GAMMAPATHIES MONOCLONALES CHEZ LE SUJET ÂGÉ
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vs 5 %) et plus fréquente (93 % des patients vs 45 %) dans
le myélome. De plus, la présence de signes histologiques
de résorption osseuse était un élément prédictif d’évoluti-
vité de la MGUS, puisqu’elle n’était retrouvée que dans
4 % des MGUS stables lors du suivi alors qu’elle était
présente dans 52 % des MGUS évoluant vers un myé-
lome. Cependant, le caractère invasif du geste et la diffi-
culté de standardisation de la technique ont amené à
étudier les paramètres biologiques simples du remodelage
osseux.
Les principaux marqueurs biologiques d’ostéoforma-
tion étudiés ont été l’ostéocalcine (OC) plasmatique, les
phosphatases alcalines osseuses spécifiques, et le propep-
tide C terminal du procollagène de type I (PICP). Il existe,
au cours des myélomes, une bonne corrélation entre les
données histomorphométriques et les taux de ces 3 mar-
queurs qui se révèlent être anormalement bas dans la plu-
part des études [8]. Ces mêmes marqueurs au cours des
MGUS donnent des résultats plus discordants : certains
auteurs retrouvent une baisse fréquente de l’ostéocalcine
et des phosphatases alcalines osseuses, d’autres ne détec-
tent pas d’anomalie de ces marqueurs [8, 9, 10].
La résorption osseuse, quant à elle, s’accompagne de la
libération de produits de dégradation de la matrice
osseuse protéique. Ses principaux marqueurs biochimi-
ques sont des produits de dégradation du collagène : taux
plasmatiques du télopeptide C-terminal du collagène I
(ICTP) et du télopeptide N-terminal du collagène I (NTx),
excrétion urinaire de déoxypyridinoline. Il existe une
bonne corrélation entre les taux de ces marqueurs et les
données histomorphométriques au cours des myélomes
[8]. Dans la plupart des études [8, 9, 11], ces produits de
dégradation du collagène osseux sont significativement
plus élevés chez les patients atteints de myélome que chez
les sujets sains, les patients ostéoporotiques ou les patients
porteurs d’une MGUS. Ces dosages sont cependant peu
utiles au diagnostic différentiel entre myélome et MGUS,
leurs résultats étant proches dans les myélomes sans
atteinte osseuse décelable et les MGUS. Les dosages ité-
ratifs des produits de dégradation du collagène de type I
pourraient avoir un intérêt au cours de la surveillance des
MGUS puisqu’il restent stables dans les MGUS non
évolutives. Il apparaît cependant que leur élévation est
inconstante au cours de la transition MGUS – myélome.
Le dosage plasmatique de la sialoprotéine osseuse
(BSP) est un autre marqueur de résorption osseuse, plus
récemment étudié [12]. La BSP est un des composants de
la matrice osseuse organique non collagénique dont la dis-
tribution est limitée au tissu osseux minéralisé. L’éléva-
tion de la BSP plasmatique est donc un indicateur
biologique de résorption osseuse. Les taux plasmatiques
de BSP ne sont pas modifiés par l’insuffisance rénale, à
l’inverse d’autre marqueurs de résorption osseuse comme
l’ICTP. Les taux de BSP sont significativement plus éle-
vés chez les patients atteints de myélome que chez les
sujets sains, les patients ostéoporotiques ou les patients
ayant une MGUS. Certains auteurs [11] insistent sur
l’intérêt du dosage de la BSP plasmatique dans le dia-
gnostic différentiel entre MGUS et myélome.
Au cours du myélome, l’activation des ostéoclastes est
due à la synthèse par les plasmocytes de facteurs stimu-
lant les ostéoclastes (osteoclast activating factors (OAF))
dont le principal est l’interleukine-1
β
(IL-1
β
). Les plas-
mocytes ne produisant jamais d’IL-1
β
à l’état normal,
l’apparition d’une sécrétion d’IL-1
β
par les plasmocytes
s’inscrit comme un événement essentiel dans l’évolution
d’une MGUS vers un myélome. En effet, outre son rôle
d’OAF (par stimulation de la différenciation ostéoclasti-
que des CFU-GM médullaires et de la production d’enzy-
mes ostéolytiques par les ostéoclastes), l’IL-1
β
joue aussi
un rôle essentiel [13] dans l’expression des molécules
d’adhésion par les plasmocytes et stimule la sécrétion
d’IL-6 par les cellules du stroma médullaire.
L’étude de l’expression plasmocytaire de l’ARNm de
l’IL-1
β
par rt-PCR [14] ou par HIS (hybridation in situ)
[15] a montré qu’elle était nulle à l’état normal, quasi
constante (91 à 96 %) au cours du myélome, et rare (15 à
24 %) au cours des MGUS. La détection de l’expression
d’IL-1
β
par les plasmocytes pourrait donc être élément
prédictif essentiel de l’évolution d’une MGUS vers un
myélome.
P
HÉNOTYPE
PLASMOCYTAIRE
Les données concernant le phénotype des plasmocytes
au cours des MGUS sont peu nombreuses et contradictoi-
res. Ceci reflète la difficulté technique de ces études, avec,
en particulier, la nécessité d’avoir recours à des techni-
ques sophistiquées et complexes (triple marquage avec
acquisition différée) plutôt qu’à des techniques de simple
marquage [16].
Une autre difficulté d’interprétation du phénotype plas-
mocytaire est due à la variabilité inter-individuelle du
phénotype des plasmocytes normaux, et aussi à l’exis-
tence, chez un même individu normal, de sous popula-
tions normales plasmocytaires de phénotypes différents.
Le phénotype plasmocytaire normal est classiquement
caractérisé par :
– l’expression fortement positive (+++) de CD38 et
l’expression (+) de CD138,
– la possible expression de marqueurs B matures
(CD19, CD20, HLA-DR), surtout dans le contingent plas-
mocytaire le moins mature,
– une expression faible de CD56, molécule d’adhésion
de la superfamille des immunoglobulines, et ce par un fai-
ble pourcentage de plasmocytes.
Au cours du myélome, les éléments phénotypiques
caractéristiques des plasmocytes malins sont :
– une expression de CD38 plus faible (+) que dans les
populations plasmocytaires normales,
– la rareté (moins de 35 % des plasmocytes) de
l’expression de CD19,
– une expression forte (+++) de CD56, et ce par la
majorité (> 66%) des plasmocytes,
– l’expression d’autres molécules d’adhésion des
familles des
β
1-intégrines et
β
2-intégrines,
– l’expression possible de marqueurs myéloïdes autres
que le CD34 (comme le CD117 = c-kit, récepteur du SCF)
ou de marqueurs T comme le CD45.