Les cahiers de myologie N°9 OCTOBRE 2013
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tante en Belgique. Les pouvoirs publics commen-
cent à découvrir les malades neuromusculaires, les
besoins quotidiens des patients et les possibilités de
prise en charge. Les discussions entre les quelques
responsables médicaux actifs dans le domaine et les
autorités sanitaires belges aboutissent, en 1989, à la
signature d’une première convention. Celle-ci établit
que les pouvoirs publics prennent en charge les frais
liés à la ventilation assistée. Par ailleurs, elle définit
des critères médicaux très stricts de sélection des
patients bénéficiaires et les conditions précises
d’utilisation de la ventilation (modalités, durée). Elle
prévoit, des conditions strictes auxquelles devront
répondre les centres hospitaliers habilités à mettre
en oeuvre ces techniques, y compris un nombre
minimal de patients, ainsi qu’une obligation de for-
mation des familles et des professionnels. Cette
convention a permis d’apporter une assistance aux
malades, en évitant le recours excessif au secteur
privé et ainsi, le risque d’un surcoût financier.
L’installation de la ventilation non invasive
Initialement, toute ventilation assistée était propo-
sée par trachéotomie. La mise au point du masque
nasal CPAP par l’australien Colin Sullivan et son
adaptation à la ventilation, par l’équipe Rideau-
Delaubier-Bach à Poitiers, par Robert et Léger à la
Croix Rousse de Lyon, vont changer rapidement la
donne. Dès 1985, deux centres belges proposent
d’administrer la ventilation nocturne par masque
nasal, en réservant la trachéotomie aux patients
également ventilés durant la journée. En 1993, une
nouvelle étape est franchie par une équipe belge qui
choisit d’installer les ventilations continues par voie
non invasive, l’interface diurne utilisée étant une
pipette buccale. Il n’est fait recours à la trachéoto-
mie que dans quelques indications résiduelles bien
décrites.
Dans un pays où la dignité de la fin de vie peut être
soutenue par la loi, l’utilisation de techniques non
invasives, plus facilement réversibles, est un élé-
ment
a priori
non négligeable. Il faut cependant rela-
tiviser cette question : sur les 104 123 décès enre-
gistrés en Belgique en 2011, seulement 1 133 (1,1%)
dont deux patients neuromusculaires l’ont été dans
le cadre de la loi sur l’euthanasie. Cette proposition
de ventilation continue « non invasive par défaut »
n’est pas acceptée partout mais elle progresse en
Europe depuis vingt ans.
Une nouvelle convention neuromusculaire globale
L’année 1999 voit la signature d’une convention
neuromusculaire globale avec les autorités fédé-
rales de santé. Cette nouvelle convention permet à
tout patient atteint d’une maladie neuromusculaire
de bénéficier, non seulement de soins médicaux
(y compris kinésithérapie, appareillage dont le
Cough Assist®
), mais aussi d’un éventail thérapeu-
tique élargi incluant la prise en charge par un(e) psy-
chologue, un(e) assistant(e) social(e), un(e) ergothé-
rapeute, un(e) diététicien(ne)… Les centres neuro-
musculaires doivent proposer aux patients un éven-
tail complet de soins. Pour être agréés, ils doivent
prouver qu’ils accueillent annuellement un nombre
minimal de patients. Une collaboration systéma-
tique avec les centres de génétique est encouragée.
Ce système, mis en place par concertation directe
entre les autorités, les médecins responsables et les
organisations de patients, fonctionne maintenant
depuis quatorze ans à la satisfaction globale de
l’ensemble du secteur.
Un avenir tracé dans deux directions principales
Depuis plus de quarante ans, la Belgique est un état
fédéral dans lequel la recherche et la prise en
charge des personnes en situation de handicap sont
des domaines gérés par les entités fédérées. Le
secteur neuromusculaire n’a donc pas beaucoup à
redouter d’éventuels changements structurels liés à
l’instabilité politique actuelle du pays. L’avenir s’y
trace dans deux directions principales. La première
est d’amplifier la recherche génétique et fondamen-
tale dans laquelle plusieurs équipes s’illustrent
depuis de nombreuses années. Cette recherche est
soutenue par le « Téléthon Belgique » apportant
chaque année un support financier notable à une
dizaine de projets filtrés par un conseil scientifique
de haut niveau. La seconde orientation consiste à
développer la prise en charge des malades et l’équi-
pement au domicile des familles (
Cough Assist®
et
saturomètre) afin d’anticiper au mieux le recours à
l’hospitalisation. Ceci passe par une meilleure for-
mation spécifique à la fois des équipes sur le terrain
(médecin généraliste, kinésithérapeute et infir-
mier(ère) libéraux) et des patients et de leurs
familles. Comme il y a environ dix fois plus de méde-
cins que de malades atteints de maladie neuromus-
culaire, il est probable que les actions d’information
et d’éducation ciblant directement les patients et
leurs familles soient plus faciles à mettre en place.
La réalisation de ces objectifs implique une collabo-
ration accrue entre les trois pôles-ressources de
l’action médico-sociale en Belgique : les profession-
nels, les associations de malades à savoir ABMM
(Association Belge contre les Maladies neuroMus-
culaires : www.abmm.be) et NEMA (Vlaamse vereni-
ging neuromusculaire aandoeningen vzw : www.
nema.be) et les autorités.
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