Évaluer la précision d`une carte avec le nombre de bits

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ACQUISITION SUR CARTE
Évaluer la précision
d’une carte avec le nombre
de bits effectifs
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Pour une application donnée, comment choisir une carte d’acquisition de signaux, tout en étant certain d’obtenir la précision souhaitée? Une spécification appelée “nombre de bits effectifs” (ENOB, pour Effective Number of Bit en anglais) facilite l’évaluation des performances d’une carte.
D
e nos jours, il ne suffit plus
d’évaluer la précision d’une
carte d’acquisition de données
en vérifiant uniquement la
conversion analogique-numérique ou les
spécifications du domaine temporel (la linéarité, la précision relative, etc.). Des critères
comme le temps de conversion, les performances de l’étage analogique ou la réponse
en fréquence jouent un rôle croissant pour
déterminer la performance globale d’une
carte de conversion analogique-numérique.
Si l’on évalue une carte seulement à partir
des spécifications de précision, on ne se rend
compte que d’une partie de ses performances. La précision relative est définie
comme la plus grande différence entre la
valeur analogique du signal et la valeur
retournée par la carte après numérisation.
Pour déterminer ce paramètre, on injecte sur
la carte une tension d’entrée connue que l’on
fait varier entre 0 et 10V par exemple (pour
un convertisseur dont la gamme d’entrée est
de 10V). Puis on relève pour chaque valeur
injectée, la valeur binaire retournée par le
convertisseur que l’on compare à la tension
d’entrée de référence. La plus grande différence entre cette valeur binaire convertie en
Toute carte d’acquisition comporte des imperfections qui sont source de bruit,de non linéarité et de distorsion du signal.
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tension et la tension d’entrée détermine la
précision relative de la carte. Ce paramètre
est considéré comme une spécification temporelle parce que la mesure est toujours faite à faible vitesse d’échantillonnage en utilisant une seule entrée analogique.
Bien que cette manipulation puisse refléter
certaines utilisations de la carte, la plupart
des applications utilisent un grand nombre
d’entrées analogiques à des périodes
d’échantillonnage de 1 échantillon par seconde à plus de 1 million d’échantillons par
seconde. A des vitesses plus élevées et avec
des acquisitions multivoies, la précision relative n’est plus un bon indicateur de l’intégrité d’une carte. Pour être certain que les
données acquises soient fiables, seuls les paramètres fréquentiels
En bref
permettent
de
mettre en éviden- Tout système d’acquisition
ce les perforcomporte des limitations
mances d’une carintrinsèques qui sont source de bruit, de non linéarité
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et de distorsion des harmobits effectifs (en
niques du signal
anglais ENOB,
pour
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facilite l’appréciadu convertisseur ou la prétion de la précision
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pas compte de ces limitad’une carte d’actions
quisition.
Un critère appelé nombre
Obtenu à partir du
de bits effectifs permet de
rapport signal sur
se faire une bonne idée de
bruit (en anglais
la précision globale de la
SNR, pour Signal
carte
to Noise Ratio)
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Le nombre de bits effectifs permet de se faire une bonne idée de la précision globale d’un système d’acquisition.
d’une carte, le nombre de bits effectifs permet d’évaluer la performance globale d’un
système de conversion analogique-numérique en prenant en compte le bruit introduit
par le système ainsi que ses nombreuses
imperfections.
L’insuffisance des spécifications
temporelles
L’étage d’entrée analogique d’une carte d’acquisition de données multivoies possède un
multiplexeur, un amplificateur de gain programmable et un échantillonneur-bloqueur
qui précède le convertisseur analogique/numérique. La fonction de transfert de l’étage d’entrée (c’est-à-dire le rapport de l’entrée sur la
sortie) impacte fortement le signal qui sera à
l’entrée du convertisseur analogique/numérique et par conséquent le résultat numérisé.
Toute déformation de spectre apparaissant à
travers l’étage d’entrée est également convertie
avec le signal d’origine, entraînant une sortie
imprécise.Les non linéarités dynamiques introduites au niveau de cet étage d’entrée peuvent
devenir une source d’imprécision importante.
Par ailleurs, tout convertisseur a ses propres
limitations : les non linéarités différentielles,
les fluctuations d’ouverture, les fluctuations
d’horloges, le temps de conversion, les
conversions erronées, le bruit et les distorsions… Bref, négliger la conception de l’étage d’entrée analogique comme celle du
convertisseur engendre la dégradation de la
précision du système d’acquisition de données considéré.
A titre d’exemple, les systèmes multivoies
utilisent souvent un multiplexeur pour commuter de voie à voie. Une erreur fréquente
dans le calcul de la précision d’un tel système consiste à évaluer la précision relative en
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faisant des mesures sur une seule voie. Ceci
est dû au fait que l’on ne prend pas en compte les erreurs dues au temps de réponse de la
voie d’entrée. Le temps de réponse donne
une meilleure estimation des performances
d’acquisition d’un sous-système d’entrées
analogiques que les caractéristiques de précision. Ce temps de réponse correspond au
temps nécessaire au multiplexeur pour stabiliser sa sortie. Celui-ci est le fruit d’un
ensemble de paramètres : l’impédance de la
source, les parasites à l’entrée du multiplexeur
et l’effet capacitif en sortie. De plus, l’amplificateur ajoute son propre temps de réponse. Si les voies sont commutées avant que
l’entrée de la voie précédente soit remise à
zéro, une valeur résiduelle est ajoutée à la
valeur de la voie suivante. Il faut typiquement environ neuf constantes de temps RC
(résistance-capacité) à un signal pour arriver à 0,01 % de sa valeur initiale. Par conséquent, avec 1 kΩ d’impédance à la source et
100 pF de capacité en sortie, la constante de
temps est de 100 ns. Multiplié par neuf, cela
représente presque 1 µs. Si la première voie
était à une valeur de 10V et que vous ne laissez pas assez de temps pour l’établissement,
une partie de ces 10V sera ajoutée à la valeur
de la voie suivante. Ce serait le cas avec un
échantillonnage de voie à 250 Kéch./s qui lit
une nouvelle voie toutes les 4 µs. A l’heure
actuelle, aucune spécification de conversion
sur une seule voie ne peut mettre en évidence cette source d’erreur.
Même les tests de conversion de données qui
sont valables sur une voie perdent leur intérêt avec les nouvelles techniques de conversion de données. Par exemple, un test fréquent consiste à calibrer une carte
d’acquisition de données avec un signal pleine échelle bipolaire et à vérifier la valeur du
niveau zéro. Pour des méthodes de conversion par approximations successives ou
d’autres méthodes de conversion, vérifier le
niveau zéro ou le point à mi-échelle représente le pire des tests. Cela revient à comparer le bit de poids fort (Most Significant Bit
MSB en anglais qui vaut la moitié de la valeur
pleine échelle) à la somme des bits restants
qui vaut 1 LSB (Least Significant Bit, bit de
poids le plus faible) de moins que le MSB.
Bien que ce test ait été accepté pendant des
années, ses résultats ne sont pas assez significatifs pour les nouvelles architectures de
convertisseurs à approximations successives
ou à conversion sigma-delta. Même si le
convertisseur a un temps de réponse rapide
et de bonnes caractéristiques de conversion,
il peut introduire des erreurs en raison de
l’instabilité de la distorsion des harmoniques
qu’engendre l’échauffement du composant
à vitesse d’échantillonnage élevée.
Enfin, un système d’acquisition de données
ayant un étage d’entrée mal conçu engendre
souvent de la distorsion d’harmonique (une
conséquence de la non-linéarité de l’étage).
Le taux de distorsion harmonique (THD
pour Total Harmonic Distorsion en anglais,
appelé aussi distorsion harmonique totale)
est le rapport entre la somme des moyennes
quadratiques (ou valeurs efficaces) des harmoniques du signal sur la moyenne quadratique de sa fréquence fondamentale. Le
taux de distorsion harmonique est devenu
très important pour l’évaluation de la précision d’une carte d’acquisition de données.
Les erreurs dues à la distorsion de l’étage
d’entrée se retrouvent à l’entrée du convertisseur analogique/numérique et ne peuvent
être supprimées à sa sortie. La distorsion des
harmoniques et d’autres sources d’erreurs
non-linéaires diminue le rapport signal sur
bruit d’une carte.
Appréhender le nombre
de bits effectifs
Le nombre de bits effectifs, lui, donne une
mesure simple du rapport signal sur bruit
d’une carte permettant d’appréhender sa précision dynamique. Le nombre de bits effectifs peut être obtenu à partir de la définition
théorique du rapport signal sur bruit. Pour
un signal d’entrée sinusoïdal, le rapport signal
sur bruit théorique d’un signal échantillonné avec un convertisseur idéal est donné par :
SNR = (6,02N+1,76) dB où N
est la résolution du convertisseur
Le bruit n’est ici que du bruit de quantification. Dans le cas idéal, un convertisseur de
12 bits de résolution a un rapport signal sur
bruit théorique de 74 dB; un convertisseur
de 16 bits a un rapport signal sur bruit théorique de 98 dB.
La résolution N s’exprime donc en fonction
du rapport signal sur bruit sous la forme :
N = (SNR-1,76)/6,02
Pour une entrée sinusoïdale d’une certaine
fréquence, le nombre de bits effectifs calculé à partir du SNR mesuré est :
ENOB = (SNR mesuré – 1,76)/6,02
En mesurant le rapport signal sur bruit, on
peut en déduire le nombre de bits effectifs
d’un sous-système analogique. Pour le rapport signal sur bruit théorique SNR, on a :
ENOB = (SNR-1,76)/6,02=N
La résolution du convertisseur représente le
nombre de bits effectifs théorique que le système peut atteindre. Dans la réalité, le
nombre de bits effectifs n’atteint jamais la
résolution réelle du convertisseur analoMESURES 766 - JUIN 2004
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gique/numérique. Cependant, plus le
nombre de bits effectifs est proche de la résolution de la carte, meilleures sont les performances de celle-ci.
Ainsi, le nombre de bits effectifs donne une
mesure représentative de la précision dynamique basée sur un seul paramètre. Il s’agit
d’un excellent critère pour connaître la capacité d’un sous-système à acquérir et numériser correctement des signaux dynamiques
dans une plage de fréquence donnée.
Comment mesurer le nombre
de bits effectifs ?
Le point clé pour calculer le nombre de bits
effectifs d’une entrée analogique d’un soussystème est de mesurer son rapport signal
sur bruit. Le moyen le plus simple de le faire est de faire l’acquisition d’une série
d’échantillons en numérisant un signal d’entrée sinusoïdal à la pleine échelle. Puis il faut
tronquer la séquence d’échantillons en utilisant l’une des nombreuses fenêtres de pondération. Ensuite, la transformée de Fourier
est réalisée sur chaque fenêtre de pondération. On regarde enfin chaque résultat ; la
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fenêtre dont l’amplitude est la plus grande
permet de déterminer la fréquence fondamentale. Le rapport signal sur bruit est une
mesure de la largeur de bande du bruit introduit dans le signal. Il est le rapport entre la
moyenne quadratique de la somme de la fréquence fondamentale et de la moyenne quadratique de la somme de tous les autres harmoniques inférieurs à la fréquence de
Nyquist (à l’exclusion de la composante
continue). Pour être tout à fait juste, ce résultat est le rapport du signal sur le bruit et la
distorsion (S/(N+D)) qui est une définition
généralement acceptée du rapport signal sur
bruit. Le rapport signal sur bruit mesuré est
alors utilisé pour calculer le nombre de bits
effectifs de la carte.
Que se passe-t-il si l’on n’utilise pas une carte d’acquisition de données avec un nombre
de bit effectif élevé? Le suréchantillonnage
ou le moyennage des résultats peuvent-ils
rehausser leur précision? Certes, les calculs
peuvent aider mais ne peuvent pas corriger
toutes les erreurs introduites par un design de
mauvaise qualité.
Si par exemple, vous surveillez des thermo-
couples avec un bruit significatif, un moyennage pourra améliorer la précision générale
des résultats. La plupart des thermocouples ne
sont pas très précis (un thermocouple de
Type J a une précision de l’ordre de 0,75 %
soit environ 2,2 °C). Si l’on envisage d’acquérir 100 échantillons et ensuite de faire
une moyenne des résultats, on éliminera
beaucoup de bruit et d’incertitude provenant du thermocouple. Cependant, si vous
surveillez des signaux plus rapides sur une
gamme de tension plus large, faire la moyenne ne devrait pas être d’une grande aide. Et
si l’étage d’entrée de la carte d’acquisition
de données a une faible linéarité et qu’il produit de la distorsion, faire la moyenne ne
pourra pas compenser les erreurs.
Diminuer la fréquence d’échantillonnage
peut améliorer les performances de la carte
si elle souffre d’un mauvais temps de réponse mais cette technique réduit fortement sa
bande passante et sa capacité à numériser
avec précision des signaux rapides.
Kevin Sullivan,
Data Translation Engineering
Texte proposé par Atemation
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