La guerre froide : conflit idéologique, conflit de puissance Grâce à l’alliance entre les Américains, les Britanniques et les Soviétiques, les puissances de l’Axe sont finalement vaincues en 1945 : l’Allemagne capitule en mai, le Japon en septembre. Les 3 alliés se réunissent à Yalta puis à Postdam pour poser les bases de l’Europe et du monde d’après 1945. Ils décident, notamment, d’administrer conjointement (et avec la France) l’Allemagne et l’Autriche. Mais dès 1947, les deux grandes puissances que sont les États Unis et l’URSS vont se disputer la domination mondiale dans une confrontation qui ne les opposera jamais directement et qu’un journaliste américain a baptisé de « guerre froide ». Quelle est la nature de cette confrontation entre les deux grands ? Quelle y est la part de la concurrence entre deux puissances à visée hégémonique et celle de l’opposition entre deux modèles antagonistes et incompatibles ? Nous montrerons comment la rupture prévisible de la « grande alliance » est la conséquence logique de deux visions radicalement opposées du monde et de deux projets aux antipodes l’un de l’autre mais à vocation universelle qui entreront donc en concurrence sur toute la planète et confronteront leur puissance sans jamais toutefois commettre l’irréparable. I. La rupture d’une « grande alliance » contre-nature A. La fin du mirage d’une gouvernance mondiale commune Ex. de Berlin et de l’Allemagne divisés en 4 zones d’occupation en 1945 qui doivent décider conjointement de l’avenir du pays. Mais visions différentes : pour Staline, seul le communisme peut en finir avec l’impérialisme allemand et il réunifie les partis communistes et socialistes allemand en un parti unique le SED (parti socialiste unifié). Pour les occidentaux, seuls la démocratie et le redressement économique du pays peut vaincre les fantômes du nazisme et ils envisagent d’unifier leurs zones d’occupation et de créer une monnaie allemande commune et solide. Ces visions opposées entraînent la rupture entre l’URSS et les occidentaux. B. Et l’opposition de deux modèles opposés USA et pays occidentaux : modèle libéral. Idée que les libertés démocratiques, religieuses et économiques apportent paix, prospérité et bonheur aux peuples. Les états Unis, colonies maltraitées au XVIIIème siècle ne sont-ils pas devenus la 1ère puissance mondiale en 1945, à la tête d’une économie-monde américaine ? L’URSS, en revanche, appuie le modèle marxiste. Idée que la lutte des classes permet la vraie démocratie qui donne le pouvoir au vrai peuple, les prolétaires, généralement exploités par les bourgeois capitalistes. En 1917, la révolution d’octobre a permis d’installer le socialisme au pouvoir en URSS et de partager les biens, les richesses entre tous les citoyens pour faire leur bonheur. Ce bonheur socialiste a vocation à se diffuser partout. C. Qui se combattent Doctrine Truman ou du « containment » : endiguer la diffusion du communisme dans le monde par tous les moyens (économiques, militaires, porpagande etc.) Doctrine Jdanov : lutter contre l’impérialisme capitaliste américain sur le monde en aidant les pays à lui résister et en diffusant le socialisme partout où cela est possible. II. Deux blocs et idéologies à vocation universelle en concurrence A. Pour diffuser leur modèle mondialement Ex. de Berlin : Berlin-Ouest = « monde libre », démocratie / Berlin-Est = SED, parti unique, répression des émeutes ouvrières de 1953 qui réclament le pluralisme politique. Mise en place d’un véritable « rideau de fer » qui sépare les démocraties occidentales des démocraties populaires en Europe. LA construction du mur de Berlin en 1961 illustre cette frontière que les Soviétiques veulent imperméable. Dans le reste du monde de nombreux pays deviennent communistes (Chine, Vietnam nord, Corée du Nord, Cuba etc.), de nombreux autres soutiennent les USA ( Am. Latine, Turquie, Corée du Sud, Vietnam du s. etc.) B. À grand renfort de propagande Les différents partis communistes éditent de nombreuses affiches de propagande dénonçant les dangers de l’impérialisme américain. En occident, condamnation unanime des répressions soviétiques de 1953, 1956, 1968 mais aussi du mur « de la honte » contre lequel Kennedy prononce en 19636 son célèbre discours « Ich bin ein Berliner ». C. Et de soutiens économique et diplomatique Dès 1947 : plan Marshall en Europe de l’ouest. Alliances après la crise de Berlin et la guerre de Corée : OTAN, OTASE, Pacte de Varsovie… III. Qui confrontent leur puissance indirectement A. L’équilibre de la terreur Hiroshima et nagasaki l’arme atomique est définitive. Dès 1949, les deux grands en disposent et se lancent à une course aux armements pour être en mesure de neutraliser l’ennemi. Ex. de la crise des misssiles de Cuba de 1962 mais aussi de la démonstration de force des USA lors du pont aérien de 1948-1949. B. Des guerres par intermédiaires interposés Ex. guerre de Corée de 1953 mais surtout guerre du Vietnam de 1964 à 1973. Les USA soutiennent Saïgon, l’URSS et la Chine soutiennent Hanoï. Les USA envoient hommes, armes, l’URSS envoie des armes. C. « Paix impossible, guerre improbable » (Aron) Malgré l’intensité de la lutte idéologique entre les deux blocs, on évite toujours d’aller trop loin dans la confrontation pour éviter la destruction atomique. Ex. de Cuba ou de Berlin où l’URSS recule. Coexistence pacifique obligatoire, voire détente après 1962 avec mise en place du « téléphone rouge » En 1989, la chute du mur de Berlin, rendue possible par la nouvelle politique soviétique de non intervention dans les démocraties populaire (Gorbatchev) marque la fin du rideau de fer. En 1991, l’éclatement de l’URSS confirme la fin de la guerre froide. Ces plus de 40 ans d’affrontement entre les deux grands ont marqué durablement l’histoire mondiale de l’aprèsguerre dans une guerre sans merci de leurs deux modèles où chacun ne cessait de fourbir ses armes pour maintenir l’autre sous la menace dans un inquiétant équilibre de la terreur. Certains auteurs ont cru pouvoir affirmer après la défaite du communisme « la fin de l’histoire » mais la victoire du modèle libéral est-elle aussi indiscutée et indiscutable en ces temps de fortes perturbations économiques ?