’HLM, les sociétés d’économie mixte, les régies, les syndicats communaux, les établissements pour handicapés…. Les organismes privés sans but lucratif au service des entreprises (le MEDEF et autres syndicats patronaux), les organismes privés dont le produit des ventes au public couvre au moins 50% de leurs coûts de production, les comités d’entreprise, les CROUS… Le secteur des ménages rassemble : les ménages ordinaires. les personnes physiques vivant dans des ménages collectifs (maisons de retraite, foyers pour travailleurs, maisons d’arrêt…). les entrepreneurs individuels, dont le statut juridique ne distingue pas le patrimoine professionnel du patrimoine privé. Le secteur des sociétés financières inclut : les établissements de crédit bancaire et assimilés : Banque de France, Fonds de stabilisation des changes, banques recevant du public des dépôts à moins de deux ans, caisses d’épargne et de prévoyance, Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), sociétés financières et institutions financières spécialisées. Les Organismes de placements collectifs (OPC) qui comprennent : les Organismes de Placements Collectifs en Valeurs Mobilières (OPCVM : Sociétés d’investissement à capital fixe, SICAF, ou à capital variable, SICAV, et Fonds Communs de Placements, FCP) ; Sociétés Civiles de Placements Immobiliers (SCPI). Les entreprises d’assurances (distincts des organismes publics de protection sociale, classés dans le secteur des Administrations publiques) : Organismes d’assurances-dommages, ou d’assurance-vie, mutuelles complémentaires (auxquelles l’adhésion n’est pas obligatoire), Fonds de pensions. Les auxiliaires financiers et d’assurances : courtiers d’assurances ou de crédit, conseillers en placements, bourses de valeurs mobilières ou de placements, sociétés d’émissions de titres. Le secteur des Administrations Publiques comprend : L’Etat et les autres administrations centrales. Les administrations publiques locales : régionales, départementales, municipales, et les organismes qui en dépendent (bureaux d’aide sociale, crèches, écoles, lycées et collèges…). Les administrations de Sécurité Sociale : régimes publics d’assurance sociale et les organismes qui en dépendent (hôpitaux publics, cliniques privées sous contrat, œuvres sociales intégrées aux organismes de sécurité sociale), mutuelles auxquelles l’adhésion est obligatoire (MNEF ou SMEBA par exemple pour les étudiants), régimes directs d’employeurs (mineurs, SNCF). Les entreprises publiques dont la production est cédée à un prix ne couvrant pas 50% des coûts de production. Dans le secteur des ISBLSM on classe enfin : les cultes, les syndicats de travailleurs, les partis politiques, les fondations à caractère humanitaire, plus généralement toutes les associations Loi 1901. Le secteur du Reste du Monde rassemble l’ensemble des agents économiques non résidents avec lesquels les agents des 5 secteurs institutionnels précédents entrent en relation dans le cadre de leurs échanges, quelle que soit le secteur institutionnel auquel ils appartiennent. 2. Les opérations. Dans le cadre de leur activité, l’ensemble des agents économiques effectue un certain nombre d’opérations dans le cadre de leur activité. On distingue 3 groupes d’opérations : 3 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 les opérations sur biens et services. Les opérations de répartition. Les opérations financières. 2.1 Les opérations sur Biens et Services. Elles décrivent l’origine des biens et services disponibles sur le marché intérieur, et la manière dont ils sont utilisés par les agents économiques. 2.1.1 Les ressources. Les ressources en produits proviennent de deux sources : la production intérieure, et les importations. 2.1.1.1 La production intérieure. Elle est définie simultanément comme l’activité des agents résidants sur le territoire économique de la France, permettant de fournir des biens et des services en combinant capital et travail1, et comme le résultat de cette activité (les biens et services produits) : La production est dite « marchande » lorsque les biens et services sont vendus à un prix couvrant plus de 50% des coûts de production2. Elle est évaluée d’abord au prix de base, c’est-à-dire le prix facturé par le producteur, hors taxes, augmenté des subventions sur les produits éventuellement reçues (qui permettent d’abaisser le prix facturé des produits). Elle est « non marchande » lorsqu’elle est composée de services proposés à titre gratuit ou à un prix couvrant moins de 50% des coûts de production. Produits par les Administrations Publiques (APU), ou les Institutions sans But Lucratif au Service des Ménages (ISBLSM), ces services répondent à une logique de besoins collectifs (santé, éducation, justice, défense nationale, aide sociale, assistance aux plus démunis, etc.). Ils sont évalués aux coûts de production (coût des consommations intermédiaires, rémunérations des salariés cotisations sociales comprises, amortissement du capital utilisé, impôts nets de subventions sur la production). La production « pour emploi final propre » concerne les biens ou services qu’une unité institutionnelle (une entreprise par exemple) produit et conserve pour sa propre consommation finale ou sa formation brute de capital fixe3. Leur valeur est mesurée au prix de base des produits similaires vendus sur le marché. 2.1.1.2 Les importations. Les importations sont les ressources en produits provenant du Reste du Monde, et entrant définitivement sur le territoire économique de la France 4. Il s’agit des biens et des services fournis par des agents non-résidents5 à des résidents6. Les importations de biens sont mesurées « coût, assurances, fret » (CAF), c’est-à-dire au prix de base augmenté du coût des assurances et du transport jusqu’à la frontière française (ou le port ou l’aéroport de déchargement), droits de douane non inclus. Les importations de services sont évaluées 1 Les processus purement naturels sans intervention ou contrôle humain ne font pas partie de la production. 2 Production des Sociétés Financières (SF) et non Financières (SNF), et des entreprises individuelles (EI). 3 Production des jardins familiaux destinés à l’autoconsommation des ménages, services de logement produits par les ménages propriétaires des logements qu’ils occupent. 4 Le territoire économique de la France est constitué de la France Métropolitaine (l’Hexagone) et des départements d’outre-mer (DOM). Depuis 1998, les Territoires d’outre-mer (TOM) sont classés dans le secteur « Reste du Monde ». Agents non résidents : agents économiques dont l’activité principale s’exerce de manière habituelle et durable dans le Reste du Monde, sans considération du secteur institutionnel auquel ils sont susceptibles d’appartenir, et quelle que soit leur nationalité. 5 Agents résidents : agents économiques exerçant leur activité principale, de manière habituelle et durable, sur le territoire économique de la France, quelle que soit leur nationalité. 6 4 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 au prix d’acquisition (toutes taxes, marges commerciales comprises, moins les subventions éventuellement perçues sur ces produits : il s’agit du prix réellement payé par l’acquéreur.) 2.1.2 Les Emplois. Les emplois correspondent aux utilisations des ressources précédentes pendant la période considérée (en général l’année civile). On distingue les emplois intermédiaires et les emplois finaux. 2.1.2.1 Les Emplois intermédiaires. Encore nommés « consommations intermédiaires », ils sont constitués de l’ensemble des produits transformés ou entièrement consommés, intégrés dans une production finale au cours du processus de production (matières premières, circuits électroniques, autres biens intermédiaires, électricité, huiles, fuel, autres produits consommables…). Tous les secteurs qui produisent utilisent des consommations intermédiaires. Pour calculer la production totale d’un pays au cours d’une année, il paraîtrait logique d’additionner la production effective de l’ensemble des agents économiques. Cependant, on comptabiliserait ainsi plusieurs fois les mêmes productions : une fois en production finale d’un agent, et une ou plusieurs fois en consommations intermédiaires d’un ou plusieurs autres agents : en effet, la valeur des consommations intermédiaires est intégrée au prix de base de la production finale de ces derniers. Pour éviter cela, chaque producteur est amené à déduire de la valeur de sa production effective (au prix de base) celle de ses consommations intermédiaires : on obtient ainsi sa valeur ajoutée, qui mesure sa participation réelle à la création de richesse au cours de l’année. En conséquence, au niveau de l’ensemble de l’économie : Production effective totale de l’ensemble des agents producteurs – Total des consommations intermédiaires (Aux prix de base) ________________________________________________________________ = Somme des valeurs ajoutées (aux prix de base) Prenons un exemple. Soit trois entreprises : Entreprise A (entreprise de pêche) Valeur de la production finale au prix de base : 2000 euros, Dépenses courantes nécessaires à une campagne de pêche : 1000 euros Valeur ajoutée : 2000 – 1000 = 1000 euros La production de l’entreprise A est intégralement vendue à l’entreprise B. Entreprise B (production et conditionnement de filets de poisson) Valeur de la production finale au prix de base : 5000 euros, Poissons acquis auprès de l’entreprise A : 2000 euros Autres consommations intermédiaires (emballages, électricité, etc.) : 500 euros Valeur ajoutée : 5000 – 2500 = 2500 euros La production de l’entreprise B est enfin intégralement vendue à l’entreprise C. Entreprise C (élaboration de plats cuisinés à partir de filets de poisson) Valeur de la production finale au prix de base : 10000 euros Filets de poissons acquis auprès de l’entreprise B : 5000 euros Autres consommations intermédiaires (épices, légumes, farines, électricité, etc.) : 1000 euros Valeur ajoutée : 10000 – 6000 = 4000 euros La richesse nouvelle réellement créée par ces trois entreprises n’est pas égale à la somme de leurs productions effectives finales (17000 euros) mais à la somme de leurs valeurs ajoutées (7500 euros) : on évite ainsi de comptabiliser 3 fois la valeur des poissons, et 2 fois la valeur des filets de poisson, ce qui gonflerait artificiellement la valeur de la production… 5 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 En ajoutant à la somme des valeurs ajoutées « au prix de base » d’une part la TVA et les autres impôts prélevés sur les produits, et les marges commerciales et de transport (la valeur ajoutée des distributeurs et des entreprises de transport); et en déduisant d’autre part les subventions perçues par les producteurs sur leurs produits, on obtient le Produit Intérieur Brut (PIB) « au prix d’acquisition », c’està-dire au prix réellement payé par les consommateurs ou les utilisateurs. Produit Intérieur Brut (PIB) aux prix d’acquisition par l’utilisateur final Somme des valeurs ajoutée (y compris celle des branches Commerce et Transport) + TVA et autres impôts prélevés sur les produits Moins subventions versées par les APU sur les produits 2.1.2.2 La consommation finale. Les produits font l’objet d’une consommation finale lorsqu’ils sortent définitivement du circuit de production et sont utilisés à la satisfaction des besoins individuels ou collectifs. La consommation finale ne concerne que les ménages, les Administrations Publiques et les ISBLSM. On distingue : Les dépenses de consommation finale des ménages, qui se limitent aux dépenses que les ménages supportent directement. Elles comprennent la part des dépenses de santé, d’éducation, de logement, restant à leur charge, après remboursements éventuels. On y inclut aussi les loyers « imputés », que les ménages propriétaires de leur résidence principale se versent implicitement à eux-mêmes7. La consommation effective des ménages, qui est obtenue en ajoutant aux dépenses de consommation des ménages les consommations individualisables incluses dans la dépense de consommation finale des Administrations Publiques (APU) et celles des Institutions Sans But Lucratif au Service des Ménages (ISBLSM). Ce sont les dépenses des administrations et des ISBLSM en faveur des ménages, dont les bénéficiaires peuvent être précisément définis 8. La consommation collective des APU, qui est constituée de cette part de leurs dépenses de consommation finale qui ne peut être individualisée : par exemple les dépenses liées à la Défense Nationale. 7 On distingue, au sein de ces dépenses de consommation des ménages, les dépenses de consommation « pré-engagées », c’est-à-dire celles qui sont réalisées dans le cadre d’un contrat difficilement renégociable à court terme. Il s’agit des : des dépenses liées au logement (y compris loyers imputés aux propriétaires occupant leur logement), dépenses relatives à l’eau, au gaz, à l’électricité et aux autres combustibles ; des services de télécommunications ; des frais de cantine ; des services de télévision (redevance télévisuelle, abonnements à des chaînes payantes) ; des assurances (hors assurance-vie) ; des services financiers (y compris services d’intermédiation financière indirectement mesurés, SIFIM). Il s’agit des Services non facturés mesurés par les marges que les intermédiaires financiers obtiennent sur les dépôts et les crédits de leur clientèle. Les SIFIM sur les dépôts représentent l’écart entre la rémunération versée sur les dépôts et les coûts de refinancement que ces dépôts permettent d’éviter. Les SIFIM sur les crédits représentent l’écart entre les intérêts reçus sur les crédits et les coûts de refinancement de ces crédits. 8 C’est le cas en particulier des dépenses pour l’éducation et pour la santé. On distingue en leur sein des prestations sociales en nature (par exemple, la consultation médicale et les médicaments remboursés par la sécurité sociale et les mutuelles complémentaires) et des transferts de biens et services non marchands (par exemple, les denrées alimentaires distribuées aux ménages en difficulté par des ISBLSM). 6 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 La consommation finale : Définitions Dépenses de consommation finale totales Dépenses de consommation des ménages Dépenses de consommation des ménages Dép. des ISBLSM Dép. des ISBLSM Dépenses des APU 2.1.2.3 Consommation effective des ménages Dép. individualisables Dép. collectives Dép. collectives APU La formation brute de capital (FBC). Elle comprend essentiellement : La formation brute de capital fixe (FBCF) : Ce sont les acquisitions, nettes de cessions, d’actifs fixes réalisées par les agents résidents. Les actifs fixes sont les actifs corporels ou incorporels issus d’un processus de production et utilisés de façon répétée ou continue dans d’autres processus de production pendant au moins un an. Les investissements en logement des ménages y sont inclus. La formation de capital fixe peut aussi être calculée nette, si l’on soustrait de la FBCF la consommation de capital fixe : il s’agit de la dépréciation subie par le capital fixe au cours de la période considérée par suite d’usure normale et d’obsolescence prévisible. Le terme « brut » dans les expressions comme Produit intérieur brut ou Formation brute de capital fixe signifie que la consommation de capital fixe n’a pas été soustraite. Quand on la soustrait de ces grandeurs, leur valeur est dite « nette ». Les variations de stocks, correspondant à la différence entre les ressources et les emplois de la période (valeur des entrées en stocks diminuées des sorties de stocks et des pertes sur stocks pendant l’année). La formation brute de capital (FBC) inclut aussi les acquisitions nettes d’objets de valeur (ANOV), qui comptabilisent essentiellement les acquisitions, nettes de cessions, d’or par les ménages, et les acquisitions nettes d’actifs non financiers non produits (essentiellement les acquisitions, nettes de cessions, de terrains et de brevets). La formation brute de capital : Définitions Formation brute de capital (FBC) Formation Brute de Capital Fixe (FBCF) Variations de stocks ANOV* + ANANFNP** *ANOV : Acquisitions nettes d’objets de valeur. **ANANFNP : Acquisitions nettes d’actifs non-financiers non produits 7 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 2.1.2.4 Les exportations. Elles sont constituées des produits (biens et services) qui quittent définitivement le territoire économique de la France pour être utilisés dans le Reste du Monde. 2.1.3 L’équilibre emplois-ressources. Sur une année donnée, on ne peut à l’évidence utiliser dans l’économie plus de biens ou de services que l’on en a produits ou importés. Cet équilibre – l’égalité stricte entre les ressources en produits et leurs emplois – est réalisé pour chaque produit, et pour l’ensemble des produits, et constaté a postériori. Cette égalité suppose que le PIB soit évalué de la même manière que les emplois finaux, c’est-àdire aux prix d’acquisition, en d’autres termes au prix payé par l’utilisateur final. De même, les Importations doivent être évaluées de la même manière que les Exportations, c’est-à-dire F.A.B, ce qui nécessite de convertir l’évaluation C.A.F des importations en évaluation F.A.B. Les emplois étant toujours valorisés aux prix d’acquisition observés sur le marché, l’équilibre ressources-emplois finaux se traduit donc finalement par l’égalité suivante : PIB + IM = CF + FBC + EX PIB + Importations = Consommation finale + Formation brute de capital + Exportations Par Ressources on entend le Produit Intérieur Brut et les Importations. Le deuxième membre de cette égalité comprend exclusivement les utilisations finales en produits (Consommation finale, Formation Brute de capital et Exportations), les consommations intermédiaires ayant été intégrées dans le calcul du PIB. 2.2 Les opérations de répartition. Il s’agit ici de répartir les revenus générés par la production entre les agents économiques résidents, sous forme de revenus de différentes natures. La répartition des revenus se fait à deux niveaux : On appelle répartition primaire la distribution des revenus aux agents économiques qui ont directement participé à la production de richesses : ils constituent le revenu primaire de ces agents. A un second niveau, ce revenu primaire est modifié par les opérations de distribution secondaire et de redistribution. 2.2.1 La répartition primaire. 8 Une partie de la valeur ajoutée est versée aux salariés des entreprises : ce sont les rémunérations salariales, qui comprennent les salaires et traitements bruts et les cotisations sociales à la charge des employeurs : c’est la rémunération du travail, sans lequel il ne pourrait y avoir production. B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 Ces rémunérations salariales forment une partie importante des revenus distribués, et le principal revenu des ménages, puisque 88,5% des actifs sont, en France, salariés. Salaires et traitements bruts et cotisations sociales à la charge des employeurs constituent pour les producteurs qui emploient des salariés le coût global du travail. Pour les ménages cependant, le prélèvement des cotisations sociales (salariales et patronales) ne doit pas être considéré comme une réduction de salaire, mais comme un salaire différé, puisqu’elles leur sont intégralement reversées sous forme de prestations sociales. Une partie plus faible de la valeur ajoutée est prélevée sous forme d’impôts liés à la production par l’Etat et les Administrations publiques. Ces impôts constituent la rémunération des services et des infrastructures que ces derniers mettent à la disposition de l’appareil productif. On en déduit les subventions d’exploitation reversées par les APU aux entreprises. Les impôts liés à la production comprennent pour l’essentiel la Contribution économique territoriale, qui a remplacé la taxe professionnelle sur les équipements et les biens mobiliers depuis le 1er janvier 20109, les taxes foncières et la contribution sociale de solidarité des sociétés ; les impôts sur les salaires et la main-d’œuvre,. Ces impôts s’ajoutent aux impôts sur les produits prélevés sur l’acquéreur (TVA, taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), taxes sur l’alcool et les produits du tabac, etc.). Principaux impôts par catégorie Impôts de type TVA (D211) Impôts de type droits de douanes (D212) Impôts sur les produits (D214) Taxe Intérieure sur les produits pétroliers Taxes sur les tabacs Droits d'enregistrement (taxe additionnelle) Taxes spéciales sur conventions d'assurances Taxes sur les boissons Produits de la loterie nationale et du loto Impôt sur l'énergie électrique Taxe pour le fonds du service public de la production d'électricité Impôts courants sur revenu et patrimoine (D51) Contribution sociale généralisée (CSG) CSG affectée à la CNSA Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) Impôt sur le revenu Prélèvements sur les capitaux mobiliers Prélèvements social 2 % sur revenu du capital Contribution additionnelle au prélèvement social affectée à la CNSA Impôts sur les sociétés (inclus impôt forfaitaire annuel) Majoration de 10% sur l'IS 9 2012 142,5 2,5 82,0 23,6 11,6 10,5 8,8 3,4 2,1 2,0 3,7 Impôts sur salaires et main d'œuvre (D291) Taxes sur les salaires Versements transports Taxe au profit du fonds national d'aide au logement Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie Impôts divers sur la production (D292) Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises Cotisation foncière des entreprises Impositions forfaitaires sur entrepr. réseaux Taxe sur le foncier bâti et non bâti (entreprise) TVA sur subventions et sous/compensations agricultures Contribution sociale de solidarité des sociétés 2,7 2,0 61,5 12,7 5,7 1,2 28,7 0,6 5,5 218,4 90,0 1,2 6,6 59,5 6,6 3,7 Autres Impôts sur revenu et patrimoine (D59) Taxe d'habitation Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) Taxe sur le foncier non bâti (ménages) 25,0 16,9 5,0 0,2 0,4 42,1 0,5 Impôts en capital (D91) Mutation à titre gratuit La contribution économique territoriale (CET) est composée : d’une cotisation foncière des entreprises (CFE), assise sur les valeurs locatives foncières, (taux est déterminé par les communes ou les EPCI), et d’une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), prélevée selon un barème progressif et due uniquement à partir de 500 000 € de chiffre d’affaires. La CET est plafonnée à 3 % de la valeur ajoutée. 9 2012 30,4 12,0 7,0 9,6 9,0 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 Une troisième part de la valeur ajoutée est versée sous forme de Revenus de la propriété et de l’entreprise, qui constituent la rémunération des apporteurs de capitaux : intérêts des dépôts et des prêts, dividendes et parts de bénéfices versées aux actionnaires des Sociétés Anonymes et aux associés des autres types de sociétés ; s’y ajoutent les bénéfices réinvestis tirés des investissements directs à l’étranger, les revenus de la propriété attribués aux assurés par les Entreprises d’Assurances, et les revenus des terrains et gisements. La masse des revenus répartie entre les agents résidents dans le cadre de la répartition primaire n’est pas strictement égale au PIB, puisqu’une petite partie de la Valeur ajoutée est versée au Reste du Monde (sous forme de rémunérations salariales, impôts sur les produits, subventions et revenus de la propriété, tandis que le Reste du Monde verse aux agents résidents des revenus du même type. Le solde des transferts de revenus primaires entre le pays et le Reste du Monde peut être en théorie positif ou négatif. Il est en France positif depuis de nombreuses années : les résidents français perçoivent plus de revenus primaires du Reste du Monde qu’ils n’en versent au Reste du Monde. Ce solde était de 34,9 Mrds d’€ en 2012 et vient ainsi accroître les revenus primaires des agents. Par ailleurs, les agents résidents conservent une part de la valeur ajoutée dans le but de compenser la perte de valeur du stock de capital fixe utilisé du fait du temps, de l'usure physique, de l'obsolescence ordinaire ou des dommages accidentels courants : c’est la consommation de capital fixe (CCF) de l’année. La consommation de capital fixe est un coût de production. En résumé : Produit Intérieur Brut (PIB) Moins Consommation de capital fixe (CCF) = Produit intérieur net (PIN) Plus Solde des Transferts de revenus primaires entre le pays et le Reste du Monde (soit : Transferts de revenus primaires du Reste du Monde vers le Pays Moins Transferts de revenus primaires du Pays vers le Reste du Monde) = Revenu National Net (RNN) Le Revenu National Net est partagé entre les 5 secteurs institutionnels résidents, et constitue leur Revenu Primaire Net respectif. Si l’on en déduit le Revenu Primaire net des Administrations publiques, on obtient le Revenu distribuable, ou encore Revenu « aux coûts des facteurs » : ce dernier représente la part du PIB qui rémunère les facteurs de production, capital et travail. 2.2.2 La répartition secondaire et les opérations de redistribution. On appelle répartition secondaire ou redistribution : celle qui est effectuée par le biais des opérations d’assurances-dommages : versement de primes d’une part (des assurés aux entreprises d’assurances) et d’indemnités (des Entreprises d’assurances aux assurés ayant subi un dommage pour lequel ils se sont assurés). Les opérations d’assurance-vie – du fait de leur caractère de placement financier – sont classées dans les opérations financières. celle qui est effectuée pour l’essentiel par les Administrations Publiques : prélèvement d’impôts sur le revenu et le patrimoine – essentiellement l’impôt sur le revenu des personnes physiques, l’IRPP, et l’impôt sur les bénéfices des sociétés, l’IS – ; prélèvement de cotisations sociales (salariales et patronales) sur les ménages, dont la contrepartie est le versement de prestations sociales en nature ou en espèces aux ménages, autres transferts courants. A ces différents transferts, s’ajoutent de façon marginale des transferts en capital (aides à l’investissement, et impôts sur le capital essentiellement). A l’issue de la répartition secondaire, chaque agent dispose d’un revenu disponible net, principalement consacré à la Consommation Finale (pour les ménages, les Administrations Publiques et 10 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 les Institutions Sans But Lucratif au Service des Ménages) et à la Formation Brute de Capital (pour tous les secteurs). Revenu primaire net d’un agent économique + Solde des revenus issus de la répartition secondaire (perçus moins versés) = Revenu disponible net de l’agent Si sur l’année, pour un secteur institutionnel donné, ses emplois (dépenses) ont excédé ses ressources (revenus), le secteur présente un besoin en financement : il a dû emprunter pour équilibrer ses comptes. Il présente une capacité de financement dans le cas contraire (il a pu prêter aux autres secteurs présentant des besoins en financement). Pour l’ensemble de l’économie, la somme algébrique des capacités ou des besoins en financement des 5 secteurs institutionnels résidents peut être : Positive : dans ce cas, le pays présente une capacité nette de financement à laquelle correspond un besoin en financement de même valeur du Reste du Monde. Le pays a été créancier de l’extérieur. Négative : dans ce cas, le pays présente un besoin net en financement auquel correspond une capacité de financement de même valeur du Reste du Monde. Le pays a été débiteur de l’extérieur. 2.3 Les opérations financières. Il s’agit de l’ensemble des opérations portant sur des actifs ou des passifs financiers. La plupart sont la contrepartie monétaire d’une opération sur biens et services ou d’une opération de répartition. Certaines sont cependant purement financières (prêts, émissions ou cessions de titres). Elles indiquent comment, et avec quels instruments s’est effectué le financement des agents économiques, en d’autres termes comment les besoins en financement des uns ont été couverts par les capacités en financement des autres, par l’intermédiaire des institutions financières (« financement intermédié »), ou sans leur intermédiaire (« financement de marché »). Le tableau des opérations financières enregistre en emplois les flux nets de créances et en ressources les flux nets de dettes de chaque secteur, classés en ordre décroissant de liquidité et selon la nature des actifs (monétaires ou non monétaires) utilisés dans les opérations de financement : Moyens de paiement internationaux (or, devises, DTS) Moyens de paiement en euros Autres liquidités Titres du marché monétaire Obligations Actions et autres participations Prêts à court terme Prêts à moyen et long terme Réserves techniques des entreprises d’assurances. Actifs monétaires Actifs non monétaires Sur l’ensemble de l’économie, - Un solde positif des opérations financières des 5 secteurs d’agents résidents correspond à un solde négatif pour le Reste du Monde, et inversement. - Le solde des opérations financières des 5 secteurs d’agents résidents est strictement égal à la capacité (ou au besoin en financement selon le cas) dégagé(e) par ces mêmes secteurs à l’issue des opérations sur biens et services et des opérations de répartition. On a donc un équilibre entre les opérations de la « sphère réelle » de l’économie et celles de la « sphère financière ». 11 B. Engelhardt-Bitrian Economie Politique 2013-2014 ANNEXES Evaluation des ressources en produits. Production marchande Elle est évaluée d’abord au prix de base, c’est-à-dire le prix facturé par le producteur, hors taxes, augmenté des subventions sur les produits éventuellement reçues (qui permettent d’abaisser le prix facturé des produits). Services de logement Produits par les ménages qui louent un bien immobilier à un autre ménage, ils sont valorisés au montant des loyers versés, hors taxes. Production à compte propre Lorsque les biens et les services marchands produits ne font pas l’objet d’une transaction (intraconsommation, production des entreprises pour leur propre usage, autoconsommation des ménages…), leur valeur est mesurée au prix de base des produits similaires vendus sur le marché. Ce principe vaut aussi pour les services de logement que les ménages propriétaires se rendent à eux-mêmes s’ils occupent leur propre logement, services valorisés à la valeur locative du logement. Production (Services) non marchande Produits par les Administrations Publiques et les Institutions sans but lucratif au service des ménages, ces services sont évalués aux coûts de production (coût des consommations intermédiaires, rémunérations des salariés cotisations sociales comprises, amortissement du capital utilisé, impôts nets de subventions sur la production). Services domestiques Ces services non marchands produits par les ménages sont évalués au montant des salaires versés. Importations Les importations de biens sont mesurées « coût, assurances, fret » (CAF), c’est-à-dire au prix de base augmenté du coût des assurances et du transport jusqu’à la frontière française (ou le port ou l’aéroport de déchargement), droits de douane non inclus. Les importations de services sont évaluées au prix d’acquisition (toutes taxes, marges commerciales et coût du transport compris, moins les subventions éventuellement perçues sur ces produits : il s’agit du prix réellement payé par l’acquéreur.) Evaluation des emplois finaux. Consommation finale et FBC Exportations 12 Evaluation au prix d’acquisition Evaluation « Franco à bord », c’est-à-dire au prix facturé par le producteur, auquel on ajoute le coût du transport jusqu’à la frontière, ou jusqu’au port ou aéroport d’embarquement des marchandises.