Août 2016
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L’Observateur provincial – édition d’août 2016
Au moment de la rédaction de la présente édition de l’Observateur provincial, l’économie canadienne continue de
montrer des performances très inégales sur les plans sectoriel et régional. La faiblesse des prix des produits de base
continue de nuire à l’ensemble de l’économie canadienne. Également, la progression des exportations de biens et
services aux États-Unis demeure au rendez-vous et facilite la transformation de notre économie. Ainsi, davantage de
travailleurs déménagent pour dans des régions directement moins axées sur l’exploitation des ressources naturelles,
ce qui contribue à accentuer l’écart des performances sur le plan des finances publiques et dans les divers marchés
immobiliers. La présente édition de L’Observateur provincial consacre une section à chaque province dans laquelle
nous élaborons nos réflexions sur les tendances économiques générales, le marché de l’habitation et la situation
budgétaire des gouvernements. Nos prévisions détaillées pour 2016, 2017 et 2018 figurent aux pages 16 et 17.
Sébastien Lavoie | Économiste en chef
514 350-2931| [email protected]
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Canadiens qui migrents vers une autre province
(par trimestre, moy. mobile de 4 trimestres)
Source: Statistics Canada /Haver Analytics
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Colombie-Britannique : l’économie tourne à plein régime, le gouvernement fait ce qu’il faut pour
calmer un marché de l’habitation en ébullition
L’économie de la Colombie-Britannique connaît une période d’expansion parmi les plus fastes de son histoire. Le
taux de croissance du PIB réel dépassera 2,5 % une troisième année de suite en 2016. La situation sur le marché du
travail est également excellente. Ce printemps, le taux de chômage en Colombie-Britannique est devenu le plus bas
parmi les provinces canadiennes pour la toute première fois. La hausse des personnes mobiles qui résidaient
auparavant en Alberta et qui sont attirées par les postes vacants dans la région de Vancouver constitue le principal
catalyseur de cette croissance. Cette migration alimente la formation de ménages et les dépenses. Le flux migratoire
interprovincial positif, qui s’approche d’un sommet des 20 dernières années, devrait se maintenir durant notre
horizon prévisionnel 2016-2018 puisqu’une bonne partie d’anciens résidents de la Colombie-Britannique qui étaient
déménagés en Alberta durant la dernière décennie devraient revenir.
Pour sa part, le secteur des exportations se porte moins bien. La valeur des exportations internationales de la
Colombie-Britannique a augmenté d’à peine 1,0 % depuis le début de l’année, le reflet de la lente reprise de
l’économie mondiale. Les hausses dans les secteurs de la foresterie, l’agriculture et les produits minéraux ont tout
juste contrebalancé les baisses marquées dans les secteurs de l’énergie et des pâtes et papier. Par destination, les
exportations nominales sont en hausse vers les États-Unis depuis le début de l’année, mais en diminution vers
d’autres marchés clés, comme la Chine et le Japon.
Nous sommes d’avis que l’offre de logements ne suffit pas à la demande en raison de la formation de ménages
élevée. Les constructeurs travaillent à pleine capacité, puisque les mises en chantier dans la province sont en voie
de dépasser 40 000 unités cette année, renouant avec le record atteint au début des années 1980 et 1990. La
demande excessive d’habitations gonfle les prix des logements et contribue à maintenir le taux d’inoccupation du
marché locatif de Vancouver à moins de 1 %. Dans son budget de 2016, le gouvernement de la Colombie-
Britannique a fait état du problème d’offre de logements et nous sommes d’accord avec ce constat.
Pourtant, l’augmentation du parc immobilier au fil du temps ne suffira pas à calmer le marché, parce que certains
facteurs indésirables nuisent à l’abordabilité du marché de l’habitation de Vancouver. Par exemple, il est peu
probable que la flambée de 50 % des prix des logements ces quatre dernières années soit entièrement attribuable à
l’offre insuffisante. La bonne nouvelle, c’est que le gouvernement de la Colombie-Britannique mets en place des
mesures ciblées et appropriées visant à corriger la situation. Ainsi, les droits de mutation de la propriété sur les
logements neufs valant jusqu’à 750 000 $ ont été éliminés à la mi-février. En mai, le gouvernement de la Colombie-
Britannique a annoncé une mesure pour mettre fin au stratagème d’achat-revente, qui permettait à un courtier
immobilier de vendre une propriété plusieurs fois au moyen d’une transaction unique; selon la nouvelle exigence,
l’agent immobilier devra obtenir le consentement des vendeurs visés et le profit supplémentaire sera versé aux
vendeurs, plutôt qu’à l’agent.
Et enfin, d’après les données récentes recueillies par le gouvernement de la Colombie-Britannique, les acheteurs
étrangers créent une distorsion ont compté pour 10% de toutes les transactions sur le marché de la revente du
Grand Vancouver entre le 10 juin et le 14 juillet. Cette demande externe semble plus présent aujourd’hui que lors
des multiples cycles antérieurs d’appréciation des prix des logements, et cela pour deux raisons : 1. la quête de
rendement des investisseurs mondiaux est de plus en plus vive; 2. la dépréciation passée du dollar canadien procure
un énorme rabais à certains acheteurs étrangers. Ainsi, nous sommes donc d’accord avec la décision du
gouvernement de la Colombie-Britannique d’imposer une taxe de 15 % acheteurs étrangers désirant acheter une
maison ou un condo dans la région du Grand Vancouver.
Il va sans dire que tenter d’empêcher les prix des logements de dépasser excessivement les paramètres
fondamentaux locaux constitue un exercice délicat. Il importe aussi d’empêcher une perte importante de la valeur
des actifs immobiliers pour ceux qui sont déjà propriétaires dans l’éventualité d’une chute des investissements par
les étrangers ou d’une baisse de confiance des acheteurs locaux; surtout que les prix exorbitants ont alourdi
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l’endettement des ménages de la Colombie-Britannique. Selon les données disponibles dans la Revue du système
financier de juin 2016 publiée par la Banque du Canada, une proportion élevée des nouveaux emprunteurs de
Vancouver et de Victoria, soit plus de 30 %, ont un ratio prêt-revenu supérieur à 450 %. En cas de choc négatif, cette
vulnérabilité aggraverait une correction des prix des logements et pourrait avoir des conséquences graves, puisque
le quart de l’économie de la Colombie-Britannique dépend du secteur immobilier et de la construction résidentielle
(l’économie de l’Alberta dépend dans la même proportion des secteurs des mines, du pétrole et du gaz). Pour
conclure, personne ne connaît l’ultime dénouement de la situation du marché de l’habitation de la Colombie-
Britannique et le temps qu’il faudra pour y arriver. Il semble néanmoins que le risque d’un recul de l’activité
immobilière augmente. Mais il est fort possible que le gain à long terme, c’est-à-dire moins de Britanno-Colombiens
aux prises avec un endettement hypothécaire excessif, soit plus grand que les inconforts à court terme. Bref, le
compromis en vaut la peine.
Finalement, sur le plan budgétaire, la perte de la note AAA du Royaume-Uni après le référendum britannique et les
dégradations récentes de la note de crédit des provinces dans la région des Prairies nous rappellent que la
Colombie-Britannique est le seul territoire infranational noté AAA au pays. La vigueur des dépenses des ménages
devrait fort probablement procurer des revenus plus élevés que prévu provenant de la taxe sur les biens immobiliers
et la taxe de vente au détail. À notre avis, l’excédent budgétaire pourrait facilement dépasser 500 millions de dollars
durant l’exercice 2016-2017, soit plus que la prévision de 264 millions de dollars du budget de 2016. Les
investisseurs sont curieux de découvrir si l’excédent inattendu sera versé exclusivement au nouveau Prosperity Fund
(un fonds qui vise à réduire la dette de la province à long terme et à préserver une partie de la prospérité actuelle
pour l’avenir). Le contexte actuel est probablement ce qu’il y a de mieux pour l’économie de la Colombie-Britannique.
Ainsi, l’accumulation de sommes fiscales supplémentaires aujourd’hui dans le Prosperity Fund pourrait se révéler
utile pour l’avenir si un repli plus prononcé du marché de l’habitation et le ralentissement de l’économie chinoise
finissent par entraîner une croissance inférieure à la vitesse de croisière des dernières années.
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Alberta : l’économie reste confrontée à des difficultés considérables malgré le redressement des
prix du pétrole
Les feux de forêt qui ont entraîné une interruption temporaire de la production de pétrole, qui pourrait atteindre
30 millions de barils, et qui ont fortement touché les communautés de la région, nous ont incités à réviser à la baisse
notre perspective de croissance du PIB réel pour 2016. Heureusement, la production de pétrole revient
progressivement à la normale et les efforts de reconstruction ont commencé à porter leurs fruits, confirmant notre
perspective de croissance modérée du PIB réel en 2017.
Cela dit, le choc pétrolier ne s’est pas encore fait pleinement sentir dans le secteur de l’habitation. Les ménages ne
sont pas totalement tirés d’affaire. Jusqu’à présent, les pertes d’emploi à plein temps se chiffrent à environ
200 000 depuis le sommet cyclique de décembre 2014, soit l’équivalent de la baisse observée pendant la crise
financière de 2008-2009. Malheureusement, le taux de chômage qui a atteint un sommet jamais vu depuis 20 ans
(près de 8 %) et l’augmentation de la durée du chômage suggèrent que trop d’Albertains peinent à trouver de
nouveaux emplois dans la province.
Le recul des ventes de nouvelles maisons et des reventes enregistré depuis la fin de 2014 est plus important à
Calgary qu’à Edmonton, indiquant surtout que le chômage touche beaucoup plus la première ville d’Alberta : le taux
de chômage à Calgary est passé au-dessus de la barre des 8 % au premier semestre de 2016. Le brusque repli
dans la construction de maisons et condos, combinée avec des inventaires pratiquement inexistants avant le choc
pétrolier, empêche les prix des logements de plonger à Calgary.
À Edmonton, le taux de chômage de près de 7 % est nettement inférieur à celui de Calgary. Néanmoins, très peu de
ménages ont d’intérêt à acheter une nouvelle propriété puisque le nombre de nouvelles habitations compétées
inoccupées a bondit à Edmonton, et ce, malgré la baisse de la construction. Et même si le nombre de nouveaux
condominiums invendus reste faible, la quantité excessivement élevée de maisons disponibles empêchera l’offre de
nouveaux condos de s’écouler rapidement dans une ville comme Edmonton où la rareté des terrains n’est pas un
problème grave comme à Vancouver et à Toronto.
À court terme, deux principaux facteurs sont susceptibles de faire augmenter le nombre de pancartes « à vendre » et
d’accentuer l’inertie du marché immobilier albertain: 1. Le nombre d’hypothèques résidentielles en retard de
paiement (hausse de 33 % par rapport à l’année dernière, même si le niveau représente seulement la moitié de celui
de 2010) devrait continuer d’augmenter quelque peu; 2. L’exode des travailleurs vers d’autres provinces devrait se
poursuivre, principalement parce que les Albertains trouvent progressivement de nouveaux emplois en Colombie-
Britannique et en Ontario.
Même si l’arrêt temporaire de la production sur certains sites d’exploitation des sables bitumineux et les coûts
associés aux feux de forêt pèseront sur les finances publiques de l’exercice financier 2016-2017, le prix du pétrole a
heureusement décollé de son plancher de 2016 et devrait dépasser les hypothèses du budget 2016. Comme nous
l’avons mentionné à plusieurs occasions dans le passé, notre prévision nettement supérieure au consensus pour les
prix du pétrole brut est fondée sur une réduction continue de la production des pays hors OPEP et sur une
vigoureuse hausse de la demande mondiale. Comme le recul des stocks mondiaux devrait s’accélérer dans les
trimestres à venir, nous continuons de prévoir que les prix du WTI finiront 2016 à 68 $ US le baril et 2017 à 75 $ US
le baril. Somme toute, le balancier sur le marché mondial du pétrole revient dans la bonne direction pour la province
de l’Alberta. Même si les perspectives restent très incertaines pour le pétrole, les chances que les déficits
budgétaires soient plus petits que les attentes sont meilleures qu’il y a quelques mois.
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Mises en chantier Alberta (éch. de gauche, milliers ann.)
Edmonton: unités non absorbées (éch. de droite)
Calgary: unités non absorbées (éch. de droite)
Source: Canada Mortgage and Housing Corporation /Haver Analytics
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