l’autre. Après plusieurs jours de joutes
épiques, il s’avéra qu’aucun des deux ne
pouvait prendre un ascendant définitif et il
fut donc décidé que le premier arrivé au
sommet du mont Kailash le lendemain à
l’aube serait déclaré vainqueur.
Juste avant le lever du soleil, les disciples de
Milarépa, inquiets, vinrent le prévenir que
Naro Bönchung, chevauchant son tambour
de chaman, s’approchait du sommet. Sans
paraître s’en émouvoir outre mesure,
Milarépa d’un claquement de doigts immobi-
lisa Naro Bönchung dans les airs, puis,
déployant sa robe de coton blanc comme une
voile, il apparut instantanément assis au
sommet du mont Kailash dans la clarté des
premiers rayons du soleil ! Naro Bönchung,
stupéfait, perdit tous ses moyens et roula
avec son tambour au bas de la montagne...
En conclusion, nous disent les Cent mille
chants de Milarépa, Naro Bönchung ayant
perdu le combat, « les Bönpos s’attachèrent
au Chörten Kongsen. Quant aux disciples de
Milarépa, ils gardèrent continuellement le
pouvoir sur la blanche montagne et les deux
lacs ».
Sa grotte de méditation appelée la « grotte
des Miracles » est toujours visitée avec
dévotion par les pèlerins bouddhistes qui
effectuent rituellement le pèlerinage autour
de la montagne.
FESTIVAL DE THARBOCHÉ
Lorsqu’ils découvrent pour la première fois
la montagne sacrée qu’ils ont appelée de
leurs vœux et de leurs prières, pour la
contemplation de laquelle ils ont entrepris
ce dangereux périple à pied, à cheval ou en
camion depuis les lointaines provinces du
Kham ou de l’Amdo, les pèlerins tibétains
soudain exaltés par cette apparition, se
prosternent dans la poussière et ajoutent une
pierre sur le cairn qui marque la passe
comme le firent tous ceux qui les précédè-
rent. Sans doute bien peu parmi ces pèlerins
connaissent les subtilités de la métaphysique
bouddhique car, au Kailash comme souvent
comme « la montagne-svastika3» et aujour -
d’hui encore, les pèlerins qui découvrent la
montagne pour la première fois tentent de
discerner la Svastika qui orne, selon la vieille
légende Bön, la face sud de la montagne.
LA LUTTE POUR LE KAILASH
Cette mainmise des Bönpos sur le mont
Kailash fut pourtant remise en question dès
la fin du premier millénaire avec le renou-
veau du bouddhisme au Tibet. Dès l’arrivée
au Kailash de Milarépa, le grand yogi
bouddhiste, il apparut que la cohabitation
avec les Bönpos serait impossible. Naro
Bönchung, représentant la communauté bön
et Milarépa décidèrent donc d’éprouver leurs
pouvoirs magiques, le vaincu s’engageant à
abandonner la montagne à la religion de
LA GROTTE DES MIRACLES
(ZOUTROUL PHOUK)
A CONSERVÉ LA MÉMOIRE
DE MILARÉPA, YOGI ET POÈTE
DU XIESIÈCLE QUI ‘OUVRIT’
LE KAILASH AUX BOUDDHISTES.
❰
SUR LES DRAPEAUX DE PRIÈRE
ACCROCHÉS AU MÂT MONUMENTAL,
LES SOUHAITS DE TOUT UN PEUPLE
SERONT EMPORTÉS PAR LE VENT
COMME UN ACTE DE RÉSISTANCE
PACIFIQUE (ET SPIRITUELLE), SOUS
L’ŒIL ATTENTIF DE LA POLICE…
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42 //
trek
LORSQU’ILS DÉCOUVRENT POUR LA PREMIÈRE FOIS LA MONTAGNE SACRÉE,
LES PÈLERINS TIBÉTAINS SE PROSTERNENT DANS LA POUSSIÈRE.
3 SVASTIKA : CROIX REPRÉSENTANT LES
QUATRE ÂGES DE L’HUMANITÉ (BRONZE,
FER, OR, NOIR), DANS LA MYTHOLOGIE
ARYENNE ET PLUS TARD HINDOUE. HITLER A
PIQUÉ CE SYMBOLE, L’A RETOURNÉ ET L’A
MIS SUR UNE POINTE MAIS LA SVASTIKA
EST UN SYMBOLE DATANT DES PREMIERS
ARYENS (4 000 ANS).