La France, l’Europe et le monde depuis 1939 (J.-P. Barrière)
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Les dirigeants alliés, traumatisés par les hécatombes de l’été 1914, attendent que leur effort
de réarmement, la mise sur pied de l’armée de terre anglaise et leur supériorité à long terme portent
leurs fruits. Hitler, débarrassé de tout ennemi de revers à l’Est, a le temps de ramener ses troupes
vers l’Ouest pour préparer ses offensives. Faute de l’attaquer de front, les franco-britanniques,
financièrement solidaires, cherchent à affaiblir le IIIe Reich* par des stratégies périphériques [carte
de l’Europe en 1938] : soutien enthousiaste à la Finlande qui tient tête à l’URSS (décembre 1939-
mars 1940), volonté de couper la “route du fer” suédois vers l’Allemagne en débarquant un corps
expéditionnaire dans le port norvégien de Narvik (avril-mai 1940). Mais la défaite finlandaise et la
rapide occupation par l’Allemagne du Danemark, puis de la Norvège (avril 1940), et des États
baltes par l’URSS (juin 1940), ruinent ces espoirs. Les critiques s’amplifient contre Daladier : la
Chambre des Députés* s’abstient massivement lors du vote d’un ordre du jour de confiance* le
20 mars 1940. Paul Reynaud*, jugé plus énergique, le remplace le lendemain, mais son
gouvernement, toujours partagé entre partisans d’une paix de compromis et bellicistes, ne dispose
que d’une étroite majorité au Parlement. Rien ne change, sinon l’engagement réciproque avec le
Royaume-Uni de ne pas conclure d’armistice séparé avec l’Allemagne. Contrairement à la
Wehrmacht*, les forces franco-anglaises manquent d’unité de commandement ; même dans l’armée
française, des divergences existent, notamment entre son commandant en chef, le général
Gamelin*, partisan de la défensive, et le général Georges, dirigeant les armées du Nord-Est. De fait,
le potentiel de résolution, perceptible chez les Français à l’automne 1939, a été gaspillé.
L’effondrement français (10 mai – 22 juin 1940)
Le 10 mai, Hitler lance une offensive générale sur les Pays-Bas et la Belgique neutres,
mettant l’accent sur les nœuds de communication. Comme prévu, croyant y voir une répétition
élargie du plan Schlieffen* de 1914, les Alliés viennent au secours des Belges et des Néerlandais.
Mais, simultanément, conformément au plan Manstein*, Hitler concentre 9 divisions blindées dans
les Ardennes (réputées “infranchissables” par le maréchal Pétain*), à la charnière du dispositif
français, entre les troupes montées vers le Nord-Ouest et la ligne Maginot. Mal protégée, la Meuse
est franchie le 13 près de Sedan et, le 15, les blindés de Guderian*, appuyés par des
bombardements aériens, réalisent une percée qui s’élargit rapidement. Obliquant vers l’Ouest dans
un mouvement tournant, les divisions allemandes, dont la vitesse de déplacement et la
concentration créent la panique dans les rangs français, atteignent la Manche le 20 mai. Deux jours
auparavant, Reynaud* avait renforcé ses pouvoirs, mais confié à Pétain* la vice-présidence du
Conseil. Dès le 10 mai, Winston Churchill* avait remplacé Chamberlain* dans ses fonctions de
Premier ministre britannique.
Les contre-offensives lancées du 21 au 25 mai par le nouveau généralissime Weygand*
échouent, faute de coordination et de tactique adaptée : le 28, les Belges capitulent. Profitant d’une
erreur de Hitler qui freine ses troupes, les armées franco-anglaises du Nord, encerclées, peuvent se
replier sur Dunkerque pour évacuer ce qui peut l’être : jusqu’au 3 juin, dans des conditions
épouvantables, 350 000 hommes (dont plus de 100 000 Français) gagnent l’Angleterre.