CHARPENTIER Florian Master 1 Management des Événements et Loisirs Sportifs Mémoire de Recherche La France et l’Angleterre, « les frères ennemis » Etude de l’élaboration des représentations sociales à travers les rapports rugbystique et sociétaux de la France et l’Angleterre, de la genèse du rugby à nos jours. Sous la Direction de : Jean-Marc CHAMOT, Maître de Conférences à l’Université de Nanterre Paris Ouest la Défense UFR STAPS, Université de Nanterre Paris Ouest la Défense 7/06/2010 Remerciements Avant tout développement sur cette expérience de recherche universitaire, il apparaît opportun de commencer ce mémoire par des remerciements, à ceux qui m’ont beaucoup appris au cours de cette dernière année, et également à ceux qui ont eu la gentillesse de rendre ces moments très enrichissants. Ainsi, je remercie Jean-Marc CHAMOT, directeur de mon mémoire, pour sa disponibilité et ses conseils avisés permettant de toujours me recadrer dans ma démarche. Je remercie aussi Jacques DE FRANCE, professeur d’université spécialisé en Histoire et Sociologie du Sport, pour sa présence parmi le jury lors de ma soutenance de mémoire. Je tiens également à remercier Jean-Jacques SARTHOU, enseignant spécialisé en rugby à l’UFR STAPS Nanterre Paris Ouest la Défense, pour ses nombreuses références bibliographiques qui ont grandement enrichis mon étude. Je souhaite aussi remercier Jean-Pierre BLAY, Maître de Conférences, pour l’attention qu’il m’a accordée lors d’un entretien riche d’apprentissagAe. Enfin je remercie Marion LE PONTOIS, Charlotte MAURIE et Lucie PERON pour m’avoir soutenu à chaque instant en cette année universitaire et notamment lors de la mise en place et la distribution des questionnaires autour du Stade de France. 1 SOMMAIRE I. Introduction ........................................................................................................................ 3 II. Cadre théorique .................................................................................................................. 6 III. Etude historique : Trois positionnements politico-rugbystiques ..................................... 10 1. De la genèse du Rugby à l’Entente Cordiale .............................................................................. 10 a. Positionnement historique .................................................................................................... 11 b. Rapprochement unilatéral sportif et égarement politique ................................................... 13 c. Entente Cordiale, entente désirée ........................................................................................ 19 2. 1914-1939 Entre alliance et rejet .............................................................................................. 21 a. Appauvrissement et éloignement des nations ...................................................................... 22 b. Développement de deux pratiques différentes : entre conservatisme et populisme .......... 25 c. Réunion des forces militaires et césure rugbystique ............................................................ 27 3. 1980-1990 : Les années Thatcher/Blanco ................................................................................. 30 a. Les années Thatcher .............................................................................................................. 30 b. Les années Blanco ................................................................................................................. 32 IV. Etude empirique ............................................................................................................... 36 1. Positionnement étatique actuel, quelques années après le centenaire de l’Entente Cordiale.36 a. Au niveau sociétal.................................................................................................................. 36 b. Au niveau rugbystique ........................................................................................................... 39 2. V. Etude de terrain......................................................................................................................... 44 a. Elaboration du questionnaire. ............................................................................................... 45 b. Dépouillement et analyse du questionnaire ......................................................................... 46 Conclusion ......................................................................................................................... 62 VI. Bibliographie ..................................................................................................................... 65 VII. Webographie .................................................................................................................... 66 VIII. Annexes ............................................................................................................................. 67 2 I. Introduction « Il faut vous méfier des Anglais, pour la bonne raison qu’ils sont anglais, c’est-àdire des étrangers pour nous, et que nos intérêts, évidemment, ne sont pas toujours les mêmes que les leurs ». C’est en 1961 que le général De Gaulle, alors président de la Ve République Française, prononçais ces quelques mots. Ils mettent en exergue le fils rouge de ce mémoire. « Il faut vous méfier des Anglais, pour la bonne raison qu’ils sont anglais … » : le fait que les anglais le soient, doit-il constituer une preuve concrète de la méfiance du peuple français ? Historiquement parlant c’est un fait, « la perfide Albion » (une expression péjorative française courante désignant l'Angleterre et, par extension, la Grande-Bretagne et le Royaume-Uni), a souvent fait, dans un souci de sauvegarde et d’expansion, la girouette politico-militaire : Ainsi en 1415, à la bataille d'Azincourt, les Anglais achèvent, sur ordre d'Henri V, les chevaliers français faits prisonniers, alors que le code d'honneur commandait de les épargner et de négocier une rançon en échange de leur libération. De même, bien plus tard, en 1940, alors que l'armistice a été signé entre la France et le Troisième Reich, les Britanniques lancent l'opération Catapult. Elle vise à neutraliser la marine française par tous les moyens possibles, de peur que celle-ci ne tombe entre les mains des forces de l'Axe. Elle entraine la mort de centaines de marins français et la perte de plusieurs navires lors de la Bataille de Mers el Kebir. Mais l’histoire prouve qu’ils ont aussi été des alliés de choix durant les deux guerres mondiales. Ceci illustre le fait que les relations entre deux pays, quelles qu’elles soient, sont forcément complexes, ambivalentes, changeantes et même souvent contradictoires et incohérentes, à l’image de ce que sont les pays. Ces relations bilatérales, concernent bien sûr le monde du sport. Les nations britanniques revendiquent d’être le berceau du sport, car elles furent les premières à codifier les différents « jeux » de l’aristocratie. Ainsi à partir de 1830, les règles des jeux folkloriques se multiplient adoptant un cadre plus formel, plus civilisé et c’est en 1871 qu’est crée, par scission avec le football, la « Rugby-Football Union ». La diffusion de la pratique du rugby a alors été contrôlée par les britanniques qui l’ont implanté dans leurs colonies, notamment en Nouvelle-Zélande, en Australie et en Afrique du Sud. En France, les premières apparitions du rugby ont été constatées dans les zones de contact avec le Royaume-Uni, c’est-à-dire près des accès maritimes, les premiers clubs ayant été recensés au Havre et à Bordeaux. Le rugby français s’est alors 3 développé grâce aux Britanniques résidant en France. Cependant, a contrario de leur homologues anglais, les français ont donné d’emblée un rôle éducatif aux clubs, ce qui a rapidement donné au rugby français une dimension sociale. Par la suite la différence d’évolution de ces pratiques, résolument amateur et élitiste en Angleterre, « pro » (amateur marron) et facteur de l’intégration sociale en France, entraina de nombreuses frictions entre ces deux nations. La France ne fut intégrée dans l’IRB que le 17 mars 1978. Il semble donc intéressant d’utiliser ce sport, riche d’échanges perpétuels et particuliers, pour étudier l’ambivalence des rapports franco-britanniques. On admettra donc que les individus sensibles au monde de l’ovalie sont des sujets avec un ressentis et des appréhensions plus fortes que la « population normale ». « Pour les Français il est clair que chaque adversaire est anglais et l’ont sait que l’Angleterre est l’ennemie historique de la France. L’Angleterre est responsable de la perte de notre empire aux Indes, de la défaite de Montcalm au Québec, du coup de Trafalgar et de l’incident de Fachoda. Dans le cœur des français, l’Ecosse, l’Irlande et le Pays de Galles sont moins méprisables et seront soutenus lorsqu’eux-mêmes rencontreront l’Angleterre »1 Cette citation de Michel POUSSE est significative des rancœurs profondes qui animent le peuple français contre son voisin anglais. On est en droit de se questionner sur les point suivants : Ce contexte historique épineux influence t-il notre relation actuelle avec les anglais ? Les relations rugbystiques franco-anglaises sont elles fondées sur une rivalité d’identité nationale ? En d’autres termes les rapports qu’entretient le peuple français avec leurs homologues britanniques ont-ils une portée métaphysique ? Chaque rencontre sportive porte-elle le poids de siècles d’histoire ? Sommes-nous plus attachés à ce que représente l’anglais qu’à ce qu’il est vraiment ? Au vue de la richesse de ce sujet, cette liste de questions est naturellement non exhaustive. Nous nous attacherons donc par ce mémoire, à démontrer le bienfondé des croyances collectives affirmant que les facteurs historiques, politiques, militaires, culturels et sportifs sont les principaux responsables des sentiments ambivalents animant les peuple français et britannique. 1 « Rugby : les enjeux de la métamorphose », p.85, Michel POUSSE, éd l’Hamatton (2004) 4 Méthode de réponse à la question de recherche : Dans une première partie, consacrée à l’étude théorique de notre sujet de recherche, nous nous appuierons sur l’étude menée par Andy Smith dans son ouvrage « La Passion du Sport : Le Football, le rugby et les appartenances en Europe » publié en 2001. Andy SMITH est chargé de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques. D’origine anglaise mais basé en France depuis douze ans, il travaille au laboratoire CNRS le CERVL (Pouvoir, action publique, territoire) à Bordeaux. Son thème principal de recherche concerne les enjeux politiques et sociaux à l’intégration européenne. Cela va permettre d’éviter les écueils relatifs à des études désuètes, et de proposer un fonctionnement basé sur une analyse historique expliquant en partie les résultats de l’étude empirique. De plus s’appuyer sur les écris d’un anglais converti nous dirigera vers des analyses moins biaisées par ma propre appartenance nationale. La seconde partie sera donc consacrée au poids de l’histoire dans l’élaboration de notre représentation de l’autre. C'est-à-dire que nous analyserons la prégnance de l’histoire de sa nation dans les relations avec un autre peuple. Il s’agit là d’analyser des relations aussi sensibles, aussi anciennes, aussi complexes que celles existant entre la France et la Grande-Bretagne, dont les gouvernements et les peuples se sont frottés l’un à l’autre, avec plus ou moins d’hostilité, depuis plus de mille ans. Bien sûr cette analyse historique se bornera à trois phases historiques et sportives charnières et représentatives de différents positionnements par rapport à l’autre nation, repérées comme suit : De 1880 à 1900 L’entre-deux-guerres Les années Thatcher/Blanco Nous essayerons d’établir un parallèle entre évolution sportive et relations politiques qui nous permettraient d’établir une chronologie de l’évolution des rapports francobritanniques et qui expliquerait en partie la situation actuelle. 5 II. Cadre théorique Cet ouvrage fait état d'une recherche menée auprès de personnes qui suivent le football et le rugby dans l'objectif de cerner leur sentiment d’appartenance au territoire. En ciblant les régions spécifiques de deux Etats nations (les Midlands en Angleterre, le Bordelais et Montpellier en France), l'enquête interroge les pratiques variées de supporterisme afin de mieux comprendre comment cette partie de leur vie quotidienne informe et révèle leurs découpages mentaux de l'espace et du temps. Ce qui va être pertinent pour notre étude, c’est la définition du sentiment d’appartenance qu’il soit national ou plus local. En effet les différentes représentations que l’on a d’autrui, sont construites sur notre propre identité. C'est-à-dire que de par la définition de notre propre identité et appartenance sociale, nous agissons directement sur la manière de considérer « l’autre ». Comme l’explique Andy SMITH dans son ouvrage, les recherches concernant les évolutions sportives et leurs impacts dans la construction sociétale, ont souvent été « investies sous l’angle d’une construction politique et économique ». Il explique de plus que ces études portaient souvent sur les décisions de castes dirigeantes et constituaient en cela « une vue aérienne » et pas forcement révélatrice d’une réalité de terrain. Cet ouvrage de M.SMITH va permettre d’enrichir et de nuancer mon raisonnement. Ainsi le conflit social est défini par deux termes : « Selfness » (le sens de soi) et « Otherness » (la perception d’autrui). Ces termes se posent alors comme points centraux de l’explication de liens sociologiques entre deux entités. Cette définition exclut donc les représentations simplistes des problèmes sociaux souvent relayées par les médias autour de schémas de pensée étatisés. « Engouement populaire où chauvinisme et nationalisme se confondent »2 La méthode sera résolument comparative et quantitative. Comparative, car pour analyser les fondations de représentations mentales actuelles, il est nécessaire de comparer le cheminement des échanges sociétaux (politiques, cultures, militaires, sportifs…) entre deux entités riches d’échanges perpétuels. Notre étude portera donc sur ces deux nations que sont la France et L’Angleterre. Leur richesse historique et leur proximité géographique font de ces deux nations des sujets d’étude adéquats. Le choix d’un domaine comparatif particulier a été influencé par deux éléments : mes propres interrogations concernant un phénomène qui m’était extrêmement familier et que je ne pouvais expliquer et par l’ambiguïté ambiante des rapports franco-britanniques dans ce domaine. Ainsi nous opterons pour une étude comparative entre les évolutions des 2 « Rugby et identités masculines à l’épreuve des rencontres internationales », p.268, P-F GROS, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 6 échanges rugbystiques et des échanges sociétaux (politique, culturels,…). Cette partie comparative sera une base à la réflexion et mettra seulement en exergue quelques points comparatifs avérés. La plupart des comparaisons et des liaisons sportivopolitiques référeront et serviront directement la problématique sans toutefois se poser comme vérité absolue. Quantitative, car l’opportunité de toucher un public cible précis et qui sera extrêmement réceptif ne se présente pas de façon régulière. Aussi c’est à l’occasion de l’affrontement entre la France et l’Angleterre du samedi 20 mars 2010, comptant pour le tournoi des 6 nations, que 70 questionnaires ont été administrés aux présents (Français, Anglais ou Autres) dans les alentours du Stade de France. Les individus proches de ce genre de match « au sommet » ont souvent des motivations, des représentations et une certaine culture propres au rugby. Ils se définissent comme étant les plus à même de représenter une population extrême au niveau des représentations sociales. Relativiser et modérer les résultats d’une étude sur un public extrême (au niveau des ressentis), nous amènera à des conclusions se rapprochant d’une certaine réalité. Notre approche reposera sur les thèmes que sont les représentations sociales, l’identité (personnelle ou nationale) et l’altérité, le rapport aux autres. - Représentations sociales : Les représentations sociales sont par définition « des phénomènes complexes, toujours activés et agissant dans la vie sociale »3. Elles sont composées d'éléments divers qui ont longtemps été étudiés de façon isolée : attitudes, opinions, croyances, valeurs, idéologies, etc. Si « représenter ou se représenter correspond à un acte de pensée par lequel un sujet se rapporte un objet »4 alors les représentations sociales sont une manière de penser, de s'approprier, d'interpréter notre réalité quotidienne et notre rapport au monde. D’après Jodelet, « la représentation sociale est une forme de connaissance socialement élaborée et partagée *…+ ». Elle ajoute de plus que ces représentations sociales permettent de structurer une réalité commune à un ensemble d’individu et élaborer une sorte de « savoir naïf ». C'est-à-dire que ce savoir ne repose sur aucun fait scientifique mais se pose comme une référence à un ensemble d’individus. Les 3 www.psychoweb.fr JODELET (D.). 1984. Représentations sociales : phénomènes, concepts et théorie. In : MOSCOVICI.(S) ; Psychologie sociale. Paris, PUF, p. 357-378. 4 7 représentations sociales sont donc indissociables d’une définition du groupe social auquel elles se référent. Ce qui est alors intéressant c’est de s’attarder sur les bienfondés de ce savoir de sens commun. En effet comprendre et justifier des représentations sociales revient à réfléchir aux conditions et aux contextes dans lesquels émergent les représentations. Aussi mènerons-nous une étude portée sur les faits qui ont alimentés ces cheminements de la pensé et orientés les croyances collectives. Ce dernier point nous renvoie logiquement au deuxième concept de base, l’Identité Nationale. - L’Identité nationale Avant d’être un concept sociologique, l’Identité Nationale est à l’heure actuelle, plus un enjeu politique. Il suffit de parcourir le site gouvernemental www. debatidentitenationale.fr, pour comprendre l’engouement autour de la question d’appartenance. Aussi c’est dans une société dite en crise et où le rattachement à un groupe identitaire permet une certaine sécurité de l’individu, qu’un « débat national » a vu le jour avec pour thème principal « que signifie, en ce début de 21ème siècle, « être Français ».»5 Ce débat s’est officiellement achevé le 4 février 2010, mais le « buzz » reste entier. Nous nous attacherons moins à ce débat, peut être échappatoire d’un gouvernement en perte de popularité et voulant justifier une politique restrictive de l’immigration, qu’au concept même d’identité nationale. Aussi l'identité nationale d'une personne se définit comme une intériorisation de repères identitaires dus à une présence quotidienne de « points communs » de la nation, de manière intime, pratique (échanges économiques, pratiques sociales diverses, souvent la langue parlée) et symbolique (références symboliques concrètes ou intellectuelles), organisée souvent volontairement par l'État auprès des individus dès leur enfance (à travers l'école, la radio, la télévision, entre autres), et, de manière générale, l'identité d'une personne n'est pas figée, elle évolue et correspond à un « parcours de vie »6. Cette identité nationale influe de manière implicite sur nos représentations sociales, sur nos comportements, sur notre rapport à l’autre car c’est ce « *…+ qui nous permet de définir ce qui nous importe et ce qui nous importe pas *…+ nos identités définissent 5 http://www.debatidentitenationale.fr Dorian Chotard, « "On ne crée pas un sentiment d'appartenance avec des injonctions", entretien avec Olivia Samuel, démographe et enseignante-chercheuse à l'université de Versailles-Saint-Quentin, sur LeMonde.fr, 27 octobre 2009 6 8 l’espace de distinctions qualitatives au sein duquel nous vivons et nous effectuons nos choix »7. De plus, comme le fait remarquer Joël ROMAN dans la revue « Ecarts d'identité », ce sentiment d’appartenance nationale est souvent décuplé lors de menaces directes à la nation. Aussi dans le contexte où les rencontres sportives sont considérées comme des joutes modernes où chaque équipe porte le poids des aspirations de sa nation, on peut considérer le sport comme facteur de poussées identitaires nationalistes importantes. Nous utiliserons une représentation restreinte de l’identité en rapport avec les représentions sociales, car elle va permettre de mettre en exergue la part prise par un sport comme le rugby dans l’évolution du sentiment d’appartenance nationale qui va influencer notre rapport à l’autre. - L’Altérité Le concept d’Altérité vient compléter celui de l’identité, dans la mesure où, comme le défini Andy SMITH, « l’auto-représentation (selfness) » est indissociable et en perpétuel connexion avec la représentation de l’autre « otherness ». L’identité nationale s’élabore ainsi par un dialogue avec l’autre. Les représentations sociales, le sentiment d’appartenance nationale sont des concepts abstraits sans rapport à l’autre. Cette présentation théorique va poser les bases de notre compréhension des rapports franco-britanniques. Aussi nous essayerons à travers une étude historique de vérifier les bienfondés du « savoir naïf » constitutif des représentations sociales et de l’identité nationale. Au vue de la richesse des échanges franco-britanniques, nous nous bornerons à des périodes échantillons entre la deuxième moitié du XIXe siècle et aujourd’hui. Aussi sans en avoir la certitude, nous admettrons que ce choix est représentatif des différents schémas types existants entre ces deux nations que sont la France et l’Angleterre. Cette démarche historique sera suivie d’une étude empirique qui fera office de mise à l’épreuve des hypothèses formulées à la suite de la première partie. 7 «Les sources du moi : la formation de l’identité moderne » Charles Taylor, Montréal, Boréal (1998) 9 III. Etude historique : Trois positionnements politico-rugbystiques Cette phase de notre mémoire consiste en la recherche historique de facteurs influant sur les représentations sociales actuelles. C'est-à-dire que de par une analyse historicosportive, et sans prétention, nous essayerons d’établir les principaux schémas d’interactions entre les deux puissances historiques de l’Europe (sans compter l’Allemagne et considérant la Russie hors Europe) que sont la France et l’Angleterre. Cet essai est une pente glissante et il est important de rester dans le champ scientifique. En effet les analogies et les raccourcis socio-historiques servent souvent les hypothèses bancales. Et essayer de mettre en rapport des interactions sportives et sociétales n’est pas une mince affaire. Ainsi, selon les dires de monsieur Andy SMITH, dans son ouvrage « La passion du sport : le Football, le rugby et les appartenances en Europe », « l’altérité au sein de cet espace comporte généralement un caractère superficiel qui reflète peu l’épaisseur de ces rapports mis en lumière par maintes études sociologiques et anthropologiques. Améliorer la compréhension mutuelle des peuples de l’Europe est vite dit et rapidement transformable en homélie ». Une homélie est un commentaire de circonstance prononcé par le prêtre ou le diacre lors d’une messe catholique. Il ne faut pas que des pseudos rapports scientifiques se transforment en parole d’évangile. Ce que nous chercherons donc à établir à travers cette deuxième partie ce sont des modèles relationnels des rapports franco-anglais se résumant à des faits historiques. Tout cela sera avéré (ou non) par une analyse empirique sur les rapports actuels dans la troisième partie. Ce mémoire ne fera pas office de référence mais sera le point de départ d’une réflexion et d’une recherche approfondie sur le sujet épineux des rapports entre nations et de l’identité nationale. 1. De la genèse du Rugby à l’Entente Cordiale Cette première période est le siège du faste et de la reconstruction. Etudier les années 1871-1904, permet de mettre en avant les échanges entre une nation en état de grâce avec un pays dans une position moins favorable. Cette période est aussi marquée par l’apparition de nouvelles pratiques physiques codifiées, les sports. Ainsi comprendre les causes de l’apparition et les évolutions originelles d’un sport comme le rugby va permettre de mieux appréhender les représentations actuelles. Aussi afin de mieux cerner les enjeux de ces années conflictuelles, nous commencerons par un repositionnement historique. 10 a. Positionnement historique A l’aube du XX e, les rapports franco-britanniques sont des plus houleux. En effet la dizaine d’années précédant la signature de L’Entente cordiale en 1904 fut une époque de contentieux majeurs qui amenèrent la France et l’Angleterre au bord de la guerre. Cette première partie nous permettra d’étudier les rapports rugbystiques franco-anglais à une époque de forte tension politique. Il semble nécessaire pour étudier la période de 1871 (Création de la Rugby Football Union en Angleterre, la première fédération nationale du rugby) à 1904 (Date de l’établissement de l’Entente Cordiale) de resituer différents faits sociétaux antérieurs comme la bataille de Waterloo ou l’instauration de la IIIe République Française. Ces événements majeurs vont poser les bases des perceptions intra-nationales. i. 1815 : Bataille de Waterloo La bataille de Waterloo s'est déroulée le 18 juin 1815. Elle s'est terminée par la victoire décisive de deux armées : celle des alliés composée principalement de Britanniques, d'Allemands (contingents du Hanovre, du Brunswick, du Nassau) et de Néerlandais, commandée par le duc de Wellington, et celle des Prussiens, commandée par le maréchal Blücher ; toutes deux opposées à l'armée française dite Armée du Nord emmenée par l'empereur Napoléon Ier. La commune de Waterloo se situe à une vingtaine de kilomètres au sud de Bruxelles, en Belgique. Mais les combats n'eurent pas lieu à Waterloo mais un peu plus au sud, sur le territoire des communes actuelles de Lasne et de Braine-l'Alleud. La bataille a souvent été appelée en France « bataille de Mont Saint-Jean », lieu plus précis de l'engagement effectif. En Allemagne, elle est appelée « bataille de la Belle-Alliance ». Cette bataille est la dernière à laquelle prit part directement Napoléon Bonaparte, qui avait repris le contrôle de la France durant la période dite des Cent-Jours. Malgré son désir de poursuivre la lutte avec de nouvelles forces qui se reconstituaient, il dut, par manque de soutien politique, abdiquer quatre jours après son retour à Paris. Les principales causes de la défaite française sont les suivantes : Du côté français : Sous-estimation par Napoléon de la cohésion des troupes alliées et prussiennes, mauvaises transmissions et ambiguïté des ordres, manque de coordination des armes (Jérôme attaque Hougoumont sans préparation d'artillerie ; Ney lance des charges de cavalerie en oubliant son infanterie), mauvaise gestion tactique. 11 Du côté allié et prussien : Cohésion meilleure que ce qu'on pouvait attendre de l'armée de Wellington, pourtant composée de troupes de multiple provenance. Connaissance du terrain par Wellington qui avait repéré les lieux un an avant et a décidé du lieu de la bataille. Sang-froid et ténacité des troupes alliées dont très peu d'éléments se débanderont malgré les attaques répétées des Français, combativité et allant des troupes prussiennes jamais découragées par les revers initiaux. Cette défaite met en évidence le peu de considération accordée aux pays limitrophes à l’hexagone par la caste dirigeante française. Cette défaite marquant la fin d’un empire est si prégnante qu’elle est encore aujourd’hui utilisée comme expression populaire. ii. 1870 : La IIIe république La Troisième République est le régime politique de la France de 1870 à 1940. La Troisième République est le premier régime français à s'imposer dans la durée depuis 1789. Après la chute de la monarchie absolue, la France a expérimenté sans succès sept régimes politiques en 80 ans. Ces difficultés contribuent à expliquer les hésitations de l'Assemblée nationale, qui va mettre neuf ans, de 1870 à 1879, pour trouver la voie du nouveau régime. Les délibérations vont progressivement aboutir à instaurer une République parlementaire de type bicaméral, où les deux chambres de l'Assemblée Nationale, la Chambre des députés et le Sénat, ont quasiment les mêmes prérogatives. La République est proclamée le 4 septembre, au balcon de l’hôtel de ville de Paris. Un gouvernement de la Défense nationale est constitué avec à sa tête le général Trochu. Sont également membres de ce gouvernement Jules Favre, Jules Ferry, Léon Gambetta, Ernest Picard, Henri Rochefort, Jules Simon, tous élus de Paris. De plus, la conclusion des deux premières républiques par la dictature d’un empereur milite pour une limitation du pouvoir exécutif : le coup d’État de Napoléon III, premier président élu au suffrage universel masculin, est encore un souvenir vivace. Sous la Troisième République, le président aura un rôle essentiellement représentatif. Il aura un rôle important dans la mise en place de relations de plus en plus amicale avec l’Angleterre « La réconciliation avec l’Angleterre est l’obsession de Napoléon III. A l’occasion de son premier voyage en France, il réserve à la reine Victoria des fastes que Versailles n’avait pas connus depuis la monarchie »8 Dans un premier temps, la dynamique créée va implanter en France une solide tradition républicaine, grâce en particulier à l'école obligatoire, publique et laïque. Dans un 8 www.chateauversailles.fr 12 second temps, l'usure et un affrontement éprouvant avec l'Allemagne vont mettre en évidence les conséquences néfastes d'un affaiblissement trop marqué du pouvoir exécutif et entraîner la chute du régime9. A part les volontés de Napoléon III, les aspirations françaises de l’époque étaient incarnées par 2 personnalités marquantes : - Jules Ferry : Il fut tour à tour chargé de l’éducation nationale et des affaires étrangères. Il relance l’expansion coloniale par de nombreuses entreprises audacieuses (protectorat de la France sur la Tunisie à la barbe de l’Italie (1881) et sur l’Annam et le Tonkin contre la Chine (1885)). - Le Général Boulanger : Le général Boulanger est ministre de la guerre en 1886. Très populaire parmi les déçus du nouveau régime et les Revanchards (il est surnommé le « général Revanche »), il est considéré par les Opportunistes comme un danger pour la République et la paix. Tout deux participaient, de par la relance de l’expansion coloniale et par le développement de l’esprit « revanchard », à une montée forte du patriotisme. Ces axes de développement remettaient en cause supériorité coloniale britannique, ce qui n’était pas pour plaire aux Anglais. b. Rapprochement unilatéral sportif et égarement politique Les années 1871-1900 vont être le point de départ de notre réflexion. Nous allons faire le parallèle entre les relations qu’entretiennent la France et l’Angleterre dans les domaines rugbystiques et politiques. Ainsi nous verrons si ces domaines peuvent être assimilés, regroupés dans une politique d’ensemble avec un schéma relationnel type. 9 La Troisième République prit fin de facto le 10 juillet 1940 par la délégation des pleins pouvoirs constituants au maréchal Pétain. Le référendum du 21 octobre 1945, organisé par le Gouvernement provisoire de la République française, adoptant la loi constitutionnelle de 1945, prépara l'avènement de la Quatrième République, par la Constitution du 27 octobre 1946. 13 i. Rapprochement unilatéral sportif Le Rugby est un jeu inventé dans les collèges britanniques est codifié en 1871 par la Rugby Union qui formule les règles et favorise son implantation d’abord au cœur de l’Angleterre puis dans les des nations britanniques que sont l’Ecosse, le Pays de Galles et l’Irlande et enfin dans les terres de l’Empire britannique. Le rugby participait ainsi à « la promotion et l’édification d’un idéal de masculinité dans la culture anglo-saxonne »10 Ce jeu au ballon ovale et aux règles complexes fut le symbole des castes bourgeoises britanniques qui voyant en celui-ci l’outil de leur différenciation sociale. La source du succès actuel du rugby se situe donc en Angleterre où la codification des règles favorisa la multiplication des rencontres entre les collèges mais aussi les universités. Plusieurs auteurs notent que le rugby touche dans les années 1880 plus de joueurs que le football. Le jeu qui a rapidement gagné l’Ecosse et l’Irlande est pratiqué dans les universités d’Edimbourg, Glasgow et Saint Andrews d’une part et au Trinity College de Dublin comme au Queen’s College de Belfast d’autre part. Les étudiants, de retour dans leurs villes et installés comme notables ou capitaines d’industries n’hésitent pas à former des équipes et des clubs et à organiser des fédérations et des championnats. Cette diffusion géographique s’accompagne souvent « d’un élargissement social »11 dans la mesure où pour former des équipes puis des clubs, les initiateurs font appel aux jeunes gens disponibles qui ne sont pas passés par les Public Schools. Ainsi, dans les régions industrielles du nord de l’Angleterre, dans le Lancashire, le Yorkshire, le Cumberland, mais aussi en Ecosse dans la région textile de la Border, se constituent des équipes socialement composites qui favorisent la pratique dans une visée mêlant le consensus social et l’emblématique nationale. Au-delà des différences nationales, c’est l’organisation des rencontres internationales qui donne au rugby britannique sa dimension particulière et sa cohésion. Le premier match international a lieu au stade d’Edimbourg entre l’Ecosse et l’Angleterre le 29 mars 1871. L’Irlande en 1875 et le Pays de Galles en 1881 s’inscrivent dans ce concert. En s’institutionnalisant, le rugby crée un esprit de communauté sportive et propose la dignité internationale aux meilleurs joueurs dont les noms s’affichent ostensiblement dans les club-houses. L’International Rugby Board créé en 1888, réunit les représentants de la Rugby Football Union (1871), de la Scottish Football Union (1873), de l’Irish Rugby 10 « Rugby et identités masculines à l’épreuve des rencontres internationales », p.267, P-F GROS, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 11 « Le Rugby en Australie et en France : des diffusions et des implantations différenciées », p.162, JP AUGUSTIN et Hélène JONCHERY, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 14 Football Union (1875) et de la Welsh Football Union (1881). Ce Board se positionne pour un amateurisme absolu interdisant toute compensation aux pratiquants. Cette rigueur entraîne plusieurs crises dans les équipes du nord de l’Angleterre qui sont composées d’ouvriers et la création à partir de 1893 de la Northern Union qui devient la Rugby League et admet le manque à gagner puis la rétribution des joueurs et la formation d’équipes de 13 joueurs. On l’aura compris le Rugby est à cette époque une activité sportive de gentleman britannique voulant se distinguer de la classe populaire par une pratique totalement amateur. Le rayonnement de cette nouvelle activité ne tarda pas à toucher les côtes française et c’est ainsi qu’en 1872 est fondé par des marchands anglais Le Havre Athletic club rugby. Ce rapprochement rugbystique tient à la proximité géographique, économique et politique des deux pays et à l’influence des pédagogues français qui ont étudié les systèmes éducatifs de la Grande Bretagne et mesuré le rôle qu’y jouait le sport. Ce jeu fut « délibérément choisi, dans le cadre d’une grande place dévolue au sport, sur le modèle Anglais des Publics Schools »12 et développé notamment dans des établissements d’avant-garde. Pierre de Coubertin est, parmi d’autres, un admirateur des méthodes sportives et des activités de plein air organisées outre Manche. Il considère que le jeu et le sport participent à la préparation des individus pour la concurrence internationale. Ses conférences et ses écrits sont des exhortations pour préparer des hommes capables de faire front à la compétition industrielle dans le cadre d’un patriotisme élargi. Durant l’année 1892, décisive pour le développement du sport en France, il affirme dans les "Sports athlétiques" que le jeune homme qui joue au rugby est mieux préparé qu’un autre au match de la vie. « Le rugby est donc le sport élu par Coubertin et devient rapidement le premier sport collectif du mouvement sportif français »13. Alors qu’en Allemagne la nation se forge dans les sociétés de gymnastique, en France, sur le modèle anglais, les pédagogues tentent de former des caractères à partir des sports de plein air et particulièrement du rugby. La diffusion des sports collectifs dans le reste de l’Europe est plus tardive et se réalise à un moment où la pratique du football se généralise. 12 « Le Rugby à Paris avant 1914 »,p.91 de Belhost, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 13 « Le Rugby en Australie et en France : des diffusions et des implantations différenciées », p.171, JP AUGUSTIN et Hélène JONCHERY, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 15 L’expansion du rugby français se fit d’une manière disparate : - D’abord au niveau des côtes atlantiques (1872 : Le Havre Athletic Club) - Puis par la capitale (1882 : Racing Club de France) - Et enfin en remontant légèrement du sud-est pour toucher tout le sud de la France. (1885 : Bordeaux ; 1896 : Lyon Ouest ; 1899 : Le Stade Toulousain,…)14 Il faut dire que le développement de cette pratique dans l’hexagone n’était pas encouragé par les créateurs britanniques mais seulement présent sous forme « d’initiateurs, de formateur, mais aussi de meneurs de jeu »15. Aussi tandis que le premier match international a lieu au stade d'Édimbourg entre l'Écosse et l'Angleterre le 27 mars 1871, la France doit attendre 35 ans pour avoir une équipe qui puisse être confrontée aux équipes nationales britanniques. (Sans compter les rencontres d’équipes diverses mais non nationales, telles que l’U.S.F.S.A contre le Civil Service Athletic Club en 1893 ou contre les Ecossais en 1896) Sur le plan sportif et plus précisément rugbystique on peut définir cette période par les traits suivants : Admiration et inspiration du système de pédagogie anglais axé sur un apprentissage complémenté par une pratique rugbystique, par les français. Rejet des aspirations françaises, quand à la volonté d’exister sur la scène internationale, par les dirigeants britanniques. ii. Egarement politique Si l’on peut résumer les axes majeurs des politiques des années 1880, elles seraient fondées sur les empires coloniaux. Nous allons étudier les empires coloniaux français et britanniques, leurs états dans les années 1880 et en quoi ils furent le siège des principales frictions entre ces deux puissances. Entre 1870 et le déclenchement de la Première Guerre mondiale, l’idéologie de l’expansion coloniale européenne est souvent appelée le nouvel impérialisme. Cette course eut surtout lieu en Afrique, qui n’était pas accessible auparavant à cause du 14 http://pedagogie.ac-toulouse.fr « Le Rugby à Paris avant 1914 », p.99 de Belhost, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 15 16 manque de médicaments comme la quinine pour traiter les maladies endémiques, et en Asie du Sud-est. L’empire colonial français est l'ensemble des territoires ultramarins colonisés par la France. Commencé au XVIe siècle, il a connu une évolution très contrastée selon les époques, aussi bien par son étendue que par sa population ou sa richesse. Après une première période faste et un déclin à la fin du 18e siècle, l’Empire Colonial Français connut un regain de vigueur à partir de 1830 date à laquelle il est alors composé principalement de régions d'Afrique, acquises à partir des anciens comptoirs, mais aussi d'Asie (Indochine) et d'Océanie (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Nouvelles-Hébrides). Ce Second empire colonial fut de la seconde moitié du XIXe siècle et au XXe siècle le deuxième plus vaste du monde, derrière l'Empire colonial britannique qui était un ensemble territorial composé des dominions, colonies, protectorats, mandats et autres territoires gouvernés ou administrés par le Royaume-Uni. Les Empires facilitaient la propagation des technologies, l'essor du commerce, de la langue des nations française et britannique à travers le globe. Cette hégémonie contribua à l’expansion économique extraordinaire et renforçait considérablement son influence sur l’évolution du monde. Tout en étendant son emprise outre-mer, il continua à développer et élargir ses institutions démocratiques dans la métropole. L’entrée du Royaume-Uni dans cette course à l’expansion coloniale, date de 1875 quand le gouvernement conservateur acheta à Ismaïl Pacha dirigeant endetté de l’Egypte, ses parts du canal de Suez pour s’assurer le contrôle de cette voie maritime stratégique ouverte six ans auparavant, avant de finalement occuper militairement la zone en 1882. Ce fut sur les terres d’Afrique que les frictions franco-britannique furent les plus vives. La France, présente sur de nombreuses côtes (Maroc, Madagascar), contrôle en partie la route maritime vers les Indes et compte assoir cette position dominante, par l’acquisition de parts du Canal de Suez (la France était l’initiatrice du projet et détient 52% des actions de la société d’exploitation). Ce canal bouleverse alors la donne géopolitique et remet en question la souveraineté de l’empire colonial britannique. Le premier Empire décide alors de racheter des actions du canal et d’envahir l’Egypte au nez et à la barbe des Français (Crise de Fachoda). Dans l’imaginaire collectif français, la crise de Fachoda marqua une profonde humiliation infligée par l’archétype d’un Royaume-Uni triomphant et hautain, forcément de mauvaise foi. En somme, l’image même de la « perfide Albion » abondamment relatée par la presse et les caricaturistes de l’époque. 17 Le manque de concertation franco-britannique sur la question égyptienne est bien réel et c’est cette absence de dialogue qui a conduit à la crise. Le gouvernement britannique, conscient de sa supériorité, rechignait également à discuter des questions importantes avec une France dont l’instabilité gouvernementale déroutait les dirigeants britanniques et influait sur la cohérence de sa politique extérieure. Cette époque marqua donc une réelle scissions entre ces Nations voisines et ne laissa présager que davantage de frictions et conflits politiques. Le revers de 1815 incarnait la supériorité des Britanniques et cantonnait le peuple français à celui d’un ennemi turbulent mais peu menaçant. Le sentiment revanchard, porté par des figures patriotiques de la IIIe République, atteint son apogée lors de conflits militaires à la fin du 19e siècle. Toutefois, l’échec français à Fachoda fut un choc salutaire qui permit aux deux ennemis irréductibles de sortir de cette logique d’affrontement en recadrant leurs politiques étrangères respectives, ils se tournèrent alors contre l’adversaire commun qu’était devenue l’Allemagne. Au début du 20e siècle, les rapports entre la France et l’Angleterre sont relativement détériorés. Les français sont vexés des revers de leur empire colonial mais ne cessent d’admirer le système pédagogique britannique, « la domination anglaise sur le marché mondial et ses réussites coloniales et industrielles font de l’Angleterre un rival mais surtout un modèle ».16 Dans le même temps, les Anglais sont au sommet de l’impétuosité, s’imposant comme le premier empire colonial et refusant de déléguer la gestion de ses inventions sportives. Le monde de l’ovalie est alors partagé entre une volonté française de développement et d’imitation du système anglais et un rejet des britanniques. Au niveau des relations politiques, l’Empire britannique ne peut se résoudre à descendre de son trône et va tenter d’écraser publiquement l’empire français qui le talonne. Il faut relativiser ses conclusions, car il semble difficilement pertinent de comparer deux domaines avec une énorme différence maturité. (Les empires ont plus de 4 siècles alors que le rugby est à peine âgé d’une décennie) 16 « Le Rugby en Australie et en France : des diffusions et des implantations différenciées », p.170, JP AUGUSTIN et Hélène JONCHERY, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 18 c. Entente Cordiale, entente désirée i. Entente Cordiale Le 8 avril 1904 est officialisée l'Entente cordiale entre le Royaume-Uni et la République française. Il ne s'agit pas d'une alliance mais d'un simple accord destiné à aplanir les différends coloniaux entre les deux ennemis héréditaires. En effet il ne faut pas oublier que 6 ans plus tôt, la France et l’Angleterre étaient sur le point d’entrer en guerre suite à la crise de Fadocha. Cette humiliation vécue par les français est encore dans toutes les mémoires et explique le soutien du peuple français pour les Boers d’Afrique du Sud dans leur guerre avec Londres. Cette Entente Cordiale est expliqué en partie par la monté d’une nouvelle puissance européenne. Avec la création en 1882, de la Triple Alliance regroupant l’Allemagne (du chancelier Bismarck), l’Autriche-Hongrie et l’Italie. C’est alors l’équilibre européen qui est remis en cause. L’Angleterre prend alors conscience de son isolement et de son incapacité à faire face à tous les grands d’Europe (La Triple Alliance, la France, la Russie) en même temps. Aidée par le ministre des affaires étrangère Théophile Delcassé, qui ne digère pas la perte de l’Alsace-Lorraine en 1871 au profit de l’Allemagne, et par un amoureux du gai Paris le roi d’Angleterre Edouard VII, de nouveaux liens se tissent entre les nations voisines. Malgré une anglophobie ambiante, la tournée parisienne d’Edouard VII en 1903 marqua le début de l’Entente Cordiale. L'accord, réduit à quatre articles, est enfin signé à Londres par le secrétaire au Foreign Office, Lord Lansdowne, et l'ambassadeur Paul Cambon. Il ne s'agit en aucune façon d'une alliance (il n'est pas encore question de se porter secours en cas d'agression). – L'accord résout en premier lieu un litige sur le monopole français de la pêche à la morue dans les eaux de Terre Neuve en échange de quelques avantages concédés à la France au Soudan. – Il règle quelques difficultés au Siam (Thaïlande), à Madagascar, aux NouvellesHébrides.... – Il précise surtout les objectifs immédiats des deux grandes puissances impérialistes du moment : Paris laisse les mains libres à Londres en Égypte et, en contrepartie, se voit reconnaître une liberté d'action au Maroc. 19 En définitive, l'Entente cordiale va se renforcer d'année en année jusqu'à déboucher sur une alliance pleine et entière dans la Première Guerre mondiale dix ans plus tard. La France et l’Angleterre savent alors mettre de côté leurs différends, pour faire face à un ennemi potentiel commun. i. Entente désirée Bien que sur le plan des relations internationales, la France soit davantage prise en considération, son rugby est quand à lui toujours délaissé. Ainsi c’est seulement 2 ans après l’instauration de l’Entente Cordiale que se joue le premier match officiel entre la France et l’Angleterre. Mais en 1910, le «traitement accordé aux Français était très rude » et l’équipe de France restait « très peu estimée »17. La défaite des français 8 à 35 est, bien que conséquente, considérée comme honorable et amène les britanniques (Anglais puis Gallois et Irlandais) à effectuer une rencontre annuelle contre le XV de France. Il faut ajouter à cela la prépondérance de l’engouement populaire autour de ces rencontres. Au-delà du simple aspect sportif, c’est l’aspect financier qui prime et qui « entretient l’idée qu’ils sont matures pour disputer des rencontres internationales »18 Suite à plusieurs rencontres satisfaisantes, la France est admise pour la première fois en 1910, à participer au tournoi des 5 nations. Ceci marque le début d’une certaine reconnaissance du rugby français de la part des classes dirigeantes britanniques de l’IRB mais aussi des premières frictions directes. Ainsi en 1913, la lourde défaite subie par le XV de France «fut mise par une foule imbécile sur le compte de l’arbitrage de l’Anglais V.W Baxter, qui fut houspillé, malmené » ce qui fit réagir la presse britannique qui «s’enflamma, à juste titre »19. Cette intégration est aussi le moyen de « jauger la valeur ethnique et raciale des Etats via leur équipe sportive respective »20. Ils pouvaient ainsi, comme lors des premières tournées internationales, montrer leur supériorité par de larges victoires sportives. 17 « Le Rugby : De l’esprit de clocher à la Coupe du Monde » p.89 JP BODIS, éd Privat (1999) « De 1888 à 1987, une histoire singulière de l’internationalisation du jeu rugby : de la logique discriminante de tournées internationales à la genèse d’une coupe du Monde de rugby », p.160, Joris VINCENT, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 19 « Voyous et Gentlemen : Une histoire de rugby », p.105, Jean LACOUTURE, éd Gallimard (1993) 20 « Rugby et identités masculines à l’épreuve des rencontres internationales », p.268, P-F GROS, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 18 20 Cette entente désirée par les français ne fut que de courte durée et subit les affres de la première guerre mondiale. Le Rugby se posait donc comme une pratique élitiste en développement et n’était que partiellement affectée par des tensions politiques entre une Angleterre forte politiquement, colonialement et sportivement et une France admirative (sportivement) et résignée (faute de mieux) politiquement. La politique et le rugby français sont donc à mettre au compte d’une certaine admiration de la perfide Albion. Ce sentiment d’infériorité et d’impuissance ressenti en ce début de siècle par le peuple français, a son importance dans les représentations actuelles entre ces peuples. Le Rugby où l’appartenance nationale et régionale se fait particulièrement sentir et en fait un sport à mettre à part, se développe en France sans réelle reconnaissance internationale. Ainsi en muselant l’engouement populaire aux frontières de l’hexagone (hormis sur une ou deux représentations nationales par an), les britanniques, dirigeants de l’International Rugby Board, ont sans doute participé à l’enracinement profond du rugby dans quelques régions du Sud, et à la montée d’un sentiment revanchard national. Il ne faut cependant pas oublier que ce sport doit son développement en France, à la détermination de quelques expatriés britanniques. 2. 1914-1939 Entre alliance et rejet Ces vingt années de paix de l’entre-deux-guerres ont été marquées par un bouleversement durable des rapports de force internationaux, par l'émergence des idéologies totalitaires ainsi que par des progrès techniques considérables. Cette période charnière est intéressante pour notre étude car elle place les nations dans une situation de reconstruction généralisée. Ainsi nous verrons si le domaine sportif, et plus précisément le rugby suit les mêmes axes de développement de la politique général des nations françaises et britanniques, ou si il reste un domaine à part. La période de 1914 à 1919 ne sera pas étudiée, car la première guerre mondiale à entrainée un gel des pratiques sportives internationales (la dernière rencontre entre la France et l’Angleterre datant du 13 avril 1914). On ne peut donc faire aucun parallèle entre les différents domaines sociétaux. 21 a. Appauvrissement et éloignement des nations La 1e guerre mondiale affecta les nations victorieuses (comprenant la France et l’Angleterre) et engendra un appauvrissement généralisé dans la société comme dans le rugby. i. Bilan de la première guerre mondiale La première guerre mondiale laissa de nombreuses séquelles et fut l’origine d’un appauvrissement généralisé. Sur le plan humain, la Première Guerre Mondiale fut un désastre. Les pertes s’élevèrent à 9 millions d’individus et il y eut pas moins de 8 millions d’invalides. La France et l’Angleterre ont été durement touchées, elles ont perdu respectivement 1,4 millions et 1,2 millions d’individus (tués ou disparus). Pour donner un ordre d’idée des pertes que cela représente, c’est 10% de la population active masculine qui disparut avec cette guerre. A ce bilan s’ajoute un déficit des naissances et un vieillissement de la population. Du point de vue sportif, cette guerre fut pour le rugby une terrible épreuve, aussi bien du côté français « sur les 15 hommes qui composaient l’équipe de France en 1912, 9 tombèrent au champ d’honneur », qu’Anglais « c’est toute une génération qui fut sacrifiée ».21 L’Economie et l’industrie des nations sont au plus bas, doivent faire face à un déficit de main d’œuvre (50% des paysans sont morts dans ce conflit) et ont l’obligation de se reconvertir en économie de paix. Les années vingt sont alors les témoins d’une désorganisation généralisée. ii. La désorganisation généralisée des années 1920 La première moitié de la période a été appelée les Années folles essentiellement pour les ruptures dans le comportement social (nouvelles esthétiques artistiques transgressives, développement des transports, en particulier individuels, modification des codes de comportement, en particulier chez les femmes des classes supérieures et 21 « Le Rugby à Paris avant 1914 », p.111 de Belhost, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 22 moyennes). À partir de 1929, la crise économique et sociale et la montée des nationalismes étatiques agressifs créèrent une atmosphère de tension et de peurs. La France : Les années Folles prennent toutes leurs significations en France. Le lourd bilan de la guerre en France entraine la nouvelle génération à avoir des aspirations de monde nouveau avec comme refrain le « Plus Jamais ça ! ». Sur fond d’individualisme déchainé et extravagant, de nombreuses personnalités se révèlent (Marcel Proust, André Gide, André Breton), et deviennent les fers de lance d’une révolution culturelle et technologique (le jazz, les automobiles, la radio, l’électroménager...). Les Années Folles se caractérisent bien par cette volonté de paix intérieure d'une société qui veut profiter au maximum de la vie tant qu'elle le peut encore, les années à venir étant incertaines. C'est cette société qui se réjouit d'une paix retrouvée et qui découvre dans le même temps les bienfaits de la consommation en s'efforçant au final de prolonger au maximum cette situation de stabilité intérieure. L’Angleterre : Les premières années du XXe siècle gardaient encore la marque des attitudes et idéaux victoriens. La Première Guerre mondiale change radicalement la société britannique. La flotte commerciale et militaire a été en grande partie détruite. Le Royaume-Uni a du mal à assurer le commerce avec ses colonies, et l'activité économique ralentit. Pour reconstruire sa flotte le Royaume uni doit faire appel au crédit américain. Dans ce contexte économique délicat, le Royaume-Uni cherche à asseoir une vision pragmatique de l'Europe, à savoir celle d'un espace d'équilibre concurrentiel – où elle jouerait éventuellement un rôle d'arbitre. À ce titre, le pays s'efforce de convaincre la France de participer au redressement de l'Allemagne, mais essuie un net refus illustré par l'échec diplomatique de la Conférence de Gênes. iii. Les années 1930 Les années trente sont le théâtre d'une crise économique d’une ampleur mondiale déclenchée par le krach de 1929 et dont la principale conséquence sera l’exacerbation de la concurrence entre les nations : les rivalités économiques ouvrent la porte à des rancunes politiques plus anciennes, souvent nées d’ailleurs du règlement à courte vue de la Première Guerre mondiale. 23 Les années 1930 voient également le retour des nationalismes, tant en Europe, qu’en Amérique du Sud ou en Asie ainsi qu’un développement sans précédent des idéologies totalitaires, qu’elles soient de droite (fascisme, nazisme) ou de gauche (stalinisme). Hitler parvient à obtenir les pleins pouvoirs du Reichstag en 1933. Il impose progressivement sa dictature à l'Allemagne (Gleichschaltung). Il engage le pays dans une politique délibérément raciste et antisémite, et procède à un réarmement massif. Des conflits d'envergure mondiale, mettant aux prises de grandes puissances, annoncent le pire (Conquête de la Mandchourie par le Japon en 1931, invasion de l’Abyssinie par l’Italie en 1935, Guerre civile espagnole en 1936, etc.) alors que la Société des Nations, chargée de garantir la paix mondiale, s’avère en fin de compte impuissante. La France : Les répercussions de la crise de 1929 ne se font sentir en France que vers 1931. La production industrielle s'effondre, le pouvoir d'achat baisse et le chômage augmente : la soupe populaire nourrit les nouveaux sans-logis. La France connaît en outre une crise démographique : la natalité baisse, le pays vieillit. Incapables de résoudre la crise, l’IIIe République devient très impopulaire : une grande partie de l'opinion publique devient antiparlementaire. En 1934 éclate un scandale politico-financier (autour du financier Stavisky) qui favorise l'extrême-droite. Les ligues défilent place de la Concorde le 6 février 1934 : des heurts avec la police font 15 morts. Le président du conseil, Edouard Daladier, démissionne. Un an auparavant Hitler a pris le pouvoir en Allemagne, est-ce le tour de la France ? Face à cette menace, communistes et socialistes forment en Europe des "Fronts populaires" contre le fascisme. C’est notamment le cas en Espagne et en France. L’Angleterre : La grande dépression de 1929 frappe durement le nord de l'Angleterre et le Pays de Galles (70 % de chômeurs dans certaines régions). Année Nombre de Chômeurs 1921 1922 1923 1924 1925 1926 1927 1010000 2003000 1511000 1268000 1307000 1252000 1496000 Pourcentage de chômeurs sur le total de la population 6,4% 14,2% 13,3% 11,9% 11,2% 11,1% 12,1% 24 1928 1929 1930 1931 1336000 1453000 1479000 2663000 10,7% 12,1% 12,6% 21,5% Auparavant déjà, la grève générale de 1926 avait été proclamée en solidarité avec les mineurs et leurs salaires diminués. Les exportations étaient au plus bas et alors qu'entre 1913 et 1927 l'exportation britannique avait baissé de 21 %, celle du monde dans son ensemble s'était au contraire accrue de 18 %. (...) Après les crises partielles de 1921 et 1926, celle de 1929 va marquer une remise en question plus profonde du système de la «vieille Angleterre». En effet, ce système qui à fait de l’Empire britannique le plus grand au monde, doit faire face à une transformation complète du monde et montre ses limites. Il faut donc plus qu’une révision partielle, par quelques changements de castes gouvernantes, un changement de conscience collective. L'effort est plus difficile, c'est chaque Anglais qui doit modifier sa façon de penser, de travailler et même de vivre : il ne faut rien moins qu'une révision des bases mêmes sur lesquelles s'était fondée l'existence du pays. Ces années se virent donc dans le cadre de rapports internationaux difficiles. Bien qu’il y ait des effort de coopération entre les deux blocs naissants, les rivalités et tensions dues à la première guerre mondiale sont dans tous les esprits et bloquent la plupart des négociations internationales. La question cruciale du désarmement oscille de fiasco en fiasco tout au long de la décennie, 1933 marquant le tournant vers la dynamique inverse : un réarmement assumé et rapide. b. Développement de deux pratiques différentes : entre conservatisme et populisme « De l’autre côté de la Manche, les ballons de rugby n’ont jamais rebondi dans le jardin des pauvres »22. Le rugby est en Angleterre une affaire de Gentlemen. Pratique sportive servant à se différencier des classes populaire. Le rugby est pratiqué dans les Collèges pour former une élite supérieure sur le plan physique tout comme sur celui de l’esprit. Les dirigeants britanniques qui contrôlaient la propagation du rugby mondial par le biais de l’IRB, voyaient en cette pratique le moyen d’asseoir une domination, qu’elle soit sociale à l’intérieur des pays, ou coloniale à travers les différentes tournées des Lions Britanniques dans les colonies. 22 « Dictionnaire Amoureux du Rugby » p.28, HERRERO (D), éd Plon (2007) 25 Des règles tacites étaient donc mises en place, telles que la condamnation du professionnalisme ou la bonne tenue des joueurs sur et en dehors du terrain, pour conserver la noblesse de ce sport si britannique. Il est aussi à noter que le rugby britannique était «à l’image de la classe sociale qui dirigeait le pays : conservateur et peu ouvert »23. Ce style de jeu pragmatique et organisé est toujours la marque de fabrique du jeu à l’Anglaise. Le Rugby soutenu par les Anglais expatriés en France, le Baron Pierre de Coubertin et par un engouement de plus en plus retentissant, se développe de façon concrète et officielle le 11 octobre 1920 avec la création de la Fédération Française de Rugby. Ce fut un premier pas vers une acceptation internationale d’un mouvement rugbystique français. Bien qu’importée par nos homologues britanniques, la pratique rugbystique en France s’est enrichie et développée autour de cultures locales et d’une politique globale. En effet le sport scolaire était alors l’enfant pauvre du système éducatif et se résumait à la répétition de gestes rigoureux se référant à une tradition militaire. Les mots d’ordre étaient alors la discipline, le courage et l’obéissance aux chefs. Le Sport, phénomène encore nouveau, fut donc confié aux clubs civils. Dans un souci d’élargir le nombre de leurs pratiquants et d’améliorer leur compétitivité, la pratique rugbystique était ouverte à tous. Ainsi les clubs locaux recrutaient et formaient toutes les classes sociales et contribuaient à faire du rugby français, un sport populaire et intégrateur. « En Grande-Bretagne c’est l’appartenance à une certaine classe sociale qui permettait de jouer au rugby, alors qu’en France c’est de jouer au rugby qui améliorait le statut social »24 Cette particularité de développement marque la première grande différence avec la pratique d’outre-manche mais n’est source de réussite immédiate. En effet au cours des années 1920, les Français sortirent seulement « sept fois vainqueurs des quarante-trois affrontements contre les britanniques »25 . Le développement différencié de la même pratique du rugby peut être mis en relation avec les aspirations politiques de chaque nation. Ainsi le rugby Britannique est marqué par un élan conservateur et hermétique au changement, tandis que la pratique française est tournée vers l’intégration de toutes les classes sociales et le 23 « Rugby : Mythe et Réalité », p.354, Michel POUSSE, dans « La Planéte est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 24 « Rugby : les enjeux de la métamophose », p.44, Michel POUSSE, éd l’Hamatton (2004) 25 « Le Rugby : De l’esprit de clocher à la Coupe du Monde » p.73 JP BODIS, ed Privat (1999) 26 développement du spectacle sportif (en accord avec le développement culturel des années folles). Le krach de Wall Street de 1929, marqua la fin des années folles et le début de rapports politiques et sportifs différenciés. c. Réunion des forces militaires et césure rugbystique i. Césure rugbystique Le rugby français est alors en plein développement et connait son lot de dérives. Dans une période de crise, le pays se morcèle et le rugby passe d’un instrument de « socialisation nationale diffusant une culture patriotique », à un facteur de la « socialisation locale, véhiculant une culture communautaire »26. Ainsi les clubs s’approprient ce sport en qui ils voient le moyen de s’affirmer face aux autres clubs locaux. On vu alors l’apparition de joutes régionales où chacun représente non pas son équipe, son club, mais toute une culture locale. Ainsi mobilisé pour la défense de l’éthos local, le public rugbystique développe au fil des saisons sportives « une forme de chauvinisme agressif, dépassant le cadre du simple campanilisme sportif, qui se manifeste par des actes d’intimidation dirigés contres les arbitres et les joueurs ». Ce sont donc des sportifs et des supporters qui dérivent vers des affrontements de plus en plus agressif et amplis de haines inconsidérées. Les brutalités se font de moins en moins rares « 9 points de sutures pour le Gallois Day en 1930 touché par la lourde chaussure de Jean Galia »27, de plus en plus grave « Georges Rivière, talonneur de Quillan, meurt d’une fracture de la colonne vertébrale suite à une mêlée écroulée »28 et sont même partie intégrante de la tactique sportive, « De plus en plus les équipes utilisent des armes illicites pour affaiblir les adversaires en éliminant physiquement les meilleurs éléments »29. La Fédération Française de Rugby intervient en radiant certains joueurs et clubs et en organisant des campagnes de sensibilisation, mais le problème de fond n’est pas traité. L’aspect populaire et la dégradation rapide du rugby français constituent les deux premiers reproches avancés par l’IRB. Vient s’ajouter à cela la rétribution partielle ou 26 « Le Rugby Français en Crise (1918-1939) »p. 129, P-F GROS, dans « La Planéte est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 27 « Le Rugby : De l’esprit de clocher à la Coupe du Monde », p.92, JP BODIS, éd Privat (1999) 28 « Le Rugby Français en Crise (1918-1939) »p. 137, P-F GROS, Ibid 29 « Le Rugby Français en Crise (1918-1939) »p. 139, P-F GROS, Idem 27 totale de certains joueurs. En effet mobiliser un ouvrier, ou un salarié d’entreprises, 4 à 5 fois par semaine pour s’entrainer et faire la gloire du club local oblige à une certaine compensation financière. Malgré la condamnation de ses pratiques par la presse et les dirigeants du rugby français, « l’amateurisme marron se généralise »30. Durant les années 1935-1937 c’est ainsi 37 internationaux de rugby à XV qui rejoignent la Ligue Professionnelle. En mars 1931, la France est chassée par l’IRB avec une rupture effective. Les Britanniques craignent alors « qu’une démocratisation trop poussée du jeu » nuise à l’image de marque du rugby. Ils regrettent les dérives engendrées par le professionnalisme, à savoir «le jeu dur et la violence » et pensent qu’en se popularisant le rugby aurait « perdu son caractère ludique, éducatif et ostentatoire »31. Afin de subsister sur le plan international, la Fédération Internationale de Rugby Amateur est crée le 2 janvier 1934. Cela permet d’organiser des rencontres contre l’Allemagne et l’Italie dans un premier temps puis avec la Roumanie, l’URSS et la Tchécoslovaquie en 1956. Cette pseudo-émancipation est vue par les Britanniques comme un pied de nez à leurs institutions et comme une remise en question de leur autorité. « Les Britanniques n’accepterons pas que ce sport puisse se développer en dehors du contrôle de l’IRB ». L’attitude de rejet face à un phénomène presque hors de contrôle est à mettre en corrélation avec « la politique de protectionnisme pur et dur »32 du gouvernement Britannique pour se sortir de la crise économique. Ainsi dans une situation de crise on observe des comportements similaires dans différents domaines sociétaux, et notamment dans ceux de la politique et du sport. Comme le souligne P-F GROS dans son ouvrage le Rugby Français en crise (1918-1939), on peut alors faire le parallèle entre sport et politique tant les courbes des relations rugbystiques franco-britanniques semblent épouser celle des relations diplomatiques jusqu’en. 30 « Le Rugby Français en Crise (1918-1939) »p. 134, P-F GROS, dans « La Planète est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 31 « Le Rugby Français en Crise (1918-1939) »p. 142, P-F GROS, Ibid 32 « Le Rugby Français en Crise (1918-1939) »p. 144, P-F GROS, Idem 28 ii. Réunion militaire A la veille de la guerre, la France est un pays divisé entre une droite avec des penchants nazis (« plutôt Hitler que Blum ») et une gauche qui l’accuse de capituler face à cette montée fasciste, et comparativement à ses voisin, le pays est en retard sur le plan économique. Le radical Daladier gouverne à partir de 1938 et mène une politique de réarmement. Tout comme le 1er ministre britannique, il cède face Hitler lors de la conférence de Munich en septembre 1938. Les Français l'acclament comme le sauveur de la paix, alors que la guerre est devenue inévitable. Pour la seconde fois, Français et Britanniques font face à un ennemi commun. L’Axe regroupant l’Allemagne, l’Italie et le Japon, est une menace grandissante et veut asseoir les idéaux Nazis prônés par Hitler. L’invasion de la Pologne provoque les déclarations de guerre de la Grande-Bretagne et de la France le 3 septembre 1939, à respectivement 13 h et 17 h. Cette phase est une période d’exclusion totale du rugby français par les Britanniques. On lui reproche ses dérives (brutalités extrêmes et professionnalisme) et ses options de développement (un rugby populaire favorable au rapprochement des classes). Mais dans un même temps, ces deux nations se rapprochent politiquement pour faire face à la menace grandissante d’une triple alliance fasciste. Les relations politiques et sportives sont en 1939, diamétralement opposées : ce rapprochement politique poussé par l’émergence d’un ennemi commun n’affecte en rien le rejet que les anglais font du rugby français. Encore une fois le rapprochement politique, n’est pas synonyme d’une amélioration des relations sportives entre ces deux nations, bien au contraire. Alors que la Triple Entente, signée en 1914, scelle l’unification des frères ennemis, l’exclusion totale du rugby français des rencontres internationales est officialisée en 1931 par l’IRB. 29 3. 1980-1990 : Les années Thatcher/Blanco Cette période est intéressante car elle est le témoin d’un retournement des rapports franco-britanniques. En effet la « vieille Angleterre » se met à admirer la fougue et l’audace d’une équipe de France de rugby hors du commun. a. Les années Thatcher « Vous pouvez avoir à livrer la même bataille plus d'une fois pour la gagner ». Cette phrase a été prononcée par Margaret Thatcher, qui fut l’une des plus grandes figures politiques du gouvernement anglais. Issue d'une famille modeste, Margaret Thatcher a fait des études de chimie, puis de droit. Membre du parti conservateur (situé sur la droite de l’échiquier politiques), elle est élue député de Finchley dans la banlieue londonienne à plusieurs reprises. De 1964 à 1970, elle occupe la fonction de porte-parole de son parti à la chambre des Communes - l'équivalent de l'Assemblée Nationale française. Ministre de l'éducation sous le gouvernement Heath de 1970 à 1974, chef du parti conservateur dès 1975, elle devient la première femme Premier Ministre de l'histoire britannique, avec pour but de redresser l'économie du royaume. En effet les années 1970 sont marquées, en GrandeBretagne, par une crise à la fois économique, sociale, politique et culturelle. Crise économique d’abord, avec une croissance faible (inférieure à 1,5%) voire négative, un taux de chômage très élevé (1,5 millions), une inflation galopante (jusqu’à 25%) et un endettement national. A titre d’information, on peut rappeler que l’Angleterre était en 1971 située au 15e rang des pays de l’OCDE alors qu’elle était 5e en 1951. Crise sociale ensuite, avec le retour du chômage de masse, qui avait disparu depuis la Seconde Guerre mondiale. Ces taux record entrainent une agitation sociale sans précédent : 1974 : 15 millions de journées de travail perdues uniquement à cause des grèves 1977 : 10 millions de journées de travail perdues uniquement à cause des grèves 1979 : 30 millions de journées de travail perdues uniquement à cause des grèves Mais aussi crise politique car il est difficile en effet de faire face aux syndicats, soutenus par 13 millions d’adhérents. Ces conflits du travail à répétition ont pour cause la volonté du gouvernement de modérer des revendications salariales des syndicats, se rapportant à une production poussive incapable de faire fasse à la concurrence. Le gouvernement alors dirigé par Callaghan (1976-1979) ne dispose plus de la majorité à la Chambre des communes. Les Libéraux et les partis nationalistes, gallois et écossais, se trouvent en position d’arbitres : James Callaghan doit conclure en mars 1977 un accord avec les Libéraux pour obtenir une majorité aux Communes et la dissolution du 30 « pacte Lib-Lab » (Liberal-Labour). Ces instabilités politiques entraînent le 28 mars 1979, la chute du gouvernement et provoque des élections anticipées. Enfin crise culturelle : Ce modèle de société érigée au lendemain de la guerre par le partie travailliste semble tout à fait dépassé et inapproprié aux évolutions mondiales. L’État providence, omniprésent et mobilisant une part toujours plus grande de la richesse nationale (les dépenses publiques représentent 59% du PIB), n’est plus en mesure d’assurer la croissance économique ni le plein emploi. On ne saurait donc sous-estimer la gravité de la situation de la Grande-Bretagne à la fin des années 1970, elle est « l’homme malade » de l’Europe Margaret Thatcher mena alors une politique ultralibérale, privatisant les entreprises publiques, coupant les budgets sociaux, tout en réduisant au silence les syndicats. . Elle aide la nation britannique à sortir de sa phase d’instabilité par de nombreuses réformes radicales, des prises de positions fermes et une politique conservatrice fondée sur des idées libérales (telle que la reconquête militaire des Malouines,…). Cette intransigeance, notamment face à la longue grève des mineurs de 1984, lui vaut bientôt le surnom de 'dame de fer. A l’entré des années 1980, l’Angleterre est donc une nation en pleine crise. Menée par une figure politique devenant rapidement emblématique, elle est encore à la recherche de repères pour revisiter les fondations de la « vieille Angleterre » et ainsi faire face à des évolutions mondiales. Cette totale refonte du système touche tous les domaines, y compris celui du sport et du rugby. Aussi nous verrons que l’équipe d’Angleterre, aux tactiques vieillissantes et limitées, ressentira pour la première fois une certaine admiration pour ses voisins d’outre-manche. Ceux sont alors portés par une génération dorée, comptant dans leurs rang, des joueurs illustres tels que Jacques Fouroux, Jean-Pierre Rives, Pierre Berbizier, Philippe Sella ou encore Serge Blanco. 31 b. Les années Blanco « Le jeu français se définit comme spontané où les qualités d’improvisation et l’initiative individuelle doivent pallier la carence en joueurs de poids et l’insuffisance d’un jeu collectif »33. Cette première citation de P-F Gros dans son ouvrage « Rugby et identités masculines à l’épreuve des rencontres internationales », résume assez bien les représentations internationales de l’équipe de France. En effet, elle était vue comme une équipe développant un jeu de déplacements perpétuels et reposant plus sur la technique des ¾ quarts, que sur le physique et la rudesse des ses avants. Cette pratique des français n’avait jamais franchement convaincu et les puristes lui préférait, et de loin, celle des Britanniques. Cependant l’apparition sous le maillot de l’équipe de France de quelques joueurs très particuliers, va décupler cette façon libertine et impertinente de jouer. Ce sera les années BLANCO qui vont symboliser le renouveau du rugby français et provoquer une révolution dans les schémas de jeu établis. Serge Blanco : Serge Blanco est né le 31 août 1958 au Venezuela. Sa mère est Basque alors que son père est Vénézuélien. La famille quitte Caracas pour rejoindre la France et s’installer à Biarritz. Serge Blanco est scolarisé au Collège Immaculée conception de Biarritz, collège tenu par le clergé séculier. Excellant dans tous les sports, il est remarqué par le Football Club de Nantes qui lui propose de le rejoindre mais, ne souhaitant pas quitter le Pays basque, Blanco refuse. Il joue donc au rugby à XV et brille dans les jeunes catégories. Blanco évoluant la majorité de sa carrière au Biarritz Olympique, est sélectionné pour la première fois à 22 ans et 69 jours le 8 novembre 1980 lors de la tournée de l’équipe de France en Afrique du Sud. Malgré la lourde défaite de Blanco et de ses camarades, il est rappelé l’année d’après pour participer à son premier tournoi des 5 nations : il inscrit le premier essai de l’équipe de France dans le tournoi après seulement 9 minutes de jeu contre les Ecossais. Par la suite l’équipe de France avec Blanco affiche ces statistiques : 33 « Rugby et identités masculines à l’épreuve des rencontres internationales », p.284, P-F GROS, dans « La Planéte est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 32 Tournoi des 5 nations 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 Total Rang Final Résultat France 1 4 1 2 2 1 1 1 1 3 2 6 fois vainqueur 4 v 0 n 0 d 34 1v0n3d 3v0n1d 3v0n1d 2v2n0d 3v0n1d 4v0n0d 3v0n1d 3v0n1d 2v0v2d 3v0n1d 31 v 2 n 11 d Match Joués par Blanco 3/4 4/4 4/4 4/4 4/4 4/4 4/4 4/4 4/4 3/4 4/4 42/44 Il est à noter que l’année 1987 est la plus faste et réussie de cette dizaine d’année, en effet l’équipe de France cumule le grand chelem et sa première finale de Coupe du Monde (avec à l’arrivée une défaite face aux All Blacks). De 1980 à 1991, Serge Blanco dispute 93 matchs avec l'équipe de France au cours desquels il marque 38 essais, 6 transformations, 2 drops et 21 pénalités (233 points). Il participe notamment à onze tournois des cinq nations de 1981 à 1991 et à deux coupes du monde (1987 et 1991). Il a remporté deux grands chelems en 1981 et 1987 et quatre autres tournois. Il dispute neuf rencontres de coupe du monde en deux participations avec un titre de vice-champion du monde. « Blanco guidé par un instinct génial, sut imposer un style unique qui laissa perplexes les observateurs et les adversaires »35 Blanco était alors le fer de lance d’une nouvelle culture rugbystique, reposant plus sur les prises d’initiative, même les plus désespérées, que sur des schémas tactiques ordonnés et inflexibles. De la réussite d’actions extraordinaires et de leurs répétitions régulières, va naître une idéologie nationale : le French-Flair. Ce sont les Anglais qui les premiers utilisent cette expression relative aux coups de folies français, qui riment alors avec coups de génie. Ce concept relativement abstrait, caractérisait un style de jeu national, laissant place à des actions épiques et «privilégiant le dynamisme, la course, la créativité *…+ » 36 . La réussite de ce jeu plein d’audace était à mettre en opposition aux latences du jeu 34 V= victoire, n=match nul, d=défaite « Dictionnaire Amoureux du Rugby » p.78 HERRERO (D), éd Plon (2007) 36 « Le XV de France : Construction d’une équipe, réalisation d’une utopie ?» p.251, Emilie GIRARD, dans « La Planéte est rugby : regards croisés sur l’Ovalie » sous la direction de Jean-Yves Guillain et Patrick Port, col Sport et Mémoire (2007) 35 33 britannique plutôt académique et « correspondant plutôt à une image stéréotypée »37. Le rugby anglais commençait à cette même période à souffrir de ce qui avait toujours fait sa force, une organisation totale du jeu. En effet on leur reproche alors un jeu trop prévisible et peu spectaculaire. Bien que le bilan des rencontres pendant ces années reste équitable (En 11 rencontres France-Angleterre de 1980 à 1990 : 4 victoires de l’Angleterre, 6 pour la France et 1 match nul), le jeu développé par les Français force l’admiration des Anglais. Ainsi le French-Flair se pose comme une particularité « libertine et impertinente que les Anglais ne peuvent dominer et encore moins comprendre »38. Cette période met en lumière, l’ambigüité des relations entre la France et l’Angleterre. Elle est représentative du caractère bilatéral des représentations que l’on pouvait avoir, toujours entre rejet et admiration. Ainsi le rugby français « Imprévisible, violent et mal élevé »39, intrigue des Anglais qui cultivent cependant leur différences et surtout leur pseudo supériorité. De leur côté les Français, toujours en quête de reconnaissance et jamais las de contrer les Britanniques, ferons de cette période faste sur le plan du jeu (mais à mettre au compte d’une réussite totale), une référence encore actuelle. Le jeu anglais est entre 1980 et 1990 bien représentatif de la nation, enlisée, vieillissante et à la recherche de nouveaux repères. La France se pose alors comme modèle sportif. Par la suite, Margaret Thatcher qui avait enchainée les mandats, accuse les limites de sa politique (augmentation flagrante des inégalités sociales et régionales) ce qui la contraint à démissionner en 1990. Au niveau rugbystique, les français fort de leur « French-Flair », connaissent une période noire et sont mis en échec par les Anglais jusqu’à leur rencontre comptant pour la 3e place de la Coupe du Monde de 1995 en Afrique du Sud. 37 « Le XV de France : Construction d’une équipe, réalisation d’une utopie ?» p.251, Ibid « Dictionnaire Amoureux du Rugby » p.33 Ibid 39 « Dictionnaire Amoureux du Rugby » p.33 Idem 38 34 A travers l’étude de ces trois phases majeures du 20e siècle, on peut mettre en évidence la complexité qu’il y a à établir des liens de causalité entre la politique et le monde sportif. On ne peut, par cette étude théorique partielle, proposer un schéma explicatif des ambivalences franco-britanniques. Se borner à une simple recherche historique ne permet pas d’expliquer les sentiments partagés par les français à l’égard des anglais et réciproquement. En effet bien que ces phases aient participé à l’élaboration de représentations sociales, au développement d’une identité nationale toujours décuplée par une altérité conflictuelle, on ne peut affirmer par une recherche bornée à l’histoire, la prégnance du passé dans les représentations actuelles. Une démarche pertinente serait alors de démontrer en quoi les aspirations rugbystiques diffèrent des volontés politiques. En d’autres termes nous tenterons d’éclaircir le fondement de cette « haine réciproque » et nous verrons si elle se borne au champ sportif. Dans cette optique il serait alors intéressant d’étudier de façon empirique l’ancrage des représentations sociales. En effet nous avons déterminé que le savoir naïf fruit et moteur de ces représentations, n’est pas sur le plan des relations entre nations, fondé. Aussi serait-il intéressant de confirmer par une étude de terrain la véracité de représentations fondées ou infondées. 35 IV. Etude empirique 1. Positionnement étatique actuel, quelques années après le centenaire de l’Entente Cordiale. a. Au niveau sociétal « Le Royaume-Uni et la France entendent coopérer étroitement pour faire face aux problèmes politiques, économiques et de sécurité du XXIème siècle. »40 Cette phrase fait introduction au compte-rendu du 30e sommet franco-britannique qui s’est tenu le 6 juillet 2009 à Evian. Elle souligne la volonté de la France et l’Angleterre à poursuivre leurs efforts de collaboration pour mettre en œuvre une politique adaptée aux enjeux mondiaux (notamment ceux exposés en conclusion du G20 de Londres en avril 2009). Ces deux membres du G8 ont ainsi rappelé leur souhait de résultats ambitieux en matière de développement et de lutte contre le changement climatique, ainsi que la nécessaire réforme de la gouvernance mondiale. Nicolas Sarkozy et Gordon Brown travaillent aussi sur des sujets plus européens, surtout en matière de politique industrielle européenne, sur l’énergie nucléaire ou encore sur la coopération en matière d’immigration. Nous exposerons de façon un peu plus détaillée les relations politiques, économiques, culturelles, scientifiques, techniques et les autres types de coopération qu’entretiennent la France et la Grande-Bretagne. Relations politiques Les relations bilatérales, fortes des communautés françaises et britanniques de plus de 200 000 membres établis respectivement en Grande-Bretagne et en France, comptent sur des contacts réguliers et des sommets bilatéraux annuels. Malgré des frictions concernant les prises de position dans des conflits internationaux (par exemple la guerre en Irak, en 2003), la France et le Royaume-Unis entretiennent des relations saines et denses, revigorées par le centenaire de l’Entente Cordiale en 2004 et le rythme régulier des sommets entre Chefs d’Etat. 40 « Déclaration Mondiale et Développement », compte rendu du 30e sommet Franco-Britannique 36 Relations économiques Le Royaume-Uni est un partenaire essentiel pour la France dans le domaine des échanges commerciaux, comme en matière d’investissements. La France est le troisième client et le cinquième fournisseur du Royaume-Uni. Marché de proximité, le marché britannique est stratégique pour les PME françaises. Ce sont plus de 15 000 d’entre elles qui y exportent leurs produits ou services. Le Royaume-Uni figure parmi les partenaires commerciaux majeurs de la France : en 2008, le Royaume-Uni représentait le premier excédent commercial de la France avec un solde positif de 8.8 milliards €. Les principaux produits français exportés vers le Royaume-Uni étaient les biens intermédiaires, les biens d’équipements et les produits de l’industrie automobile (malgré une baisse de 14,9 % dans ce secteur en raison de l’effet de la crise économique sur la demande intérieure). Exportations françaises vers le Royaume-Uni par secteur en 2008 41 D’après le rapport de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement, le Royaume-Uni est la 1ère destination européenne, et la 2ème au plan mondial pour les investissements directs étrangers (IDE). Le Royaume-Uni est en particulier la 1ère destination des investissements français à l’étranger, avec plus de 41 http://www.francemondexpress.fr/IMG/pdf/royaume_uni.pdf 37 2000 filiales françaises qui y sont implantées et qui emploient près de 600 000 personnes, dont 300 000 à Londres seulement.42 Coopérations culturelle, scientifique et technique Les échanges culturels et scientifiques se développent dans un contexte de grande effervescence de la scène culturelle britannique. La France présente au Royaume-Uni une offre culturelle à travers ses établissements, en particulier l’Institut français de Londres43. La coopération se noue souvent en dehors des circuits inter-gouvernementaux, au travers de liens directs entre universités, musées, instituts, centres de recherche ou fondations. Les objectifs de cette coopération visent à promouvoir la langue française, la création contemporaine, à consolider ce réseau culturel, à favoriser le dialogue entre les institutions et les systèmes éducatifs. Un accord bilatéral en matière de coopération éducative a été signé lors du Sommet franco-britannique du Touquet, le 4 février 2003, qui fournit un cadre officiel et dynamique dans ce secteur. Un nouvel arrangement administratif, signé lors du Sommet de Paris du 9 juin 2006, vient compléter et élargir ce dispositif sur la coopération décentralisée, la formation et les filières européennes. Le programme d’échange d’assistants de langue, illustre les efforts en ce sens. La coopération administrative fait l’objet d’une relance, notamment au travers des échanges de fonctionnaires. Autres types de coopération La coopération en matière de lutte contre l’immigration illégale s’est renforcée et des bureaux de contrôles juxtaposés ont été installés dans les ports de la Manche et de la mer du Nord ainsi que sur le lien fixe trans-Manche. Des filières d’immigration clandestine opérant entre les deux pays sont régulièrement démantelées grâce à des opérations policières conjointes. Plus largement, la coopération bilatérale en matière de sécurité intérieure s’étend à la lutte contre les trafics de stupéfiants et la criminalité organisée. Elle comporte également une dimension multilatérale : G6, G8, premières équipes communes d’enquête (France, Royaume-Uni, Espagne, Pays-Bas) et création du centre d’analyse maritime du renseignement au Portugal (MAOC-N). 42 Source : Chambre de Commerce Française de Grande Bretagne Accueille chaque année 60.000 visiteurs, dont 45. 000 spectateurs au « ciné Lumière », salle du réseau Europas cinema 43 38 Il convient également de mentionner le « Conseil franco-britannique », né en 1972 d’une initiative commune du Président de la République et du Premier Ministre du Royaume-Uni. Ce conseil, composé d’une section française et d’une section britannique d’une trentaine de membres chacune, a pour objet de prendre toute initiative propre à promouvoir une meilleure compréhension entre les deux pays ainsi que l’organisation de rencontres de personnalités ou de spécialistes de haut rang dans les domaines politique, stratégique, social, économique et culturel. b. Au niveau rugbystique i. Au niveau des équipes nationales L’année 2010, marquait le centenaire de l’intégration de la France dans le tournoi des 6 nations. Les rencontres entre la France et l’Angleterre sont généralement appelées « Crunch » ce qui signifie « moment crucial » en Anglais. Au début réservé au tournoi des 6 nations, l’emploi de ce terme à été étendu à toutes les rencontres officielles entre ces deux nations. Cette dénomination date du premier match entre ces deux équipes le 22 mars 1906 au Parc des Princes à Paris. Bilan : Victoire Anglaise Match Nul Victoire Française 50 7 36 39 Il faut rappeler pour nuancer ce premier bilan, un récapitulatif des rencontres postérieures à la seconde Guerre Mondiale : Victoire Anglaise Match Nul Victoire Française 32 6 34 Malgré ce bilan positif pour les Français, les Anglais ont toujours été vus comme une bête noire. En effet, lors ces dernières années, pour de grandes échéances, l’équipe de France a toujours buté sur l’équipe d’Angleterre (Par deux fois en 2003 et 2007 lors des demi-finales de Coupe du Monde). Comme le souligne un quotidien Français, « Le XV de la rose cristallise un mélange de frustration et d’envie »44, est devient une équipe contre laquelle il n’y jamais de certitudes. Cela donne à ces rencontres entre la France et l’Angleterre un caractère spécial. Ces rencontres sont le point central d’un engouement de plus en plus populaire. Ainsi pour le match France-Angleterre du tournoi des 6 nations, se sont plus de 8,3 millions de téléspectateurs qui se sont réunis. Ce chiffre représente une part d’audience de 35,2%, le record de l’année pour le diffuseur, France 2.45 44 « Direct Sport » n°30, du vendredi 19 mars. A noter que le match a atteint un pic d'audience, dans le dernier quart d’heure de la rencontre, avec plus de 9,5 millions de téléspectateurs et 42,7% de part d’audience tandis que la remise du trophée a, quant à elle, été suivie par près de 8,2 millions de téléspectateurs pour une Part d'Audience de 40.7%. 45 40 ii. Au niveau des championnats européens Après une année 2009 noire pour la France sur le plan du rugby européen (seulement un quart de finale pour Toulouse), 2010 résonne comme l’année du rugby Français. Après un Grand Chelem de l’équipe nationale, on vit le triomphe de Toulouse lors de la finale Franco-française de la Coupe d’Europe et une deuxième place acquise par Toulon lors du Challenge Européen. Le Classement européen de l’ERC, servant à établir les poules de la Coupe d’Europe de Rugby (la H Cup), classe les équipes européennes en leur attribuant un nombre de points suivant leurs parcours Européen des 4 dernières années. Classement européen ERC :46 Rang Nom de l’Equipe Total points 1 Munster 29 2 Toulouse 27 3 Leinster 25 4 Leicester Tigers 23 5 Biarritz Olympique Pays Basque 20 6 Cardiff Blues 20 7 London Wasps 19 8 Stade Français Paris 16 9 ASM Clermont Auvergne 15 10 Ospreys 15 Ce tableau nous révèle que deux équipes Irlandaise et une Française forment le trio de tête. La première équipe Anglaise pointe à la 4e place. Ce classement est donc composé par 4 équipes françaises, 2 irlandaises, 2 galloises et 2 anglaises. Il met donc en évidence la valeur actuelle des équipes françaises au niveau européen. 46 Source http://www.ercrugby.com/fra/37_74.php 41 Cependant sur les 15 coupes d’Europe disputées depuis 1995, ce sont les équipes anglaises qui remportèrent le plus de fois le titre. On peut aussi remarquer que les 5 coupes d’Europe ramenées en France sont le fruit de seulement 2 équipes pour la France contre 4 pour l’Angleterre. Ces chiffres nous rappellent donc que la gloire française sur le plan européen est souvent le fait d’une seule équipe, le Stade Toulousain. Toulouse 4 Leicester tigers 2 London wasps 2 Munster 2 Brive 1 Bath 1 Ulster 1 Northampton 1 Leinster 1 Il est aussi à noter que la compétence des équipes encadrantes des Clubs du Top 14 a été mise en valeur par l’attribution du titre de meilleur Entraîneur Européen de ces 15 dernières années à Guy Noves (entraineur du Stade Toulousain). 42 En analysant les relations qu’entretiennent aujourd’hui la France et l’Angleterre, on s’aperçoit qu’un climat plutôt sain est établi. Des relations politiques, culturelles et scientifiques pérennes et régulières mettent en avant la volonté croissante des deux nations à s’allier afin de mieux répondre aux enjeux mondiaux. Au niveau rugbystique, l’IRB classe définitivement l’équipe de France au dessus de celle de l’Angleterre. Cependant, la faculté du Quinze de la Rose à répondre présent lors des matchs à enjeux, en fait une équipe à ne jamais sous estimer. Position Nation Points 1 Nouvelle-Zélande 91,68 2 Afrique du Sud 88,60 3 Australie 85,56 4 France 85,43 5 Ireland 82,61 6 Argentine 80,56 7 Angleterre 80,10 8 Pays de Galles 78,91 9 Ecosse 76,79 10 Fidji 75,90 La charnière 2009/2010, restera comme l’année du rugby français, la suprématie européenne des années antérieures aura cependant toujours été à mettre sous l’étendard britannique. Les Britanniques considèrent grandement l’équipe de France, disant qu’elle est capable du meilleur comme du pire. Si l’on s’en tient à ce bref bilan, la situation actuelle des rapports franco-britanniques ne justifierait donc en rien des représentations sociales « négatives ». En d’autres termes, si l’on constate par notre étude empirique, un mauvais ressentis des peuples français et anglais, on ne peut en aucune façon les lier à la situation des rapports nationaux d’aujourd’hui. 43 2. Etude de terrain « Ce qui m’a marqué en tant qu’Australien c’est le mythe du Tournoi… Un FranceAngleterre ce n’était pas qu’un match de rugby, c’était une leçon d’histoire ». Comme le dit si bien Tim Horan, ancienne Star du rugby australien, les matchs du tournoi des 6 nations sont chargés d’histoire. Et pour cause. Celui-ci, fut créé en 1882 regroupant initialement 4 nations. C’est ainsi le siège annuel, d’une joute entre les nations britanniques et la France dès 1910 puis l’Italie à partir de 2000. Remporter ce tournoi, ou même accéder au Grand Chelem (5 victoires sur 5 matchs), fait des vainqueurs les champions d’Europe. Aussi il est tout indiqué pour étudier les sentiments qui animent les peuples français et britannique de le faire dans des lieux et à des moments où ils sont le plus palpables. Le 20 mars 2010, s’affrontaient au Stade de France, l’équipe de France et celle de l’Angleterre dans le cadre du tournoi des 6 nations. L’Equipe de France, avec 4 victoires était en route vers le Grand Chelem qu’elle n’avait pas réussi depuis 2004. L’Angleterre avec un parcours plus mitigé et de nombreux doutes, avait à cœur de montrer que « le quinze de la rose piquait encore ». C’est donc à l’occasion du centenaire de l’équipe de France au sein du tournoi des 6 nations, que nous avons décidé de mener notre enquête. Cette étude de terrain repose sur des questionnaires dispensés à tous les individus, sans distinction de sexe où d’appartenance, se trouvant autour du Stade avant le match France/Angleterre. L’ambiance toute particulière d’un Crunch, va exalter tout les sentiments intrinsèques aux individus venus au Stade ce jour là et nous espérons ainsi avoir davantage de retombées au niveau de notre prospection. Il faudrait cependant relativiser les résultats, car les enjeux de cette rencontre et ce que cela provoque sur les individus cibles, peuvent être un biais à notre questionnaire. Le dépouillement et l’analyse des résultats, mettrons éclaireront les ressentis des supporters, et ne sont qu’une base de développement pour tenter de jauger les perceptions de deux peuples. Nous étudierons dans une première partie, l’élaboration du questionnaire et sa pertinence quant à notre réflexion puis nous nous pencherons sur le dépouillement de celui-ci 44 a. Elaboration du questionnaire. Ce questionnaire représente notre seul outil empirique et doit servir notre problématique sur 1 point : étudier de façon concrète la base des représentations sociales qui forment le savoir naïf. Il doit permettre aussi de révéler la prégnance du sentiment d’appartenance nationale. Ce questionnaire est donc construit en trois grandes parties : La première définit l’individu aussi bien par son identité propre que sur par connaissances. Il semble important pour analyser sa manière de penser, de connaitre son bagage identitaire. Aussi définirons-nous dans un premier temps, son âge, sa nationalité et sa catégorie socioprofessionnelle. Nous pourrons donc ainsi le replacer dans une époque, un contexte social et dans l’espace européen. Puisque nous nous axons sur le rugby, nous questionnerons les individus sur leurs affinités avec ce sport. Aussi tâcherons-nous de connaître leurs expériences pratiques du rugby, leurs connaissances générales de ce sport. Ensuite nous ciblerons davantage leur pratique de supporters, la diversité de leur soutien ou encore la fréquence à laquelle ils assistent à ce genre de manifestation. La deuxième partie réfère davantage aux représentations sociales. Nous interrogerons donc l’individu sur ses sentiments vis-à-vis de l’autre et l’amènerons à se questionner sur l’origine de sa façon de penser et le bienfondé de celle-ci. Cette dernière phase doit amener la personne questionnée à nous exprimer, en se référant constamment à une certaine altérité, son sentiment d’appartenance nationale. En établissant des questions portant sur leurs représentations de leur propre nation et de l’autre, de l’éloignement ou de possibles rapprochements dans différents domaines sociétaux, nous mettrons en avant les aspirations nationales et patriotiques de chaque individu. Ces échelles, permettrons aussi de déterminer si le Sport est un domaine sociétal à part, où l’individu se réfère à une représentation sociale particulière et non objective. Nous essayerons aussi de savoir si, sorti de ce contexte particulier du sport, l’individu retrouve une certaine cohérence et objectivité sur les rapports sociétaux qui l’entourent. Les fins de 2e et 3e parties sont clôturées par une interrogation sur l’objectivité de l’individu. Ainsi, nous pourrons savoir comment sont appréhendés et compris par celuici, les représentations sociales et les sentiments envers l’autre. 45 b. Dépouillement et analyse du questionnaire L’étude rassemble 69 questionnaires, 38 administrés à des Français et 31 à des Britanniques. Les questionnaires sont identiques et simplement traduis en Anglais. i. Définition de l’individu Les Français : 100% des individus se sont définis comme Français. 38% sont des « cadres » et font donc partie d’une classe sociale plutôt aisée. 35% des interrogés sont « sans activité professionnelle ». Cela s’explique aussi par leur moyenne d’âge : 24,3 ans (31 ans moyenne totale). La plupart en sont encore au stade des études et n’ont donc pas forcément d’activité professionnelle. 46 66 % des français interrogés ont une pratique sportive actuelle (pour la moitié d’entre eux, elle se résume à jouer au rugby), et 92% des autres ont eu une pratique passée. Les pratiquants de rugby ont une expérience ne dépassant pas en moyenne 5 ans. L’âge n’entre pas en considération pour la pratique ou non pratique, puisque les moyennes sont de 30,92 ans pour les pratiquants et 31,15 ans pour les non pratiquants. Ces supporters le sont pour 61% d’entre eux, de manière occasionnelle, de 1 à 5 fois par an. Ils assistent principalement à des manifestations de rugby et de football en supportant presque uniquement la France (pour 68% des individus). Un peu plus de la moitié ont de bonnes connaissances générales du Rugby47 (53%) et 34% l’ont assimilé de façon « parfaite » (réf : très bonnes connaissances »). Nous avons donc une population de classe moyenne, voire aisée, avec une pratique sportive régulière, ce qui peut expliquer les bonnes connaissances du rugby. L’assistance aux manifestations sportives (majoritairement rugbystique) de ce publique est sporadique et ne concerne que l’équipe de France. 47 On fait ici référence à la connaissance propre au jeu et au monde de l’ovalie en général. 47 Les Britanniques Car c’est bien des britanniques qu’il faut parler, car seulement 26% des anglophones interrogés se définissent comme anglais. Sur les 31 personnes participant à notre étude, 37% sont des « managers » et 30% des « Craftsman, Shopkeeper and Company director ». Cela veut dire que la plupart sont professionnellement actifs et appartiennent à la classe moyenne et aisée. 50% d’entre eux sont des rugbymen, pratiquants réguliers. 54% des non pratiquants actuels ont été des rugbymen avec une durée de pratique moyenne de 23 ans. Ils sont à 74% des supporters peu réguliers (ou seulement pas habitués à aller dans les stades).Ils se déplacent de 1 à 5 fois par an pour des rencontres de rugby (75%) et de football (22%) 90% d’entre eux soutiennent l’équipe d’Angleterre et 45% soutiennent de temps en temps une autre équipe nationale (essentiellement l’Irlande, l’Ecosse, le Pays de Galles et la France). 55% assument avoir une très bonne connaissance rugbystique, 36% bonne et 9% peu ou pas du tout de connaissances. Ce public britannique est donc assez disparate mais avec de fins connaisseurs s’appuyant sur une pratique sportive de longue date. Ils sont pour la plupart aisés, ce qui explique qu’ils aient pu assister à un match en dehors de leur patrie, soutenant l’Angleterre mais acceptant d’autres équipes nationales. 48 ii. Représentations sociales Les Français Comme on peut le constater sur ce graphique, les français sont séparés en 2 groupes à peu près homogène : ceux qui éprouvent des sentiments haineux (11%) ou peu amicaux (36%) et ceux qui sont neutres (22%) ou amicaux (31%). On obtient donc 47% des français avec des sentiments « défavorables » et 53% avec des sentiments « favorables » envers nos homologues britanniques. 86% des sentiments «favorables » sont considérés comme justifiés alors que seulement 65% des « défavorables » pensent être juste par la personne qui l’a exprimé. On justifie alors ses sentiments par la notion de fair-play, du bon sens ou encore du côté sport des anglais pour les « favorables ». Les « défavorables » s’appuient plutôt sur le côté inquisiteur des Anglais et les affres historiques (Jeanne d’Arc, la guerre de cent ans,…). 49 Quand on les questionne sur la provenance de ce sentiment, ce sont les domaines sportif (55%) et culturel (31%) qui ressortent. Il faut cependant faire attention aux biais, la culture pouvant être vue comme une catégorie « fourre-tout ». A la suite de l’évocation de ce sentiment, 84% des Français considèrent que l’équipe qu’ils soutiennent est supérieure à l’équipe d’Angleterre. Il est a noté que 74% des interrogés attestent de l’objectivité de leurs réflexions. 50 Les Britanniques Les britanniques n’ont cité aucune fois le sentiment de haine (hatred) ou celui de peu amical (unfriendly) et ils sont même 87% à exprimer un sentiment amical envers les Français. Ils sont même 95% à trouver ce sentiment tout à fait justifié par le caractère relatif d’une compétition sportive (compétition oui, mais toujours amicale, ce n’est que du sport) et par la camaraderie ambiante pendant nos entretiens. Les britanniques rejoignent les français sur la définition de l’origine de ce sentiment, en considérant qu’il provient du sport (66%) ou de la culture (34%). Ils expliquent par ailleurs, que ces sentiments « favorables » viennent d’expériences diverses (vivre en France, enseigner le sport) et des valeurs du rugby, le respect, le fairplay… 51 Seulement 39% des Britanniques considèrent leur équipe comme meilleure que celle de la France. Ce pourcentage pouvant être expliqué par les piètres prestations anglaises précédant cette rencontre (2 victoires peu convaincantes contre le Pays de Galles et l’Italie, une défaite face à l’Irlande et un match nul contre les Ecossais). Comme les français, 75% des britanniques pensent alors être objectifs. iii. Appartenance nationale et altérité Cette partie du questionnaire doit nous renseigner sur la façon dont on considère l’autre, et la façon dont on l’accepte. Aussi avons-nous interrogé les individus sur leur considération des écarts leurs entre deux sociétés et les possibilités d’un certain rapprochement entre celles-ci. Les individus devaient quantifier un ressenti sur une échelle de 4 (pas de « juste » milieu, obligation de choisir un camp), concernant les domaines sociétaux que sont : la politique, la culture, les médias, le citoyen (façon de vivre et de penser), les militaires, l’histoire nationale, l’économie et le Sport. Les Français Ce qui ressort premièrement de ces questions, c’est la difficulté pour les personnes interrogées de répondre. Deux hypothèses alors à considérer, soit il s’agissait d’une élaboration inadaptée de la question soit la difficulté pour les sujets de sortir de représentations subjectives, pour venir à en répondre objectivement. 52 Ce graphique « radar » nous permet de voir que globalement, les Français se considèrent « éloignés » des anglais quand au références suivantes : Politique, culture, médias, façon de vivre, façon de penser La courbe rouge, nous indique ainsi que c’est au niveau de la culture et de la façon de vivre qu’il y a le plus de différences, suivies du domaine politique, de la façon de penser et des médias. C’est encore dans la façon de penser que les Français trouvent les Britanniques les plus éloignés d’eux même.(courbe bleue). Aussi, plus que dans des domaines comme la politique ou les médias, c’est au niveau des représentations intrinsèquement liées à la population, que le peuple français voit le plus de différences. Cependant deux domaines marquent un-contre-pas dans ce graphique. En effet au niveau historique, les Français pensent l’Angleterre proche, voire très proche de l’Hexagone. Enfin c’est au niveau sportif qu’ils se trouvent les plus proches de leurs homologues Britanniques. 53 Cette question nous renseigne sur la façon dont sont vus les Anglais par les Français. Analysons maintenant leur capacité à accepter l’autre. Ce graphique nous indique qu’une réunion avec les Anglais est considérée par les Français comme : - Probable dans les domaines suivants : les médias, les forces armées, l’économie, les citoyens et le sport. - Peu probable en politique et sur la culture. Les sentiments principaux sont donc faiblement positifs ou faiblement négatifs. La prise de position reste prudente sauf dans le domaine sportif, où l’on remarque un fort pic de refus catégorique d’intégration. Les Français interrogés, concèdent un passé historique commun avec les Britanniques, mais se sentent généralement éloignés d’eux. 54 Toutefois ils ne rejettent pas l’idée d’un rapprochement avec leurs homologues d’outremanche qu’ils voient essentiellement « probable ». Le Domaine Sportif se pose en tous points différents des autres domaines sociétaux. En effet les Français trouvent les Anglais proches sportivement parlant mais une poignée d’individus trouvent impensable le rapprochement de ces nations dans ce domaine. Ce dernier phénomène trahit un rejet de l’autre et peut être une volonté d’affirmer son appartenance nationale et son indépendance vis-à-vis des Britanniques. Les Britanniques : Les Britanniques considèrent donc les Français : - Très éloignés en politique et sur le plan de la culture. - Eloignés au niveau des médias, de la façon de vivre et de penser. - Proche au niveau historique et dans le domaine sportif. 55 Les Britanniques n’hésitent pas à rentrer dans les « extrêmes » négatifs, au niveau de la culture et de la politique et trouvent globalement éloignées la France et l’Angleterre. Ils admettent que ces nations sont proches au niveau historique, tout comme leurs homologues français. Le sport reste un domaine à part, où les Français sont vus comme proches, voire très proche par les Anglais de leur propre pratique. Au niveau de l’acceptation de l’autre, les Britanniques ont des aspirations globalement négatives. En effet ils considèrent un rapprochement avec les Français : - Impossible, au niveau militaire - Peu probable, au niveau de la politique, de la culture, des médias, de l’économie, des citoyens. Les Britanniques ont donc du mal à accepter un rapprochement avec la France sur tous les plans, à part peut-être en sport, où le rejet semble le moins important. Tout comme leurs homologues Français, et même de manière plus prononcée, les Britanniques se trouvent bien différents du peuple vivant outre-manche. Ils admettent 56 des relations assez proches au niveau historique avec la France sans toutefois envisager qu’un quelconque rapprochement, sur tous les plans sociétaux, soit possible avec celleci. Les résultats montrent que le sport est un domaine à part, se sentent proches des Français et admettent qu’une réunion entre ces 2 nations dans ce domaine, est probable voire certain. iii. Analyse comparative Individu type Représentation Sociale Français Britanniques cadre (38%) manager (37%) 31 ans 41 ans oui 66% oui 50% oui 50% oui 50% 7,6 ans 19 ans occasionnel (61% de 1 à 5 fois/an) occasionnel (74% de 1 à 5 fois/an) Supporte uniquement la France (68%) uniquement l'Angleterre (55%) Connaissance du Rugby bonne (53%) très bonne (55%) haine 11% haine 0% peu Amical 36% peu Amical 0% neutre 22% neutre 13% amical 31% amical 87% 86% sentiment "favorable" justifié 95% sentiment "favorable" justifié Catégorie Socioprofessionnelle Moyenne d'âge Pratique Sportive Actuelle Pratique Rugbystique Expérience dans ce sport Type de Supporterisme Sentiment envers le peuple outremanche 65% sentiment "défavorable" justifié Provenance de celui-ci sport (53%) sport (66%) culture (31%) culture (34%) 57 Equipe que l'on soutient meilleure que l’adverse? oui (84%) non (61%) Objectivité oui (74%) oui (75%) Comment considérez-vous le peuple outre manche par rapport à vous-même dans les domaines suivants? politique culture médias façon de vivre façon de penser au niveau historique sport Appartenance Nationale et Altérité éloigné éloigné éloigné éloigné éloigné proche proche très éloigné très éloigné éloigné éloigné éloigné proche proche Comment considérez-vous un éventuel rapprochement avec vos homologues outre-manche dans les domaines suivants? politique culture médias militaire économie citoyens sports peu probable peu probable probable probable probable probable probable peu probable peu probable peu probable impossible peu probable peu probable probable Votre Pensée reflète celle des citoyens de votre nation? non 58% oui 63% Pensez-vous avoir été objectif sur cette seconde partie? oui 82% oui 70% Ce tableau comparatif nous renseigne tout d’abord sur l’individu interrogé type. Français comme Anglais appartiennent à une catégorie socioprofessionnelle plutôt aisée, celle des cadres. Les Britanniques étaient en moyenne plus âgés de 10 ans par rapport aux Français, ce qui explique en partie la différence dans l’expérience de pratique rugbystique et dans la connaissance de ce sport. 58 Pour nuancer davantage cette différence il faut rappeler que l’enquête s’est déroulée lors d’un événement sur le sol Français et donc accessible seulement aux personnes avec certains moyens. Ce sont des individus assistant de façon occasionnelle à ce genre de manifestation et supportant, pour la majorité, uniquement leur équipe. Il est cependant bon de montrer que les Britanniques se montrent plus ouverts que les Français (45% soutiennent une autre équipe). Les personnes participant à notre étude ont donc une certaine expérience de la vie et du rugby. Elles ont donc eu tout le temps d’évoluer dans un milieu rugbystique et de se construire par cela des représentations sociales affirmant leur appartenance à un groupe d’individus (que ce soit un groupe de supporters ou les citoyens d’une nation) se regroupant autour de symboles forts (comme une équipe nationale par exemple). Ce qui paradoxal, c’est que les Français avec une moins grande expérience dans le rugby, moins d’assiduité aux événements sportifs et avec de moins bonnes connaissances de ce jeu, affirment davantage leur affection exclusive à leur équipe nationale. On peut donc avancer l’hypothèse qu’ils sont plus réceptifs aux stimuli de leur environnement (attitudes, opinions, croyances, valeurs, idéologies) et/ou qu’ils appuient leurs représentations sur un ensemble dépassant le simple cadre sportif. Cette force des représentations se retrouve aussi dans les sentiments évoqués envers l’autre. Aussi quand les Britanniques expriment un ressenti favorable de leurs homologues Français, uniquement de la neutralité et de l’amitié, les Français n’hésitent pas à parler de sentiments peu amicaux voir haineux. Les continentaux trouve même cela justifié (65%) et objectif (74%). Tous s’accordent à dire que ce ressenti proviendrait du sport, et plus généralement de la culture. Cependant les anecdotes historiques ne cessent de revenir du côté français, peut-on y voir une rancune injustifiée ? En effet alors que la majorité des Français considèrent de façon négative les Britanniques avec pour justification l’évocation de faits historiques datant de plus d’un siècle ou rappelant simplement que les Anglais sont les ennemis naturels de la France, ils attribuent majoritairement ceux-ci au domaine sportif. On peut avancer l’hypothèse qu’il est plus facile d’exprimer ses sentiments que de les justifier, et que le cadre de l’enquête a surement influencé les réponses des personnes interrogées, mais cette tendance reste exclusivement française. Les britanniques ont, quand à eux, une certaine amitié envers les Français, considérant que le sport reste du sport, ne méritant pas de sentiments néfastes, et reconnaissent même l’infériorité de leur équipe nationale. 59 On peut donc voir dans l’analyse de cette première partie, que la prégnance de l’histoire dans les représentations sociales, n’est pas flagrante. Elle est le fait de quelques individus et uniquement du point de vu Français. Quand on étudie plus précisément ces représentations en décortiquant ce que peuvent penser les individus domaine par domaine, on se rend compte qu’il y a là encore des différences entre le panel français et le panel anglais. Mais les résultats vont à l’encontre des premières analyses. Les Britanniques globalement ouvert à l’autre (par exemple sur les équipes supportées) sur cette première partie ne le sont plus quand on sort du domaine du sport. On constate bien qu’ils se sentent proches des Français et qu’ils pensent qu’un rapprochement est probable dans le domaine sportif, mais ceci reste une exception. Là où les Français se considèrent éloignés, les Britanniques se pensent très éloignés ; là ou un rapprochement semble probable pour l’un, il est peu certain voire impossible pour l’autre. Si l’on pousse un peu plus l’analyse, les Français comme Anglais considèrent avec un certain éloignement le peuple d’outre-manche. Mais si, au niveau de la façon de penser et de vivre tous s’accordent à dire qu’ils sont différents, seuls les Français pensent probable un rapprochement des citoyens de chaque nation. L’Altérité est ici prégnante dans la définition de soi. Le Britannique, par le rejet objectif (70% pensent l’être), cultive son indépendance et son appartenance à la GrandeBretagne. On peut voir à travers ces résultats l’expression d’une certaine identité nationale, puisque l’on met l’individu dans une position représentative de la nation. Aussi quand le Français ressent ses dires comme éloignés d’une pensée générale, le Britannique se trouvent en cohérence avec celle-ci et représentatif des citoyens de sa nation. Le Français se considère donc de façon individuelle alors que le Britannique pense faire parti d’un « tout ». Si l’on devait réduire cette étude à un profil type du Français et de l’Anglais, nos résultats nous pousseraient à penser : - Les Français comme ayant des « représentations sociales de surface ». C'est-à-dire qu’ils fondent leur ressenti sur certains faits historiques, animant leur sentiment d’appartenance nationale et ravivant leur flamme patriotique dans le rejet du Britannique. Cependant ils admettent que sur le fond, leur pensé n’est pas celle du reste de la nation et que le peuple Britannique n’est pas si éloigné du leur. 60 - Les Britanniques comme ayant des « représentations sociales pragmatiques et profondes ». En d’autres termes, ils se montrent capable de dissocier leur ressenti lié au sport et aux autres domaines, restant objectif sur des symboles nationaux et montrant ainsi leur pragmatisme mais rejettent fondamentalement le peuple Français. Cette culture de la différence devient alors partie intégrante de représentations sociales nationales et non plus uniquement liées au sport. Il semble important pour conclure cette phase d’analyse de rappeler quelques biais pouvant relativiser ces résultats : - L’appartenance nationale des enquêteurs - Le lieu de la rencontre et de la prospection - L’enjeu de la rencontre suivant la prospection - La situation passée de chaque équipe dans le tournoi de 6 nations - Le fait de faire la prospection avant la rencontre (là où les tensions sont les plus fortes) 61 V. Conclusion Par l’élaboration de ce mémoire, nous cherchions à montrer le bienfondé des croyances populaires, concernant l’origine des représentations sociales qui sont par définition « un processus, un statut cognitif, permettant d'appréhender les aspects de la vie ordinaire par un recadrage de nos propres conduites à l'intérieur des interactions sociales »48. En d’autres termes nous voulions étudier la prégnance de l’histoire dans l’élaboration d’un savoir naïf, base des représentations sociales et facteurs de nos interactions avec l’autre. Nous avons basé notre étude sur les rapports Franco-Britanniques, et sur l’objet rugbystique. Ce choix fut orienté par la prépondérance d’aspirations nationales et patriotiques autour de ce sport et par la richesse des échanges historiques entre la France et l’Angleterre. La première partie cherchait à expliquer de façon historique, les représentations et le ressenti actuel des peuples français et britanniques. Nous avons donc établi le parallèle entre relations rugbystique et relations dans les autres domaines sociétaux, entre la France et l’Angleterre, sur trois périodes-échantillons. Ainsi nous voulions définir un schéma type relationnel qui expliquerait en partie la situation actuelle. Ainsi sur la période intitulée « De la genèse du rugby à l’Entente Cordiale », les rapports Franco-Britanniques ont été des plus houleux. La suprématie coloniale revenait comme un leitmotiv et on frôla un conflit majeur lors de l’incident de Fachoda. Aussi fallut-il toute la bonne volonté d’Edouard VII et l’arrivée d’un ennemi commun pour signer l’Entente Cordiale qui atténua ainsi les frictions récurrentes entre la France et l’Angleterre. Les relations rugbystiques ont été moins forcément moins riches. La France en quête de développement national et de reconnaissance internationale mit de nombreuses années avant une pseudo-acceptation des dirigeants Britanniques de l’IRB. Et cette intégration en 1910 dans le tournoi des désormais 5 nations, ne signifiait pas que l’on estimait une équipe de France consignée à un rôle mineur. Cette phase, genèse du rugby actuel à d’emblée enfermé les Français dans une certaine frustration, et laisser les Anglais se gargariser dans un rôle régalien. Elle peut donc être la référence en matière de représentations actuelles. La Deuxième phase, celle de l’entre-deux guerre, nous renseigne sur les politiques globales de reconstruction de chaque nation. Ce qui est intéressant pour notre étude c’est d’identifier si les relations rugbystiques suivent celles d’une politique globale (diplomatie, culture,…). Dans cette double période, avant et après le krach de Wall Street de 1929, la France et l’Angleterre connurent d’énormes difficultés à se remettre du lourd bilan de la première guerre mondiale. Le système impérialiste Anglais voit alors 48 FISCHER (G.N.). 1987. Les concepts fondamentaux de la psychologie sociale. Presses de l'université de Montréal. Dunod. p 118. 62 ses limites et c’est tout un pays, un peuple qu’il faut refonder. Tandis que la France « folle », fut frappée de plein fouet par la Crise de 1929. Cette année fut aussi le début d’une césure rugbystique, l’IRB par peur de perte de contrôle sur une pratique rugbystique à la dérive, privant l’équipe de France de toute rencontre officielle. Les relations politiques et sportives sont en 1939, diamétralement opposées : ce rapprochement politique poussé par l’émergence d’un ennemi commun n’affecte en rien le rejet que les anglais font du rugby français. Le Sport se pose donc comme un domaine sociétal à part, où les directives d’une politique globale ne sont pas forcement appliquées. Cette phase met aussi en lumière le besoin de contrôle de la nation Britannique sur une pratique qu’elle a inventée et dont elle veut conserver toute la gestion. La troisième période échantillon, inverse les rôles des nations. La Grande-Bretagne souffre d’un système sociétal poussiéreux et incapable de faire face aux nouvelles contraintes mondiales. L’équipe d’Angleterre est alors à l’image de la société, en recherche de nouveaux repères. Le développement d’un jeu audacieux et plein de fraicheur, porté par une génération de joueurs exceptionnels (notamment Blanco), fait de la France un modèle sportif. Cette phase est donc pertinente car elle met en l’accent sur cette ambivalence des sentiments britanniques à l’égard des Français, entre rejet impérialiste et admiration populaire. Cette étude historique qui devait nous amener à définir un modèle relationnel type expliquant en partie les ressentis actuels, nous montre simplement qu’il n’en existe pas. D’une part les relations entre la France ont toujours été influencées par un contexte mondial et ne sont donc pas significatives de ressenti national et d’autre part le rugby s’est toujours posé comme un domaine à part. Ce que l’on peut retirer de cette première partie, ce sont des éléments explicatifs des relations actuelles, comme par exemple les conditions de la genèse de ce sport, où l’admiration relative, des Britanniques envers les Français lors des années 1980/90. Ils servent juste à comprendre quelques représentations sociales actuelles mais ne peuvent expliquer leur fondement profond. Il fallait pour cela réaliser une étude empirique, fondée toujours sur le même objet, le rugby. La mise en place d’un questionnaire interrogeant l’individu sur sa personne, ce qui le définit, sur ses sentiments envers l’autre, et les origines de ceux-ci et sa capacité à dissocier ses ressentis, a permis d’enrichir grandement nos conclusions de première partie. 63 Le dépouillement et l’analyse de ceux-ci mettent en évidence la différence fondamentale des représentations sociales des individus Français et Britanniques. En effet les Français ont une représentation du Britannique reposant sur des faits et une vision subjective de la situation sans toutefois le rejeter. Alors que les Britanniques se considérant comme appartenant à un ensemble d’individus cohérent et objectif se définissent par sa différence avec l’autre et notamment avec les Français. Ce questionnaire met aussi en valeur, le fait que tous les individus questionnés s’accordent à dire que le sport reste un domaine à part des autres domaines sociétaux (politique, culture, économie,…). Il est le siège d’une augmentation de sentiments patriotiques extrêmes, en gardant à l’esprit que « le sport, ça ne reste jamais que du sport ». Plus qu’une conclusion, ce mémoire se pose comme étant la base d’une réflexion plus approfondie et notamment sur la prégnance du sentiment d’appartenance nationale. Dans le contexte où l’identité nationale et devenue une question européenne, on peut se poser des questions sur le rôle du rugby dans l’évolution et l’ancrage d’une telle appartenance. 64 VI. 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Une manière d’être au monde », Paris, Autrement, 1999 HERRERO (D) « L’esprit du jeu, l’âme des peuples » éd de la table tonde, 2007 HERRERO (D) « Dictionnaire amoureux du Rugby » éd Plon, 2007 GENET (JP) « Les idées passent-elles la Manche ? Savoirs, représentations, pratique » Presse de l’université Paris-Sorbonne GUILLAIN et PORTE, « La planète est rugby : regards croisés sur l’ovalie » tome 1 et 2 (2007) LACOUTURE (J), « Voyou et gentlemen. Une histoire du rugby », Paris, Gallimard 1993 POCIELLO (C), Le Rugby ou la guerre des styles, A.M. Métaillé, 1983 POCIELLO (C), Le rugby, Paris, PUF, 1988 POUSSE, « Rugby : enjeux de la métamorphose », éd l’harmattan (2001) RAPOPORT (M) « L’entente cordiale : cent ans de relations culturelles franco-britanniques, 1904/2004 » SMITH (A) « Le football, le rugby et les appartenances en Europe », presse universitaire de rennes, 2001 65 VII. Webographie www.psychoweb.fr http://www.debatidentitenationale.fr www.chateauversailles.fr http://pedagogie.ac-toulouse.fr http://www.francemondexpress.fr http://www.ercrugby.com 66 VIII. Annexes Annexe 1 : Déclaration Finale du Sommet Franco-Britannique (Londres 27 mars 2008) Annexe 2 : France - Angleterre, la Guerre de Cent ans, www.sportvox.fr Annexe 3 : France-Angleterre : nos meilleurs et nos pires souvenirs, www.ladepeche.fr Annexe 4 : Cette Rose pique-t-elle encore ? www.sports.fr Annexe 5 : « 10 ans de Crunch », http://www.rugbyrama.fr/rugby/6nations/2008/story_sto1487600.shtml Annexe 6 : Bilan des rencontres France/Angleterre, http://fr.wikipedia.org/wiki/AngleterreFrance_en_rugby_%C3%A0_XV Annexe 7 : Bilan des finales de la H-Cup Annexe 8 : Bilan du Stade Toulousain en coupe d’Europe source http://www.ercrugby.com/fra/13_5553.php?section=4 Annexe 6 : Questionnaire Français / Questionnaire Anglais 67 I.- SOMMET FRANCO-BRITANNIQUE DECLARATION FINALE (Londres, 27 mars 2008) Le Royaume-Uni et la France sont convenus que les deux pays doivent plus que jamais agir ensemble, au niveau bilatéral, dans le cadre de l'Union européenne et à l'échelle internationale pour contribuer à organiser la mondialisation. Car la mondialisation est la principale caractéristique de l'économie mondiale : elle a créé des possibilités nouvelles pour les entreprises et les citoyens, mais elle est aussi à l'origine de nouveaux défis économiques, sociaux, environnementaux et sécuritaires. Le Premier ministre Brown et le président Sarkozy sont convenus aujourd'hui que la France et le Royaume-Uni allaient intensifier leur coopération et leurs contacts et travailler ensemble dans le cadre d'un partenariat pionnier en mesure d'apporter une réponse mondiale aux grands défis internationaux. Ils ont décidé d'agir ensemble dans le cadre d'initiatives concernant les institutions internationales, la politique étrangère et de défense, le développement, les migrations, le changement climatique, l'énergie et la prospérité mondiale, notamment à travers des réponses concrètes. 1. Le Royaume-Uni et la France partagent la même analyse de l'organisation de l'ordre international du XXIème siècle et font des propositions pour une gouvernance internationale plus efficace. Le monde change. Nous devons approfondir notre analyse commune des évolutions en cours et adapter nos outils pour mieux relever ces nouveaux défis, en particulier au sein des instances internationales. INSTITUTIONS INTERNATIONALES Nous travaillerons ensemble pour établir un système international efficace afin de relever les défis du XXIème siècle et pour associer nos partenaires internationaux et les organisations multilatérales à ce processus. Nos priorités communes sont de remodeler les institutions internationales nécessaires pour promouvoir la prospérité économique mondiale, de protéger l'environnement, de lutter contre le changement climatique et de préserver la sécurité mondiale. Le Royaume-Uni et la France œuvreront pour : - développer des institutions internationales qui représentent le monde d'aujourd'hui et qui soient efficaces, étudier les possibilités de réformer le G8 pour tenir compte de l'apparition de nouveaux acteurs majeurs dans l'économie mondiale. Le processus d'Heiligendamm, lancé sous la présidence allemande du G8, a mis en place un dialogue utile avec la Chine, l'Inde, le Brésil, le Mexique et l'Afrique du Sud. Nous attendons avec intérêt le rapport d'étape qui sera discuté lors du Sommet de Toyako en juillet prochain. Nous devons faire en sorte que ces grands acteurs assument leur part de responsabilité en ce qui concerne les questions internationales. 68 - réformer le CSNU, à qui incombe en premier lieu la responsabilité de préserver la paix et la sécurité internationales. Dans le même esprit d'adaptation des institutions aux nouvelles réalités du monde, le CSNU doit être réformé pour qu'il représente mieux le monde d'aujourd'hui tout en restant capable de prendre les mesures nécessaires face aux problèmes de sécurité qui se posent aujourd'hui ; . il faut donc assurer le succès de la réforme du CSNU, tant en ce qui concerne son élargissement que l'amélioration de ses méthodes de travail. Nous réaffirmons le soutien de nos deux pays à la candidature de l'Allemagne, du Brésil, de l'Inde et du Japon pour devenir membres permanents, ainsi qu'à la représentation permanente de l'Afrique au sein du Conseil ; . nous regrettons que les négociations à cet effet demeurent dans l'impasse et nous sommes donc prêts à envisager une solution intermédiaire, qui pourrait prévoir une nouvelle catégorie de sièges avec un mandat plus long que celui des membres élus actuellement, et qui serait renouvelable. A la fin de la phase initiale, il pourrait être décidé de transformer ces nouveaux sièges en sièges permanents ; . nous travaillerons avec tous nos partenaires pour définir les paramètres de cette réforme ; . la réforme du CSNU nécessite un engagement politique des Etats membres au plus haut niveau. Nous travaillerons dans cette direction dans les mois à venir afin de parvenir à une réforme efficace ; - faire en sorte que les institutions internationales traitent simultanément la question du développement et celle du changement climatique et coordonnent leur action afin de mobiliser des ressources plus importantes et de rendre plus efficace la gestion des fonds affectés aux projets locaux ; - traiter énergiquement les problèmes actuels des marchés financiers. Nous avons reconnu la nécessité d'une plus grande transparence des marchés financiers pour faire en sorte que les banques révèlent totalement et rapidement l'ampleur de leurs pertes, et notamment de trouver les moyens d'obtenir une plus grande certitude sur la valorisation des actifs complexes. Nous avons également reconnu la nécessité de renforcer la gestion des risques et d'améliorer le fonctionnement des marchés financiers. Nous préconisons de continuer à discuter avec les Etats-Unis et d'autres pays de mesures permettant de promouvoir la stabilité financière, notamment lors des prochaines réunions des ministres des Finances du G7 à Washington et lors des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale. Au sein de l'Union européenne et du G8, nous œuvrerons, conformément aux conclusions du Sommet de Londres et du Conseil européen, afin de mettre en œuvre rapidement et complètement la feuille de route de l'Union européenne arrêtée lors de l'ECOFIN d'octobre 2007 qui prévoit un renforcement du cadre européen et des modalités de supervision financière transfrontalière, ainsi que de la gestion des situations de crise financière transfrontalières ; - assurer la prospérité mondiale sur un marché mondial plus turbulent, en réformant le Fonds monétaire international pour qu'avec le Forum de stabilité financière, il constitue un système d'alerte précoce crédible et faisant autorité pour l'économie mondiale et le système financier international ; - relever efficacement les défis de la mondialisation, à l'extérieur comme à l'intérieur ; 69 Ensemble, nous entendons : - nous engager avec nos partenaires dans une coopération stratégique améliorée et travailler ensemble dans le cadre d'organisations multilatérales plus fortes ; - agir en faveur d'un accord ambitieux, équilibré et global dans le cadre des négociations à l'OMC sur le programme de développement de Doha ; A l'intérieur, au niveau de l'Union européenne et au niveau national, nous devons engager de véritables réformes pour faire en sorte que notre économie tire pleinement parti des réalités de la concurrence mondiale. Il est particulièrement important de stimuler l'esprit d'entreprise et de créer les conditions permettant aux PME de prospérer. Ensemble, nous entendons : - obtenir un acte législatif de l'Union européenne concernant les PME, qui prévoit une série de mesures visant à réduire la réglementation européenne pour les PME, notamment en recourant davantage à des dérogations en faveur de ces entreprises, à intégrer un filtre pour les PME dans le processus législatif de l'Union européenne et à introduire des dates d'entrée en vigueur communes au niveau de l'Union européenne ; - faire en sorte que l'acte législatif accélère l'élimination des barrières à l'investissement de capital-risque dans toute l'Union européenne, en rendant le marché unique plus attractif pour les PME et en favorisant un meilleur accès des PME aux marchés publics ; - promouvoir une culture d'entreprenariat partout en Europe et soutenir la semaine mondiale de l'entreprenariat en 2008. Nos institutions internationales sont essentielles pour préserver la sécurité dans le monde, mais elles ne disposent pas des capacités nécessaires dans des domaines essentiels. En ce qui concerne la gestion des conflits, nous continuerons d'améliorer les capacités internationales en termes de stabilisation et de relèvement après un conflit. Ensemble, nous entendons : - renforcer les capacités internationales de l'ONU et de l'Union européenne pour agir à chaque étape d'un conflit, depuis la menace de conflit jusqu'à la reconstruction, en passant par le maintien de la paix et la stabilisation ; . nous affecterons chacun du personnel civil qualifié à la stabilisation dans le cadre de l'objectif global civil de l'Union européenne pour 2010, en prélude aux rapports pour le Conseil de novembre. Nous espérons que d'autres pays prendront des engagements similaires ; . nous contribuerons à la réalisation de l'objectif de l'Union européenne en organisant une conférence franco-britannique commune sur l'utilisation des missions expéditionnaires civiles pour développer l'état de droit dans les régions touchées par un conflit, notamment sur l'échange des bonnes pratiques sur la création d'une force de stabilisation ; 70 Nous souhaitons que 2008 soit l'année des missions civiles de l'Union européenne afin d'agir de manière décisive sur les conflits : en Afghanistan, dans les Territoires palestiniens occupés et au Kosovo, avec rapport au Conseil de décembre. Nous prenons acte des questions spécifiques à l'Afrique. Ensemble, nous entendons : - développer notre coopération pour garantir la paix et la sécurité en Afrique, grâce à la formation et au soutien technique et financier à la Force africaine en Attente pour des opérations de maintien de la paix. En étroite coopération avec nos partenaires européens, nous agirons ensemble à l'appui d'exercices africains visant à soutenir la Force africaine en attente dans le cadre du programme Euro-RECAMP, ainsi qu'une réforme du secteur de la sécurité en Afrique, en étroite coopération avec nos partenaires européens ; - travailler avec le G8 et d'autres membres de la communauté internationale pour contribuer au financement des opérations de maintien de la paix sous direction africaine ; - prendre des mesures afin de créer un mécanisme de financement prévisible et viable, en nous appuyant sur l'expérience de la Facilité de soutien à la paix pour l'Afrique et sur les contributions bilatérales des Etats membres de l'Union européenne et de l'Union africaine ; - travailler pour conforter le soutien des Nations unies aux opérations de maintien de la paix conduites par l'Union africaine ou sous son autorité, dans le cadre du chapitre VIII de la Charte des Nations unies. DEVELOPPEMENT INTERNATIONAL Nous sommes convenus que cette année était essentielle pour le développement. A mi-chemin du calendrier des OMD, il est clair que nous devons faire davantage. Nous sommes attachés au développement de l'Afrique et nous réaffirmerons notre volonté d'atteindre les OMD et d'encourager une croissance économique et un développement efficaces du secteur privé. En tant que membres de l'Union européenne, nous avons pris l'engagement de respecter les calendriers de contributions annoncés : 0,7 % du RNI consacrés à l'APD. Nous nous concentrerons davantage sur les résultats à atteindre. Ensemble, nous entendons : - construire un nouveau partenariat pour scolariser 16 millions d'enfants en Afrique d'ici 2010 et tous les enfants d'ici 2015. A mi-chemin de 2015, le défi reste immense, avec 33 millions d'enfants africains ne bénéficiant toujours d'aucun enseignement primaire. Le Royaume-Uni et la France contribueront chacun à la scolarisation de 8 millions d'enfants d'ici 2010. Nous le ferons avec la FIFA, la English FA, la Premier League britannique, la Ligue professionnelle de football et la Fédération française de football d'ici la Coupe du Monde de 2010 qui se déroulera en Afrique du Sud pour utiliser l'impact formidable qu'aura cet événement en Afrique et partout dans le monde. Le Royaume-Uni et la France invitent d'autres pays à se joindre à eux pour participer au financement de la scolarisation des enfants qui ne le sont toujours pas, pour faire en sorte que nous soyons à nouveau sur la bonne voie pour atteindre l'objectif d'éducation primaire universelle en Afrique d'ici 2015. Nous entendons également accorder une importance accrue à la qualité de l'éducation, au suivi et à l'évaluation des 71 mesures prises. De manière prioritaire, nous travaillerons avec d'autres pays pour recruter et former les quelque 3,8 millions d'enseignants supplémentaires nécessaires pour atteindre l'objectif de l'éducation primaire universelle en Afrique sub-saharienne d'ici 2015. Nous soutiendrons aussi les efforts déployés par les pays pour améliorer la gestion des écoles pour que les nouvelles ressources assurent une éducation pour tous de qualité ; - ensemble, nous voulons œuvrer à l'amélioration de la situation sanitaire dans les pays en développement, en particulier pour faire face aux maladies comme le paludisme, la tuberculose, le HIV et le sida. Cela implique que nous devons respecter notre engagement d'atteindre un niveau aussi proche que possible de l'accès universel aux soins et au traitement du HIV et du sida d'ici 2010. Cela suppose aussi de travailler pour parvenir à une réduction radicale de la mortalité maternelle. Toutes les minutes, une femme enceinte ou parturiente meurt. Le Royaume-Uni et la France, signataires du Partenariat international pour la santé, s'engagent aujourd'hui à faire en sorte que leur action en faveur du renforcement des systèmes de santé aura pour objectif la réduction quantifiable de la mortalité infantile. A mi-chemin de 2015, l'Afrique n'a toujours pas le 1,5 million de personnel médical dont elle a besoin pour fournir des services de santé efficaces aux mères et aux enfants. Le Royaume-Uni et la France aideront à faire face à cette crise en étudiant la manière dont des mécanismes innovants peuvent contribuer au financement des systèmes de santé, y compris grâce à la Facilité internationale de financement pour la vaccination. Par ailleurs, comme les mères et les enfants sont les plus vulnérables au paludisme, nous nous engageons aujourd'hui à travailler avec d'autres pour que chaque mère et chaque enfant puissent dormir sous une moustiquaire d'ici 2010. Pour faire avancer l'action en faveur de la santé maternelle, nous encouragerons les relations entre les établissements de santé britanniques et français. Nous sommes d'accord pour travailler à l'approfondissement de toutes les options pour le financement de l'accès universel aux services de santé, y compris la contribution de l'assurance maladie. Cette question fera l'objet d'une importante conférence qui se tiendra à Paris le 7 mai 2008. - œuvrer pour que la réunion de l'ONU en septembre à destination des Etats, du secteur privé, des organisations religieuses et des ONG se mette d'accord sur des engagements afin d'atteindre les OMD d'ici 2015 ; - travailler dans le cadre de l'Union européenne durant cette année (lors du Conseil européen de juin et durant la Présidence française) en vue d'un ambitieux plan d'action de l'Union européenne en faveur du développement qui inclura des mesures destinées à stimuler le secteur privé et la croissance afin d'atteindre nos objectifs de lutte contre la pauvreté ; - souligner la nécessité de prendre en compte les besoins spécifiques des Etats fragiles lors du forum de haut niveau qui se tiendra à Accra en septembre 2008. Nous appelons de nos vœux un consensus international sur un ensemble réaliste d'objectifs communs en matière de renforcement de l'Etat, de consolidation de la paix et de prévention des conflits, l'accent étant mis plus particulièrement sur des indicateurs et des critères appropriés pour mesurer les progrès accomplis ; - continuer de promouvoir des mécanismes innovants de financement du développement ; - travailler ensemble pour faciliter et rendre plus efficaces et plus sûrs les transferts des migrants. En outre, nous accorderons une attention particulière à la meilleure utilisation de ces ressources pour soutenir les économies locales ; 72 - en tant que membres du Commonwealth et de la Francophonie respectivement, nous travaillerons pour encourager ces organisations à promouvoir la gouvernance démocratique. 2. Le Royaume-Uni et la France œuvreront et coopéreront de manière bilatérale et au sein des institutions internationales (UE, OTAN, ONU, etc.) afin de renforcer la stabilité du monde. Le Royaume-Uni et la France renforceront leur coopération dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité. Les ministres des Affaires étrangères de nos deux pays mettront en œuvre ensemble le présent engagement. POLITIQUE ETRANGERE ET CRISES INTERNATIONALES Ensemble : - nous réaffirmons notre détermination à œuvrer pour la stabilisation et la paix dans les Balkans. Nous sommes convenus de prendre de nouvelles mesures avec nos partenaires européens, notamment dans le cadre de la mission EULEX, pour aider les autorités du Kosovo à instaurer l'Etat de droit de manière à permettre à toutes les communautés de vivre dans la paix et la sécurité. Nous avons rappelé notre souhait de voir la Serbie progresser vers son avenir européen et nous aiderons Belgrade à travailler dans cette direction ; - nous condamnons fermement les attentats perpétrés récemment par le gouvernement soudanais et les forces rebelles dans l'ouest du Darfour, notamment les attaques sans discriminations contre les civils qui constituent une violation directe des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. Il ne saurait y avoir de solution militaire à la crise au Darfour. Nous approuvons l'appel lancé par le Haut-Commissaire des Nations unies aux Droits de l'Homme d'une part au gouvernement soudanais pour qu'il mette fin aux attaques aériennes et à l'utilisation des milices armées dans la conduite d'opérations militaires, et d'autre part aux groupes rebelles pour qu'ils cessent les attaques délibérées contre les civils et s'abstiennent d'impliquer les civils dans le conflit, y compris comme boucliers humains. Le Royaume-Uni et la France œuvreront pour relancer le processus de paix au Darfour, dans le contexte de la résolution 1769 du CSNU, en appuyant les efforts déployés par les co-médiateurs de l'ONU et de l'Union africaine. Nous appelons le gouvernement soudanais et les rebelles à s'engager dans un processus de négociation. Nous prendrons des mesures conjointes pour faciliter le déploiement le plus rapidement possible de la MINUAD au Darfour et nous appelons le gouvernement soudanais à coopérer pleinement avec la MINUAD. Le Royaume-Uni et la France envisageront ensemble des mesures contre les parties qui commettent des atrocités sur le terrain et celles qui font obstacle au processus de paix ou au déploiement de la MINUAD. Nous ferons progresser la mise en œuvre de l'Accord de paix global qui a mis fin à la guerre entre le Nord et le Sud du Soudan, en apportant un soutien particulier à la préparation des élections de 2009 qui seront décisives pour l'avenir du Soudan. Au plan régional, nous agirons en faveur de la normalisation des relations entre le Soudan et le Tchad, sans laquelle il ne saurait y avoir ni stabilité au Tchad, ni paix au Darfour. Nous appelons le Soudan et le Tchad à se conformer aux accords qu'ils ont signés, notamment l'accord signé à Dakar, et à mettre en 73 œuvre des mécanismes de suivi efficaces. Nos deux pays rappellent qu'ils soutiennent sans réserve l'opération de l'Union européenne dans l'Est du Tchad ; - nous restons préoccupés par la situation humanitaire, politique et économique au Zimbabwe et par les conditions sur le terrain qui sont susceptibles de compromettre l'organisation d'élections parlementaires et présidentielles libres et équitables ; - nous soulignons qu'une paix juste et durable au Moyen-Orient ne sera possible qu'avec la création d'un Etat palestinien moderne, indépendant et démocratique. Nous condamnons fermement les derniers attentats terroristes. Une solution ne pourra être trouvée que par la négociation. Nous demeurons attachés au processus politique engagé à Annapolis l'année dernière et nous exhortons les parties à progresser sur le terrain. Les parties doivent mettre un terme aux activités de colonisation et prendre des mesures pour améliorer la sécurité. Nous nous félicitons des conclusions de la Conférence des donateurs qui s'est tenue à Paris et nous attendons avec intérêt la réunion de coordination des donateurs qui doit se tenir à Londres en mai. Nous soutenons tous les efforts déployés pour mettre fin à la violence. Nous sommes vivement préoccupés par la détérioration de la situation humanitaire à Gaza, nous demandons l'ouverture des points de passage et nous sommes prêts, par l'intermédiaire de l'EUBAM, à apporter toute l'assistance jugée nécessaire ; - la crise politique persistante au Liban reste vivement préoccupante. Nous avons réaffirmé notre soutien au gouvernement du Liban et aux efforts déployés par la Ligue arabe pour contribuer à trouver une solution. Nous avons appelé à l'élection d'un président consensuel du Liban dès que possible ; - l'Afghanistan constitue un défi stratégique. Avec le soutien du gouvernement afghan, nous sommes déterminés à rester avec nos Alliés aussi longtemps que nécessaire pour assurer la stabilité de ce pays. Nous continuerons de travailler à la reconstruction de l'Afghanistan à titre prioritaire, l'objectif étant de permettre à la population et aux institutions afghanes de prendre en charge l'avenir de leur pays. Et ensemble, nous continuerons à promouvoir une gouvernance efficace et l'état de droit. Nous redoublerons d'efforts dans notre lutte contre le fléau de l'industrie de la drogue qui finance la rébellion, alimente la corruption et la criminalité et compromet les perspectives de développement du peuple afghan. La France et le Royaume-Uni appellent leurs partenaires à unir leurs efforts pour assurer le succès de la conférence de soutien qui se tiendra à Paris en juin ; - nous sommes unis dans notre détermination à régler le problème de la prolifération en Iran : nous nous félicitons du très large soutien apporté à la résolution 1803 du CSNU, nous appelons l'Iran à s'y conformer, nous demandons instamment la mise en œuvre rapide et totale des sanctions qu'elle prévoit, et nous demandons à nos partenaires de l'Union européenne d'arrêter des mesures supplémentaires à l'appui de nos objectifs communs : l'Iran doit comprendre que le prix à payer pour continuer à ne pas respecter ses obligations internationales ne fera qu'augmenter. Nous réaffirmons que nous sommes toujours disposés à engager le dialogue avec l'Iran sur la base des propositions industrielles ambitieuses E3+3 ; - nous continuons de travailler avec le Conseil de sécurité des Nations unies, l'Union européenne et les partenaires de la région afin d'encourager la transition démocratique et le respect des Droits de l'Homme en Birmanie. Nos priorités immédiates sont de soutenir la mission de bons offices du Secrétaire général de l'ONU et de mettre l'accent sur les graves défauts des propositions du régime concernant le référendum et la nouvelle constitution, afin 74 de rendre le processus politique véritablement global et crédible. Nous sommes prêts à répondre de manière positive à l'évolution politique en Birmanie ou à intensifier les pressions sur le régime si celui-ci continue d'ignorer les exigences de la communauté internationale ; - nous nous félicitons de l'accord de partage du pouvoir au Kenya, négocié par Kofi Annan. Cet accord fournit la feuille de route pour mettre fin à la crise politique et réaliser les réformes essentielles qui sont nécessaires pour relancer le Kenya sur la voie de la prospérité, de la démocratie et de la stabilité. Le Royaume-Uni et la France continueront de travailler en étroite coopération dans le cadre de l'Union européenne et avec d'autres partenaires internationaux en vue de la mise en œuvre totale de cet accord. DEFENSE ET SECURITE En tant que membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, nous sommes résolus à travailler en étroite concertation pour préserver la paix et la sécurité internationales et régler les crises internationales. Nous sommes confrontés aux mêmes problèmes de sécurité. Nos intérêts stratégiques et de sécurité sont étroitement corrélés. Nous ne pouvons imaginer une situation dans laquelle les intérêts vitaux de l'un d'entre nous sont en jeu sans que ceux de l'autre le soient aussi. Nous ne pouvons imaginer une situation dans laquelle les intérêts vitaux de l'un de nos deux pays, la France et le Royaume-Uni, sont en jeu sans que les intérêts vitaux de l'autre le soient aussi. Nos forces armées travaillent ensemble. Nous entendons continuer à intensifier notre coopération bilatérale en matière de défense sous tous ses aspects et rechercher des synergies entre nos politiques industrielle, commerciale et de recherche et développement. Dix ans après le sommet de Saint-Malo, au cours duquel avait été lancée la Politique européenne de sécurité et de défense, nous soulignons la persistance de notre détermination commune à jouer un rôle moteur dans la défense et la sécurité, en Europe et au sein de l'Alliance atlantique, en étroite coopération avec nos partenaires et Alliés. Nous appelons tous nos partenaires européens à prendre des mesures décisives pour renforcer les capacités européennes militaires et civiles de gestion des crises, sous la Présidence française de l'Union européenne. Ensemble, nous entendons : - lutter conte la menace que font peser la prolifération des armes nucléaires, biologiques et chimiques, de leurs vecteurs, équipements et matériels partout dans le monde, et le risque terroriste qui y est associé. Notre engagement vaut également pour les acteurs étatiques et les acteurs non-étatiques. Nous résisterons à toutes les tentatives visant à affaiblir le Traité sur la non-prolifération qui est la clé de voûte de la sécurité internationale. Nous œuvrerons également à l'établissement, sous l'égide de l'AIEA, d'un système d'assurances pour le combustible nucléaire pour réduire les risques de prolifération ; - soutenir les mesures internationales de contrôle des armes classiques, notamment le commencement rapide des négociations concernant une convention sur le commerce des 75 armes et la conclusion rapide d'accords internationaux interdisant les armes à sous-munitions qui causent des dommages inacceptables aux populations civiles ; - coopérer étroitement dans la lutte contre le terrorisme par un large éventail d'actions allant de l'analyse de la menace à la coopération technique et opérationnelle. Nous travaillerons ensemble pour lutter contre le terrorisme nucléaire en inspectant les véhicules, y compris ceux qui empruntent le tunnel sous la Manche. Nous accorderons une importance accrue à l'élaboration de réponses concertées face au développement de l'extrémisme violent dans nos sociétés, notamment en ce qui concerne la radicalisation, le recrutement et la propagande terroriste, y compris sur Internet. Nous avons demandé à nos fonctionnaires responsables d'organiser un séminaire pour mettre en commun leur expérience et les bonnes pratiques. Nous sommes également convenus de travailler ensemble pour élaborer des propositions, en vue du Conseil européen de juin, sur la manière dont les efforts de lutte de l'Union européenne contre l'extrémisme pourraient être approfondis, par exemple en y consacrant davantage de crédits. Sur tous ces points, nous réaffirmons notre attachement au respect absolu de l'Etat de droit et des Droits de l'Homme ; - rester attachés à une étroite coopération de nos services de renseignement et de sécurité pour lutter contre les menaces communes, notamment le terrorisme, tout en reconnaissant que le renseignement et la sécurité nationale demeurent de la seule responsabilité de chaque Etat ; - renforcer notre dialogue bilatéral sur la dissuasion nucléaire ; - travailler ensemble pour préparer nos deux pays à faire face aux menaces émergentes dans le domaine de la cybersécurité, de la sécurité spatiale et des missiles ; - travailler ensemble pour faire face à la criminalité organisée et lutter contre le trafic de drogue ; - coopérer au renforcement des capacités militaires européennes dont disposent l'Union européenne et l'OTAN, notamment dans les domaines suivants : - opérations des groupes embarqués : en facilitant la mise en place en tant que de besoin d'une capacité de frappe maritime combinée pour les opérations menées par l'Union européenne, par l'OTAN ou nationales. Cette capacité pourrait être élargie à d'autres pays européens capables et désireux d'y contribuer ; . A400M : la France et le Royaume-Uni chercheront à adopter une approche commune des services de soutien à l'interopérabilité par une optimisation des coûts pendant le cycle de vie, notamment par une gestion commune de la configuration avec d'autres pays dotés d'A400M ; notre objectif est de couvrir les besoins de la France et du Royaume-Uni par un contrat unique commun ; . Hélicoptères : en remédiant au manque de capacités qui font obstacle au déploiement d'hélicoptères dans les opérations. Un soutien sera accordé aux initiatives telles que les cours de formation opérationnelle et avancée pour les pilotes, la modernisation des aéronefs et la création d'un fonds fiduciaire propre à améliorer la mise à disposition d'hélicoptères pour nos partenaires européens et nos alliés de l'OTAN. D'autres pays sont invités à contribuer à cette action. Nous soutenons le rôle que peut jouer l'AED et l'OTAN pour aider l'Europe à remédier aux lacunes ; 76 - contribuer aux initiatives actuelles et œuvrer à la modernisation de l'OTAN, en particulier pour en rationaliser l'organisation, réformer sa planification de défense, améliorer sa capacité en termes d'opérations expéditionnaires et encourager une répartition équitable des charges ; - œuvrer au renforcement de l'interaction et de la coopération UE/OTAN, en particulier la capacité d'opérer ensemble sur le même théâtre ; - donner un nouvel élan à notre coopération bilatérale en matière de défense industrielle, qui contribue au renforcement des capacités européennes et alliées : . en intensifiant notre effort commun en matière de recherche et développement, chacun d'entre nous fournissant 50 millions d'euros par an pour des projets communs ; . en réexaminant de manière systématique les possibilités de coopération entre nos programmes respectifs de capacités ; . en arrêtant des mesures pour faciliter les transferts entre nos deux pays et entre les sociétés privées ; . en adoptant une stratégie industrielle pour les armes complexes afin d'élaborer des projets et des technologies pour des programmes communs de missiles SCALP/Stormshadow, de missiles antinavire et de missiles de combat, en utilisant de manière plus efficace nos capacités et nos compétences industrielles respectives pour tenir compte de nos besoins militaires en armes, notamment lorsque ceux-ci sont communs ; . en veillant à ce que nos deux pays disposent des processus adéquats pour échanger librement et efficacement des informations entre nous et les fabricants d'armes complexes concernés ; . en offrant davantage de possibilités aux petites et moyennes entreprises dans les projets d'armements, grâce à une série de mesures ; . en signant un accord pour encourager les investissements croisés dans le secteur de la défense et éliminer les obstacles potentiels ; . en acceptant d'échanger des données classifiées pour faciliter la coopération de défense ; . en soutenant la mise en œuvre des recommandations du groupe de haut niveau conformément aux futures décisions nationales sur les ressources. 3. Le Royaume-Uni et la France sont convenus d'instaurer une coopération étroite dans les domaines d'action prioritaire de l'Union européenne tels que les migrations, l'énergie et le changement climatique, ainsi que les questions bilatérales telles que l'éducation. MIGRATION ET INTEGRATION 77 Les migrations sont une question internationale qui requiert une coopération internationale. Les flux migratoires ont considérablement augmenté et il existe déjà 200 millions de migrants dans le monde. L'accroissement démographique et le développement des chances qu'offre la mondialisation devraient inciter toujours plus de personnes à migrer durant la décennie à venir. Le Royaume-Uni et la France ont la conviction qu'il est essentiel, au XXIème siècle, de faire en sorte que chacun puisse profiter des possibilités qu'offre la migration. La coopération entre le Royaume-Uni et la France est excellente ; elle repose sur la manière dont nous avons réussi à juguler les migrations illégales à travers la France, notamment le nord de la France, en travaillant ensemble pour mettre en place des contrôles juxtaposés stricts et pour fermer les centres qui attiraient les trafiquants. Cependant, notre coopération doit aller plus loin et comprendre des mesures de lutte contre les passeurs et les trafiquants qui profitent de la circulation des personnes, ainsi que des actions avec les pays d'origine et de transit afin de mieux gérer les migrations. Ensemble, nous entendons : - renforcer la sécurité et la qualité des contrôles aux frontières à Calais en réalisant un audit de sécurité commun, en renforçant les clôtures de sécurité autour du port et en lançant une étude commune sur la création d'un système permettant d'accélérer et d'alléger les contrôles sur certains poids lourds ; coopérer pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de centre permanent pour les migrants à Calais ou ailleurs sur les côtes de la Manche ; - travailler ensemble à l'élaboration d'un plan d'action commun pour juguler les pressions migratoires persistantes dans le Pas-de-Calais de la part des migrants en situation irrégulière, notamment par un échange des données pour améliorer l'identification, la coopération sur l'obtention de documents et l'organisation de vols communs si nécessaire ; - soutenir les projets de l'Union européenne de renforcement des capacités dans les principaux pays d'origine dans le cadre de l'approche générale des migrations ; organiser un séminaire sur l'aide au retour volontaire à partir des pays de transit ; travailler ensemble pour assurer le succès de la deuxième conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement qui se tiendra à Paris en octobre 2008 ; - œuvrer à l'adoption d'un nouveau pacte sur l'immigration sous Présidence française de l'Union européenne, de manière à renforcer la réponse de l'Union européenne à l'immigration illégale et à améliorer la coopération avec les pays d'origine. Nous étudierons également la manière dont les Etats membres et l'Union européenne peuvent assurer le succès des migrations légales, tant pour les citoyens que pour les migrants, en aidant ces derniers à s'intégrer et à contribuer de façon positive à notre société et à leur société ; - lutter, à l'échelle bilatérale et à l'échelle communautaire, contre ceux qui cherchent à utiliser à mauvais escient la liberté de circulation par des activités criminelles, ou les droits et les prestations qu'offrent nos pays. A cette fin, nous intensifierons la coopération entre la Serious Organised Crimes Agency et l'Office central de répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi des étrangers sans titre (OCRIEST) ; - soutenir les efforts déployés par les Etats membres pour utiliser les nouvelles technologies pour les contrôles aux frontières et la délivrance des visas et demander aux Etats membres de délivrer des visas biométriques d'ici 2011 ; travailler ensemble pour utiliser davantage les 78 données des visas biométriques afin de mieux établir l'identité de ceux qui cherchent à abuser de nos systèmes et de les renvoyer dans leur pays d'origine. CHANGEMENT CLIMATIQUE ET ENERGIE Le Royaume- Uni et la France sont déterminés à ce que l'Union européenne reste en pointe dans les mesures de lutte contre le changement climatique en travaillant dans la perspective d'un accord international ambitieux et équitable à Copenhague fin 2009. Nous déploierons tous nos efforts pour parvenir à un accord mondial contenant les principaux éléments arrêtés à Bali, notamment une vision partagée des objectifs à long terme, des engagements différenciés des pays en ce qui concerne leur niveau de développement et d'émissions, un traitement équilibré des mesures d'atténuation et d'adaptation, une décision ambitieuse sur le développement et la diffusion des technologies, ainsi qu'un cadre international de financement efficace et cohérent permettant d'atteindre les objectifs d'un tel accord portant sur l'après 2012. Un marché mondial du carbone étendu ainsi que d'autres outils et mécanismes financiers pour aider les pays en développement à prendre des mesures d'atténuation et d'adaptation devront faire partie d'un accord général sur l'après 2012. Cet accord mondial doit assurer une convergence appropriée entre la lutte contre le changement climatique et le développement, d'une manière qui assure une véritable appropriation par tous les pays concernés. En outre, nous sommes déterminés à confier un rôle-clé au FEM aux côtés d'autres mécanismes financiers de la CCNUCC, notamment le Fonds d'adaptation, ainsi que d'autres dispositifs tels que le Cadre d'investissement pour les énergies propres, qui ont un rôle important à jouer. Le Royaume-Uni et la France sont décidés à travailler ensemble pour assurer la complémentarité et la coordination de ces instruments, dans le cadre d'une réponse internationale efficace au changement climatique pour l'après 2012. Cependant, des efforts mieux concertés pour renforcer l'investissement et le financement afin de répondre au défi du changement climatique et du développement durable sont également nécessaires avant 2012. Ensemble, nous entendons : - explorer conjointement les différentes initiatives actuellement en discussion, notamment le Cadre d'investissement pour les énergies propres des banques multilatérales de développement (BMD) et le fonds stratégique pour le climat, ainsi que le renforcement et la reconstitution adéquate des mécanismes existants, notamment le FEM, tout en assurant la bonne coordination de ces dispositifs. Une évaluation de ces initiatives et mécanismes renforcés devrait être menée afin de convenir de l'architecture financière globale de l'accord sur l'après 2012 ; - travailler ensemble pour intégrer le développement et l'environnement, en encourageant les pays en développement à tirer parti de l'intégration précoce du changement climatique dans leurs stratégies générales de développement ; - promouvoir le développement d'un marché mondial du carbone étant donné que les financements publics bilatéraux et multilatéraux doivent compléter le secteur privé pour la prise en charge des coûts d'atténuation. Nous ferons en sorte que le programme d'échange de droits d'émissions de l'Union européenne ait des liens avec d'autres systèmes obligatoires 79 d'échange d'émissions qui limitent les émissions absolues en les considérant comme un tout sur le marché mondial du carbone permettant de réduire les émissions au moindre coût. Nous souhaitons amener les économies émergentes à conclure des accords sectoriels efficaces dont bénéficieront les pays émergents et les pays développés ; - engager des travaux communs pour renforcer le marché du carbone, notamment améliorer et renforcer le mécanisme pour un développement propre, et éliminer les obstacles à l'adoption plus générale du mécanisme pour un développement propre dans les pays les moins avancés, notamment en Afrique, par les intérêts commerciaux français et britanniques ; - étudier de nouveaux mécanismes de lutte contre la déforestation et assurer une gestion durable des forêts et des autres ressources naturelles ; - entreprendre des travaux communs pour accélérer le développement et le déploiement de la capture et du stockage du carbone dans l'Union européenne, par un accord sur un plan d'action sur la capture et le stockage du carbone durant la présidence française de l'Union européenne. Nous demandons à la Commission européenne de présenter une proposition de mécanisme permettant de faire la démonstration d'une douzaine de centrales de capture et de stockage du carbone d'ici 2015. Nous convenons d'œuvrer pour encourager la capture et le stockage du carbone à l'intérieur et à l'extérieur de l'Union européenne, notamment en Chine en accélérant l'action de coopération COACH pour la capture et le stockage du CO2 et l'initiative pour un charbon à émissions presque nulles (NZEC). Nous travaillerons activement afin de parvenir dès que possible à un accord de l'Union européenne sur la question de l'énergie et du climat. Nous nous félicitions de l'ambitieux programme de la Commission qui précise notamment comment l'Union européenne peut réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 30 % dans le cadre d'un accord international. Nous agirons pour mettre en place une économie sobre en carbone en Europe et la promouvoir dans le monde entier. Ensemble, nous entendons : - faire tous les efforts possibles pour parvenir à un accord sur le changement climatique et les énergies renouvelables d'ici la fin 2008, l'objectif étant son adoption durant la législature actuelle, au plus tard début 2009, avec une répartition équitable de l'effort de réduction des émissions entre les Etats membres de la manière la moins coûteuse. A cet égard, les objectifs nationaux de développement des énergies renouvelables doivent prendre en compte la diversité de situation des pays, la part totale des technologies sobres en carbone, les points de départ et le potentiel de chacun, y compris le bouquet énergétique existant ; - soutenir le niveau de référence envisagé dans le cadre du programme d'échange de droits d'émission de l'Union européenne et une trajectoire à la baisse d'ici 2020 et même au-delà afin de parvenir à de véritables réductions des gaz à effet de serre et de fournir aux entreprises la certitude qu'elles peuvent investir dans l'économie sobre en carbone ; - demander instamment à la Commission d'inclure les produits respectueux de l'environnement dans la proposition de législation sur les taux réduits de TVA qui sera examinée sous Présidence française ; 80 - coopérer à l'élaboration de solides critères de viabilité des biocarburants et à l'évaluation des effets directs de la production de biocarburants ; - analyser de manière urgente le risque de fuite de carbone et mettre en œuvre des mesures appropriées dans le cas où les autres pays ne s'engagent pas à prendre des mesures adéquates pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le cadre d'un accord international. Un accord international reste la meilleure manière de traiter ce problème ; - améliorer l'efficacité des projets de développement nucléaire, notamment dans le domaine de la sûreté et des licences préalables, en demandant à nos autorités de sûreté de travailler en étroite collaboration et d'échanger des informations sur la sûreté, la sécurité et la gestion des déchets nucléaires, mesures qui pourraient être étendues à d'autres partenaires européens intéressés (et qui pourraient inclure en tant que de besoin d'autres aspects d'intérêt commun). Nous étudierons la possibilité de développer les échanges de personnel entre les autorités de sûreté des deux pays ; - nous féliciter du rapport commun du Haut Représentant et de la Commission sur l'incidence du changement climatique et de la sécurité internationale ; accepter de travailler ensemble et avec la commission contre la désertification et l'Union africaine pour fournir une analyse régionale de la zone allant du Sahel à l'Afrique de l'Est sur les effets du changement climatique sur la sécurité et le développement ; - collaborer à l'élaboration d'une stratégie globale de l'Union européenne sur la sécurité énergétique, thème qui sera l'une des priorités de la Présidence française. EDUCATION ET COMPETENCES Il est essentiel de doter nos concitoyens des compétences adéquates pour leur permettre de tirer parti des possibilités qu'offre la mondialisation, l'éducation et les compétences étant déterminantes pour assurer l'efficacité et le bon fonctionnement de la dimension sociale en Europe. Ensemble, nous entendons : - faire en sorte que la demande adressée à la Commission par le Conseil européen de printemps de présenter une évaluation complète des compétences qui seront nécessaires en Europe d'ici 2020 soit suivie sous la Présidence française et demander à la Commission de travailler en étroite coopération avec les Etats membres, et lancer l'action de bilan dès que possible ; - poursuivre notre tradition d'apprendre la langue de l'autre, notamment par l'intermédiaire de notre mémorandum d'entente : . nous intensifierons la coopération pour enseigner la langue du partenaire à l'école primaire, l'accent étant mis sur l'utilisation des technologies de l'information et de la communication et l'établissement de relations entre écoles ; 81 . nous développerons la coopération dans le domaine de l'enseignement d'une matière par l'intégration d'une langue étrangère (EMILE), notamment à l'école primaire ; . nous étudierons attentivement l'évaluation des programmes bilingues existants et la manière dont ils pourraient être généralisés dans la pratique ; . nous étudierons également la faisabilité d'une option bilingue dans les nouveaux diplômes de langue, qui sera développée par le Diploma Development Partnership./. 82 France - Angleterre, la Guerre de Cent ans Entre la rigueur anglaise et la fantaisie française, le "Crunch" s’annonce une nouvelle fois explosif samedi entre les meilleurs ennemis. Mais cette année, au delà des antagonismes historiques, le XV tricolore va disputer le titre et même le Grand Chelem. De quoi obtenir un crû exceptionnel... Duel mythique du rugby, France-Angleterre n’est pas un match comme les autres et ne l’a jamais été. Ce n’est pas une simple rencontre, c’est un évènement, un choc de culture. L’état d’esprit qui anime les frères ennemis peut se résumer à cette définition de Serge Simon qui précise ce que signifie lemot "anglais"dans le vocabulaire du rugby tricolore: "peuple visionnaire qui eut un jour le génie d’inventerle rugby et la grandeur d’âme de le diffuser ensuite. A ce titre, le monde entier lui est reconnaissant. Exemple: les Anglais, faut les crever!" La légende naît d’abord par le Tournoi. Très vite, ce choc voit s’opposer deux visions très différentes du rugby, une approche très méthodique où tout est planifié à l’avance côté anglais et un jeu fait d’imagination et decréativité côté tricolore. Chaque match est surnommé "The Crunch", que l’on peut traduire par moment crucial, le choc des titans que tous les supporters attendent avec impatience chaque année. Séparés par un bras de mer, les deux XV grandissent ensemble dans ces confrontations régulières, au gré des matchs jamais vraiment amicaux, toujours virils, oubliant parfois d’être corrects. Ensemble, le Coq et la Rose forgent le mythe de cette mésentente cordiale de l’ovalie, avec quelques matchs références. France-Angleterre, c’est d’abord la domination anglaise au début du XXème siècle, la première victoire française en 1927 au stade Yves du Manoir puis l’exploità Twickenham en 1951. C’est l’ode au rugby champagne de 1972, dernier match à Colombes et une victoire spectaculaire des Maso, Villepreux et Spanghero qui surclassent les Anglais. Mais c’est aussi les féroces batailles d’avants de la génération de Jean-Pierre Rives, avec notamment les victoires de 1977 et 1983 dans l’antre de Twickenham. La fin des années 1980 est un tournant dans l’histoire du "Crunch". Les Français, sûrs de leur jeu, ne voient pas arriver l’émergence d’une nouvelle génération revancharde des humiliations passées. Revenus aux fondamentaux du jeu de William Webb Ellis, les Carling, Moore, Andrew et autres Leonard trouvent la faille de l’adversaire, le côté obscur de leur spontanéité balle en main, leur indiscipline. Provoquants et narquois, ils font peter les plombs des avants tricolores, encore élevés au biberon des générales du sud-ouest. En 1991, lors du Tournoi des V Nations, ils l’emportent pour la troisième fois de suite. Six autres victoires derang suivront, mais à ce moment les Français croient encore pouvoir se sauver grâce à leur grain de folie, et se rassurent en inscrivant probablement l’essai du siècle à Twickenham... 83 Les Français ignorent encore qu’ils rentrent dans une longue période de disette, dont les joueurs ne retiendront que la traditionnelle et humiliante poignée de main, lorsque le capitaine Anglais Will Carling se plaisait à remercier ses adversaires déchus d’un "good game" au goût amer. Accueillant les Anglais au Parc des Princes pour la deuxième édition du Mondial, le XV du Coq pense ne faire qu’une bouchée de ceux qui semblent encore dépassés par les inspirations géniales et insensées de Serge Blanco. Mais l’Anglais sait s’adapter et dès le coup d’envoi sifflé, Andrew monte une chandelle stratosphérique avant de piétiner l’arrière tricolore à la retombée. Ils seront quatre à lui marcher dessus et Blanco restera dans le coltard les 80 minutes suivantes, tout comme ses coéquipiers trop occupés à rendre justice pour se soucier du score... Helas, aucune vidéo de ce grand moment de perfidie anglo-saxone n’est disponible sur la toile. L’exaspération est à son comble côté Bleu, le Crunch du Tournoi 1992 aura même vu l’arbitre du match exclure deux Français ( Lascubé pour avoir marché sur Bayfield, Moscato pour être entré trois fois de suite en mélée en mettant un coup de tête à Leonard ). Arrive alors le Mondial 1995 en Afrique du Sud et le match pour la troisième place entre deux équipes en pleine transition générationnelle. Cela fait maintenant sept ans que la France n’a pas battu le XV de la Rose. Eloignés géographiquement et médiatiquement de la pression nationale vécue lors des Tournois, les Français battent enfin leurs meilleurs ennemis. Et décident de passer la troisième mi-temps ensemble! Cuite mémorable et fin des "sales années" dans un pub de Prétoria. Libérés par ce succès, les partenaires d’Abdelatif Benazzi vont alors connaître une période faste pour le rugby français, marquée par deux Grands Chelems réussis consécutivement dans le Tournoi 1997 et 1998. Lors du premier d’entre eux, le XV de France s’offre un succès de prestige dans le temple des Anglais ( 20-23 ) où il n’avait plus gagné depuis près de vingt ans, grâce au pied de Christophe Lamaison et à un essai en fin de match de Laurent Leflamand. L’année suivante, le XV tricolore inaugure de la meilleure des manières le Stade de France en battant l’Angleterre ( 24-17 ), Philippe Bernat-Salles et Christophe Dominici inscrivants un essai chacun. En 2003, alors que se termine la Coupe du Monde en Australie, Français et Anglais se retrouvent en demi-finale. Les Bleus ont mis de la discipline dans leur jeu et Bernard Laporte a inoculé dans le sang de l’international Français le virus de la défense, au détriment du "french flair". Dans la foulée d’un début de compétition impeccable, le XV tricolore pensait avoir tout prévu pour passer l’obstacle, entre engagement physique irréprochable, méléeindestructible et pied redoutable de Michalak. Las, il n’avait pas prévu la pluie, la botte de Wilkinson et l’expérience des joueurs de sa Majesté ( Catt, Dallaglio, Johnson ). Sortis par la petite porte, les Coqs laissent l’Angleterre soulever le premier trophée mondial de l’hémisphère nord. Trois ans après, à l’occasion du Tournoi 2006, on assiste à la plus large victoire française de l’histoire face à l’Angleterre. Ce 12 mars restera comme un jour sombre pour le rugby anglais. Sans âme, dominés dans tous les secteurs, les hommes d’Andy Robinson touchent le fond. Charlie Hodgson, pétrifié par la pression de la défense française et par l’ombre plus que jamais pesante du grand absent Jonny Wilkinson, rate tout. Il sortira à la mi-temps. Dimitri Yachvili endosse sa tenue de bourreau des Anglais pour enquiller trois pénalités et donner une marge confortable aux Français à la pause ( 16-3 ). Le deuxième acte, tendu, est marqué par une grosse présence défensive française, puis par un feu d’artifice final sous la forme de deux essais dans les cinq dernières minutes, signés Traille et Dominici ( 31-6 ). Ce dimanche là, il 84 n’y avait personne, pas même un Anglais, pour imaginer que le XV de la Rose disputerait sur la même pelouse, 19 mois plus tard, une nouvelle finale de Coupe du Monde. En effet en 2007, une semaine après un exploit mémorable face aux All Blacks à Cardiff, les Bleus retrouvent leur public pour une improbable demi-finale contre l’Angleterre. La revanche de 2003. Mais de revanche il n’y aura pas. Le cauchemar commence dès la deuxième minute de jeu et un essai de Lewsey. Une cuillère sur Vincent Clerc, une charge de Chabal trop courte de deux mètres et c’est la finale qui ne veut pas s’offrir. Elle se dérobe même pour de bon à six minutes de la fin. Une cravatte de Szarzewski offre la pénalité qui tue à Wilkinson. Animal à sang froid, "Wilko" frappe sans état d’âme, avant de crucifier le rugby français d’un drop. Triste fin d’aventure. Depuis ce naufrage, les Français ont repris le dessus. Seule ombre au tableau, une défaite 3410 à Twickenham dans le Tournoi 2009, pour la dernière confrontation entre les deux équipes. Samedi, France-Angleterre sera donc beaucoup plus qu’une finale de Tournoi. Ce sera le match le plus important de l’histoire du rugby français. Comme d’habitude... 85 France-Angleterre : nos meilleurs et nos pires souvenirs Tournoi VI Nations VIDÉOS -- C'est une longue histoire. Parfois très belle, parfois moins. Un duel jamais éteint, en tout cas sans cesse rallumé sur les prés d'hivers brûlants et parfois même de lointains étés. Au rugby comme ailleurs, Anglais et Français se détestent avec une brave et presqu'émouvante fidélité. Du coup, l'album de souvenirs déborde d'images inoubliables…France-Angleterre. Nos meilleurs et nos pires souvenirs. TOP 5 DES VICTOIRES 1927 : première 2 avril 1927. à Colombes, France 3- Angleterre 0 (M-T 3-0).- Adolphe Jaureguy mérite bien une place en pleine lumière dans le jardin prestigieux du rugby tricolore. C'était lui le premier capitaine victorieux des Anglais après des années de patience. Quand les Bleus ont enfin réussi à faire chuter les « inventeurs » de ce sport grâce à un essai de Vellat, c'était la 17e 86 confrontation entre les deux sélections ! Quinze défaites et un nul avaient sanctionné leur parcours face aux bourreaux britanniques. 1951 : chez eux ! 24 février. À Twickenham, Angleterre 3-France 11 (M-T 3-5).- Arcalis, Pomathios, Belletante, Brun, Porthault, Alvarez, Dufau, Prat, Basquet, Bienes, Mias, Foures, Bernard, Pascalin et Bertrand. On ne résiste pas à vous rappeler la composition de l'équipe qui, pour la première fois, est rentrée d'Angleterre avec dans la musette, non pas la défaite habituelle, mais une victoire, une vraie. Un succès après dix tentatives infructueuses… 1972 : fête à Colombes À Colombes. France 37-Angleterre 12.- C'était la « der » à Colombes. Autour de Walter Spanghero, les Français ne pouvaient permettre aux Anglais de gâcher la fête. La victoire fut magnifique avec six essais à la clé, deux pour Duprat, un pour Biemouret, Sillères, Lux et… Walter. Un petit chef d'œuvre au moment de dire adieu à un monument du sport français qui vient de retrouver des couleurs avec le retour du Racing parmi l'élite. 1998 : et de quatre À Saint-Denis. France 24-Angleterre 17. (M-T 15-3).- Le 21 janvier 1978, les Français avaient déjà réussi une spectaculaire passe de quatre. Vingt ans plus tard, sous la houlette de Raphaël Ibanez, ils récidivent à l'occasion de leur baptême sur la pelouse d'un Stade de France flambant neuf. Deux essais de Bernat-Salles et Dominici, une transformation et deux buts de Lamaison, deux drops de Castaignède et Sadourny ont donné corps à cette quatrième victoire, bizarrement obtenue sur une quatrième pelouse différente (Prétoria en Coupe du monde, Parc des Princes, Twi-ckenham et Saint-Denis). 2006 : tranquille À Saint-Denis. France 31-Angleterre 6. (M-T 16-3). -16-0 au bout d'une demi-heure. Pas de suspense pour une fois, et une agréable balade bleu-blanc-rouge dans les lignes anglaises avec au final un des plus larges succès des Français sur les Anglais… Il vaut mieux en profiter quand l'occasion se présente non ? Flop 5 DES DEFAITES 1911 : la plus lourde 28 janvier. À Twickenham, Angleterre 37- France 0. (M-T 8-0).- Le voile pudique du tarif des points à travers l'Histoire atténue un peu la lourde défaite du brave beauvaisien Marcel Communeau et de ses camarades en cet hiver 1911. Un peu seulement. Ce terrible 37-0 avec 87 sept essais cinq transformations et deux pénalités équivaudrait aujourd'hui à un non moins douloureux 51-0 soit un nombre de points encaissés supérieur à celui de l'année du record (48 en 2001). À la mi-temps, les Tricolores pouvaient encore espérer. Ils ne savaient pas encore qu'ils étaient en route pour la pire défaite jamais encaissée par les Bleus face à leurs ennemis intimes. 1991 : rêve brisé 16 mars. À Twickenham. Angleterre 21-France 19. (M-T 18-9).- Une seule fois en un siècle de tournoi, les Anglais ont eu l'occasion de priver les Français du Grand Chelem lors du dernier match. C'était en 1991 et ils ne se sont pas gênés... Malgré trois essais de Saint-André, Camberabero et Mesnel, sous le crachin londonien, Blanco et les Bleus ont vu s'évanouir le triomphe entrevu. Revanche demain après-midi... 2007 : douloureuse 13 octobre à Saint-Denis. France 9-Angleterre 14 (M-T 6-5).- Évidemment, ils « nous » ont laissé virer en tête. Évidemment on y a cru jusqu'au bout, mais cette Coupe du monde maudite (défaite inaugurale face à l'Argentine), les Anglais ne pouvaient pas ne pas nous la gâcher un peu plus. En trois minutes (75, 78) et deux coups de pieds (une pénalité, un drop), Jonny Wilkinson a expédié les rêveurs sans le moindre état d'âme en consolante. Comment pourraiton lui pardonner ? 2003 : en enfer 16 novembre à Sydney. France 7- Angleterre 24. (M-T 7-12).- Une demi-finale de Coupe du monde, c'est toujours compliqué. Face à nos insupportables voisins, c'est l'enfer. En Australie il y a sept ans, Serge Betsen avait monté la (bonne) voie en début de match, mais les premiers points français étaient aussi les derniers. Une blessure toujours grande ouverte. 2009 : la gifle 15 mars à Twickenham. Angleterre 34- France 10. (M-T 29-0).- Celle-là, ils s'en souviennent tous, et c'est peut-être elle qui va les mettre à l'abri de tout péché d'orgueil. Les Anglais de l'hiver dernier, on les disait « pauvres » et « sans génie ». On les estimait « prenables », « bons à jouer » même. Après quarante minutes, ils avaient déjà violé l'en-but de France à… cinq reprises. Le crash n'a toujours pas été élucidé… 88 Cette Rose pique-t-elle encore ? Moribonde dans ce Tournoi 2010, raté quoi qu'il arrive, et incapable d'élever son niveau de jeu, l'Angleterre rêve pourtant de faire trébucher son meilleur ennemi samedi, au Stade de France, en privant au passage le XV de France de son 9e Grand Chelem. Dans un choc, qui reste à part, les Bleus n'ignorent rien du danger. Même sans Wilkinson au coup d'envoi. Szarzewski et les Bleus châtiés en 2008 au Stade de France (13-24). (Reuters) Et aussi... Bastareaud et le racisme ordinaire Andreu-Palisson: Little Big Men FRA-ANG: Les compositions La 5e journée Le classement "En terme d'intensité, on n'a pas encore vécu ça dans le Tournoi. Ils vont rechercher le combat". Sébastien Chabal connaît bien les Anglais pour avoir joué pendant quatre saisons à Sale avant de revenir cette saison en France, au Racing Métro. "Les Anglais ont le même profil que les Springboks. Ils sont aussi durs, mais peut-être moins agressifs", dit encore le deuxième ligne, qui sera remplaçant samedi et avoue sa "frustration" de ne pas être titulaire pour ce dernier match du Tournoi 2010. Comme Chabal, Julien Bonnaire a connu bien des déboires face aux Anglais au fil des "crunchs", même s'il en sort avec un bilan équilibré de quatre victoires et quatre défaites. Pour le troisième ligne de Clermont, il n'y a "rien de compliqué" dans le jeu du XV de la Rose. "C'est très simple et efficace avec une grosse intensité devant, ils portent beaucoup le ballon, ils font énormément de pickand-go. Ils pilonnent jusqu'à ce que la défense en face lâche, il ne faudra pas subir. Pour nous, ça va être un gros défi, on sait qu'il faudra répondre présent si on veut pouvoir donner quelques ballons à nos trois trois-quarts", ajoute-t-il. "Il y aura des espaces aussi il ne faudra pas hésiter à jouer, mais il faudra d'abord faire le boulot devant." C'est entendu. Mais Bonnaire de prévenir malgré tout: "S'ils peuvent nous priver d'un grand chelem ils le feront avec grand plaisir." Harinordoquy: "Ils ne sont pas bien, on est toujours là pour les relancer " 89 Tout est là, perdue pour perdue, cette équipe d'Angleterre, après avoir frisé la correctionnelle en Italie (17-12), sombré à Twickenham face à l'Irlande (16-20) et buté sur le Chardon écossais à Murrayfield (15-15), se verrait bien entraîner dans sa chute son rival honni, ce XV de France qui, samedi, peut non seulement décrocher la timbale dans ce Tournoi, mais en plus entrer dans l'histoire en signant le Grand Chelem. Le risque est bien réel, comme le mesure un Imanol Harinodoquy qui, avec six défaites en huit "crunchs" disputés, dont les demi-finales des Coupes du monde 2003 et 2007 et le cuisant revers (34-10) du Tournoi 2009, a payé pour savoir que lorsqu'"ils ne sont pas bien, on est toujours là pour les relancer." C'est pourtant le fantôme du vice-champion du monde sortant, qui se présente samedi, au Stade de France, avec à sa tête un Martin Johnson dont le bilan de... huit victoires en dix-huit matches depuis sa nomination ressemble de plus en plus à un faire-part d'enterrement. Et pourtant, "Johno" sait mieux que quiconque à quel point cette équipe d'Angleterre peut tirer profit de ce climat si particulier du "crunch". "Ils sont l'équipe en forme du tournoi. Mais nous sommes une formation d'internationaux qui jouons pour l'Angleterre et nous voulons sortir une bonne performance (...). Ils ont beaucoup à perdre, car ils peuvent perdre le Grand Chelem (...). Nous avons beaucoup à perdre à chaque fois que nous jouons pour l'Angleterre". Même dans la tourmente, l'orgueil et la fierté parlent toujours chez les voisins de l'Albion... Et ce même si la pression médiatique et populaire outre Manche a eu raison du plus emblématique des joueurs anglais, un Jonny Wilkinson sacrifié par Johnson au profit de Toby Flood. Les éditorialistes et autres commentateurs ont fini par avoir la tête de l'idole, à l'image de l'ancien ouvreur international, Stuart Barnes, consultant en vue, qui a salué cette décision. "C'est un choix courageux", a-t-il déclaré, tout en regrettant qu'elle intervienne bien tard. "Non seulement Jonny ne jouait pas bien, mais il symbolisait les difficultés de l'Angleterre". A l'entendre, l'Angleterre d'un Toby Flood à la baguette serait plus portée sur l'offensive. "Je préfère que l'Angleterre perde 40-20 en jouant un rugby d'attaque que 15-9 après avoir tenté de limiter les dégâts". Flood: "Si nous pouvons les embêter et les calmer en mêlée..." Pour Marc Lièvremont pourtant, rien n'y fait. "L'Angleterre a toujours joué le même rugby. On sait très bien qu'il y aura d'abord du combat, beaucoup de jeu au pied de pression. On s'attendait au retour de Simon Shaw qui est la poutre, la pierre angulaire du pack anglais. Ils nous ont mis une troisième-ligne puissante, pénible, expérimentée. Il y a aussi le retour de Mike Tindall pour muscler le milieu de terrain. Les Anglais annoncent la couleur..." Flood, lui, en tout cas, ne perd pas l'essentiel de vue lorsqu'il affirme sur la BBC: Ils ont probablement une chance de gagner ce Grand Chelem. Mais si nous pouvons les embêter et les calmer en mêlée, nous aurons une chance de victoire. Immuable France-Angleterre... 90 10 ans de Crunch DPPI Infos liées : Un doute à lever Dusautoir: "Un défi" En 1998, le XV tricolore découvrait le Stade de France. Face à l'Angleterre. De cette victoire initiale à la cruelle défaite en demi-finale de la Coupe du monde, les Bleus ont croisé cinq fois la route des Anglais à Saint-Denis. Retour sur 10 ans de Crunc . TOURNOI 1998 – FRANCE-ANGLETERRE: 24-17 Moins d'un mois après l'inauguration en grandes pompes du Stade de France par les manchots du foot (victoire 1-0 face à l'Espagne, but de Zidane), c'est au tour des rugbymen d'investir l'enceinte dionysienne pour la première fois. Quoi de mieux qu'un bon vieux Crunch face à l'ennemi anglais pour fêter ça? Cette équipe de France est encore celle du tandem SkrelaVillepreux. Un duo contesté après la monumentale et historique gifle (10-52) reçue de la main des Springboks, au mois de novembre 1997, au Parc des Princes. Heureusement, les débuts au Stade de France vont mieux se passer que les adieux au Parc. Deux essais de Bernat-Salles et Dominici (le premier de l'ailier parisien pour sa première sélection), deux drops de Castaignède et Sadourny et huit points de Titou Lamaison permettent aux Bleus de célébrer dignement cette première en s'imposant 24-17. La France est en route vers son deuxième Grand Chelem consécutif. Une première dans son histoire. . TOURNOI 2000 – FRANCE-ANGLETERRE: 9-15 La fête est finie. Quelques mois après une brillante Coupe du monde, où il a atteint la finale, le XV de France entame une nouvelle ère, celle de Bernard Laporte. Deux semaines après des débuts probants mais en trompe-l'oeil (victoire 36-3 à Cardiff), le nouveau sélectionneur va vivre sa première grande désillusion. Face à l'Angleterre, qui sera la cause de bien des tourments pour le futur ministre tout au long de son mandat de huit années. Déjà, tout Laporte est contenu dans ce premier Tournoi: la défense érigée en nec plus ultra du rugby moderne, exit les joueurs trop limités physiquement, type Bernat-Salles, tout pour le physique. La paire de centres alignée, Venditti-Lombard, en est la meilleure preuve. La présence incongrue du trentenaire d'origine samoane, Legi Matiu, est un autre symbole. Mais le fiasco est total. Les 91 Bleus viennent s'enferrer toute la journée dans la défense anglaise. Pas une once d'imagination, et un revers frustrant: cinq pénalités à trois pour les Anglais, un non-match et la première victoire anglaise au Stade de France. . TOURNOI 2002 – FRANCE-ANGLETERRE: 20-15 Après deux succès à domicile contre l'Italie et au pays de Galles, le XV tricolore reçoit l'Angleterre pour la véritable finale avant l'heure du Tournoi. Les Bleus savent qu'un succès leur ouvrirait les portes d'un possible Grand Chelem. Ce match, les hommes de Bernard Laporte ne vont mettre qu'un quart d'heure pour le plier. Un premier essai de Gérald Merceron à la 10e minute, puis un second, quatre minutes plus tard, du tout jeune troisième ligne Imanol Harnordoquy, qui fête ce jour-là sa deuxième cape. 14-0, les Anglais sont groggys. Ils ne se relèveront jamais de cette entame de rencontre calamiteuse. Ils sauvent toutefois les meubles avec deux essais de Jason Robinson et Ben Cohen (à la dernière minute) sans jamais envisager la victoire. Deux semaines plus tard, la France s'offre son septième Grand Chelem. . TOURNOI 2004 – FRANCE-ANGLETERRE: 24-21 Nous sommes quatre mois après la Coupe du monde. L'Angleterre étrenne son titre mondial. Mais sans Martin Johnson, parti à la retraite, ni Jonny Wilkinson, blessé, il manque à la fois du talent et du charisme aux champions du monde. Le XV de France va en profiter, en s'offrant son huitième Grand Chelem, le quatrième en sept ans, mais le dernier à ce jour. L'homme-clé clé de ce match, c'est Dimitri Yachvili, enfin révélé au grand public par cette "finale" du Tournoi. Un sans-faute pour le Biarrot, auteur de 19 des 24 points des Bleus, dont un essai lumineux avec un coup de pied à suivre pour lui-même. Quand il ne marque pas, Yach' offre un caviar sur une diagonale au pied pour son pote Harinordoquy. Groggy, les Anglais ne voient pas le jour en première période. A l'orgueil, ils vont revenir après la pause (essais de Cohen et Lewsey) pour faire trembler le public de Saint-Denis. Mais les Bleus tiennent bon. L'échec de Sydney n'est pas effacé, mais en cette douce soirée de printemps, il est au moins atténué. . TOURNOI 2006 – FRANCE-ANGLETERRE: 31-6 25 points d'écart. La plus large victoire française de l'histoire face à l'Angleterre. Sous un soleil d'hiver tondu comme un moine et par une température glaciale, ce 12 mars restera comme un jour sombre pour le rugby anglais. Sans âme, dominés dans tous les secteurs, les hommes d'Andy Robinson touchent le fond. Charlie Hodgson, pétrifié par la pression de la défense française et par l'ombre plus que jamais pesant du grand absent Jonny Wilkinson, rate tout. Il sortira à la mi-temps. Les Bleus, d'un froid réalisme, frappent d'entrée par Florian Fritz. Dimitri Yachvili endosse à nouveau sa tenue de bourreau des Anglais pour enquiller trois pénalités et donner une marge confortable aux Tricolores à la pause (16-3). Le deuxième acte, tendu, est marqué par une grosse présence défensive française, puis par un feu d'artifice 92 final sous la forme de deux essais dans les cinq dernières minutes, signés Traille et Dominici. Ce dimanche-là, il n'y avait personne, pas même un Anglais, pour imaginer que le XV de la Rose disputerait sur la même pelouse, 19 mois plus tard, une nouvelle finale de Coupe du monde. . COUPE DU MONDE 2007 – FRANCE-ANGLETERRE: 9-14 Crispation. Frustration. Désillusion. Une semaine après un exploit mémorable face aux All Blacks à Cardiff, les Bleus retrouvent leur public du Stade de France pour une improbable demi-finale contre l'Angleterre. La revanche de 2003. Revanche? En rêve, oui. Le cauchemar commence dès la 2e minute. Un long coup de pied de Gomarsall, une hésitation coupable et fatale de Damien Traille, et l'essai de Lewsey. Comme un premier coup au coeur. La botte de Lionel Beauxis entretiendra l'illusion. Une pénalité, puis deux, puis trois et les Bleus mènent 9-5 en début de seconde période. Mais faute de jeu, les hommes de Bernard Laporte resteront toujours dans le viseur anglais. Une cuiller sur Vincent Clerc, une charge de Chabal trop courte de deux mètres, et c'est la finale qui ne veut pas s'offrir. Elle se dérobe même pour de bon à six minutes de la fin. Une cravate de Szarzewski offre la pénalité qui tue à Wilkinson. Animal à sang froid, Wilko frappe sans état d'âme, avant de crucifier le rugby français d'un drop. Triste fin d'aventure… 93 Liste des confrontations Les confrontations France-Angleterre No Date Lieu Match Score Compétition 1 22 mars 1906 Parc des Princes, Paris France Angleterre 8-35 Test Richmond Angleterre France 4113 Test Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 0-19 Test 4 30 janvier 1909 Welford Road, Leicester Angleterre France 22-0 Test 5 Parc des Princes, Paris France Angleterre 3-11 Tournoi des cinq nations 6 28 janvier 1911 Twickenham, Londres Angleterre France 37-0 Tournoi des cinq nations 7 Parc des Princes, Paris France Angleterre 8-18 Tournoi des cinq nations 8 25 janvier 1913 Twickenham, Londres Angleterre France 20-0 Tournoi des cinq nations 9 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 1339 Tournoi des cinq nations 10 31 janvier 1920 Twickenham, Londres Angleterre France 8-3 Tournoi des cinq nations 11 28 mars 1921 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 6-10 Tournoi des cinq nations 12 25 février 1922 Twickenham, Londres Angleterre France 1111 Tournoi des cinq nations 13 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3-12 Tournoi des cinq nations 14 23 février 1924 Twickenham, Londres Angleterre France 19-7 Tournoi des cinq nations 15 13 avril 1925 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 1113 Tournoi des cinq nations 16 27 février 1926 Twickenham, Londres Angleterre France 11-0 Tournoi des cinq nations 17 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3-0 Tournoi des cinq nations 18 25 février 1928 Twickenham, Londres Angleterre France 18-8 Tournoi des cinq nations 19 1er avril 1929 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 6-16 Tournoi des cinq nations 20 22 février 1930 Twickenham, Londres Angleterre - 11-5 Tournoi des cinq nations 2 5 janvier 1907 3 1er janvier 1908 3 mars 1910 8 avril 1912 13 avril 1914 2 avril 1923 2 avril 1927 94 France 6 avril 1931 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 1413 Tournoi des cinq nations 22 19 avril 1947 Twickenham, Londres Angleterre France 6-3 Tournoi des cinq nations 23 29 mars 1948 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 15-0 Tournoi des cinq nations 24 26 février 1949 Twickenham, Londres Angleterre France 8-3 Tournoi des cinq nations 25 25 février 1950 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 6-3 Tournoi des cinq nations 26 24 février 1951 Twickenham, Londres Angleterre France 3-11 Tournoi des cinq nations 27 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3-6 Tournoi des cinq nations 28 28 février 1953 Twickenham, Londres Angleterre France 11-0 Tournoi des cinq nations 29 10 avril 1954 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 11-3 Tournoi des cinq nations 30 26 février 1955 Twickenham, Londres Angleterre France 9-16 Tournoi des cinq nations 31 14 avril 1956 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 14-9 Tournoi des cinq nations 32 23 février 1957 Twickenham, Londres Angleterre France 9-5 Tournoi des cinq nations 33 1er mars 1958 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 0-14 Tournoi des cinq nations 34 28 février 1959 Twickenham, Londres Angleterre France 3-3 Tournoi des cinq nations 35 27 février 1960 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3-3 Tournoi des cinq nations 36 25 février 1961 Twickenham, Londres Angleterre France 5-5 Tournoi des cinq nations 37 24 février 1962 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 13-0 Tournoi des cinq nations 38 23 février 1963 Twickenham, Londres Angleterre France 6-5 Tournoi des cinq nations 39 22 février 1964 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3-6 Tournoi des cinq nations 40 27 février 1965 Twickenham, Londres Angleterre France 9-6 Tournoi des cinq nations 41 26 février 1966 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 13-0 Tournoi des cinq nations 21 5 avril 1952 95 42 25 février 1967 Twickenham, Londres Angleterre France 1216 Tournoi des cinq nations 43 24 février 1968 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 14-9 Tournoi des cinq nations 44 22 février 1969 Twickenham, Londres Angleterre France 22-8 Tournoi des cinq nations 45 18 avril 1970 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3513 Tournoi des cinq nations 46 27 février 1971 Twickenham, Londres Angleterre France 1414 Tournoi des cinq nations 47 26 février 1972 Stade Yves-du-Manoir, Colombes France Angleterre 3712 Tournoi des cinq nations 48 24 février 1973 Twickenham, Londres Angleterre France 14-6 Tournoi des cinq nations 49 2 mars 1974 Parc des Princes, Paris France Angleterre 1212 Tournoi des cinq nations 50 1er février 1975 Twickenham, Londres Angleterre France 2027 Tournoi des cinq nations Parc des Princes, Paris France Angleterre 30-9 Tournoi des cinq nations Twickenham, Londres Angleterre France 3-4 Tournoi des cinq nations Parc des Princes, Paris France Angleterre 15-6 Tournoi des cinq nations Twickenham, Londres Angleterre France 7-6 Tournoi des cinq nations 55 2 février 1980 Parc des Princes, Paris France Angleterre 1317 Tournoi des cinq nations 56 21 mars 1981 Twickenham, Londres Angleterre France 1216 Tournoi des cinq nations 57 20 février 1982 Parc des Princes, Paris France Angleterre 1527 Tournoi des cinq nations 58 15 janvier 1983 Twickenham, Londres Angleterre France 1519 Tournoi des cinq nations 59 Parc des Princes, Paris France Angleterre 3218 Tournoi des cinq nations 60 2 février 1985 Twickenham, Londres Angleterre France 9-9 Tournoi des cinq nations 61 15 mars 1986 Parc des Princes, Paris France Angleterre 2910 Tournoi des cinq nations 62 21 février 1987 Twickenham, Londres Angleterre France 1519 Tournoi des cinq nations 63 16 janvier 1988 Parc des Princes, Paris France - 10-9 Tournoi des cinq nations 51 20 mars 1976 52 1er février 1977 53 21 janvier 1978 54 1er février 1979 3 mars 1984 96 Angleterre Twickenham, Londres Angleterre France 11-0 Tournoi des cinq nations 65 3 février 1990 Parc des Princes, Paris France Angleterre 7-26 Tournoi des cinq nations 66 16 mars 1991 Twickenham, Londres Angleterre France 2119 Tournoi des cinq nations Parc des Princes, Paris France Angleterre 1019 Coupe du Monde (quart de finale) 68 15 février 1992 Parc des Princes, Paris France Angleterre 1331 Tournoi des cinq nations 69 16 janvier 1993 Twickenham, Londres Angleterre France 1615 Tournoi des cinq nations 70 Parc des Princes, Paris France Angleterre 1418 Tournoi des cinq nations Twickenham, Londres Angleterre France 3110 Tournoi des cinq nations Loftus Versfeld, Prétoria Angleterre France 9-19 Coupe du monde (match pour la 3ème place) 73 20 janvier 1996 Parc des Princes, Paris France Angleterre 1512 Tournoi des cinq nations 74 1er mars 1997 Twickenham, Londres Angleterre France 2023 Tournoi des cinq nations 75 7 février 1998 Stade de France, SaintDenis France Angleterre 2417 Tournoi des cinq nations 76 20 mars 1999 Twickenham, Londres Angleterre France 2110 Tournoi des cinq nations 77 19 février 2000 Stade de France, SaintDenis France Angleterre 9-15 Tournoi des six nations 78 7 avril 2001 Twickenham, Londres Angleterre France 4819 Tournoi des six nations 79 2 mars 2002 Stade de France, SaintDenis France Angleterre 2015 Tournoi des six nations 80 15 février 2003 Twickenham, Londres Angleterre France 2517 Tournoi des six nations 81 30 août 2003 Stade Vélodrome, Marseille France Angleterre 1716 Test Test 64 67 4 mars 1989 19 octobre 1991 5 mars 1994 71 4 février 1995 72 22 juin 1995 82 6 septembre 2003 Twickenham, Londres Angleterre France 4514 83 16 novembre 2003 Telstra Dome, Melbourne Angleterre France 24-7 Coupe du monde (demi-finale) Stade de France, SaintDenis France Angleterre 84 27 mars 2004 2421 Tournoi des six nations 97 85 13 février 2005 Twickenham, Londres Angleterre France 1718 Tournoi des six nations 86 12 mars 2006 Stade de France, SaintDenis France Angleterre 31-6 Tournoi des six nations 87 11 mars 2007 Twickenham, Londres Angleterre France 2618 Tournoi des six nations 88 11 août 2007 Twickenham, Londres Angleterre France 1521 Test match 89 18 août 2007 Stade Vélodrome, Marseille France Angleterre 22-9 Test match[1] Stade de France, SaintDenis Angleterre France 14-9 Coupe du monde (demi-finale) 91 23 février 2008 Stade de France, SaintDenis France Angleterre 1324 Tournoi des six nations 92 15 mars 2009 Twickenham, Londres Angleterre France 3410 Tournoi des six nations 90 13 octobre 2007 Statistiques [modifier] Au 15 mars 2009 Matchs invaincus : Angleterre : 16 (21 ans) France : 6 (6 ans et 1 mois) Nombre de rencontres : 92 Premier match gagné par les Anglais : 22 mars 1906 (no 1) Premier match gagné par les Français : 2 avril 1927 (no 17) Dernier match gagné par les Anglais : 15 mars 2009 Dernier match gagné par les Français : 18 août 2007 Plus grand nombre de points marqués par les Anglais : 48 points le 7 avril 2001 Total : (gagné) Plus grand nombre de points marqués par les Français : 37 points le 26 février 1972 (gagné) Plus grande différence de points dans un match gagné par les Anglais : +37 le 28 janvier 1911 98 Plus grande différence de points dans un match gagné par les Français : +25 les 26 février 1972 et 12 mars 2006 En Angleterre : Nombre de rencontres : 44 Premier match gagné par les Anglais : 5 janvier 1907 (no 1 en Angleterre) Premier match gagné par les Français : 24 février 1951 (no 13 en Angleterre) Dernier match gagné par les Anglais : 15 mars 2009 Dernier match gagné par les Français : 11 août 2007 Plus grand nombre de points marqués par les Anglais : 48 points le 7 avril 2001 (gagné) Plus grand nombre de points marqués par les Français : 27 points le 1er février 1975 (gagné) Plus grande différence de points dans un match gagné par les Anglais : +37 le 28 janvier 1911 Plus grande différence de points dans un match gagné par les Français : +8 le 24 février 1951 En France : Nombre de rencontres : 46 Premier match gagné par les Anglais : 22 mars 1906 (no 1 en France) Premier match gagné par les Français : 2 avril 1927 (no 9 en France) Dernier match gagné par les Anglais : 23 février 2008 Dernier match gagné par les Français : 18 août 2007 Plus grand nombre de points marqués par les Anglais : 39 points le 13 avril 1914 (gagné) Plus grand nombre de points marqués par les Français : 37 points le 26 février 1972 (gagné) Plus grande différence de points dans un match gagné par les Anglais : +27 le 22 mars 1906 Plus grande différence de points dans un match gagné par les Français : +25 les 26 février 1972 et 12 mars 2006 99 En Coupe du Monde : Nombre de rencontres : 4 Premier match gagné par les Anglais : 19 octobre 1991 (no 1 en Coupe du Monde) Premier match gagné par les Français : 22 juin 1995 (no 2 en Coupe du Monde) Dernier match gagné par les Anglais : 13 octobre 2007 Dernier match gagné par les Français : 22 juin 1995 Plus grand nombre de points marqués par les Anglais : 24 le 16 novembre 2003 (gagné) Plus grand nombre de points marqués par les Français : 19 le 22 juin 1995 (gagné) Plus grande différence de points dans un match gagné par les Anglais : +17 le 16 novembre 2003 Plus grande différence de points dans un match gagné par les Français : +10 le 22 juin 1995 Dans le tournoi : Nombre de rencontres : 80 Premier match gagné par les Anglais : 3 mars 1910 (no 1 du tournoi) Premier match gagné par les Français : 2 avril 1927 (no 13 du tournoi) Dernier match gagné par les Anglais : 15 mars 2009 Dernier match gagné par les Français : 12 mars 2006 Plus grand nombre de points marqués par les Anglais : 48 points le 7 avril 2001 (gagné) Plus grand nombre de points marqués par les Français : 37 points le 26 février 1972 (gagné) Plus grande différence de points dans un match gagné par les Anglais : +37 le 28 janvier 1911 Plus grande différence de points dans un match gagné par les Français : +25 les 26 février 1972 et 12 mars 2006 100 LES FINALES DE LA H CUP Année 1995/96 1996/97 1997/98 1998/99 1999/00 2000/01 2001/02 2002/03 2003/04 2004/05 2005/06 2006/07 2007/08 2008/09 Equipes Stades Toulouse 21 (AET) Cardiff 18 Cardiff Arms Park Brive 28 Leicester 9 Cardiff Arms Park Bath 19 Brive 18 Stade Lescure Ulster 21 Colomiers 6 Lansdowne Road Northampton Saints 9 Munster 8 Twickenham Leicester Tigers 34 Stade Français Paris 30 Parc des Princes Leicester Tigers 15 Munster 9 Millennium Stadium Toulouse 22 Perpignan 17 Lansdowne Road London Wasps 27 Toulouse 20 Twickenham Toulouse 18 (AET) Stade Français Paris 12 Murrayfield Biarritz 19 Munster 23 Millennium Stadium Leicester Tigers 9 London Wasps 25 Twickenham Munster 16 Toulouse 13 Millennium Stadium Leinster 19 Leicester Tigers 16 Murrayfield Aff 21800 41664 36500 49000 68441 44000 74600 28600 73057 51326 74534 81076 74417 66523 101 Bilan du Stade Toulousain en Coupe d’Europe49 49 Matchs joués 110 Plus grand nombre d'apparition 76 (Fabien Pelous) Victoires 78 Meilleur marqueur 441 (Jean-Baptiste Elissalde) Matchs Nuls 4 Défaites 28 Plus grosse victoire 108 - 16 (v Ebbw Vale 1998) Nombre de points marqués 3152 Plus grosse défaite 17 - 77 (v London Wasps 1996) Nombre de points encaissés 2052 Nombre d'essais marqués 339 Plus gd nbre de victoires consécutives Plus gd nbre de défaites Nombre d'essais encaissés 182 consécutives Plus gros score Nombre de transformations marquées 259 Nombre de transformations encaissées 130 Nombre de pénalités marquées 277 Meilleur marqueur d'essais 30 (Vincent Clerc) 7 3 108 (v Ebbw Vale 1998) Plus gd nbre d'essais dans 1 16 (v Ebbw Vale match 1998) Plus gd nbre de 14 (v Ebbw Vale transformations dans 1 1998) match Plus gd nbre de pénalités 7 (v Stade Francais dans 1 match Paris 2010) 3 (v Biarritz Plus gd nbre de drops dans Olympique Pays 1 match Basque 2010) Nombre de pénalités concédées 276 Nombre de drops marqués 36 Plus forte affluence 78962 Nombre de drops encaissés 18 Affluence totale à domicile 1853383 Source http://www.ercrugby.com/fra/13_5553.php?section=4 102 Questionnaire Mémoire M1 MELS « Relations rugbystiques Franco-anglaises » Bonjour, je suis actuellement étudiant en Master à l’université et j’ai besoin que vous répondiez à quelques questions. Ce questionnaire est totalement anonyme utilisé uniquement pour mon mémoire sur les relations rugbystiques « Franco-anglaises » et ne prend que quelques minutes. Répondez le plus franchement et le plus sérieusement possible, Merci pour votre participation. 1- Age : …………………………………. Nationalité : ………………………………………………. CSP : agriculteurs artisans, commerçants et chef d’entreprises cadres professions intermédiaires employés ouvriers retraités sans activité professionnelle 2- Pratique sportive actuelle : Oui Non (passé à la question 3) Si oui la principale : ………………………………………… Depuis combien de temps : …………… an(s) (passer à la question 4) 3- Pratique sportive passée : Oui ………………………………… Pendant combien de temps : …………. an(s) Non Si oui la principale : 4- Assistez-vous souvent à ce genre de manifestation: 5- Dans quel(s) sport(s) ? Football 6- Dans quel(s) pays ? France …………………………………………............. 1 à 5 /an plus de 15 /an Rugby Basket Angleterre Autres : 6 à 15 /an Handball Autres 7- Combien de fois à l’étranger : ……./ fois en France …… / fois en Angleterre …… / fois « autres » 8- Soutenez-vous : la France l’Angleterre Aucune des deux 9- Avez-vous déjà supporté une autre équipe nationale : Oui Non Si oui laquelle (lesquelles) :………………………………………………… ……………………………………………………….. 10- Comment pensez-vous connaitre le rugby : Bien Pas du tout Un peu Bien Très 103 11- Quel sentiment portez-vous à l’égard de l’équipe de France (si vous êtes anglais) ou à Angleterre (si vous êtes français) : Amical Neutre Peu Amical Haine 12- Ce sentiment vous semble-t-il justifié : Oui Non Si oui, en quoi ? …………………………………………………………………………………………………………………………… 13- D’où provient ce sentiment : Médias Relations Politiques Relations Militaires Relations Culturelles Relations Economiques Sport Précisez votre réponse : …………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………………………………………................ 14- Pensez-vous que l’équipe de France ou d’Angleterre est meilleure que celle que vous soutenez ? Oui Non En quoi ? …………………………………………………………………………………………………………………………………….. 15- Pensez-vous être objectif : Oui Non 16- Comment considérez-vous la France et l’Angleterre dans les domaines suivants (cocher la case correspondante) : Très éloignées éloignées proches Très proches Politique Culture Médias Façon de Vivre Façon de penser Au niveau historique Sport 17- Pensez-vous qu’une alliance pourrait être conclue dans les domaines suivants (cocher la case correspondante) : Impossible Peu probable Probable A coup sûr Politique Culture Médias Militaire Economie Citoyens Sport 18- Pensez-vous que votre pensée reflète celle de la majorité des citoyens de votre pays ? Oui Non 104 19- Pensez-vous être objectif ? Oui Non 20- Avez-vous des commentaires ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………… Voici mon questionnement terminé, je vous remercie encore de votre participation à cette étude universitaire. Questionnaire Memory book Master1 MELS Excellente journée, « French and English relationships through rugby » Florian CHARPENTIER Good morning, I am a student in a Sports Master’s degree at the university. I wonder if you could answer to some questions? This questionnaire is anonymous. It will be used only for my report about French and English relations through rugby. Could you please take a few minutes to help me? Do not hesitate and answer as honestly and as seriously as you can. Thank you for your readiness to help. 1- Age: …………………………………. Nationality: ………………………………………………. Occupation: Farmer Craftsman, Shopkeeper and Company director Temporary profession Employee Workman Unemployed Manager Retired 2- Current sports practice: Yes No (go to question 3) If yes, main one: …………………………………How long have you been playing? : …………… years(s) (go to question 4) 3- Ancient sports practice: Yes How long did you play? : …………. year(s) 4- Do you often attend sports events? year 5- In what sport 6- In which country? Football France No If yes, main one: ………………………………… 1 to 5 a year Rugby 6 to 15 a year Basket England Handball More than 15 a Other Others: ………………………………….. 7- How many times in other countries?: ……. time(s) in France …… time(s) in England .…… time(s) in others 8- Do you support: France England 9- Have you ever supported an other national team?: If yes, which one? : ……………………………………………………….. None Yes No 105 10- How do you know rugby? not at all a little Well Very well 11- What do you feel about French/English teams (according to your nationality): Friendship Neutral Unfriendly Hatred 12- Does this feeling seem justified to you: Yes No If yes, why? …………………………………………………………………………………………………………………………… 13- Where does it come from? : Political relations Cultural relations Media relations Military relations Economic relations Sports Explain in a few words : …………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………………………………………................ 14- Do you think the French/English team is better than the team you support? Yes No Why? …………………………………………………………………………………………………………………………………….. 15- Do you think you are objective : Yes No 16- What is your opinion about French and English relations in the follow subjects? (check) : Very far from each other Far Close Very close Politics Culture Media Way of living Way of thinking At a historical level Sports 17- Do you think an alliance could be reached in the follow subjects?(check): Impossible May be Probable Certain Politics Culture Media Military Economy Citizenship Sports 106 18- Do you think your opinion reflects the state of mind in your country?: Yes No 19- Do you think you are objective?: Yes No 20- Have you some comments ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………… This is the end of my questionnaire, thank you for your help. Have a good day! Florian CHARPENTIER 107