Extrait de l’ouvrage « La pratique des régimes de neutre » [email protected] 1.1 Etude d’un double défaut monophasé sur un réseau HTA « Les défauts doubles » sont des défauts consécutifs qui apparaissent à la suite d’un court-circuit avec la terre. Ils sont le résultat d’une rupture de l’isolement en mode commun d’un point du réseau soumis à une surtension dynamique. Ils cumulent les propriétés des défauts monophasés et des défauts biphasés à la terre. Ces anomalies affectent généralement les réseaux présentant un facteur de mise à la terre très supérieur à 3 dont l’isolement en mode commun est dégradé ou insuffisant. 1.1.1 Simulation du défaut double On fixe Rm1+Rm2=100 Ω et on fait varier Rm1 de 0 à 100 Ω (Rm2 de 100 à 0 Ω). On observe les courants homopolaires J1, J2 et Jn 1.1.1.1 Zo source= 120 Ω Cas d’un neutre mis à la terre par une résistance de 40 Ω Déphasage Io/Vo pour Rm1+Rm2=100Ω Ω et Zo source=120Ω Ω Valeur des courants à la terre pour Rm1+Rm2=100Ω Ω et Zo source= 120Ω Ω 450 200 Φn 400 150 ΦA 350 250 Déphasage (°) Intensité (A) 100 300 J3 200 J2 150 Jn 50 0 0 10 20 30 40 50 60 70 -50 -90° 100 -100 Φ3 50 -150 0 Φn 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 -200 Rm1(Ω Ω) Caractéristiques de ce défaut double a) Amplitude des courants: r r r Le module du courant Jn = J2 + J3 passe par un minimum pour Rm1 ≈ 52 Ω. Pour Rm1= 52 Ω, J2 = J3 . Rm1(Ω Ω) 80 90 100 Extrait de l’ouvrage « La pratique des régimes de neutre » [email protected] b) Déphasage des courants homopolaires par rapport à la tension homopolaire en C: Les déphasages dépendent des valeurs respectives de Rm1 et Rm2. Les arguments ΦA et ΦB sont symétriques. Le déphasage du courant dans le neutre s’inverse pour Rm1= 44 Ω c) Signes des puissances homopolaires Puissances actives Puissances réactives Déphasage Io/Vo pour Rm1+Rm2=100Ω Ω et Zo source=120Ω Ω Déphasage Io/Vo pour Rm1+Rm2=100Ω Ω et Zo source=120Ω Ω 200 200 Φn Pn <0 150 50 0 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 -50 -90° -100 PBo> 0 ΦA 100 PAo>0 PAo<0 Déphasage (°) Déphasage (°) 100 Φn Qn= 0 150 ΦA QAo>0 50 0 0 10 20 30 40 50 -90° PBo<0 60 70 80 90 100 -50 QBo<0 -100 Φ3 Φ3 -150 -150 Pn <0 Φn Qn=0 Φn -200 -200 Rm1(Ω Ω) Rm1(Ω Ω) L’argument de l’impédance homopolaire du réseau influe directement sur le signe des puissances homopolaires. On constate que les protections à maximum de puissance homopolaire installées sur les deux départs ont peu de chance de fonctionner en même temps du fait de leur argument respectif. En effet, on constate sur les graphiques que les signes de ces puissances sont souvent opposés. Il s’ensuit que le deuxième défaut sera éliminé après l’élimination du premier. 1.1.2 Evaluation des montées en potentiel des prises de terre aux lieux des défauts Les doubles défauts monophasés provoquent, sur les prises de terre, des montées en potentiels dangereuses pour les biens et les personnes. Ils sont parfois à l’origine de graves sinistres chez les clients alimentés en basse tension. 1.1.2.1 Influence de l’impédance homopolaire sur les montées en potentiel des prises de terre. Le graphique ci dessous représente les valeurs des tensions apparaissant aux bornes des résistances de prise de terre Rm1 et Rm2 pour différent régimes de neutre. Montées en potentiel des prises de terre lors d'un défaut double (Rm1= 10 Ω , Rm2= 90 Ω ) 18000 V 16000 V3 14000 12000 10000 8000 V2 6000 4000 2000 0 3j 12 12j 36 36j 36+36j 120 120j 120+120j 240 1800 Zo ( Ω ) . La surtension apparaissant sur la prise de terre la plus résistante dépend du régime de neutre. 2700 Extrait de l’ouvrage « La pratique des régimes de neutre » [email protected] Evolution des montées en potentiel des prises de terre en fonction des résistances de défaut. Si le courant dans le neutre est négligeable (cas du neutre isolé ou fortement impédant), on peut admettre que la tension composée se répartit en fonction du rapport des résistances. Variation de Vm2 et Vm3 pour Zo source = 120 Ω +120jΩ Ω Rm1+Rm2= 100Ω Ω 20000 18000 Vm3 14000 12000 10000 8000 6000 Vm2 4000 2000 100;0 90;10 80;20 70;30 60;40 50;50 40;60 30;70 20;80 10;90 0 0;100 Etudions la variation de Vm2 et Vm3 en fonction des valeurs de Rm1 et Rm2 pour une impédance homopolaire de 120+120j Ω. On fait varier simultanément Rm1 de 0 Ω à 100 Ω et Rm2 de 100 Ω à 0 Ω. Montée en potentiel 16000 Rm1;Rm2 On relève les valeurs de Vm2 et Vm3. En pratique, on a coutume de calculer les montées en potentiel des prises de terre en négligeant le courant dans le neutre (ce qui est une grossière approximation pour les faibles valeurs d’impédance homopolaire). On applique alors la relation Rm1 Vm2 = U Rm1 + Rm2 10 = 2000V et Vm3= 18000V. Pour Rm1=10Ω, on obtient un résultat approximatif Vm2 = 20000 100 Conséquences des défauts doubles Considérons un poste HTA / BT siège d’un défaut coté HTA Extrait de l’ouvrage « La pratique des régimes de neutre » [email protected] La tension Vm peut être transmise au neutre du réseau Basse Tension de deux façons: Directement, lorsque la tension Vm est supérieure à la tension d’amorçage de l’éclateur de neutre installé dans le coffret B.T. du poste. Par couplage entre les prises de terre, la tension transmise à la basse tension dépend alors du facteur de couplage et donc de la distance entre les prises de terre. Dans le cas d’un défaut double, la tension transmise au réseau Basse Tension peut atteindre plusieurs milliers de volts et provoquer de graves sinistres chez les clients. Le tableau de la page suivante donne quelques exemples de grandeurs électriques au point C. Si l’on néglige la chute de tension en ligne provoquée par le courant de défaut, les montées en potentiel des prises de terre sont sensiblement égales aux tensions simples au point C. On vérifie également que les puissances homopolaires de la dérivation A sont de signes opposés à celles de la dérivation B. Extrait de l’ouvrage « La pratique des régimes de neutre » [email protected] Double défaut monophasé Système électrique au point C pour différents régimes de neutre Neutre isolé Neutre inductif 26856V Zo source = 120jΩ Zo source = -120jΩ V3 17967V Vr 16474V Vr V3 33500V J3 191A J3 175A V1 22711V 220A j 17785V V1 Jn j i V2 5809V Jn 292A i Pno = 0 Qno > 0 PBo > 0 QBo < 0 PAo < 0 QAo > 0 Pno < 0 Qno = 0 PBo > 0 QBo < 0 PAo < 0 QAo > 0 V2 206A J2 2781V J2 429A Neutre résistif Neutre impédant Zo source = 120 + 120jΩ Zo source = 120Ω 16805V V3 15472V V3 24309V J3 179A Vr Vr 18458V J3 164A V1 j V1 18681V j Jn i 202A Jn V2 4592V 340A J2 25940V i 151A Pno < 0 Qno = 0 PBo > 0 QBo < 0 PAo < 0 QAo > 0 3369V V2 249A J2 Pno < 0 Qno < 0 PBo > 0 QBo < 0 PAo < 0 QAo > 0 Extrait de l’ouvrage « La pratique des régimes de neutre » [email protected] 1.1.3 Les surtensions dynamiques Comparons les surtensions dynamiques affectant la phase 1 pour différents types de défauts à la terre. Surtension dynamique affectant la phase 1 Tension de service: 20,4 kV 17500 Impédance homopolaire de la source: 120 Ω 17000 Défaut Ph3-T Puissance de court-circuit au lieu du défaut: 60 MVA Tension V1-T 16500 16000 Défaut double Ph2-Ph3 Rm1+Rm2= 100 Ω 15500 15000 Défaut Ph2-Ph3-T 14500 14000 10 30 60 Résistance du défaut Pour une faible résistance de défaut, un défaut double peut dégénérer en défaut triple. Cela peut être le cas pour un réseau 10kV dont la tension de service est passée à 20 kV sans renforcement de l’isolement en mode commun. En conclusion Les défauts doubles produisent sur les prises de terre des montées en potentiel qui dépendent essentiellement de leur résistance respective. Les contraintes maximales sont obtenues lorsque l’une des prises de terre présente une résistance négligeable par rapport l’autre (cas du réseau équipé d’un disjoncteur shunt). En moyenne tension, on rencontre fréquemment le cas où la montée en potentiel d’une prise de terre est transmise aux installations avoisinantes par couplage ou par transmission directe. Les défauts doubles sont alors particulièrement dangereux et dévastateurs pour les biens et les personnes. L’ampleur des dégâts peut faire penser à un coup de foudre direct. Il n’en n’est rien. Il est donc inutile d’installer des dispositifs (parafoudres, parasurtenseurs) dont le rôle est de limiter les effets des surtensions d’origine atmosphérique. La seule protection réside dans l’élimination des défauts doubles en respectant les règles suivantes. Les équipements qui composent un réseau et les installations qui y sont raccordées doivent posséder un isolement en mode commun supérieur aux surtensions dynamiques pouvant apparaître sur celui-ci (24 kV pour un réseau 20 kV par exemple). Cet isolement doit être pérennisé par la mise en oeuvre d’une politique de maintenance. Les dispositifs de protections contre les surtensions d’origine atmosphérique doivent être protégés contre les agressions qui pourraient réduire cet isolement (Ce n’est pas le cas des éclateurs). Les parafoudres sont des appareils qui répondent à cette exigence, Ils présentent en outre l’intérêt de ne pas laisser passer le «courant de suite »1. 1 « Le courant de suite » est le courant à la fréquence industrielle qui utilise l’arc électrique provoqué par une surtension d’origine atmosphérique, comme chemin d’écoulement à la terre.