monde meilleur » le fait que le second spectacle se construise sur son cadavre donne l’idée
que notre époque se construit sur la mort de l’art et des aspirations humanistes.
Quand il disparaît son vague souvenir peut s’incarner en la figure de la journaliste dans la
deuxième pièce. En effet ce personnage n’arrive pas à s’épanouir dans ce monde-là. C’est une
sorte d’artiste ratée des temps moderne, rétrécie par les contradictions et contraintes de son
métier. Le rapport à l’élévation et au temps du silence est anéanti, et remplacé par un rapport
horizontal au monde, noyés d’informations et de vitesse : « Notre époque voit de nombreux
changements structurels : l’individualisme prend le pas sur la notion de collectivisme, les
micro-récits (l’anecdotique, le fait divers, le retour du « je ») sur les grands récits ; la durée se
rétracte, le zapping devient une fièvre ; les fêtes, même celle de l’art, remplacent les
manifestations politiques. » Philippe Roux.
De l’accélération du temps et de l’information, de la difficulté de faire coïncider être et
avoir.
Dans la deuxième partie le cube servira aussi d’espace de projection. La réalité deviendra
alors plus impalpable plus complexe et poreuse par la présence d’images vidéo. La
comédienne qui incarnerait la journaliste aurait toujours à la main sa caméra comme un
journal intime. Au lieu d’écrire ce qui lui arrive elle se filmerait lors de ses soliloques. Les
images seraient projetées en direct comme une volonté dérisoire et désespérée de laisser une
trace. Nous nous servirons aussi de l’objet caméra comme d’une arme… Il sera central, pas un
accessoire anecdotique mais l’œil par lequel tout fait sens et non-sens. Il incarnera
l’enferment de l’homme actuel dans le monde de l’instantané. Nous verrons comment les
images ne sont jamais neutres et influent sur la manipulation des idées et des opinions. Les
petites gens qui tentent de s’en sortir sont leurrés par des représentations mensongères de
bien-être, de richesse et de plénitude véhiculé par la pub comme c’est le cas pour Paulya, la
jeune prostituée. Nous tenterons de faire surgir la thématique centrale de la pièce, à savoir :
comment la révolution informationnelle et les nouvelles technologies ont complètement
transformé notre rapport aux autres et à nos ambitions. En synchronisant nos opinions et nos
émotions elles font tendre l’homme vers moins de réflexion. C’est une nouvelle forme de
dictature et de nivellement par le bas qui produit une uniformisation des désirs dans l’avoir ou
le paraître plutôt que dans l’être.
Ainsi le discours hygiéniste que fait le conseiller ministériel au début et le coup de théâtre
télévisuel de la !n ne serve qu’à cacher la laideur du monde et nous enfermer dans plus de
faux semblant et d’inculture.
L’idée que le mal du siècle naît du manque de conscience de l’homme moderne et de sa perte
de rapport au réel Hannah Arendt l’avait très bien décrit dans son livre «Eishman à
Jérusalem». Cette étude sur les ressorts du mal tente de comprendre ce qui a rendus possibles
les camps de concentrations. Elle perçoit, cet Eishman, haut fonctionnaire nazi qui s’occupait
de l’évacuation des juifs et de la logistique de la solution finale, non pas comme un barbare
sanguinaire mais comme un fonctionnaire s’occupant de chiffre incapable de jugement morale
ou de faire appel à sa conscience… Le progrès des nouvelles technologies sans conscience ou
éthique se retourne contre l’homme lui même au lieu d’être le lieu de sa liberté : il devient une
forme vicieuse d’enfermement.
Finalement à partir du même décor et des mêmes acteurs en passant d’un théâtre burlesque à
un théâtre documentaire, d’un lieu unique à un espace fragmenté, ces 2 pièces ne sont-elles
pas les viatiques inespérés pour parler de notre époque en perte de valeurs ? Nous tenterons, à
partir des costumes et de la direction d’acteur de poser un regard sensible sur l’Homme, cet