Le tribunal est un lieu où est rendue la justice - Théâtre de Bourg

DOSSIER SPECTACLE
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Sébastien Joanniez / Jean-Michel Baudoin
Compagnie Lalasonge
Jeudi 4 et vendredi 5 octobre à 20h30
Au Théâtre
Durée estimée (en création) : 1h20
Contact scolaires :
Marie-Line Lachassagne
04 74 50 40 06
EPCC Théâtre de Bourg-en-Bresse
11 place de la Grenette BP 146 01004 Bourg-en-Bresse cedex
(entrée du Théâtre : Esplanade de la Comédie)
Etablissement public de coopération culturelle
Ce spectacle est soutenu par le Groupe des 20 dans le cadre du projet « Saut en auteurs ».
Le Groupe des 20 qui réunit 26 théâtres de ville en Rhône-Alpes, a passé une commande
d’écriture à six auteurs de théâtre, sur le thème Un Monde meilleur ?
6 courtes pièces en un acte sont nées !
A l'issue d'un appel à projet auprès des compagnies de la Région, la Compagnie Lalasonge a
été retenue pour composer un spectacle à partir de deux pièces : La Fin du monde en mieux de
Sébastien Joanniez et Arrêt sur zone tous feux éteints de Jean-Michel Baudoin.
Création en résidence au Théâtre de Bourg-en-Bresse
Le metteur en scène, Aannabelle Simon, animera le stage PAF « THEATRE : VIDEO DANS
LA MISE EN SCENE CONTEMPORAINE » (Thème : Action culturelle, Dispositif
12A0100391) le mercredi 16 janvier 2013. Inscriptions sur http://www.ac-
lyon.fr/paf/enseignants avant le 24 septembre.
Le spectacle
Des ouvriers sur un chantier, pris dans une lutte acharnée contre le temps, construisent un
centre de Thalassothérapie.
Un prophète surgit. Telle une petite luciole dans la nuit, il incarne la tentative d’un
jaillissement poétique dans ce monde d’hommes-machines mais l’implacable mécanique de
ces automates va s’abattre sur lui. S’engage alors la seconde pièce. Un microcosme en bord
d’autoroute où les destins d’un politicien, un chauffeur routier, une journaliste, une prostituée
et un vigile vont se croiser.
En faisant se suivre les deux pièces ainsi de manière chronologique on verra comment de
simple pion au sein d’une entreprise de travaux, l’homme, est devenu un rouage parmi tant
d’autres dans la grande machine européenne froide et brutale. On fera surgir avec férocité ses
fragiles lueurs d’espoir et de résistance qui se brisent dans un monde cynique et désenchanté.
Utopie => u-topos (= lieu qui n’existe pas), qui fait fantasmer et/ou permet de revenir ensuite
à son propre monde. Thomas More, au XVIème siècle a entraîné cette réflexion sur un autre
monde, imaginant alors que tout ce que nous connaissions pouvait être modifié voire remis en
cause. Rabelais, autre humaniste, recourt à ces sociétés « idéales » permettant de proposer une
autre société, une autre éducation, ou « simplement » de voir le monde tel qu’il est. Ce monde
imaginaire, parfois merveilleux (comme chez Votlaire), devient le lieu du questionnement : le
monde dans lequel je vis est-il « le meilleur des mondes » ? Par les progrès multiples, avons-
nous enfin évolué et créée un monde mieux que ? Par anticipation, d’autres auteurs ont usé
de ce subterfuge littéraire afin de montrer ce vers quoi nous tendions si nous ne prenions pas
garde. Ainsi, les dystopies d’Orwell et d’Huxley, par exemples, sont autant de réflexions sur
l’avenir possible et angoissant. Et aujourd’hui, alors… ? La question reste posée et est
soulevée par ce spectacle composé de deux pièces contemporaines.
Distribution
Textes La fin du monde en mieux, de Sébastien Joanniez
Arrêt sur zone tous feux éteints, de Jean-Michel Baudoin
Mise en scène Annabelle Simon
Assistée de Marion Camy-Palou
Avec Nelly Antignac, Yann Garnier, Lucas Olmedo, Chap Rodriguez, Aurélia Poirier
Scénographie Arnaud Verley
Création lumière Maëlle Payonne
Création son Christophe Provincial
Vidéos, Graphisme Pierric Favret
Costumes Antonin Boyot-Gellibert
Note d’intention
Je choisis de monter ces deux textes car ils traitent tous deux de l’homme moderne piégé dans
un système d’efficacité qu’ils ont eux-mêmes mis en place et dont ils ne peuvent se libérer. Ils
constituent, chacun avec leur spécificité, les 2 parties logiques d’un même spectacle. La
transition d’une pièce à l’autre peut s’opérer à la fois chronologiquement, esthétiquement et
métaphoriquement autour de la figure du prophète tué dans la première pièce et dont le
cadavre raisonne bruyamment dans la seconde.
Nous verrons comment les thématiques soulevées dans « La fin du monde en mieux »
trouvent une continuité percutante dans « Arrêt sur zone tout feux éteints », en décrivant un
monde de plus en plus pragmatique, instantané et réticent à l’élaboration d’un monde
meilleur.
I) De la farce loufoque a la réalité crue
D’une théâtralité assumée et burlesque à un style réaliste et cinématographique.
Dans la première pièce on assiste à la déshumanisation des êtres au sein d’une entreprise de
bâtiment. La pièce s’inscrit sous le ton de la comédie loufoque et décalée. Des ouvriers sur un
chantier, construisent un centre de Thalassothérapie.
Ils sont pris dans une lutte acharnée contre le temps. C’est dans cette spirale infernale qu’un
prophète en treillis et tee-shirt de foot surgit pour apporter la parole “divine”. Telle une petite
luciole dans la nuit, il incarne la tentative d’un jaillissement poétique dans ce monde
d’hommes-machines, mais l’implacable mécanique du chantier avec ces ouvriers automates
va s’abattre sur lui. La théâtralité burlesque très affirmée dans l’écriture fait penser au film «
Les temps modernes » de Chaplin.
Pour accentuer cette idée, nous verrons les comédiens qui pourraient s’apparenter aux
techniciens du théâtre, en train de construire un espace, l’espace de jeu pour la seconde pièce
qu’ils nomment Thalassothérapie. Cet espace qu’ils mettent en forme est un cube dont ils
assemblent les parties et habillent sous nos yeux de lamelles en plastiques et différents objets.
Les matériaux utilisés auront un double sens, pouvant évoquer et le centre de thalasso thérapie
et le complexe autoroutier qui servira à l’autre pièce. La direction d’acteurs s’orientera sur un
code de jeu très stylisé : les comédiens incarnant les ouvriers auront des costumes bruyant et
chacun aura une attitude et des mouvements marqués en contraste avec le prophète qui tentera
d’amener un monde de silence. La musique expérimentale et industrielle comme celle du
groupe allemand Neubauten et les chorégraphies inspirées des danses de Anna Teresa de
Keersmaker faites de mouvements en spirale et de va et vient perpétuels seront nos points
d’appuis. La lumière pourra s’apparenter à un plein feu comme si les services étaient restés
allumés. Ainsi dans cette première partie du spectacle on est dans un espace unique, poétique
et déréaliser. Dans la seconde le plateau sera fragmenté, réaliste et crue.
Du monde du travail au sein d’une entreprise au monde du travail dans l’Europe.
Dans la seconde pièce l’ambiance décrite, à la différence du premier, a un côté plus
documentaire. En effet on se heurte à la réalité poisseuse et brutale de l’actualité. L’action se
situe aujourd’hui, au cœur de l’Europe. La construction de la pièce fait penser au scénario
d’un film noir l’on traverserait les dessus et les dessous d’un microcosme en bord
d’autoroute.
Chaque personnage a une langue singulière, avec un phrasé et un rythme qui donne
immédiatement une couleur de jeu à celui qui s’en empare. L’ambiance inhospitalière de
l’autoroute, avec bande d’arrêt d’urgence, camions et aire de repos deviennent les lieux se
croisent différentes couches sociales et corps de métier : un politicien, un chauffeur routier,
une journaliste, une prostituée et un vigile. Les personnages dépeints de manière brute et sans
fard donnent l’impression d’insectes enlisés dans la boue. La pièce s’ouvre avec un conseiller
ministériel qui prépare un discours sur l’interdiction de fumer dans tous les lieux publics.
Cette loi sous couvert d’une éthique pour le bien-être des citoyens au fur et à mesure du
déroulement de la pièce va faire tomber les faux semblants et découvrir sa vraie nature. Ainsi
le cube installé dans la première partie pourra créer différents axes de vue pour suivre
l’enquête. Il aidera à créer différents espaces : fermé par des lamelles en plastique il peut
signifier l’arrière du camion de Kars, (le chauffeur routier qu’on soupçonne de transporter
dans son camion des contrefaçons de toute sorte et qui sert aussi de passeur à une jeune
prostituée de 16 ans Paulya qui rêve d’aller à Londres) ; ouvert on peut imaginer le complexe
autoroutier avec carrelage blanc, tv et chaise qui représente l’univers usuel du vigile ; le
dessus, peut signifier une sorte de salle de conférence pour le conseiller ministériel qui se
situe symboliquement en haut de l’échelle sociale ; à jardin on aura le bord de l’autoroute,
zone non-définissable, dans l’obscurité, à peine éclairée par les vidéos d’ambiance de phare
de camion… Dans cette pièce le son et la lumière viendrait donc de l’intérieur du processus
scénique pour amener à plus de réalisme. En effet des éclairages partiels et les sons provenant
de l’intérieur du cube seront pour sculpté l’espace de jeu. Le clair/obscur pour dessiner ce
lieu de passage, cette zone de contrôle se trame les délits les plus sordides. Le cube peut
aussi représenter une sorte de TV géante, une petite lucarne sur le monde les images de
l’arrestation du chauffeur seront projetées à la une du journal télévisé «juste avant le loto»
pour montrer l’exemple au monde comme le souhaite le conseiller ministériel.
Le cube qu’on construit dans la première pièce qui représente la Thalassothérapie et puis le
complexe autoroutier en plus d’éclater l’espace dans la seconde a un double sens : il est
d’abord le cercueil du prophète puis l’endroit va se cacher la misère du monde.
Symboliquement il devient à la fois boîte de pandore, ascenseur social et miroir aux alouettes.
II) Un monde sans valeur
accoucheuse d’hommes sans gravité
La mort du prophète.
Il m’apparaît primordiale, pour la cohésion de l’ensemble du spectacle de traiter la figure du
prophète sous l’angle du poète, de l’artiste garde-fou. Il est une fragile conscience, héritière
des horreurs du passé. Quand il arrive, il descend d’une échelle, donc du ciel ou d’une
montagne. Pour moi il incarne l’apaisement et le calme en contraste du brouhaha perpétuel
que font les hommes du monde. Comme un grain de sable qui vient faire railler une
machine le prophète devient dérangeant. Il est l’autre celui qu’on ne connaît pas et qu’on ne
veut pas connaître. Un des ouvriers le rouent de coup, l’assomme, puis l’emmure dans une
coulée de béton. Avec sa mort disparaît alors cette lueur fragile qui pourrait dessiner une vie
plus fraternelle, un temps plus romantique et des aspirations plus idéalistes que celles
orchestrées par la loi du profit. Ainsi le cadavre du prophète, trouvera une résonance sourde et
persistante dans le second texte. Si le prophète représentait le fragile espoir d’apporter « un
monde meilleur » le fait que le second spectacle se construise sur son cadavre donne l’idée
que notre époque se construit sur la mort de l’art et des aspirations humanistes.
Quand il disparaît son vague souvenir peut s’incarner en la figure de la journaliste dans la
deuxième pièce. En effet ce personnage n’arrive pas à s’épanouir dans ce monde-là. C’est une
sorte d’artiste ratée des temps moderne, rétrécie par les contradictions et contraintes de son
métier. Le rapport à l’élévation et au temps du silence est anéanti, et remplacé par un rapport
horizontal au monde, noyés d’informations et de vitesse : « Notre époque voit de nombreux
changements structurels : l’individualisme prend le pas sur la notion de collectivisme, les
micro-récits (l’anecdotique, le fait divers, le retour du « je ») sur les grands récits ; la durée se
tracte, le zapping devient une fièvre ; les fêtes, même celle de l’art, remplacent les
manifestations politiques. » Philippe Roux.
De l’accélération du temps et de l’information, de la difficulté de faire coïncider être et
avoir.
Dans la deuxième partie le cube servira aussi d’espace de projection. La réalité deviendra
alors plus impalpable plus complexe et poreuse par la présence d’images vidéo. La
comédienne qui incarnerait la journaliste aurait toujours à la main sa caméra comme un
journal intime. Au lieu d’écrire ce qui lui arrive elle se filmerait lors de ses soliloques. Les
images seraient projetées en direct comme une volonté dérisoire et désespérée de laisser une
trace. Nous nous servirons aussi de l’objet caméra comme d’une arme… Il sera central, pas un
accessoire anecdotique mais l’œil par lequel tout fait sens et non-sens. Il incarnera
l’enferment de l’homme actuel dans le monde de l’instantané. Nous verrons comment les
images ne sont jamais neutres et influent sur la manipulation des idées et des opinions. Les
petites gens qui tentent de s’en sortir sont leurrés par des représentations mensongères de
bien-être, de richesse et de plénitude véhiculé par la pub comme c’est le cas pour Paulya, la
jeune prostituée. Nous tenterons de faire surgir la thématique centrale de la pièce, à savoir :
comment la révolution informationnelle et les nouvelles technologies ont complètement
transformé notre rapport aux autres et à nos ambitions. En synchronisant nos opinions et nos
émotions elles font tendre l’homme vers moins de réflexion. C’est une nouvelle forme de
dictature et de nivellement par le bas qui produit une uniformisation des désirs dans l’avoir ou
le paraître plutôt que dans l’être.
Ainsi le discours hygiéniste que fait le conseiller ministériel au début et le coup de théâtre
télévisuel de la !n ne serve qu’à cacher la laideur du monde et nous enfermer dans plus de
faux semblant et d’inculture.
L’idée que le mal du siècle naît du manque de conscience de l’homme moderne et de sa perte
de rapport au réel Hannah Arendt l’avait très bien décrit dans son livre «Eishman à
Jérusalem». Cette étude sur les ressorts du mal tente de comprendre ce qui a rendus possibles
les camps de concentrations. Elle perçoit, cet Eishman, haut fonctionnaire nazi qui s’occupait
de l’évacuation des juifs et de la logistique de la solution finale, non pas comme un barbare
sanguinaire mais comme un fonctionnaire s’occupant de chiffre incapable de jugement morale
ou de faire appel à sa conscience… Le progrès des nouvelles technologies sans conscience ou
éthique se retourne contre l’homme lui même au lieu d’être le lieu de sa liberté : il devient une
forme vicieuse d’enfermement.
Finalement à partir du même décor et des mêmes acteurs en passant d’un théâtre burlesque à
un théâtre documentaire, d’un lieu unique à un espace fragmenté, ces 2 pièces ne sont-elles
pas les viatiques inespérés pour parler de notre époque en perte de valeurs ? Nous tenterons, à
partir des costumes et de la direction d’acteur de poser un regard sensible sur l’Homme, cet
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