PREAMBULE
En 1675, un prêtre janséniste du nom d’abbé Bouhours écrit à propos de la
grammaire française : « lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus
noble l’emporte ». Curieux comme la polémique du « Mademoiselle » soulevée par
les féministes est taxée d’inutile et négligeable - l’emploi de ce mot est si flatteur
pour vous mesdames qui vieillissez – quand d’éventuelles modifications de termes en
vue de leur féminisation font ruer dans les brancards les académicien-ne-s.
Avant le XVIIIe siècle, la règle de proximité – dans laquelle l’adjectif s’accorde au
genre du dernier nom - régissait la grammaire française. Ce n’est qu’à la fin du XVIIe
où académiciens et hommes de lettres décidèrent que le masculin l’emporterait
désormais sur le féminin. En 1767, le grammairien Nicolas Beauzée écrira à ce
propos : « Le genre masculin est réputé plus noble que le genre féminin à cause de
la supériorité du mâle sur la femelle ».
Face à la polémique enclenchée par la remise en question de ces règles historiques
de grammaire, un article du Monde donne la parole à Jacqueline Costa-Lascoux,
directrice de recherche au CNRS : « Cette règle grammaticale qui instaure la
domination du masculin sur le féminin est historiquement très datée : elle nous
renvoie à la monarchie absolue, au Roi-Soleil et au catholicisme triomphant. La
langue, c'est l'architecture de la pensée. Nous sommes au XXIe siècle : adoptons
donc la règle de proximité, qui est plus simple et plus esthétique. Elle sonne mieux à
l'oreille, elle offre plus de liberté dans l'écriture, et surtout, elle est plus égalitaire »1.
Ce mémoire, consacré à la mise en lumière d’une domination apprise et incorporée
par les individus ainsi qu’à la volonté de combattre un système de domination
culturel masculin presque invisible, sera rédigé selon les principes de la règle de
proximité. Ainsi, selon la règle, il convient de dire que les perroquets et les poules de
mon jardin sont absolument merveilleuses.
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1 Genre, le désaccord, Le Monde, 14 janvier 2012