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le clinicien septembre 2010
Linvestigation dune masse rénale
Robert Sabbagh, B.Pharm,
M.Sc., M.D., FRCSC
Basé sur la
conférence donnée
dans le cadre du
colloque Néphrologie,
présenté par
l’Université de
Sherbrooke, avril
2010.
Le cas de Monsieur Gagné
Monsieur Gagné se présente pour une douleur abdominale sous-costale droite.
L’échographie abdominale prescrite par son médecin révèle une masse solide au
tiers moyen du rein gauche et deux kystes sur le rein droit.
La tomodensitométrie axiale de M. Gagné révèle une masse de 9 cm au tiers moyen
du rein gauche rehaussant après injection de contraste, ainsi que deux lésions
hypodenses compatibles avec des kystes simples au pôle inférieur du rein droit. La
radiographie pulmonaire est négative ainsi que le bilan sanguin.
Son médecin a communiqué directement avec l’urologue de garde pour une
consultation dans les plus brefs délais, en prévision d’une néphrectomie radicale
gauche par laparoscopie.
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Les masses rénales et le cancer du rein
Le cancer du rein touche 2 à 3 % de la population, plus souvent les hommes
que les femmes et les personnes de plus de 50 ans. La plupart des masses
rénales sont découvertes fortuitement. Il est important de noter sur les rapports
d’échographie la nature des kystes rénaux puisque la conduite à tenir varie selon
qu’il s’agit de kystes simples ou complexes.
La conduite à tenir lors de la découverte dune
masse rénale
Lors de la découverte d’une masse solide ou d’un kyste complexe (Bosniak III),
une tomodensitométrie axiale doit être effectuée. L’investigation d’un patient
atteint d’une masse rénale débute avec une anamnèse, se poursuit avec un exa-
men physique, des tests de laboratoire et finalement des examens radiologiques.
Lanamse
L’histoire permet de rechercher les patients avec un cancer rénal avancé qui se
manifeste par une perte de poids significative (> 10 %), des douleurs osseuses et
un pauvre statut de performance.
Lexamen physique
Les patients qui présentent une masse rénale palpable ou des adénopathies sont
possiblement atteints d’une maladie avancée.
Les patients qui
présentent une
masse rénale
palpable
ou des
adénopathies
sont
possiblement
atteints dune
maladie
avancée.
Linvestigation dune masse rénale
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Les tests de laboratoire
Une anémie significative, une vitesse de sédimentation élevée, une perturbation
des enzymes hépatiques ou une augmentation de la phosphatase alcaline orientent
le diagnostic vers un cancer du rein avancé1. La créatinine sérique, le coagulo-
gramme – rapport international normalisé (INR) et ponction transthoracique intra-
veineuse (PTT) – et les électrolytes font aussi partie de l’évaluation.
L’imagerie
Plographie intra-veineuse (PIV)
Depuis l’échographie et la tomographie axiale, la PIV est beaucoup moins
utilisée pour l’évaluation de l’hématurie ou des lithiases urinaires. La PIV est très
peu sensible et spécifique pour la recherche de masse rénale. Lorsqu’une masse
rénale est suspectée à la PIV, il faut effectuer une échographie.
En général,
toute masse
rénale qui
rehausse
avec
ladministra-
tion de
produit de
contraste
doit être
considérée
comme un
cancer rénal,
jusqu’à
preuve du
contraire.
Classification de
Bosniak
Caractéristiques
radiologiques
Risque
de cancer Conduite à tenir
I
Kyste simple
Masse arrondie anéchoïque de
densité hydrique homogène
avec parois minces et
régulières. Pas de rehaussement
à la tomographie.
Aucun Pas de surveillance
II
Fines cloisons ou calcification à
l’intérieur du kyste. Pas de
rehaussement à la
tomographie.
< 3 % Pas de surveillance
II
Kyste hyperdense < 3 % Pas de surveillance
Kyste hyperdense à la
tomographie sans
rehaussement.
II F
F pour Follow-up
Cloisons fines multiples plus
épaisses qu’un cheveu ou paroi
légèrement plus épaisse.
5-10 % Surveillance aux 6-12 mois
III
Kyste complexe
Épaississement uniforme des
parois. Calcification ou cloison
épaisse ou irrégulière.
Rehaussement des cloisons à la
tomographie.
50 %
Adresser le patient en
urologie pour une
excision chirurgicale.
IV
Gros kystes avec parois
irrégulières et proéminentes.
Rehaussement des éléments
solides, indépendamment des
cloisons.
75 %-90 %
Adresser le patient en
urologie pour une
excision chirurgicale.
Classification de Bosniak
TTaabblleeaauu 11
Docteur
Robert
Sabbagh est
urologue,
professeur
adjoint au
CHUS et
directeur du
programme du tronc commun
de chirurgie de la Faculté de
médecine et des sciences de la
santé de l’Université de
Sherbrooke.
Linvestigation dune masse rénale
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le clinicien septembre 2010
Échographie
L’échographie est un examen relativement peu coû-
teux, non invasif et assez précis pour la recherche de
masses rénales. Les taux de sensibilité et de spéci-
ficité, pour la détection d’une masse rénale, sont
respectivement de 91 % et de 82 %. L’échographie
permet de distinguer une masse rénale solide d’un
kyste rénal (Tableau 1). Pour mieux caractériser une
masse solide ou un kyste complexe, une tomographie
est la prochaine imagerie à prescrire.
Tomographie axiale (scan)
La tomographie abdominale et pelvienne, avec et sans
produit de contraste, est l’examen de choix pour l’in-
vestigation d’une masse rénale (voir Tableau 1). En
général, toute masse rénale qui rehausse avec l’administration de produit de con-
traste doit être considérée comme un cancer rénal, jusqu’à preuve du contraire2.
Quatre-vingt-trois pour cent à 90 % des masses rénales suspectes de cancer lors
de la tomographie le sont à la pathologie3.
La tomographie axiale permet de mesurer la taille de la tumeur, de la localiser
et d’évaluer son extension périrénale ou veineuse. La sensibilité de la tomographie
quant à la détection d’un thrombus tumoral dans la veine rénale est de 78 %, et de
96 % dans la veine cave inférieure4. Elle permet aussi d’évaluer le contenu de la
masse. La présence de graisse dans une masse rénale représentée par des unités
Hounsfield négatives est caractéristique d’un angiomyolipome tumeur bénigne5.
Un kyste hyperdense, considéré bénin, peut aussi être identif(voir Tableau 1).
Radiographie des poumons versus tomographie du thorax
Le site le plus fréquent de métastase du cancer du rein est le poumon. Selon la lit-
térature urologique, la radiographie des poumons est suffisante6. La tomographie
thoracique peut être réservée pour les patients souffrant de symptômes pulmo-
naires ou d’une anomalie à la radiographie des poumons7.
Résonance magnétique
La résonance magnétique est l’examen de choix pour évaluer l’étendue des
thrombus tumoraux dans la veine rénale et la veine cave inférieure8. De plus, la
résonance magnétique est aussi indiquée chez les patients ayant des actions
allergiques graves aux produits de contraste et ceux dont la clairance de la
créatinine (Clcr) se situe entre 30-60 mL/min. Les patients ayant une Clcr
inférieure à 30 mL/min ne peuvent bénéficier d’une résonance magnétique
à cause des risques de fibrose systémique néphrogénique induite par le gadoli-
nium9.
La résonance magnétique est
l’examen de choix pour
évaluer l’étendue des
thrombus tumoraux dans la
veine rénale et la veine
cave inférieure.
Linvestigation dune masse rénale
Vénocavographie
Cette technique, peu utilisée de nos jours, est indiquée lorsque les résultats
obtenus à la résonance magnétique sont équivoques ou pour les patients qui ont
une contre-indication à la résonance magnétique. L’artériographie rénale joue un
rôle limité dans l’investigation d’une masse rénale.
Tomographie d’émission de positons (TEP)
La TEP n’est pas indiquée pour l’investigation d’une masse rénale, car elle est très
peu sensible.
Biopsie rénale ou par aspiration à l’aiguille fine (FNAB)
Il est rare qu’on procède à une biopsie rénale pour une masse suspecte à la tomo-
graphie puisque le risque qu’elle soit maligne est de plus de 85 %. Les indications
d’une biopsie rénale ou FNAB sont les contextes cliniques qui laissent suspecter
la présence soit d’un abcès, d’un lymphome ou d’une métastase d’un organe pri-
maire autre que le rein. La sensibilité et la spécificité de la FNAB, pour le
diagnostic d’un cancer du rein varie entre 80 % et 95 %10. Les complications
potentielles de la FNAB sont les saignements, l’infection, la fistule artério-
veineuse, la contamination néoplasique le long du trajet de l’aiguille et le
pneumothorax.
Références :
1. Gelb AB. Renal cell carcinoma: Current prognostic factors. Union
Internationale Contre le Cancer (UICC) and the American Joint Committee
on Cancer (AJCC). Cancer 1997 Sept; 80(5):981-6.
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nephrectomy for renal mass. Ann Surg Oncol 1997 Oct-Nov; 4(7): 570-4.
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Il est rare
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